c) Les enjeux pour nos relations avec les pays de la zone arabe et la défense de la francophonie

L'importance d'assurer et de maintenir une offre suffisante d'enseignement de la langue et de la culture arabes en France, et plus largement en Europe, revêt une dimension géopolitique, dans la mesure où cette offre sert d'affichage de l'intérêt porté à nos partenaires arabes. De plus, en faisant l'effort de communiquer avec cette région, dans ses langues, il s'agit de préserver la qualité des négociations engagées avec cette zone stratégique.

De surcroît, en raisons des relations étroites et spécifiques qui relient la France au monde arabophone, l'enseignement de l'arabe dans les établissements français représente un enjeu privilégié dans la politique de coopération culturelle , et conditionne pour une grande part, en retour, le développement de la francophonie.

Les autorités portent une grande attention aux évolutions de cette discipline et sont en demande de contreparties pour promouvoir en retour l'enseignement du français et des langues européennes. Ainsi, lors d'un colloque sur la culture et la coopération entre le Conseil de l'Europe et les pays méditerranéens non membres 33 ( * ) , les représentants des parlements de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie ont déploré le fait que l'enseignement de l'arabe demeure limité, et concerne avant tout les immigrés, alors que les langues européennes sont très présentes dans leurs enseignements. Autre exemple éloquent, l'annonce, ensuite démentie, de la suppression des postes à l'agrégation d'arabe pour la session 2004, a suscité un vif émoi, qui a conduit les autorités syriennes à réexaminer leur décision d'introduire à la rentrée prochaine un enseignement obligatoire de français en deuxième langue....

Par ailleurs, les besoins économiques sont évidents : l'arabe est la langue de 22 pays et d'environ 230 millions d'habitants. Or la France peut puiser dans son immigration un atout collectif précieux, en valorisant la compétence « native », active ou latente, d'une partie de sa jeunesse originaire de ces pays, et en faire des relais naturels, des intermédiaires privilégiés pour nos relations avec nos partenaires arabes. Il s'agit de la thèse que défend M. Jacques Berque 34 ( * ) : en proposant un enseignement d'arabe à ces locuteurs bilingues précoces, et en leur prouvant ainsi que la variété, y compris linguistique, de la population est une chance, ces jeunes seront bien intégrés, car non humiliés.

Une sensibilisation de tous les élèves, dès le plus jeune âge, aux intérêts divers de l'apprentissage de cette « langue d'avenir » serait un premier pas en vue de dépasser nombre de stéréotypes. La mission d'intégration et d'éducation à la tolérance de l'école se joue aussi en cours de langue : le respect suppose la reconnaissance de la langue de l'autre, et se gagne au contact direct avec la culture et l'altérité dont elle est le vecteur.

* 33 Colloque organisé par la Commission de la culture et de l'éducation à Palma de Majorque (22 au 24 octobre 2000).

* 34 Rapport « L'immigration à l'école de la République », 1985, La Documentation française.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page