B. LES LANGUES DANS LE SECOND DEGRÉ : UNE HOMOGÉNÉISATION CROISSANTE DES PROFILS LINGUISTIQUES
Dans le sens des recommandations conjointes du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne, les mesures récentes destinées à développer l'enseignement des langues vivantes dans le second degré ont répondu à l'objectif d'amener tous les élèves à la maîtrise d'au moins deux langues vivantes étrangères à la fin de leur scolarité. Toutefois les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes : l'objectif de diversification se heurte à des tendances fortes ainsi qu'à une organisation inadaptée et rigide du paysage éducatif.
1. Une standardisation linguistique consolidée
La tendance lourde que relevait le précédent rapport n'a pas été ébranlée : les établissements scolaires se mettent à l'heure de l'anglais et de l'espagnol et la palette des langues enseignées se restreint. Face à un tel déséquilibre, qui repose sur une absence d'information sur les différentes langues, de grandes langues risquent de péricliter dans notre pays.
a) Deux langues pour tous, une généralisation encore partielle
(1) Deux langues dès l'entrée au collège : un objectif compromis
L'introduction d'une seconde langue dès l'entrée
au
collège pour tous les élèves, conjuguée avec
l'apprentissage précoce d'une première langue vivante dès
cinq ans, constitue la clé de voûte du plan Lang de
développement de l'enseignement des langues vivantes :
«
Dès 2005, tous les enfants du pays apprendront au
collège, en classe de 6
ème
, deux langues
étrangères
».
Dans un premier temps,
dès la rentrée 2002,
l'expérimentation se concentre sur les élèves qui ont
étudié une langue autre que l'anglais à l'école
primaire
, pour répondre à l'objectif de
diversification : en 2002-2003, 22 906 élèves de
6
ème
et 18 350 élèves de
5
ème
apprennent ainsi une deuxième langue, dans plus
de 900 collèges de France métropolitaine et des DOM.
Toutefois,
l'objectif de généralisation semble aujourd'hui
compromis
, tant par le décalage du calendrier de la
généralisation des langues au primaire que par un manque de
moyens et d'impulsion en ce sens. La circulaire de préparation de la
rentrée 2003 se contente en effet de préciser que
« l
'
expérience
d'anticipation d'une seconde
langue vivante (en 6
ème
ou en 5
ème
) avec un
horaire hebdomadaire de deux heures sera développée à
l'attention particulière des élèves n'ayant pas
étudié l'anglais à l'école
primaire
».
Si notre pays affirmait avec vigueur « L'Europe de demain, c'est deux
langues apprises dès le plus jeune âge »
20
(
*
)
, la France, en laissant cette
mesure dans un relatif état d'abandon, ne se montre pas
exemplaire...
(2) Une ligne directrice : deux langues obligatoires
Si la
quasi-totalité des élèves (plus de 99 %)
étudient une première langue obligatoire, la part des
élèves qui suivent un enseignement de LV2 a connu une progression
régulière, pour atteindre aujourd'hui 77 % :
- depuis la rentrée 1998, l'apprentissage d'une deuxième
langue vivante est obligatoire pour tous les élèves de
4
ème
, à raison de trois heures hebdomadaires.
Toutefois, si cet enseignement se poursuit en classe de 3
ème
à option LV2, il ne devient que facultatif, même si fortement
recommandé, en classe de 3ème à option technologie ;
il en sera de même, dans le projet de nouvelle classe de
3
ème
soumis à concertation en octobre 2003 pour les
élèves qui opteront pour l'enseignement
« Découverte professionnelle » ;
- de plus, alors qu'elle était jusque là facultative dans
les séries ES et S, la LV2 est devenue obligatoire dans l'ensemble
des filières de l'enseignement général, dans le cadre de
la réforme des lycées, pour la classe de première depuis
la rentrée 2000, et depuis la rentrée 2001 pour la classe de
terminale ; en outre, un enseignement complémentaire de LV1 ou LV2
peut être proposé au titre de l'option obligatoire au choix en
première et de l'enseignement de spécialité en terminale
dans les séries L et ES.
(3) Les filières technologiques et professionnelles laissées de côté...
Il faut
néanmoins regretter que l'introduction progressive de l'apprentissage
obligatoire de deux langues vivantes ait laissé de côté les
filières technologiques et professionnelles : en effet, la LV2
n'est obligatoire que pour la série STT, depuis 1993 ; dans toutes
les autres séries technologiques, elle n'est qu'une option facultative.
Enfin, si la LV1 est enseignée à tous les élèves
des lycées professionnels, l'étude d'une seconde langue vivante
ne les concerne pas tous : elle n'est obligatoire, en principe, que pour ceux
des classes de baccalauréat professionnels et de certains BEP et CAP du
secteur tertiaire et de l'hôtellerie.
Ainsi, seuls
9,5 % des élèves de second cycle
professionnel étudiaient deux langues à la rentrée 2001,
même si ces effectifs sont en progression régulière.
POURCENTAGE D'ÉLÈVES ÉTUDIANT UNE
DEUXIÈME LANGUE VIVANTE
France métropolitaine - public +
privé
|
1990-91 |
1995-96 |
1997-98 |
2001-2002 |
4 e et 3 e |
87,5 |
88,9 |
89,5 |
94 |
2 nd cycle professionnel |
3 |
5,1 |
7,2 |
9,5 |
2 nd cycle général et technologique |
78,9 |
85,0 |
85,1 |
89,8 |
Ensemble |
68,1 |
72,1 |
72,2 |
77 |
* 20 Manifeste en faveur du plurilinguisme et de l'apprentissage des langues dès le plus jeune âge, lancé à l'initiative de la France, qui a reçu en 2002 la signature de 350 personnalités scientifiques, artistiques, culturelles françaises et étrangères, ainsi que de personnalités politiques étrangères.