II. POUR CONCLURE LE CYCLE, RENFORCER L'EFFICACITÉ DE L'OMC DE MANIÈRE PRAGMATIQUE

Puisqu'il apparaît peu raisonnable de compter sur une remise en cause fondamentale des données de la négociation, que sont le nombre des participants et le champ concerné, il est indispensable d'envisager, de manière pragmatique, des voies et moyens moins radicaux mais permettant d' améliorer l'efficience de l'organisation qui supporte cette négociation . Si des différences substantielles continueront de diviser les membres sur le fond, il y a assurément moyen de renforcer l'efficacité fonctionnelle de l'OMC et de promouvoir le consensus de façon transparente et participative .

De ce point de vue, il convient de distinguer deux niveaux de réformes : celles qui visent à améliorer la procédure de négociation , et celles qui tendent à renforcer la légitimité de l'organisation , facteur clef de son efficacité.

A. RENDRE LES PROCÉDURES PLUS OPÉRATIONNELLES

Le rapport Sutherland s'était déjà penché sur les pistes envisageables pour améliorer les procédures internes à l'organisation afin d'atteindre des résultats de négociation optimaux. Certaines, modestes mais réalisables, pourraient être utilement exploitées sans délai.

1. Mieux organiser les enceintes de négociation

L'élargissement et l'approfondissement de l'OMC, décrits plus haut, modifient nécessairement le déroulement des négociations. Sans même remettre en cause les structures actuelles de négociation, créées par le cycle d'Uruguay et peut-être encore appropriées, il est possible d'entreprendre des adaptations institutionnelles pour rationaliser les activités de l'organisation et rendre optimal le fonctionnement des enceintes de négociation, qu'il s'agisse des Conférences ministérielles ou des enceintes de négociation plus confidentielles, telles les « chambres vertes ».

a) Des conférences ministérielles mieux préparées donc plus efficaces

La Conférence ministérielle constitue l'organe suprême de décision de l'OMC. Réunissant les Etats membres au moins tous les deux ans, elle est habilitée à prendre des décisions sur toute question relevant d'un accord commercial multilatéral, décisions adoptées au sein de différents conseils et comités composés de représentants de tous les membres. A ce titre, l'OMC est entièrement « conduite par les membres » .

Lorsqu'il était commissaire européen au commerce, Pascal Lamy avait déploré le manque d'efficacité des Conférences ministérielles, relevant par exemple qu'en septembre 2003 à Cancún, sur les 150 heures de réunion, trois et demie seulement avaient été véritablement consacrées aux négociations multilatérales .

Pour y remédier, il a été suggéré d'organiser plus en amont ces réunions afin de garantir un démarrage plus précoce des négociations. Ainsi, leur structure et leur agenda gagneraient à être fixés préalablement à la Conférence ministérielle afin de mieux synchroniser le processus diplomatique préparatoire à Genève et le début de celle-ci. De même a-t-il été proposé que les noms des « facilitateurs » désignés pour chaque groupe de négociation, soient également convenus avant la Conférence, afin de leur donner le temps de se préparer à leur rôle et d'entrer en fonction dès le début de la conférence. Pour rendre leur nomination plus aisée, le rapport Sutherland envisageait ainsi de laisser leur désignation à l'appréciation du président de la Conférence ministérielle et du Directeur général de l'OMC. L'ensemble de ces préconisations a été mis en oeuvre par Pascal Lamy pour l'organisation de la Conférence de Hong Kong et ces modestes innovations techniques ont vraisemblablement contribué à faciliter sa réussite politique .

En revanche, la proposition du rapport Sutherland de réunir une Conférence ministérielle chaque année plutôt que tous les deux ans laisse votre rapporteur dubitatif. Certes, il convient que seule la participation directe des dirigeants politiques peut créer l'espace et le sentiment d'urgence nécessaires pour que s'opèrent des changements de position significatifs. En revanche, il n'est pas certain qu'il faille aligner les conférences ministérielles de l'OMC sur celles de l'OCDE, du FMI ou de la Banque mondiale en les annualisant pour les « démythifier » : en effet, les négociations, par nature, ont besoin d'une certaine dramatisation pour avancer , et l'attente doit rester forte à l'approche des Conférences ministérielles de l'OMC.

b) Des chambres vertes officialisées pour des résultats plus légitimes

Ainsi que cela a été exposé dans la première partie du présent rapport (76 ( * )), les discussions les plus importantes se tiennent dans une enceinte informelle parallèle à celles officiellement prévues par les accords de l'OMC (Conférences ministérielles, Conseil général, Comité des négociations commerciales, comités et conseils thématiques) : la « chambre verte » . Réunissant de vingt à quarante négociateurs ministériels convoqués par le président d'un comité ou par le Directeur général, cette formation restreinte s'est imposée pour faciliter l'approfondissement des questions les plus ardues , impossibles à traiter en séance plénière. Elle permet en effet de dégager un compromis et de jeter les bases d'un consensus plus large .

Leur caractère informel, s'il présente l'avantage de la flexibilité, les rend tout de fois suspectes de manque de représentativité, voire d'opacité. C'est pourquoi, afin d'exploiter sans controverse le potentiel d'efficacité représenté par les chambres vertes, il serait judicieux d'institutionnaliser ces formats de négociation plus restreints qui permettent de préparer le consensus et donc d'atteindre des résultats. Cette institutionnalisation, sans porter atteinte au principe du consensus, reconnaîtrait que le processus de prise de décision à 150 devient intenable .

La procédure qu'il conviendrait de formaliser ainsi devrait d'abord se fonder sur la représentativité des membres de ces chambres vertes, au regard d'un critère soit géographique, soit de niveau de développement (77 ( * )). En outre, le processus devrait être non seulement transparent , c'est-à-dire faire en sorte que chaque délégation soit tenue informée de ce qui s'y passe (en ayant accès aux procès-verbaux des réunions), mais aussi inclusif , à savoir permettre à toute délégation qui ne serait pas directement consultée de participer et d'apporter sa contribution.

Ceci rejoint la proposition européenne, avancée après l'échec de Cancún, de créer un Conseil consultatif restreint réunissant les présidents des groupes de négociation pour élaborer des projets de consensus . Cette proposition renouait d'ailleurs avec la recommandation qu'avaient déjà faite les membres du GATT, dès 1955, de former un comité exécutif restreint et représentatif. Lors d'un discours adressé en janvier 2004 à des députés européens (78 ( * )), M. Pascal Lamy, encore commissaire européen au commerce, préconisait lui-même la création d'un tel groupe consultatif afin d'arriver à un meilleur équilibre entre efficacité et transparence.

Ainsi légitimées, les enceintes de négociation de format restreint seraient un outil reconnu et donc plus efficace pour faciliter ensuite la décision par consensus .

2. Renforcer les moyens du secrétariat de l'OMC et le rôle de son Directeur général

Si, selon les textes, l'OMC est « une organisation conduite par les membres » , le déroulement des négociations se trouverait certainement facilité par une implication plus grande du secrétariat de l'organisation et, à sa tête, du Directeur général de l'OMC, capable de mettre de l'huile dans les rouages.

Aujourd'hui, le secrétariat est cantonné dans un rôle de soutien et non pas d'initiative ou de défense institutionnelle du système de l'OMC. Selon le rapport Sutherland, ceux qui pâtissent le plus de cette situation sont les membres de l'OMC eux-mêmes. Il ne s'agit pas seulement d'assurer passivement le secrétariat des comités et conseils de l'OMC mais aussi d'insuffler des idées contribuant à faire en sorte que le système de l'OMC fonctionne avec efficacité. Le secrétariat jouerait ainsi le rôle d'un gardien actif et engagé des traités fondateurs de l'OMC .

Le rôle du Directeur général reste aussi à clarifier. Cette clarification était d'ailleurs prévue par l'accord de Marrakech, dont l'article VI -2 prévoit que la Conférence ministérielle « adoptera des règles énonçant les pouvoirs et les attributions » du Directeur général, ce qui n'a jamais été fait et laisse cette fonction tributaire des contingences politiques au lieu de la lier aux intérêts à long terme de l'institution.

Même si, par son « équation personnelle », Pascal Lamy a considérablement fait évoluer en pratique la fonction, le Directeur général demeure écartelé entre sa mission de contact avec les capitales des Membres et la nécessité de piloter les négociations diplomatiques à Genève, si bien que des discordances entre ces deux niveaux peuvent apparaître.

Vu la continuité et la neutralité que le Directeur général peut assurer, il conviendrait donc de conforter son rôle dans les organes délibérants et d'en faire le président du Conseil général et des autres comités et conseils (79 ( * )). Représentant la mémoire institutionnelle et l'autorité de l'OMC, il devrait également être sollicité par les Etats membres pour jouer un rôle d'arbitre ou de conseiller, notamment sur des questions de procédure ou de jurisprudence.

L'objectif doit être par ailleurs d'asseoir l'OMC en tant qu'institution en lui donnant les moyens financiers et humains d'apporter sa contribution aux négociations, de mener des recherches autour du phénomène de mondialisation et de promouvoir les principes fondateurs de son action, qui vise une libéralisation régulée du commerce international. Or, les moyens dont dispose aujourd'hui l'OMC ne permettent pas d'espérer un tel renforcement des structures institutionnelles .

Comme en témoignent les comparaisons figurant dans le tableau page suivante, l'OMC est la plus petite des institutions internationales. Elle est particulièrement mal lotie : son budget - 135 millions de dollars - est six fois moindre que celui du FMI ou que celui de la FAO, et même plus de dix fois moindre que celui de la Banque mondiale. Après Seattle, le Directeur général de l'OMC, Mike Moore, avait même signalé que le budget annuel de la World Wildlife Foundation (WWF) était triple de celui de l'OMC (80 ( * )). De même, les effectifs de l'organisation -635 employés - sont les plus faibles de toutes les organisations internationales, le FMI employant quatre fois plus de personnes, la FAO (81 ( * )) et l'OMS six fois plus, la Banque mondiale treize fois plus.

La contribution au budget de l'OMC représente une part minime des budgets nationaux (82 ( * )), alors qu'elle est susceptible d'apporter des avantages hors de proportion avec l'investissement. Si une augmentation substantielle du budget de l'OMC n'est pas réaliste, actuellement, comme en convient le rapport Sutherland, les membres de l'OMC devraient au moins s'employer à faire croître ce budget plus vite que celui d'autres institutions internationales mieux financées.

Institutions internationales

Budget 2005 ou 2004/2005

Effectifs

OMC

134,9 M$ (83 ( * ))

635 (84 ( * ))

OCDE

422,07 M$ (85 ( * ))

2.200 (86 ( * ))

BIT

529,67 M$ (4)

1.857 (4)

FAO

749,07 M$ (87 ( * ))

3.735 (4)

FMI

801,67 M$ (4)

2.693 (88 ( * ))

BANQUE MONDIALE

1.502,27 M$ (89 ( * ))

8.700 (90 ( * ))

OMS

2.824,07 M$ (4)

3.996 (4)

Enfin, pour assurer le lien entre la vie de l'organisation à Genève et l'échelon politique, il pourrait être opportun de suivre la recommandation faite par le rapport Sutherland de créer, auprès du Directeur général, un organe consultatif restreint se réunissant au moins tous les six mois et comportant environ trente membres (91 ( * )). Cette structure réunirait les « hauts fonctionnaires » chargés du commerce et représentant des Membres (92 ( * )) afin de les impliquer davantage dans la préparation des travaux des Conférences ministérielles, de manière à limiter le nombre de niveaux de décision existant entre le « niveau technique » à Genève et le « niveau politique » dans les capitales. Un tel organe, dénué de pouvoir exécutif ou de pouvoir de négociation (93 ( * )), s'efforcerait de donner aux négociateurs des orientations politiques. Il permettrait ainsi de faire coïncider l'élan politique de la négociation et ses modalités techniques.

3. Envisager le plurilatéralisme comme solution par défaut ?

La règle du consensus apparaissant comme le fondement de la légitimité, pourtant sujette à contestation, de l'OMC, votre rapporteur ne se refuse pas à envisager une solution pragmatique pour faciliter l'avancée des négociations en dépassant éventuellement les réticences de certains des 150 membres de l'OMC.

Le rapport Sutherland lui-même n'hésite pas à se pencher sur ce qu'il désigne comme des engagements « à géométrie variable » dans le cadre de l'OMC. Il vise ainsi l'hypothèse où certains membres pourraient choisir de contracter plus ou moins d'obligations, obligations qui pourraient être exécutoires ou non dans le cadre du mécanisme de règlement des différends.

A l'appui de cette approche, le rapport Sutherland relève que, dans une large mesure, le GATT et l'OMC ont toujours comporté certains éléments à géométrie variable. Ainsi, les négociations sur les services , qui fonctionnent par listes, en sont une illustration. L'accord général sur le commerce des services (AGCS) a en effet établi une nouvelle manière de procéder permettant aux membres d'inscrire sur une liste, à leur rythme, les secteurs de services pour lesquels ils sont prêts à offrir l'accès au marché et le traitement national (94 ( * )). Cette méthode (95 ( * )) est toutefois difficilement applicable aux domaines qui reposent sur l'établissement de règles comme les mesures antidumping ou les subventions.

De même, il existe des accords « plurilatéraux » (c'est-à-dire facultatifs et non contraignants pour tous) qui figurent à l'annexe 4 de l'accord sur l'OMC (96 ( * )).

ACCORDS PLURILATÉRAUX : POUR UN CERCLE PLUS RESTREINT

Pour l'essentiel, tous les membres de l'OMC souscrivent à tous les accords de l'OMC. Après la conclusion du Cycle d'Uruguay , il subsistait néanmoins quatre accords, initialement négociés lors du Tokyo Round (97 ( * )), qui s'appliquaient à un groupe plus restreint de signataires et qui sont connus sous le nom d'« accords plurilatéraux ». Tous les autres accords issus du Tokyo Round sont devenus des instruments contraignants multilatéraux liant tous les membres de l'OMC lorsque l'Organisation mondiale du commerce a été créée en 1995. Les quatre accords plurilatéraux portaient sur le commerce des aéronefs civils, les marchés publics, les produits laitiers et la viande bovine, sachant que les deux derniers ont été abrogés en 1997.

Loyauté dans le commerce des aéronefs civils

L'Accord sur le commerce des aéronefs civils est entré en vigueur le 1 er janvier 1980. Comptant aujourd'hui 30 signataires, il prévoit la suppression des droits d'importation perçus sur tous les aéronefs, autres que les aéronefs militaires, ainsi que sur les autres produits suivants : les moteurs d'aéronefs civils, leurs parties et pièces et leurs composants, tous les composants et sous-ensembles d'aéronefs civils, ainsi que les simulateurs de vol, leurs parties et pièces et leurs composants. Il énonce des disciplines concernant les marchés passés sur instructions des pouvoirs publics pour l'acquisition d'aéronefs civils et les incitations à l'achat, ainsi que le soutien financier accordé par les gouvernements au secteur des aéronefs civils.

Marchés publics : ouverture à la concurrence

Dans la plupart des pays, l'Etat et les organismes qui en relèvent constituent ensemble les plus gros acheteurs de marchandises de tous types, allant des produits de base au matériel technologique de pointe. En même temps, de très fortes pressions politiques peuvent être exercées pour que la préférence soit donnée aux fournisseurs nationaux plutôt qu'à leurs concurrents étrangers.

Un Accord sur les marchés publics a été initialement négocié lors du Tokyo Round et est entré en vigueur le 1 er janvier 1981. Ayant pour objet d'ouvrir à la concurrence internationale une partie aussi large que possible des marchés publics, il vise à faire en sorte que les lois, réglementations, procédures et pratiques en matière de marchés publics soient plus transparentes et n'aient pas pour effet de protéger les produits ou fournisseurs nationaux ou d'entraîner une discrimination à l'encontre des produits ou fournisseurs étrangers.

Vingt-huit membres ont signé l'accord, qui se compose, d'une part, de règles et d'obligations générales et, d'autre part, des listes des entités nationales de chaque pays membre dont les marchés relèvent de l'accord. Une grande partie des règles et obligations générales ont trait aux procédures d'appel d'offres.

L'accord actuel et les engagements y relatifs ont été négociés lors du Cycle d'Uruguay . À l'issue de ces négociations, le champ d'application de l'accord a été décuplé, avec l'ouverture à la concurrence internationale des marchés passés par les entités du gouvernement central et des administrations locales, dont les achats collectifs représentent chaque année plusieurs centaines de milliards de dollars. Le nouvel accord s'étend aussi aux services (y compris les services de construction), aux marchés passés à l'échelon de gouvernements sous-centraux (par exemple États, provinces, départements et préfectures), et aux marchés passés par les services d'utilité publique. Le nouvel accord est entré en vigueur le 1 er janvier 1996.

En outre, l'accord renforce les règles garantissant l'absence de discrimination et une concurrence internationale loyale. Par exemple, les gouvernements seront tenus de mettre en place des procédures nationales permettant aux soumissionnaires privés se jugeant lésés de contester les décisions d'attribution des marchés et d'obtenir réparation au cas où ces décisions s'avéreraient incompatibles avec les règles de l'accord.

L'accord s'applique aux marchés dont la valeur dépasse certains seuils. Dans le cas des marchés de biens et de services passés par le gouvernement central, le seuil est de 130.000 DTS (environ 185.000 dollars en juin 2003). Pour les marchés de biens et de services passés par les entités des gouvernements sous-centraux, le seuil varie, mais est généralement de l'ordre de 200.000 DTS. Pour les services d'utilité publique, il se situe en général autour de 400.000 DTS et, pour les marchés de construction, autour de 5.000.000 de DTS.

Secteur laitier et viande bovine : il est mis fin aux accords en 1997

Il a été mis fin à l'Accord international sur le secteur laitier et à l'Accord international sur la viande bovine à la fin de 1997. Les pays signataires ont décidé que ces secteurs étaient mieux gérés dans le cadre des accords sur l'agriculture et les mesures sanitaires et phytosanitaires. Certains aspects du travail engagé avaient souffert du nombre peu élevé de signataires. Par exemple, quelques gros exportateurs de produits laitiers n'ayant pas signé l'Accord sur le secteur laitier, il n'avait pas été possible de coopérer au sujet des prix minimaux dont l'application avait été suspendue en 1995.

Source : OMC

Il est également possible d'assimiler le traitement spécial et différencié , qui adapte aux pays en développement les accords conclus à l'unanimité, à un cas de géométrie variable, les accords régionaux pouvant également se lire sous cet angle.

Le fait que les obligations varient présente l'avantage de ménager des possibilités d'expérimenter (98 ( * )) et d'innover en concluant des accords ambitieux mais ne pouvant retenir l'adhésion de la multiplicité des membres (99 ( * )). En outre, l'approche plurilatérale permettrait sans doute de dissuader les membres les plus puissants de l'OMC de s'engager sur d'autres voies, notamment bilatérales ou régionales, afin d'obtenir - ou d'éviter - une libéralisation des échanges avec leurs partenaires commerciaux.

On ne peut nier, toutefois, l'inconvénient qu'il y aurait à s'engouffrer dans cette brèche pour résoudre l'aporie des négociations multilatérales : l'approche plurilatérale est de nature à créer des divisions et consacrerait une structure de participation comportant plusieurs catégories de membres à l'OMC, favorisant de ce fait le morcellement du système commercial multilatéral qui subit déjà les effets de fragmentation dus aux accords régionaux. Dans le cadre de l'Uruguay Round, les membres s'étaient précisément efforcés de renoncer à ce morcellement auquel avaient donné lieu les accords plurilatéraux conclus dans le cadre du Tokyo Round. Dans une certaine mesure, l'OMC sert justement à encourager et stimuler les membres, notamment lorsque les gouvernements sont confrontés à l'opposition du secteur privé ou de groupes de pression nationaux hostiles au changement, pour l'adoption de mesures propices au développement du commerce mondial.

Dans l'hypothèse où un accord se profilait entre les Etats-Unis, l'Union européenne et le G20 mais butait sur l'opposition de quelques Etats, rien n'interdit d'imaginer une telle issue aux négociations actuelles, issue certes moins satisfaisante qu'un accord unique mais toujours plus constructive qu'un échec si l'on estime qu'un engagement prévisible et exécutoire pris dans le cadre de l'OMC, même complexe en raison de la multiplicité des degrés d'engagements nationaux, est préférable à aucun engagement. Il s'agirait évidemment d'une solution dégradée et, si le principe en était accepté au plan politique, les règles devant régir de telles négociations plurilatérales mériteraient d'être examinées avec la plus grande attention afin de prévenir la marginalisation des membres qui ne seraient pas partie à de tels accords.

* (76) Voir supra , page 7.

* (77) De ce point de vue, la classification des membres de l'OMC apparaît décalée par rapport à la réalité économique : si les pays les moins avancés (PMA) sont objectivement définis, le classement d'un Etat en pays en développement (PED) résulte d'une autodéclaration. Dès lors, des Etats comme le Mexique ou la Corée du Sud, membres du club des pays développés que constitue l'OCDE, sont des PED à l'OMC... ce qui ne manque pas de contribuer à rendre plus difficiles les négociations.

* (78) Membres du groupe Kangourou, association de députés européens dont l'objectif est de promouvoir la liberté de circulation dans l'Union.

* (79) L'usage veut qu'aujourd'hui, il préside seulement le Comité des négociations commerciales qui suit le programme de développement de Doha.

* (80) Propos rapportés par Georges Soros dans son ouvrage Critique de la mondialisation - 2002.

* (81) Food and agriculture organization .

* (82) La France est l'un des principaux contributeurs au budget de l'OMC, le cinquième en 2006 avec une contribution s'élevant à 8.723.000 francs suisses, soit environ 5,6 millions d'euros.

* (83) Source : OMC - Parité 1CHF = 0,8 USD - Budget 2006 : 140 millions USD.

* (84) Source : OMC.

* (85) Source : OCDE - Budget 2006 : 430 millions USD.

* (86) Source : Ministère des affaires étrangères.

* (87) Source : FAO - Budget 2006-2007 : 765,7 millions USD.

* (88) Source : FMI.

* (89) Source : Banque mondiale.

* (90) Source : Banque mondiale - Effectifs de la Banque mondiale (Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement + Association Internationale de Développement) hors Société Financière Internationale (SFI), Agence Multilatérale de Garantie des Investissements (AMGI) et Centre international de règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI).

* (91) Avec la possibilité de membres permanents et une rotation pour les autres.

* (92) Le rapport Sutherland envisage éventuellement qu'ils soient accompagnés des ambassadeurs en poste à Genève.

* (93) Contrairement au conseil de sécurité de l'ONU.

* (94) Egalité de traitement pour les étrangers et les nationaux.

* (95) Dite « de l'inclusion », par opposition à la méthode de l'exclusion, en vertu de laquelle toutes les disciplines sont d'application universelle à l'exception des activités spécifiques identifiées et inscrites sur des listes.

* (96) Accord sur le commerce des aéronefs civils et accord sur les marchés publics.

* (97) 1973-1979. Le Tokyo Round a produit neuf accords auxquels seul un nombre limité des parties contractantes du GATT ont souscrit, pour l'essentiel, les pays développés. Ces « codes » portaient essentiellement sur les mesures non tarifaires : obstacles techniques au commerce, mesures antidumping, subventions et mesures compensatoires, marchés publics, licences d'importation, évaluation en douane, etc. Avec le cycle d'Uruguay, tous les membres de l'OMC étaient tenus de contracter toutes les obligations énoncées dans la plupart des accords de l'OMC, qui comprenaient des versions actualisées des codes du Tokyo Round.

* (98) Après Cancún, l'Union européenne a assoupli en ce sens son approche des « sujets de Singapour » en proposant de les traiter par une méthode incitative de négociations ouvertes aux membres qui l'accepteraient.

* (99) Le rapport Sutherland envisage d'ailleurs que tous les membres de l'OMC soient habilités à participer aux négociations et décident par la suite s'ils souhaitent ratifier et mettre en oeuvre l'accord. Une autre formule serait de les exclure des négociations en leur offrant la possibilité de donner leur adhésion à une étape ultérieure.

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