C. QUEL ÉQUILIBRE INSTITUTIONNEL ?

Il faut insister sur le fait que le pacte de stabilité et de croissance ne confère aucune automaticité à l'application de ses règles et qu' il organise un mécanisme institutionnel qui confère un rôle particulier à chacune des institutions désignées pour appliquer les règles qu'il prescrit.

En bref, le pacte fonde une sorte de gouvernement budgétaire européen dont l' autonomie , sans doute limitée , ne doit pas être sous-estimée .

Il reste à apprécier si le mécanisme institutionnel du PSC fonctionne correctement. Telle n'est pas la conclusion de votre Délégation qui, raisonnant dans le cadre existant d'un gouvernement européen limité, a souhaité, dans son rapport précité, formuler quelques propositions de rationalisation des rôles dévolus aux institutions chargées de l'application du PSC.

1. Les points de vue des intervenants

Jean PISANI-FERRY , qui avait la charge de développer cette question, a tout particulièrement insisté sur sa vision des imperfections du mécanisme institutionnel en charge de l'application du pacte.

Il a préconisé d'abord d'augmenter le rôle de la Commission et d'améliorer le fonctionnement du Conseil.

Sur le rôle de la Commission , il a estimé que « les propositions qui ont été faites de ce point de vue là, de permettre à la Commission d'adresser aux Etats membres, sans passer par le Conseil, des avis, des avertissements sur l'orientation de la politique économique et les problèmes qu'elle peut poser, sont de bonnes propositions. Il me semble qu'il faut essayer d'aller vers un acteur qui est écouté parce qu'il dit des choses pertinentes et qu'il a la capacité de dire ces choses pertinentes parce qu'il a l'information, il a l'analyse qui lui permet de le dire.

Aujourd'hui le paradoxe en Europe est que parfois nous écoutons davantage le Fonds Monétaire International lorsqu'il vient nous parler de politique économique que nous n'écoutons la Commission. En tout cas, quand une mission du Fonds Monétaire International arrive dans les Etats membres elle est reçue avec plus d'attention que lorsque vient la mission de la Commission. Est-ce que c'est normal dans la mesure où nous avons construit un système beaucoup plus intime entre nous que nous l'avons avec le Fonds Monétaire International ? Je ne crois pas. »

Sur le fonctionnement du Conseil , il a préconisé de remédier à sa « complexité avec des formations du Conseil (multiples) ; l' Ecofin , l' Eurogroupe qui se distinguent par, à la fois, leur nombre, leurs participants et leurs fonctions » et qu'« il y ait une traduction institutionnelle précise, c'est-à-dire que la gestion de toutes ces questions (les questions de politique économique) doit relever d'un Conseil spécifique aux pays de la zone Euro ».

Il a conclu : « Il faut renforcer ce Conseil , lui donner cette capacité et il me semble -mais je sais que c'est un point qui est controversé- qu'il faut aller jusqu'à lui donner une capacité à décider face à certaines situations économiques particulièrement difficiles , à prendre des orientations qui auraient une valeur contraignante pour les Etats membres ».

Son analyse met également en cause les Etats membres .

« Le troisième et dernier point concerne les États membres. Ils sont eux-mêmes coresponsables de ces difficultés et ils ont aussi leur travail à faire. Le premier travail est un travail de transparence en matière budgétaire ; il n'est pas normal que certaines situations se révèlent avec un décalage. Je rappelle l'exemple du Portugal dont nous avons découvert avec un an de retard qu'il était en situation de déficit excessif. Je crois qu' il n'est même pas normal que pour les prévisions budgétaires, l'évaluation des effets des mesures de politique économique, l'information soit essentiellement concentrée dans les services de l'administration et que le public ne dispose pas d'une information qui permette de juger effectivement de l'orientation et de l'impact des décisions budgétaires.

Je crois aussi qu'il serait souhaitable de réfléchir à des mécanismes, des modalités par lesquels l'insertion , disons l'imbrication, entre les éléments de politique économique commune et les politiques nationales serait renforcée . Il me semble qu' un débat sur le programme de stabilité dans les Parlements nationaux , le fait d'insérer une espèce de Chapitre 1 de la loi de finances qui expliciterait la manière dont les orientations qui sont proposées au Parlement s'intègrent ou ne s'intègrent pas dans une orientation commune aux pays de la zone euro, tout cela aiderait à ce qu'il y ait une meilleure appropriation de cette dimension dans les décisions nationales . »

De nombreux intervenants ont prolongé ces points de vue. Notre collègue Jean ARTHUIS , président de la commission des finances a vigoureusement plaidé pour que l'Europe progresse vers une meilleure gouvernance européenne tout en admettant lucidement les difficultés de l'exercice. Marco BUTI a, quant à lui, fermement soutenu la proposition de confier à la Commission des prérogatives accrues, en particulier, celle d'adresser directement des avertissements aux Etats.

Jean-Paul FITOUSSI a souhaité que le Conseil exerce davantage de responsabilités et notamment qu'il puisse régulièrement définir un niveau de déficit en lien avec l'exercice d'une compétence positive de définition du niveau de l'investissement public.

Enfin, Christopher ALLSOPP a insisté sur les besoins de mieux asseoir les institutions en charge de la politique budgétaire en Europe, mentionnant deux voies alternatives, l'une organisée autour d'un collège d'experts, l'autre plus politique.

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