b) Des attentes toujours très fortes en matière de prise en charge des aides humaines

L'analyse des premières décisions d'attribution de PCH 2 ( * ) montre que l'aide humaine est de loin l'élément le plus fréquemment accordé : 70 % des décisions comportent un volet « aide humaine ». Viennent ensuite les éléments « aides techniques » (23 % des allocataires), « aménagement du logement » (9 % des allocataires) et « aménagement du véhicule » (également 9 % des allocataires).

Les autres éléments sont plus rarement attribués. Il semblerait qu'en l'absence d'un guide d'évaluation national réellement opposable, les éléments les plus complexes à apprécier (aide exceptionnelle ou spécifique) soient plus difficilement mobilisés par les commissions des droits et de l'autonomie.

Le premier constat que l'on peut tirer de l'examen des montants moyens attribués est qu'ils représentent un gain très net par rapport à l'actuelle ACTP. S'agissant des aides humaines, le montant moyen accordé s'établit à 1 088 euros, là où l'ACTP permettait en moyenne d'obtenir seulement 450 euros.

Montants moyens de PCH accordés, par élément

Montant moyen accordé
(en euros)

Élément 1 - Aide humaine (montant mensuel)

1 088

Élément 2 - Aide technique

1 372

Élément 3a - Aide à l'aménagement du logement

3 808

Élément 3b - Aide à l'aménagement du véhicule

2 248

Élément 3c - Aide aux surcoûts de transport (montant mensuel)

185

Élément 4a - Aide spécifique (montant mensuel)

80

Élément 4b - Aide exceptionnelle

592

Élément 5 - Aide animalière (montant mensuel)

57

Source : CNSA, octobre 2006

Ces montants moyens cachent toutefois des écarts très importants : en matière d'aide humaine, l'étude de la CNSA fait état de montants accordés variant de 28 euros à plus de 9 116 euros. De la même façon, pour les aides techniques, le montant attribué se situe dans une fourchette allant de 10 euros à presque 12 000 euros.

Il convient enfin de regarder avec prudence ces premiers résultats : il est en effet trop tôt pour en extrapoler le montant moyen qui sera accordé au terme de la montée en charge de la prestation. Il est vraisemblable que les dossiers déposés concernent les personnes les plus lourdement handicapées, qui se voient ouvrir des droits supérieurs à la moyenne.

L'ensemble de l'étude publiée par la CNSA montre que ce sont les aides humaines qui concentrent le plus d'attentes de la part des personnes handicapées. C'est en effet le type d'aide qui reste le plus central pour le maintien à domicile d'un grand nombre d'entre elles.

Les premiers mois de versement ont montré la nécessité de procéder à certains ajustements concernant ce volet essentiel de la prestation de compensation, ce qui est compréhensible compte tenu de son caractère très innovant.

• La question du tarif de prise en charge des aides humaines

Le tarif horaire de prise en charge des aides humaines recrutées par le biais d'un service prestataire a été revalorisé à compter du 1 er avril 2007 : le montant initial sur le plan national (soit 14,43 euros brut de l'heure) s'avérait en effet être inférieur aux prix réellement pratiqués par les services en question, alors même que ces tarifs avaient été approuvés par le conseil général de leur lieu d'implantation.

C'est la raison pour laquelle, depuis cette date, le tarif de prise en charge dans le cadre de la PCH correspond au tarif fixé par le conseil général pour les prestations fournies par les organismes et services habilités au titre de l'aide sociale. En cas de recours à un service d'aide à la personne, titulaire de l'agrément « qualité » prévu par le code du travail mais non habilité au titre de l'aide sociale, le tarif est alors fixé nationalement à 16,92 euros brut de l'heure.

Un problème subsiste toutefois pour la prise en charge des aides humaines recrutées de gré à gré : il est fixé à 11,02 euros brut de l'heure, ce qui correspond à un salaire net de seulement 8,54 euros, largement inférieur aux tarifs réellement pratiqués par les professionnels de l'aide à domicile, notamment en région parisienne et dans les grandes agglomérations. Votre commission ne peut que plaider pour qu'une revalorisation de ces tarifs intervienne au plus vite.

• Les restrictions apportées à la prise en charge des aides ménagères

De nombreuses associations déplorent le caractère restrictif des besoins d'aide humaine susceptibles d'être pris en charge dans le cadre de la PCH, qui ne permet pas de tenir compte de la variété des besoins révélés par les projets de vie. En effet, l'aide humaine ne peut être accordée que pour couvrir deux types de besoins :

- les besoins liés directement aux actes essentiels de la vie, comme la toilette, l'habillage, l'alimentation, l'élimination urinaire et fécale et les déplacements à l'intérieur du domicile ;

- les besoins de surveillance, c'est-à-dire de présence d'un tiers pour s'assurer que la personne handicapée ne se met pas en danger, volontairement ou non.

L'évaluation horaire de ces besoins est effectuée par l'équipe pluridisciplinaire sur la base du projet de vie de la personne. S'y ajoute un forfait pour l'accompagnement à la vie sociale, qui peut atteindre au plus trente heures par mois.

Ainsi, à la différence de l'Apa, la PCH ne permet notamment pas de couvrir les dépenses d'aide ménagère, puisque les actes réalisés dans ce cadre ne sont pas considérés comme des actes essentiels de la vie. Il s'agit à l'évidence d'une restriction excessive qui va l'encontre de l'esprit de la loi. Votre commission ne peut qu'appeler le Gouvernement à y mettre fin.

C'est d'ailleurs d'autant plus souhaitable que les règles applicables à la PCH et à l'Apa devront, dans un délai maximum de cinq ans, faire l'objet d'un rapprochement, dans la perspective de la suppression des barrières d'âge demandée par la loi.

• Les difficultés liées au contrôle de l'effectivité des aides

L'un des reproches les plus fréquemment adressé à la PCH réside dans la lourdeur du contrôle de l'effectivité des aides, notamment des aides humaines. Le problème est moins aigu pour les autres éléments de la PCH car ils sont en général payés sur facture.

S'agissant des aides humaines, la loi prévoit que « le service de la prestation de compensation peut être suspendu ou interrompu lorsqu'il est établi, au regard du plan personnalisé de compensation et dans des conditions fixées par décret, que son bénéficiaire n'a pas consacré cette prestation à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée. »

En pratique, de nombreux départements ont été tentés de remplacer le contrôle a posteriori de l'effectivité de l'aide par un contrôle a priori : ils demandaient aux personnes handicapées de faire l'avance des frais et les remboursaient ensuite sur présentation de justificatifs. Outre un contrôle extrêmement tatillon très difficile à vivre pour les personnes concernées, cette situation avait une seconde conséquence : l'impossibilité pour les personnes de planifier dans le temps la couverture de leurs besoins, dans la mesure où les sommes non dépensées un mois donné étaient définitivement perdues.

Votre commission a obtenu en loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qu'il soit mis fin à ces versements sur justificatifs contraires à l'esprit de la loi qui s'attache en effet à valoriser la responsabilité des personnes handicapées dans leur prise en charge. Pour améliorer la planification des besoins d'aide par les personnes elles-mêmes, la loi de financement a également autorisé un versement de l'élément « aide humaine » par tranches trimestrielles.

Plus largement, votre commission estime utile de développer les expériences déjà menées dans certains départements de versement des aides humaines sous la forme de chèque emploi service universel (Cesu) préfinancé. Cette méthode permet en effet de garantir l'affectation des sommes versées à la rémunération d'un salarié, y compris s'il est recruté par l'intermédiaire d'un service prestataire ou mandataire, sans obliger les départements à un contrôle de l'effectivité intrusif dans la vie des personnes.

• Les limites d'une prise en charge à domicile

Le référentiel initial pour l'accès à la prestation de compensation, publié le 19 décembre 2005, plafonnait à cinq heures par jour la durée d'intervention financée au titre de la prestation de compensation, sauf pour les personnes très lourdement handicapées - c'est-à-dire nécessitant à la fois une aide totale pour la plupart des actes essentiels et une présence requise pour des soins constants ou quasi constants - pour lesquelles ce plafond pouvait être porté à douze heures par jour.

Le même référentiel autorisait même la commission des droits et de l'autonomie à porter, dans des circonstances exceptionnelles, le temps d'aide au-delà de ce plafond de douze heures. Au total, le dispositif prévu était particulièrement complexe, puisqu'il supposait une démarche en deux temps : reconnaissance du besoin d'assistance constant pour fixer le plafond à douze heures, puis reconnaissance de circonstances exceptionnelles pour autoriser la commission à dépasser ce plafond. Il était également source de grandes injustices, dans la mesure où l'appréciation des « circonstances exceptionnelles » pouvait varier considérablement d'un département à l'autre.

C'est la raison pour laquelle, par un décret en date du 8 juin 2006 3 ( * ) , le Gouvernement a porté le plafond d'heures de l'élément « aide humaine » pouvant être attribuées aux personnes très lourdement handicapées à vingt-quatre heures par jour.

Votre commission ne peut que saluer cette initiative qui rend le dispositif réglementaire plus conforme à l'esprit de la loi du 11 février 2005. Elle s'interroge toutefois sur les limites d'une prise en charge à domicile pour des personnes si lourdement handicapées.

Dans un certain nombre de cas, les prises en charge nécessaires relèvent davantage de l'intervention sanitaire que médico-sociale, mais elles restent pourtant à la charge des départements. Pour ces situations, il conviendrait de réfléchir à une plus juste répartition du financement, à travers une participation accrue de l'assurance maladie : si ces personnes étaient accueillies en établissement, ce serait en maisons d'accueil spécialisé, qui sont précisément financées par l'assurance maladie. Cette participation accrue de l'assurance maladie pourrait notamment prendre la forme d'un développement des places d'hospitalisation à domicile (HAD) dévolues aux personnes handicapées.

* 2 Enquête CNSA (octobre 2006) sur le contenu des plans de compensation et sur les décisions de PCH. Vingt-cinq départements ont répondu à l'enquête, permettant d'étudier 1 436 plans personnalisés de compensation.

* 3 Décret n° 2006-669 du 8 juin 2006 modifiant l'annexe 2-5 du code de l'action sociale et des familles établissant le référentiel pour l'accès à la prestation de compensation.

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