3. Les entreprises adaptées doivent encore trouver leur place dans le milieu ordinaire

a) Des difficultés liées à la disparition de l'orientation spécifique vers les entreprises adaptées

La loi du 11 février 2005 a fait des anciens ateliers protégés des « entreprises adaptées », c'est-à-dire des entreprises à part entière du marché du travail, qui bénéficient des dispositifs de droit commun ouverts à toutes les entreprises, tout en conservant leur spécificité qui est d'employer majoritairement des travailleurs handicapés.

Pour cette raison, elle a également supprimé l'orientation spécifique « entreprise adaptée » prononcée par les commissions des droits et de l'autonomie. Désormais, celle-ci ne prononce plus que deux types de décisions : une orientation vers un établissement ou service d'aide par le travail, lorsque la capacité de travail de la personne handicapée est inférieure au tiers de la normale, ou une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), valant orientation vers le milieu ordinaire de travail, dans tous les autres cas.

Tirant logiquement argument de leur insertion dans le milieu ordinaire de travail, les entreprises adaptées demandent aujourd'hui à pouvoir recruter librement tout travailleur handicapé, dès lors qu'il est titulaire d'une RQTH.

Or, telle n'est pas la solution retenue par les mesures d'applications publiées par le Gouvernement. Le décret du 13 février 2006 8 ( * ) envisage en effet seulement deux modes de recrutement ouvrant droit au bénéfice de l'aide au poste : la candidature du travailleur handicapé doit en effet avoir été soumise à l'entreprise adaptée par l'ANPE ou par un Cap Emploi et le recrutement direct n'est admis que pour des travailleurs handicapés remplissant des critères d'efficience réduite définies par arrêté.


Les critères d'efficience réduite

Selon les termes de l'arrêté du 13 février 2006 relatif aux critères d'efficience réduite ouvrant droit aux aides de l'Etat dans les entreprises adaptées, peuvent être directement recrutées par les entreprises adaptées les personnes handicapées qui :

- sortent d'un établissement ou service d'aide par le travail ;

- n'ont pas occupé d'emploi depuis plus d'un an et remplissent une des conditions suivantes : sortie récente d'un établissement de santé ou d'un établissement médico-social pour enfant ou adulte handicapé, passage par une entreprise d'insertion, suivi par un service de soins ou d'aide à domicile.

Le paradoxe n'est toutefois qu'apparent : l'encadrement des personnes handicapées recrutées par les entreprises adaptées répond au souci d'éviter les risques de sélection adverse à l'entrée de ces entreprises. Il est en effet à craindre qu'en l'absence de tout encadrement et dans un contexte concurrentiel, les entreprises adaptées ne soient tentées de recruter les travailleurs handicapés les plus productifs, alors même que leur mission est d'accueillir, parmi les personnes handicapées orientées en milieu ordinaire, celles qui sont le plus lourdement handicapées. Considérant que ce risque est réel, votre commission estime donc comme normales les règles imposées aux entreprises adaptées pour leur recrutement.

Ces entreprises font toutefois état d'une seconde difficulté, plus préoccupante : alors qu'elles dépendent pour leur recrutement des candidats qui leur sont envoyés par l'ANPE et les Cap Emploi, elles constatent que ces organismes sont réticents à prendre seuls la responsabilité de ces orientations et exigent des commissions des droits qu'elles assortissent leurs décisions d'orientation en milieu ordinaire de travail de préconisations - sans caractère contraignant - en faveur d'un recrutement en entreprise adapté.

Votre commission s'est étonnée auprès de ces organismes de les voir refuser d'assumer une responsabilité qui leur incombe pourtant aux termes de la loi. Il semblerait que leurs réticences soient liées à la peur de ces organismes de voir les entreprises adaptées faire pression sur eux pour obtenir des candidats les mieux productifs possible, s'ils ne disposent pas d'un élément objectif pour justifier leur sélection.

Votre commission ne saurait accepter une telle explication. C'est la raison pour laquelle elle demande à ce que la CNSA, au titre des bonnes pratiques qu'elle diffuse, informe les commissions des droits et de l'autonomie de la nécessité de mettre un terme à cette pratique de préconisations officieuses.

* 8 Décret n° 2006-150 du 13 février 2006 relatif aux entreprises adaptées et aux centres de distribution de travail à domicile et modifiant le code du travail (deuxième partie : Décrets en Conseil d'Etat).

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