M. Jean-Claude Larrivoire, journaliste

Les pays européens sont-ils solidaires et disciplinés en matière de régulation des programmes télévisés ? C'est ce que nous allons savoir, grâce aux propos de Jean-Michel Baer.

M. Jean-Michel Baer, directeur à la Direction « Culture, Politique audiovisuelle et Sport » à la Commission européenne

Il ne faut surtout pas voir l'Europe seulement comme une « menace »...

Nous observons depuis une bonne dizaine d'années que la régulation que nous exerçons est effectivement à l'oeuvre. Elle a plutôt conforté un modèle européen de la radiodiffusion, à un étage évidemment combiné avec les étages nationaux, puisqu'elle est l'émanation d'un état d'esprit et d'un « projet audiovisuel » dont on retrouve un peu partout les composantes : système mixte public-privé, prise en compte des intérêts généraux de la société, respect des diversités culturelles, protection des consommateurs, des mineurs et de la liberté humaine, respect de la liberté d'expression et du pluralisme, protection des auteurs. Par ailleurs, la tendance à la constitution d'organismes de régulation autonome, indépendants des pouvoirs politiques, est une orientation très forte au niveau européen.

L'étage européen est intervenu en fonction de missions qui lui ont été confiées par le Traité, ceci dans le domaine de la liberté de circulation des oeuvres, dans le domaine de la concurrence, en intervenant pour les grandes fusions, dans le domaine des aides d'États et dans celui du respect de l'équilibre entre télévisions publiques et privées.

Nous intervenons aussi selon les positions que défend l'Union européenne à l'Organisation Mondiale du Commerce. Vous savez par exemple que la Commission n'a pas pris d'engagement en termes de libéralisation, ce qui fait que les instruments de promotion des oeuvres européennes, qui figurent à la fois dans les textes européens et dans les textes nationaux, pourront continuer à exercer leurs effets bénéfiques.

Nous en sommes aujourd'hui au réexamen de la directive Télévision sans Frontières. La question porte sur les fondamentaux de ce modèle européen, considérant que cette régulation concerne maintenant les 25 pays de l'Union plus trois pays de l'Espace économique européen. Il ne s'agit pas d'une remise en cause du modèle, mais de revoir la façon de le réguler.

Les grands chantiers que sont les différents chapitres de la directive vont faire l'objet d'une consultation en profondeur.

Nous y trouvons par exemple le chapitre de la publicité, dont il a été question aujourd'hui : les règles sont-elles encore applicables ? Sont-elles adaptées aux nouvelles formes de publicité qui apparaissent ? Notre rôle est de nous assurer que les réglementations prises par les différents États n'entravent pas la libre circulation des émissions. Il s'agit par ailleurs de garder cette spécificité à laquelle nous tenons tous en Europe : la séparation du contenu des programmes et de la publicité.

Nous aborderons aussi la question de l'équilibre entre secteurs publics et secteurs privés. Le service public ayant été consolidé, les règles de publicité ne peuvent-elles pas être assouplies ? Voilà un exemple de question qui sera débattue.

Il sera question encore de la protection des mineurs, tant à l'égard de la publicité qu'à l'égard des programmes, du droit de réponse, du recours à la co-régulation ou à l'autorégulation, complémentaires à la réglementation d'État.

Le problème de l'applicabilité de la réglementation donnera certainement lieu à une concertation permanente au niveau européen. Nous avons à ce sujet été heureux de voir le CSA rejoindre la plate-forme des régulateurs européens. À l'occasion du ré-examen de la directive, nous pensons qu'il serait sans doute opportun de créer un Conseil des régulateurs européens, de façon à instaurer un dialogue permanent.

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