1. PREMIÈRE PARTIE :
UNE RÉPARTITION PROBLÉMATIQUE DES CRÉDITS EN TROIS SECTIONS

I. LES SECTIONS DU FNADT

La loi n° 95-115 du 4 février 1995 10 ( * ) prévoit que les crédits du FNADT sont répartis entre une section générale et une section locale à gestion déconcentrée au niveau régional. Cette disposition est précisée par la circulaire du Premier ministre du 9 novembre 2000 relative aux interventions du FNADT.

A. LA SECTION GÉNÉRALE EST CENSÉE FINANCER LA POLITIQUE NATIONALE, CE QUI N'EST PAS TOUJOURS LE CAS EN PRATIQUE

Les décisions d'attribution au titre de la section générale relèvent de la compétence du Premier ministre , sur proposition du ministre en charge de l'aménagement du territoire, après instruction du dossier par la DATAR.

La répartition des crédits qui la composent se fait en comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) ou lors d'un comité de programmation .

Selon la circulaire du 9 novembre 2000, « la section générale contribue au financement de la politique nationale d'aménagement du territoire ». Cependant en pratique la section générale finance fréquemment des opérations d'intérêt local.

1. L'absence de véritables critères de sélection pour la section générale

Cela s'explique par l'absence de véritables critères de sélection pour la section générale : n'importe quelle opération susceptible d'être financée par le FNADT peut l'être au titre de la section générale, pour peu que le gouvernement le décide.

a) Les trois grands types d'opérations susceptibles d'être financées par le FNADT

En effet, selon la circulaire du 9 novembre 2000, relèvent de la section générale du FNADT :

- les mesures, à caractère national ou territorial, résultant de décisions du gouvernement , lorsqu'il a été prévu de faire appel aux ressources du FNADT pour assurer leur financement ;

- les programmes, proposés par la DATAR, avec, éventuellement, le concours d'autres ministères ou d'organismes publics, qui présentent un caractère expérimental ou innovant , et sont susceptibles d'être ensuite généralisés ;

- le soutien aux organismes de développement local .

La première rubrique revient à reconnaître au gouvernement une faculté discrétionnaire d'inscription d'opérations à la section générale du FNADT.

b) Des opérations d'intérêt régional trop importantes pour être financées par la section locale

Les opérations d'intérêt régional correspondant à des interventions trop importantes pour être financées à partir des crédits de la section locale peuvent également être prises en charge par la section générale.

Afin d'éviter une dispersion excessive de l'aide, les préfets de région doivent veiller à ne proposer au financement par la section générale que les projets pour lesquels les demandes de subvention au titre du FNADT sont supérieures à 2 millions de francs (environ 0,3 million d'euros), et qui concernent des opérations ou des tranches d'opérations dont le coût excède 10 millions de francs (environ 1,5 million d'euros).

c) Les actions précédemment financées par le FAD

Par ailleurs, la section générale prend en charge les actions précédemment financées par le fonds d'aide à la décentralisation (FAD).

d) La « section générale » mérite-t-elle son appellation ?

Il découle de ces compétences très larges le financement par la section générale du FNADT d'opérations d'intérêt local, ce qui conduit à s'interroger sur la pertinence de son appellation, ainsi que sur la portée de la disposition de la circulaire du 9 novembre 2000 selon laquelle « la section générale contribue au financement de la politique nationale d'aménagement du territoire ».

Certes, les opérations et les engagements de crédits de la section générale sont en moyenne plus importantes que celles financées par la section locale, comme l'indique le graphique ci-après.

Montant moyen opérations et des crédits engagés (2001)

(en euros)

Source : rapport au Parlement sur l'utilisation des crédits du FNADT en 2001

Cependant, comme le souligne l'inspection générale des finances dans son rapport d'enquête sur la section générale du FNADT (1998), le faible montant des crédits alloués à la section locale libre d'emploi et l'absence de véritable critère de sélection pour la section générale conduisent à faire de la section générale « un instrument de soutien et d'accompagnement des projets locaux », et non « un instrument de transformation permettant à l'Etat de peser sur les évolutions territoriales ».

Ce point de vue semble toujours d'actualité , comme le suggère notamment la liste des opérations prévues par la première programmation pour 2003 (cf. page 54 du présent rapport).

e) Recentrer la section générale sur le financement de projets d'ampleur nationale ?

L'inspection générale des finances préconise de recentrer la section générale sur le financement des projets nationaux, et de la renommer « s ection nationale » afin de supprimer toute ambiguïté.

Votre rapporteur spécial estime qu'un tel recentrage serait en effet souhaitable.

2. Une instruction des dossiers souvent imparfaite

a) Les règles fixées par la circulaire du 9 novembre 2000

La circulaire du 9 novembre 2000 fixe la procédure d'instruction des demandes.

Elle prévoit en particulier que « les préfets de région sont seuls habilités à transmettre à la DATAR les dossiers en état, assortis de leur avis circonstancié et classés par ordre de priorité ».

Les préfets de région assurent la coordination opérationnelle de l'instruction des opérations d'intérêt régional présentées à la section générale du fonds.

Ils recueillent l'avis des préfets de département et peuvent leur déléguer l'instruction des demandes de subvention.

Les dossiers sont ensuite soumis au trésorier-payeur général, qui rend un avis à partir d'une analyse approfondie des aspects économiques et financiers du projet.

Les dossiers qui présentent un degré de complexité ou un enjeu financier particulier, notamment parce que sont en cause des opérations d'un montant égal ou supérieur à 30 millions de francs (4,6 millions d'euros) 11 ( * ) , font l'objet d'un examen par la mission d'expertise économique et financière.

Seuls sont recevables les dossiers portant sur des opérations comportant un plan de financement achevé et susceptibles d'être engagées immédiatement.

b) Les lacunes de l'instruction

Dans son rapport d'enquête sur la section générale du FNADT (1998), l'inspection générale des finances souligne des lacunes dans l'instruction des dossiers, comme le caractère incomplet de nombreux dossiers présentés en réunion interministérielle et la qualité inégale des fiches de présentation des dossiers.

En outre, « de nombreux projets ont été présentés directement à la DATAR, sans faire l'objet d'une instruction locale et de l'avis du préfet ». Dans son rapport 2001 au Président de la République, la Cour des comptes souligne que « la Délégation omet parfois de solliciter l'avis des préfets, pourtant prévu par les textes ».

Enfin, comme le souligne l'inspection générale des finances, le CIADT ne motive pas ses décisions, ce qui empêche l'émergence d'une « jurisprudence » relative à l'emploi du fonds.

Ces observations demeurent d'actualité.

3. Une gestion des crédits confiée aux préfets pour les subventions d'investissement et à la DATAR pour les subventions de fonctionnement

La Cour des comptes, dans son rapport 2001 au président de la République, indique que « par manque de moyens, la DATAR confie aux préfectures la gestion d'opérations décidées à l'échelon national, ce qui a pour effet d'introduire une confusion dans la responsabilité du contrôle financier ».

Ainsi, la situation est actuellement la suivante :

- les opérations d'investissement qui sont examinées en comité de programmation national sont, dans leur très grande majorité, proposées par les préfets de région, qui les ont instruites préalablement et qui en assurent le financement, sur crédits délégués par la DATAR ;

- il en est de même des programmes territoriaux approuvés en CIADT et qui mobilisent des crédits FNADT. Ces programmes font l'objet de délégations de crédits globalisés et sont exécutés sous l'autorité des préfets de région concernés.

Selon la DATAR, ceci s'explique par le souci de « privilégier les relations de proximité avec les bénéficiaires et optimiser les délais ouverts par la réglementation, l'ordonnance organique de 1959 et le décret sur les subventions d'investissement de l'Etat notamment ».

En revanche les interventions en fonctionnement (en particulier le soutien aux réseaux nationaux du développement local) sont directement gérées par la DATAR.

B. UNE SECTION LOCALE SERVANT ESSENTIELLEMENT AU FINANCEMENT DES CONTRATS DE PLAN ETAT-RÉGIONS

La section locale du fonds est composée d'une part, dite « section contractualisée », qui regroupe les crédits portés aux contrats de plan Etat-région (volets régional et territorial), et d'une part dite « libre d'emploi », dont les crédits sont délégués aux préfets de région.

Cette déconcentration est une bonne chose : il est en effet souhaitable que les décisions soient prises au plus près du terrain.

1. La section contractualisée

Les crédits destinés à financer les contrats de plan Etat-régions sont totalement délégués par la DATAR en début d'exercice aux ordonnateurs secondaires (préfets de région).

La section locale contractualisée du FNADT finance plusieurs types de dépenses.

• Tout d'abord, elle participe au financement de la part Etat du volet territorial des contrats de plan Etat-région , afin d'accompagner la montée en puissance des projets de territoire (projets d'agglomérations, de pays, de parcs naturels régionaux ou de réseaux de villes).

Ces crédits peuvent servir à financer la réalisation d'études de préfiguration et de diagnostic, ainsi que la mise en oeuvre de conventions d'objectifs et de contrats territoriaux.

Dans le domaine de l'ingénierie de projet, les interventions du fonds peuvent contribuer à la constitution de pôles de compétence pluridisciplinaires stables, à la mise en oeuvre de procédures de participation, de débat, de communication, de suivi et d'évaluation, ainsi qu'à l'animation de projets collectifs. Le fonds peut également intervenir au soutien des dispositifs régionaux d'appui technique aux politiques territoriales.

S'agissant du soutien aux investissements, le fonds a vocation à financer les opérations d'aménagement et de développement qui répondent à ses objectifs.

Le financement des dispositifs territoriaux préexistants, hors parcs naturels régionaux et réseaux de villes, est autorisé à la condition que leur constitution progressive en pays et agglomérations, au sens de la loi du 25 juin 1999 12 ( * ) , ait été prévue dans une convention d'application du contrat de plan Etat-région.

• Ensuite, la section locale contractualisée participe également au financement :

- de politiques de développement spécifiques qui s'inscrivent dans un cadre régional (développement des technologies de l'information et de la communication, zone de reconversion, politiques des massifs...) ;

- des conventions interrégionales de massif et des programmes interrégionaux contractualisés ;

- des autres opérations prévues dans les contrats de plan Etat-région .

2. La section locale libre d'emploi

La section locale non contractualisée, dite « libre d'emploi », est destinée à contribuer au financement :

- des mesures prises, au niveau territorial, pour accompagner l'évolution de l'implantation des services publics ;

- des opérations d'aménagement et de développement durable promues par les acteurs locaux, notamment dans un cadre intercommunal.

Les crédits délégués au titre de la part non contractualisée ne doivent pas servir au financement des projets territoriaux (pays, agglomérations, parcs régionaux ou réseaux de villes) qui sont pris en compte par les contrats de plan.

3. Le non-respect de l'interdiction des enveloppes départementales

a) Le principe

La circulaire du Premier ministre du 9 novembre 2000 prévoit que les crédits de la section locale font l'objet de délégations globales aux préfets de région ou aux préfets coordonnateurs de massif qui peuvent, pour le titre VI, les subdéléguer aux préfets de département.

Elle précise explicitement que « la détermination d'enveloppes départementales est, quant à elle, proscrite ».

b) La violation du principe jusqu'en 2001

Pourtant, comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport 2001 au Président de la République, « des crédits normalement répartis par les préfets de région sont parfois directement délégués par la DATAR sous forme d'enveloppes départementales ».

Interrogée sur la poursuite de cette pratique, la DATAR a indiqué qu'elle n'avait plus cours 13 ( * ) . Votre rapporteur spécial n'est cependant pas en mesure de vérifier la véracité de cette information.

* 10 Loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

* 11 Selon la DATAR, les opérations supérieures à 20 millions de francs (3 millions d'euros) correspondent à moins de 1 % des crédits.

* 12 Loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

* 13 « Si quelques programmes territoriaux décidés en CIADT ont pu faire l'objet d'une délégation directe aux préfets de département avec l'accord des préfets de région, aucune pratique de cette nature n'est à signaler pour les crédits qui relèvent du niveau de décision des préfets de région : les crédits de la section locale (contrats de plan et section locale libre d'emploi) leur sont directement délégués sans aucune pré-répartition régionale ».

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