C- Le prêt viager hypothécaire

Le principe du « reverse mortgage » qui transforme le capital logement en rente viagère présente un intérêt majeur : il offrirait un supplément de revenus à des retraités ne disposant que de leur logement comme patrimoine personnel tout en leur évitant de rentrer dans une situation de dépendance.

Cependant cette introduction suppose l'adaptation de notre Code civil : il faut que les héritiers et conjoints acceptent le principe.

De nombreuses questions restent posées :


• que faire si un propriétaire souhaite disposer de liquidités sans avoir payé la totalité de son logement ?


• la valeur du bien déterminée lors du contrat tient-elle compte de l'évolution de la valeur vénale du bien ? Selon quelles modalités ?


• la rente serait-elle versée sur une période déterminée ?


• quelle sera ensuite la valeur du bien à vendre ? Faudra-t-il retirer le montant de la rente ?


• si le propriétaire décède avant la fin de la période, la rente est-elle transmissible ?

Au premier trimestre de l'année 2004, le ministère de l'économie et le ministère de l'équipement ont confié la mission d'étudier l'intérêt et les modalités d'application de cette mobilisation de l'actif résidentiel des personnes âgées, en procédant notamment à une comparaison des pays déjà familiarisés avec cet outil, en l'occurrence les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni. Le rapport précise que les personnes âgées recourent difficilement à l'emprunt en France. Or, leur nombre croît, des dépenses de dépendance augmentent avec l'allongement de la durée de vie, et la situation des retraités va se dégrader dans « les 5 à 10 prochaines années ».

Les trois pays étudiés présentent des caractéristiques voisines : un nombre de dossiers de prêts relativement faibles, quoiqu'en forte augmentation au Royaume-Uni et aux États-Unis (25.000 et 18.000 en 2003) ; prêts mis à disposition en une seule fois, en plusieurs fois ou par le biais de versements mensuels ; montant augmentant avec l'âge de l'emprunteur ; clientèle assez peu « sociale » mais plutôt « house rich, cash poor » ; risques financiers importants se répercutant sur un taux élevé ; coûts importants liés à l'émission ; protection du consommateur notable. Les différences concernent les modalités de gestion des risques de dépassement, qui ont un impact sur le montant maximal du prêt.

Figure 62 : Nombre de prêts viagers hypothécaires aux États-Unis, Canada et Royaume-Uni


Le rapport pointe le fait que le développement d'un tel outil répond à un besoin croissant de financement, en constituant un revenu pour les personnes âgées : la part des personnes âgées propriétaires devrait croître dans le futur et le besoin de trésorerie global croître. Or, le patrimoine constitue justement la majeure partie du patrimoine des personnes âgées.

Un approfondissement d'enquête mené au Royaume-Uni identifie une clientèle plutôt issue des classes moyennes. Un sondage a permis de mettre en évidence l'utilisation du prêt comme indiqué dans le tableau suivant.

Tableau 42 : Utilisation du prêt viager hypothécaire au Royaume-Uni (Enquête)

Les raisons d'absence de tels prêts, en France, tiennent à la faible diffusion des prêts hypothécaires dont ils sont un dérivé. La mission estime que ce type de produit donnerait aux ménages un degré de liberté supplémentaire souhaitable dans la gestion de leur patrimoine, libre à eux d'en faire usage. Cependant, cela supposerait des adaptations d'ordre législatif et réglementaire liées à l'hypothèque, au droit à la consommation, à la fiscalité, à l'interaction avec les minima sociaux et à la réglementation bancaire. Le rapport présente des avis partagés sur l'intervention éventuelle de l'État dans la couverture du risque de dépassement.

Cependant des réserves sont émises. Les auteurs précisent que « le prêt viager hypothécaire, eu égard aux faibles versements mensuels qu'il peut procurer lorsqu'il est souscrit à un âge inférieur à 70 ans, ne saurait compenser la perte de ressources engendrée lors du départ à la retraite. L'effectif susceptible d'y recourir étant de plus limité, le prêt viager hypothécaire ne saurait constituer une réponse significative d'un point de vue macroéconomique à la question du financement des retraites futures. De même, eu égard à la faiblesse des effectifs concernés et à la lenteur de sa montée en régime prévisible, le prêt viager hypothécaire ne saurait être un instrument conjoncturel de soutien de l'activité ».

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