DÉBAT -

M. Émile Blessig : Mesdames, messieurs, puisque nous avons dépassé le temps qui était prévu pour les exposés, nous allons donner la parole dans la salle aux personnes qui assistent à ce colloque. Nous essaierons ensuite d'être plus concis sur le transfert de compétences et ses conséquences.

Question : Pourquoi faut-il faire une différence entre la gauche et la droite pour traiter nos problèmes ? Je trouve qu'au XXI e siècle, on pourrait prendre plus d'altitude. Nos concitoyens sont-ils véritablement conscients qu'en acceptant de tels bouleversements, ils participent à l'amélioration de l'intérêt général ?

Je ne suis pas contre la décentralisation, mais elle entraîne une dilution des responsabilités. Pour qu'un système soit viable, il doit être bouclé. Comment peut-on exploiter le retour d'expérience et le retour sur investissement ? Quand je vois qu'un certain nombre de constructions réalisées restent inemployées, et que rien n'est fait, on peut s'interroger sur la décentralisation.

Expliquez-moi pourquoi le budget de l'Education nationale augmente alors que le nombre d'analphabètes continue, lui aussi, à augmenter ? La décentralisation va-t-elle permettre d'y remédier ?

En matière d'énergie, on parle de l'effet de serre. La décision d'implanter des centrales nucléaires, qui est une solution permettant de limiter les émissions de CO2, va-t-elle aussi être décentralisée ? En matière de transports, 40 % des émissions de CO2 sont liées à la circulation de camions, et 40 % à l'habitat ? Qu'allez-vous faire ?

J'ai l'impression que la décentralisation a été abordée par « le petit bout de la lorgnette » sans réelle prise en compte d'un élément primordial, l'expression du besoin.

M. Adrien Zeller : Je réponds volontiers. La décentralisation mal faite aboutit à la dilution de la responsabilité. Si elle est bien faite, c'est l'effet inverse. Par exemple, autrefois, on ne savait pas si la gestion des lignes de train relevait du directeur régional des chemins de fer, du président de la SNCF, du sous-directeur du ministère ou du ministre. Aujourd'hui on sait que si on veut interpeller quelqu'un sur ce sujet, la responsabilité incombe au président de la région et à son assemblée. C'est là un réel progrès pour le citoyen, résultant de la décentralisation.

Par ailleurs, l'échelon régional est une échelle particulièrement bonne pour la mise en oeuvre des énergies renouvelables et une gestion économe de l'énergie pour l'habitat, les transports collectifs. Il faut bien sûr aussi considérer ce problème à l'échelle mondiale, mais la région doit avoir des responsabilités dans le développement durable.

Question : Je n'ai pas très bien compris quel serait le nouveau positionnement de l'Etat à la suite de la deuxième vague de décentralisation en matière d'aménagement du territoire. J'ai entendu parler de contractualisation. Cet outil existe déjà, et n'est pas toujours très efficace, si on prend par exemple les contrats de plan Etat-région, qui ne sont pas toujours respectés, en particulier par l'Etat. Cela va-t-il changer ? Y a-t-il un nouveau positionnement de l'Etat à imaginer ?

M. Marc-Philippe Daubresse : nous allons vers une coproduction de l'aménagement du territoire. Il y a vingt ans, l'Etat imposait certaines choses, et les régions devaient le suivre. Nous sommes ensuite passés à la logique du contrat de plan. Aujourd'hui, nous avons un certain nombre de collectivités majeures (comme les régions Alsace ou Nord Pas de Calais), qui définissent leurs propres schémas stratégiques et délimitent des actions, puis demandent le concours de l'Etat.

Par exemple, dans ma région, on vient d'inaugurer une plate-forme multimodale qui permet d'effectuer du transport ferroviaire, routier et fluvial. Nous avons initié cette demande, et l'État nous a suivis. Nous entrons donc dans une nouvelle démarche. Les collectivités territoriales doivent prendre le pouvoir malgré la complexité de la loi pour être source d'initiative et de coproduction d'aménagement du territoire.

M. Emile Blessig : En plus du devoir de prise de pouvoir s'ajoute un devoir de cohérence.

Je souhaite passer la parole à Mme Eliane Dutarte pour donner le point de vue de la DATAR sur la place de l'Etat dans cette seconde étape de la décentralisation.

Mme Eliane Dutarte, conseillère à la DATAR : Le ministre Jean Paul Delevoye et Nicolas Jacquet ont tous deux évoqué un renouvellement de la politique d'aménagement du territoire qui implique une redéfinition du rôle de l'Etat, et certainement pas sa disparition. Avec le partage des compétences, l'Etat ne décide plus seul pour tous.

En application du principe de subsidiarité, il doit assurer un cadre général de cohérence afin de garantir la plus grande efficacité des politiques qui peuvent être conçues localement. Il s'agit d'éviter les concurrences entre les territoires, et d'assurer leur cohésion.

C'est par ailleurs par la coproduction la rencontre de deux politiques et de deux volontés distinctes. A partir de cette idée de cohérence des besoins et de choix politiques locaux, on organise la rencontre entre ces diverses aspirations, et la négociation dans le cadre du couple Etat région par exemple.

La contractualisation est aussi un instrument s'inscrivant dans cette logique, au même titre que la conférence des présidents de régions. Comme M. Delevoye l'a indiqué, nous sommes en train de repenser la contractualisation de manière à ne pas reproduire les faiblesses connues des contrats de plan. Nous voulons simultanément maintenir un cadre qui permette d'assurer la cohésion et la solidarité de manière plus dynamique et cohérente.

M. Michel de La Brelie, sous préfet du Havre : La problématique de l'efficacité, et la logique relevant strictement de l'aménagement du territoire, peuvent s'envisager à l'échelle intercommunale, régionale, nationale ou européenne. Si l'Etat abandonne la mission d'aménagement structurant de l'espace national, un certain nombre de problèmes vont se poser.

La coproduction, la collaboration et la cogestion introduisent beaucoup d'opacité en matière de responsabilité et en tout état de cause, prennent énormément de temps. Le temps de traduction dans les faits d'une décision prise est d'environ six mois. L'économie peut-elle vivre dans ce temps ?

Question : Dirigeant d'une PME, je reçois régulièrement des mailings provenant de départements offrant des subventions pour s'installer sur leur territoire. Comment se déroule la coordination de telles initiatives ?

Question : Pourriez vous clarifier la notion de proximité du citoyen à l'égard des décisions qui le concernent ? Quelle est la place de la région française dans un contexte européen en pleine évolution ? Quel mode de scrutin adopter pour clarifier les élections au niveau du département et de la région ?

Mme Henriette Martinez, députée des Hautes-Alpes : La décentralisation pourra-t-elle s'accommoder longtemps de l'existence des cantons, compte tenu des compétences données aux conseils généraux ? Il semble que le canton est un échelon qui n'a plus aucune raison d'être à l'époque de l'intercommunalité.

M. Jean-Pierre Balligand : Je répondrai sur la compétition entre collectivités. L'Europe est en train de résoudre ce problème dans la mesure où il y a eu de nombreux gaspillages d'argent public, comme des délocalisations à l'intérieur du territoire national. Si ces pratiques reflètent une volonté de bien faire à l'échelle de micro territoires, elles posent un réel problème de cohérence.

Je pense que cette loi de décentralisation ne doit pas être un démantèlement de l'Etat, mais celui-ci ne fera pas l'économie de sa propre réorganisation. Le mimétisme administratif français ne fonctionne pas. Les conseillers généraux ont reproduit les mécanismes nationaux à l'intérieur de leurs départements.

L'Etat a conservé les compétences de voirie pour les grands axes structurants qui dépassent chaque région et assure l'articulation avec l'Europe. Il est temps que l'Etat se dote de très grandes régions administratives qui ne soient pas face aux exécutifs régionaux avec lesquels ils entrent en compétition. Les élus locaux continuent à réclamer une plus grande déconcentration, mais il faut que l'Etat développe une nouvelle architecture administrative pour ses propres missions. De même, à l'échelle infrarégionale, il doit réfléchir à son organisation, en prenant en compte les pays. Il ne peut pas y avoir de correspondance totale entre les structures.

M. Hubert-Marie Ghigonis : Je pense qu'il ne faut pas oublier cette notion de déconcentration. L'Etat est régulateur et aménageur, mais au niveau économique, c'est la région qui doit jouer ce rôle, ce qu'elle ne pourra faire que si elle est nommée expressément chef de file.

M. Bertrand Pancher : La question du contrôle citoyen accompagnant tout nouveau transfert de compétences est centrale. Je suis favorable à une élection proportionnelle, au niveau du département, de façon à ce que les campagnes électorales soient menées sur des projets, et non sur des équipements dans le cadre d'élections cantonales. De même, on ne peut être hostile à l'élection des délégués intercommunaux.

L'éparpillement des missions et les blocs de compétences généralisés ne peuvent pas durer. Je comprends parfois le président de l'Assemblée des départements de France lorsqu'il souligne que certains départements ont plus de moyens et de légitimité d'action que certaines régions. Posons-nous la question de la taille optimale des collectivités. En Espagne, il y a quelques années, des regroupements majeurs ont eu lieu.

M. Marc-Philippe Daubresse : Par rapport à la concurrence entre les territoires, je suis plus préoccupé par la question de la non réactivité. Il nous faut environ sept ans pour établir des schémas directeurs, et huit à dix ans pour faire une autoroute. La France ne peut, dans ce domaine concurrencer des pays comme la Chine. Le plus grand cabinet de consulting international spécialisé dans l'implantation des zones de logistique et de transport dans le monde soulignait que les Français possédaient de nombreuses qualités, mais que la faible réactivité était sa faiblesse majeure.

Par ailleurs, ce que disait Mme Martinez me semble fondamental. Il est tout à fait possible de mélanger des représentants de la logique territoriale et de la logique de population dans la même assemblée. Il convient de trouver un modèle approprié. De plus, s'ils travaillent ensemble pendant suffisamment longtemps, ils développeront une logique stratégique commune pour la défense des habitants et du territoire.

M. Adrien Zeller : Les aides économiques sont soumises à un contrôle financier extrêmement strict de la part de Bruxelles. La France ne peut pas distribuer d'argent pour l'implantation d'entreprises au-delà de montants très limités. À l'extérieur, en revanche, certains pays comme la Pologne proposent des régimes fiscaux extraordinairement favorables.

En France, nous sommes tous étatistes, ce qui pose un problème pour la réforme de l'Etat. Il faut repositionner l'État, qui doit se reconcentrer sur ses fonctions régaliennes, domaine dans lequel une cohérence nationale est essentielle. En matière économique, les intelligences ont évolué, les collectivités territoriales savent gérer la modernisation et n'ont pas besoin de la tutelle de l'Etat.

M. Emile Blessig : Je voudrais que pour la demi-heure qui nous reste, nous puissions envisager le transfert de compétences et de ses conséquences en termes de moyens financiers ou humains présentés dans le projet de loi.

M. Hubert-Marie Ghigonis : Je voudrais confirmer qu'il y a deux échelons prioritaires dans ce domaine : la région, qui devrait recevoir une délégation plus large, notamment en matière d'habitat, de transports publics et de patrimoine et l'échelon européen, pour la mise en oeuvre des grandes politiques publiques d'infrastructures. En outre, dans le domaine des transports, l'Etat doit conserver un rôle important.

Les transferts de compétences dans lesquels les communes et les départements jouent un rôle ne devraient se faire que dans le cadre d'un contrat de développement économique établi par la région. Celui ci associerait départements et communes pour sa mise en oeuvre.

M. Marc-Philippe Daubresse : Il faut laisser les transferts de compétences économiques, la formation professionnelle et les grandes infrastructures à la région.

En revanche, j'estime personnellement (je n'engage pas ici la Commission des Lois) qu'il est regrettable que se poursuive un enchevêtrement. Je suis, en particulier, sceptique à l'égard de l'amendement grâce auquel les communes peuvent intervenir dans tous les domaines. Je regrette, par ailleurs, que l'intercommunalité soit la grande oubliée de cette loi, alors qu'elle est la grande force émergente.

Je trouve enfin aberrant, même si cela a fonctionné par le passé, de séparer les lycées attribués à la région et les collèges au département. Il faudrait constituer un pôle de compétence unique pour l'éducation. Je trouve, en revanche, que l'intégration des personnels d'entretien est positive.

M. Adrien Zeller : Les points positifs suivent une bonne logique mais ne vont pas suffisamment loin. Les éléments qui s'imposent aujourd'hui sont une plus grande autonomie et une territorialisation des universités, garantissant des formations de haut niveau. Il est indispensable que les régions aient un droit de regard sur la carte des formations professionnelles jusqu'au niveau « Bac+3 ». Dans le domaine de l'innovation, dont dépend l'avenir de l'économie, on doit réformer profondément le système par de nouveaux partenariats, ou donner plus de moyens.

Les avancées réalisées vont dans la bonne direction, mais elles s'inscrivent dans la limite de ce qui est strictement nécessaire pour faire face aux mutations accélérées que connaissent le marché du travail et notre tissu économique et industriel.

Le point négatif principal est la complexité effrayante du dispositif.

Enfin, il convient de s'interroger sur la place de la région Ile-de-France dans l'organisation nationale. Je pense que les services de l'architecture nationale, par exemple, pourraient être déplacés à Orléans, à Amiens ou à Reims, afin de faire enfin de la France un espace plus polycentrique, à l'image des autres pays d'Europe qui réussissent.

Mme Eliane Dutarte : On peut imaginer que les amendements votés à l'Assemblée nationale vont peut-être pouvoir permettre d'aller plus loin dans la mise en place d'un pouvoir organisateur à l'échelle de la région. La question importante qui vient ensuite est celle de savoir comment on va pouvoir articuler entre eux ces différents champs de compétences, pour favoriser l'apparition de synergies.

M. Émile Blessig : Permettez-moi de vous renvoyer au tableau que nous avons distribué. Réalisé par le secrétariat de la Délégation, c'est un tableau synthétique de la répartition des compétences définie par le projet de loi relatif aux responsabilités locales. Je tiens à souligner qu'il s'agit là du projet de loi initialement déposé par le Gouvernement au Sénat.

M. Bertrand Pancher : Parmi les avancées, je voudrais souligner le transfert des personnels dans les départements, en particulier dans le domaine des routes et pour les collèges. En revanche, la définition des blocs de compétences pour les départements est trop lente, en particulier sur le plan social. Je m'interroge à ce propos sur notre capacité à mener nos missions de manière satisfaisante dans ces conditions, en particulier pour les transferts de compétences en matière de personnes âgées ou handicapées. En matière de protection judiciaire de la jeunesse, on a une expérience quant aux mesures de protection civile. Pourquoi ne pas l'étendre aux mesures pénales ?

Dans le domaine social, on ne devrait pas morceler le suivi les familles en difficulté en fonction de l'âge de ses membres. Le transfert des personnels infirmiers dans les collèges au profit du département me semble une très bonne idée permettant un suivi global et cohérent des familles en difficulté.

Enfin, la grande insuffisance est celle de la péréquation, que nous souhaiterions aborder avant les problèmes de transfert de compétences. C'est là le vrai problème de l'égalité des territoires. Je vous conseille de lire l'excellent rapport du Sénat à ce sujet, corédigé par Jean François-Poncet.

M. Marc-Philippe Daubresse : Je souhaite préciser les apports du Sénat au projet de loi initial.

Les compétences rajoutées par le Sénat sont :

- la possibilité pour les agglomérations et les communes de mettre en place des péages urbains ;

- le transfert de la responsabilité en matière de logement des plus défavorisés aux communes, aux groupements de communes et aux départements selon les cas ;

- la décentralisation, contre l'avis du gouvernement, de la médecine scolaire. En revanche, les infirmières, les assistantes sociales et les conseillers d'orientation ne sont pas décentralisés.

Aucun autre transfert majeur n'a été effectué, mais de nouvelles modifications sont à attendre après l'examen à l'Assemblée nationale.

Question : En tant que directeur départemental de l'équipement de l'Aisne, je tiens à compléter les propos de M. Jean Pierre Balligand. L'administration de l'équipement a non seulement organisé ses services de manière à couvrir les grands axes structurants au niveau suprarégional, mais aussi au niveau infra régional.

J'aurai, par ailleurs, une demande à formuler auprès des parlementaires que vous êtes, en tant que chef de service déconcentré. Nous aimerions que la décentralisation s'accompagne d'une réforme de l'Etat ambitieuse. Nous craignons que soit mise en place une réforme de l'Etat à l'échelle locale qui décevrait les citoyens.

M. Marc-Philippe Daubresse : Lors d'un débat le 18 novembre à l'Assemblée nationale sur les stratégies de réforme de l'Etat, Jean-Paul Delevoye a présenté de bonnes stratégies. La question est de savoir si elles vont être suivies dans les faits. La tendance et la motivation sont inégales selon les ministères. Le cabinet du Premier ministre, les ministères des affaires étrangères, du commerce extérieur et des finances ont engagé de grands efforts.

Le projet de loi de décentralisation présente néanmoins quelques éléments très positifs, comme la réaffirmation du rôle du préfet avec de forts pouvoirs déconcentrés, ou la fongibilité des crédits.

Question : Je m'interroge sur l'existence d'un pouvoir coercitif résiduel. L'aménagement d'une plate-forme routière sur un site rural et classé dans la région du Havre, avec le soutien du maire, a provoqué le mécontentement des citoyens. Le projet est à ce jour bloqué. Il semble que les maires n'aient provisoirement arrêté ce projet que dans l'attente des élections. Je crains que la décentralisation n'entraîne pour les citoyens le développement d'une boucle administrative infernale.

M. Bertrand Pancher : Il faut réinventer le débat public local. Je suis frappé de voir la vitalité de la démocratie locale et participative en Europe du Nord. Le référendum est remis au goût du jour, et il faut multiplier les instances de concertation et de dialogue. Les élus locaux doivent jouer un rôle de médiateur, et doivent poser les conditions d'acceptabilité des dossiers sur leur territoire en relation avec les populations. La France a accumulé un retard important en matière de démocratie participative.

M. Marc-Philippe Daubresse : Nous sommes en train de travailler sur une proposition de loi qui concilierait citoyenneté et prise de décision en faisant appel à la démocratie locale qui serait efficace pour des cas comme le vôtre.

M. Émile Blessig : Il est très difficile de procéder à des arbitrages démocratiques entre les différents intérêts généraux à l'échelon régional, local et national. C'est là toute la difficulté du travail de coproduction dont nous débattons ce matin. La faiblesse est le rapport entre démocratie représentative et démocratie participative. Les outils de la démocratie représentative ne sont plus suffisants pour assurer à eux seuls la construction d'un intérêt général reconnu comme légitime.

Nous devons effectuer un travail important de réconciliation du citoyen avec les productions de normes d'intérêt général. Les procédés d'élaboration de débat public doivent être améliorés. Pour l'instant, les citoyens se sentent exclus de l'élaboration des schémas de cohérence dont on a souligné l'importance.

Question : La compétence sociale est dévolue au département dans un territoire rural en partage avec les communes et les intercommunalités. Or la compétence sociale n'est pas évoquée dans le texte sur l'intercommunalité.

Je m'interroge, par ailleurs, sur les rumeurs de remise en cause du centre intercommunal d'action sociale. Cet outil, particulièrement en milieu rural, permet d'impliquer le secteur associatif.

M. Bertrand Pancher : Vous posez ici la question centrale du partage de la compétence entre les départements et les territoires. Dans les départements ruraux, les communes ne peuvent pas s'engager à elles seules dans des actions sociales. Elles doivent donc se regrouper à travers des centres intercommunaux d'action sociale. Puis ces centres, seuls ou regroupés, peuvent contractualiser avec les départements.

Cela implique des initiatives législatives sur ce sujet, mais aussi des incitations à l'échelle du département, qui peuvent être encore plus efficaces.

M. Marc-Philippe Daubresse : Trois éléments qui figurent dans le projet de loi de décentralisation peuvent être utiles à ce titre : la subsidiarité est affirmée timidement. Si une structure intercommunale demande au département le pouvoir d'exercer une compétence sociale, ce dernier doit obligatoirement délibérer sur la question.

Les communes et les structures intercommunales peuvent, par convention, exercer une partie de la compétence partagée avec celui qui la détient officiellement (ici le département).

Enfin, à propos des centres intercommunaux d'action sociale, très peu de communes ont les moyens de financer leurs propres CCAS (environ 3 300 sur 36 000 communes). Nous sommes face à un vide juridique, car cette compétence est obligatoire, mais de nombreuses communes n'ont pas de ressources à y consacrer. La loi a entériné cet état de fait. Les CCAS et les centres intercommunaux ne sont aucunement remis en cause, mais on n'oblige pas pour autant les communes qui ne peuvent pas le faire.

M. Adrien Zeller : Il faut souligner la nécessité absolue de doter l'ensemble du territoire national de bureaux d'action sociale branchés sur le tissu local, c'est-à-dire l'intercommunalité dans le cas des petites communes. Il faudrait que cette compétence sociale devienne obligatoire pour cette dernière.

La reconstitution d'un lien social en liaison avec les territoires devrait être une priorité nationale. Pour mener une action efficace, il faut sortir de la préfecture et des bureaux du conseil général pour aller sur le terrain.

Question : Il existe de nombreuses compétences partagées entre la région et le département. Ne pensez-vous pas qu'il serait souhaitable de déterminer des chefs de file ? Sinon, on risque de se heurter à une grande complexité des débats, par exemple sur les stratégies de développement en matière de tourisme.

M. Marc-Philippe Daubresse : La loi est assez claire sur le sujet, mais le cas du tourisme est particulièrement délicat et compliqué. Pour simplifier la loi qui est, sur ce point, une usine à gaz, c'est la région qui est responsable des stratégies de développement.

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