ANNEXE 2 - LA POLITIQUE DE LA VILLE DANS LES DECLARATIONS DE POLITIQUE GENERALE DEPUIS 1988

I - UN CONSENSUS SUR L'URGENCE À AGIR

La déclaration de politique générale constitue le texte fondateur de tout gouvernement nouvellement constitué. Elle lie le Premier ministre à sa majorité, elle expose les priorités et décline souvent un calendrier d'actions précises pour les mois qui suivent. Parce que tous les ministres sont associés à sa préparation, elle permet d'évoquer tous les grands thèmes de l'action gouvernementale à venir. Mais il ne s'agit pas, pour autant, d'un texte uniquement technique, d'un simple « agenda des réformes ». Elle doit aussi traduire une ligne politique qui s'appuie sur une conception de la politique et sur une perception de la situation de la société.

Depuis 1988, tous les chefs de Gouvernement ont accordé une place souvent notable à la question de la politique de la ville et des quartiers en difficulté dans leurs déclarations de politique générale. Ainsi M. Michel Rocard, le 29 juin 1988, observait « qu'il y a un grand problème des villes » et que « ceux qui y résident sont devenus étrangers les uns aux autres » . Il annonçait la création d'une « Mission interministérielle à la ville » ainsi que l'affectation « d'un milliard de francs à des travaux d'urgence dans les quartiers dégradés » en estimant que « pour ceux dont la réalité quotidienne est faite d'ascenseurs en panne, de boîtes aux lettres cassées, de logements trop vétustes, de loyers trop chers, j'ai la conviction qu'il s'agit d'un nouvel espoir » . Mme Edith Cresson annonçait, quant à elle, en mai 1991, une loi sur la ville et déclarait que le programme de réhabilitation des logements serait poursuivi. M. Pierre Bérégovoy s'engage, en avril 1992, à « transformer la ville pour donner une autre image de nos banlieues » . Il indique que le nouveau Ministre de la ville sera jugé sur ses résultats.

M. Edouard Balladur, en 1993, mettra l'accent sur la sécurité mais sans oublier les aspects sociaux puisqu'il annonce un plan d'urgence en faveur de la construction de logements. Face à l'ampleur des besoins, il indique qu'une partie des ressources des privatisations sera employée au développement du logement social. M. Alain Juppé poursuivra la priorité donnée au logement en insistant sur l'accession à la propriété. Il propose surtout « un traitement économique puissant et cohérent » à travers « la mise en place d'un régime fiscal différencié » .

M. Lionel Jospin, en 1997, annonce « un programme exceptionnel de réhabilitation d'un million de logements » et la réhabilitation de 100.000 logements supplémentaires dès 1997. Il a également décidé une actualisation et une revalorisation du barème de l'aide personnalisée au logement.

M. Jean-Pierre Raffarin en 2002 « souhaite aussi un effort particulier pour lutter contre toutes les formes de discriminations » . Il annonce que la politique du logement devra être définie dans un cadre contractuel négocié avec les élus locaux et les bailleurs sociaux. Il précise également que « la politique de destruction des grands ensembles sera accélérée et (...) que les zones franches urbaines [seront étendues] » .

M. Dominique de Villepin a également évoqué la lutte contre les discriminations comme étant une priorité. Concernant le logement, il annonce que de nouveaux terrains seront dégagés pour la construction de logements sociaux ainsi que la mise « en place d'un mécanisme de garantie des impayés pour les propriétaires privés qui accepteront des locataires aux revenus modestes ou intermédiaires ».

Au total, s'agissant de l'évolution de la politique de la ville, on peut estimer qu'en matière de traitement social, l'ensemble des chefs de gouvernement a mis l'accent sur la construction et la réhabilitation de logements. Par ailleurs, MM. Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin ont également insisté sur un traitement économique avec les zones franches, ce qui constitue une spécificité puisque la question du développement économique a souvent été ignorée dans les déclarations de politique générale. Enfin, on observera que depuis 2002, une nouvelle préoccupation apparaît concernant la lutte contre les discriminations avec la création de la HALDE.

II - DES DIFFERENCES NOTABLES SUR LA SECURITE

Si tous les chefs de gouvernement affirment l'importance d'agir en faveur des banlieues pour réhabiliter les logements et favoriser l'emploi, il apparaît que la mise en exergue des questions de sécurité a connu des évolutions. Si la plupart d'entre eux réaffirment l'importance de la sécurité, certains se gardent de donner un contenu à cette déclaration de principe alors que d'autres ont, au contraire, voulu apporter des inflexions à la politique en matière de sécurité.

Ainsi M. Michel Rocard considère que « sentiment d'espoir, sentiment de sécurité, ce sont les deux facettes d'une même volonté » . Il insiste, en particulier, sur la nécessité d'une « présence plus discrète, mais plus constante, de policiers restant suffisamment longtemps dans le même quartier pour y faire une prévention efficace » , mais n'évoque pas de mesures précises.

Mme Edith Cresson reconnaît quant à elle que « le sentiment d'insécurité collectif et individuel est fort » mais n'en tire pas, non plus, de conséquences concrètes. M. Pierre Bérégovoy, réaffirme quant à lui, en avril 1992, la nécessité de « lutter contre l'insécurité urbaine, dans le respect des droits de l'homme et du citoyen » , mais il ne dépasse pas l'affirmation de principe selon laquelle il faut faire respecter le droit. Les jeunes sont d'abord considérés comme des défavorisés à qui il faut « redonner l'espoir ».

M. Edouard Balladur estime, en revanche, que « l'aggravation de l'insécurité, comme celle du chômage, jettent le trouble dans l'esprit des Français et l'impuissance des gouvernements précédents pour limiter l'un et l'autre a accru leurs inquiétudes » . Dès lors, des actions précises sont évoquées comme le renforcement des contrôles d'identité et la lutte contre les bandes organisées, une meilleure organisation de notre système judiciaire pour que soient poursuivies les actions aujourd'hui non sanctionnées.

Concernant la question de la sécurité, Alain Juppé insiste sur le fait que « la police de proximité, au service quotidien de tous, doit être plus présente sur le terrain et assurer un meilleur accueil des plaignants ». Mais la priorité est clairement donnée au traitement économique de la situation.

Avec M. Lionel Jospin en juin 1997, on assiste à un retour d'un discours sur « la sécurité, garante de la liberté » illustré par des annonces concrètes, mais celles-ci sont davantage axées sur la prévention. Il évoque ainsi la mise en place d'un plan spécial contre la violence à l'école et l'attribution à la police nationale d'un renfort de 35.000 emplois de proximité. Par ailleurs, il déclare que « le Gouvernement proposera aux communes l'élaboration de contrats locaux de sécurité ».

M. Jean-Pierre Raffarin, le 3 juillet 2002, annonce pour sa part, la création du Conseil de sécurité intérieure, le rapprochement sous une autorité fonctionnelle unique des policiers et des gendarmes ainsi que la création des groupements d'intervention régionaux. Il annonce également une loi d'orientation et de programmation pour la sécurité qui prévoira 13.500 nouveaux emplois sur cinq ans. Enfin, la création des centres éducatifs fermés doit permettre de mieux lutter contre la délinquance des mineurs. M. Dominique de Villepin n'évoque pas, quant à lui, la question de la sécurité dans les banlieues mais s'inscrit dans la continuité de son prédécesseur et de son programme quinquennal.

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