B. LES INSUFFISANCES DE L'ACTUELLE OCM

1. En ce qui concerne la maîtrise du potentiel de production

À partir de 1976, la réglementation communautaire a cherché à résorber les excédents par la réduction du potentiel viticole. Les deux instruments employés ont été l'interdiction des plantations nouvelles assortie d'un encadrement des droits à replanter, ainsi que les primes à l'arrachage pour l'abandon définitif de la production. Ces mesures ont entraîné sur vingt ans une réduction de 25 % de la superficie du vignoble communautaire, qui est passé de 4,5 à 3,4 millions d'hectares. Bien que l'évolution des rendements ait compensé une partie de l'effet de la réduction du vignoble, la production a connu une tendance à la baisse durant cette même période, la production moyenne diminuant d'environ 15 %.

L'interdiction des plantations nouvelles a été prolongée par la réforme de 1999 jusqu'en 2010. Mais sa portée s'est trouvée sensiblement atténuée. Outre les dérogations accordées ponctuellement par le Conseil, année après année, entre 1996 et 1999, la réforme de 1999 a prévu l'octroi de nouveaux droits de plantation représentant une augmentation de 2 % de la surface viticole communautaire. En outre, alors qu'il s'avérait que l'interdiction des plantations nouvelles était loin d'avoir été pleinement respectée, la réforme de 1999 a préféré ouvrir une procédure (non encore achevée à ce jour) de régularisation des plantations illicites : 44 000 hectares irrégulièrement plantés ont ainsi été régularisés, et 65 000 sont encore en cours d'examen.

Parallèlement, le dispositif d'incitation à l'arrachage a été profondément modifié par l'introduction, en 1996, d'une clause permettant aux États membres d'exclure de son application tout ou partie de leur territoire. À partir de cette date, son effet est resté limité.

Ainsi, le vignoble communautaire a cessé de se rétracter, alors que la situation favorable qui justifiait la nouvelle orientation de l'OCM ne s'est pas avérée durable.

2. En ce qui concerne le soutien du marché

Le soutien du marché repose principalement sur les distillations facultatives, l'aide au stockage privé des vins de table et moûts de raisin, et les aides à l'utilisation du moût de raisin.

Les distillations facultatives doivent être distinguées de la distillation des prestations viniques (sous-produits de la vinification), qui est obligatoire et a pour but de favoriser la qualité des vins en évitant le surpressurage, et de préserver l'environnement en assurant l'élimination de ces sous-produits très polluants.

Les distillations facultatives (distillation pour l'alcool de bouche et distillation de crise) sont, quant à elles, principalement destinées à prévenir ou résorber des excédents ; elles reposent sur la garantie d'un prix minimum payé aux producteurs. L'aide au stockage privé permet d'étaler la mise en marché de la récolte. Les aides à l'utilisation de moûts de raisin peuvent contribuer à l'équilibre du marché en permettant d'obtenir de nouveaux débouchés à une partie de la production, soit pour servir à l'enrichissement des vins, soit pour servir à la fabrication de jus de raisin.

Le mécanisme des distillations facultatives est mis en cause pour son coût : l'aide à la distillation de l'alcool de bouche coûte chaque année environ 250 millions d'euros ; le coût d'une distillation de crise varie entre 150 et 180 millions d'euros. Une part notable du budget de l'OCM vin (1,5 milliard d'euros en 2006) se trouve ainsi absorbée dans un mécanisme qui ne concourt en rien à la compétitivité de la filière.

Par ailleurs, les aides à la distillation ont des effets pervers : en fournissant un débouché artificiel à certaines productions, elles freinent la réorientation vers la qualité et peuvent inciter à l'augmentation des rendements.

De plus, ce type d'utilisation des crédits ne peut que nuire à l'image de la viticulture et au maintien d'un effort important en sa faveur dans une Union où certains États membres seulement sont des producteurs significatifs.

Enfin, les mécanismes de distillation facultative, dans un marché de plus en plus ouvert et concurrentiel, s'apparentent plus à des aides au revenu qu'à des instruments efficaces de régulation du marché. Les quantités retirées du marché pouvant toujours être compensées par des importations supplémentaires, compte tenu de la situation du marché mondial du vin, on ne peut espérer réguler efficacement et durablement le marché par cette voie. En réalité, ce type d'intervention pourra de moins en moins maintenir dans la durée le prix des produits européens sensiblement au-dessus du prix des produits importés comparables.

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