C. DES MODALITÉS CLASSIQUES DE CONTRÔLE DE L'ACTION GOUVERNEMENTALE

L'Assemblée de la République doit veiller au respect de la Constitution et des lois, en contrôlant en particulier les actes du gouvernement portugais et de son administration.

1. L'engagement de la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement

Comme dans la plupart des régimes parlementaires, l'engagement de la responsabilité du gouvernement s'effectue par le biais de la question de confiance et de la motion de censure.

Une fois investi, le gouvernement doit présenter son programme à l'Assemblée de la République, qui l'examine au cours de trois séances plénières maximum. Durant cette discussion, tout groupe parlementaire peut demander le rejet dudit programme et le gouvernement un vote de confiance .

A tout moment, et sur une déclaration de politique générale ou toute affaire importante présentant un intérêt national, le gouvernement peut ensuite déclencher une procédure de question de confiance . Le rejet de la question de confiance requiert un vote à la majorité simple des députés présents.

Un groupe parlementaire, ou le quart des députés en fonctions, peut enfin déposer une motion de censure sur le programme du gouvernement ou toute affaire importante présentant un intérêt national. Cette motion ne peut être adoptée qu'à la majorité absolue des députés en exercice.

Tant l'adoption d'une motion de censure que le rejet d'une question de confiance aboutissent à la démission du Gouvernement.

2. Les importants travaux d'information des commissions

a) Les commissions d'enquête

L'Assemblée de la République peut constituer des commissions d'enquête sur « toute question d'un grand intérêt public » concernant le respect des lois et de la Constitution ou les actes du gouvernement et de l'administration.

Le parlement se prononce sur la demande de création de commission d'enquête dans les quinze jours suivant la publication de la proposition ou la distribution d'une copie aux groupes parlementaires. S'il accède à la demande, il fixe la date limite à laquelle la commission doit rendre son rapport, une prorogation pouvant toutefois être obtenue.

Depuis une loi récente, l'Assemblée de la République ne peut cependant s'opposer à la création d'une commission d'enquête dès lors qu'elle est demandée par plus d'un dixième des députés.

Les membres de la commission des affaires constitutionnelles rencontrés par vos rapporteurs ont indiqué qu'en pratique, très peu de commissions d'enquête avaient jusqu'à présent été instituées, à savoir seulement deux depuis les dernières élections législatives en 2005.

Les commissions d'enquête disposent des mêmes pouvoirs d'investigation que les autorités judiciaires.

b) Les différents outils à la disposition des commissions spécialisées

Les commissions spécialisées contrôlent l'action du gouvernement, en disposant de la possibilité de :

- procéder à des études ;

- solliciter des informations ou des avis ;

- demander à entendre tout citoyen et convoquer tout agent de l'administration, tout dirigeant ou employé des services de l'État gérés conformément aux règles de droit privé ;

- réaliser des auditions parlementaires ;

- engager des spécialistes pour les assister dans leurs travaux ;

- effectuer des missions d'informations ou d'étude.

c) Le contrôle de l'application des lois

L'application des lois votées par le Parlement est contrôlée par la Conférence des commissions spécialisées. Chaque loi fait ainsi l'objet d'un rapport, six mois après son adoption, sur sa mise en oeuvre et l'entrée en vigueur des normes permettant son application.

3. Le contrôle de l'action gouvernementale en séance publique : les questions, les interpellations et les débats

a) Les questions

Outre les questions écrites, appelées « requêtes » 86 ( * ) , les députés peuvent tout d'abord poser des questions orales au gouvernement, dans le cadre de séances plénières tenues tous les quinze jours.

La répartition des questions est effectuée par la Conférence des représentants des groupes parlementaires en fonction de la représentation de chaque groupe. Le gouvernement répond sans délai aux questions.

Il existe également des séances de questions d'actualité , au cours desquelles les députés posent leurs questions pendant trois minutes maximum, le gouvernement disposant du même temps pour y répondre. Tout député bénéficie ensuite, s'il le souhaite et avec priorité pour l'auteur de la question, de deux minutes pour demander, sans délai, des éclaircissements supplémentaires sur la réponse qui lui a été fournie.

b) Les interpellations

Durant chaque session parlementaire, tout groupe parlementaire peut demander l'ouverture de deux débats, appelés interpellations, sur des matières de politique générale ou de politique sectorielle.

La séance d'interpellation débute par l'intervention d'un député membre du groupe parlementaire auteur de l'interpellation, suivie de celle d'un membre du Gouvernement.

c) Les débats

Tout d'abord, le Premier ministre doit se présenter la première semaine de chaque mois devant l'assemblée plénière pour répondre aux questions des députés. Il s'agit du « débat en présence du Premier ministre ».

Le Premier ministre prononce un discours de 12 minutes maximum, qui ouvre le débat et est suivi d'une phase de questions comportant trois tours.

Lors du premier tour, tous les groupes parlementaires peuvent poser leur question. Au cours du second tour, seuls les quatre plus grands groupes peuvent intervenir. Puis, ce ne sont plus que les deux groupes parlementaires à l'effectif le plus important qui peuvent interroger le Premier ministre, le groupe de l'opposition étant prioritaire. Les députés disposent de 5 minutes, pour la première question, puis de 3 minutes pour les autres, le Premier ministre y répondant sans délai.

Ensuite, le Gouvernement peut à tout moment proposer l'organisation d'un débat sur une « affaire d'importance nationale » .

Enfin, des débats sur la politique générale peuvent se tenir, à une date convenue entre le gouvernement et le Président de l'assemblée, au cours des dix dernières séances de la session législative. Ils sont ouverts par un discours du gouvernement portant sur l'état de la Nation et donnent ensuite lieu à des questions des parlementaires.

L'avenir de ces procédures est actuellement très discuté dans le cadre de la réforme du parlement, la plupart des députés rencontrés par vos rapporteurs manifestant la nécessité d'en limiter la durée et de les rendre plus vivants et interactifs.

M. António José Seguro, député socialiste chargé d'élaborer un projet de réforme pour son groupe parlementaire, a indiqué que celui-ci devrait par exemple proposer de diminuer le temps consacré au débat en présence du Premier ministre -actuellement de 3 heures 10 à 4 heures en moyenne-, en le réduisant à un seul tour de questions/réponses, tout en octroyant un temps de parole à chaque groupe parlementaire qui en disposerait librement.

4. L'examen des pétitions de citoyens

Les citoyens portugais disposent d'un droit de pétition leur permettant de présenter « des demandes ou des suggestions écrites relatives à la défense de [...] droits, de la Constitution, de la loi ou de l'intérêt général » 87 ( * ) .

Droit universel et gratuit consacré par la Constitution et la loi n° 43/90 du 10 août 1990, le droit de pétition s'exerce par une demande écrite, dûment identifiée -l'adresse de l'un des signataires doit être mentionnée-, adressée au Président de l'Assemblée de la République.

La pétition est ensuite examinée par la commission spécialisée concernée ou par une commission ad hoc , qui élabore un rapport dans un délai de 60 jours prorogeable. Ce rapport peut proposer les mesures jugées utiles pour répondre à la demande des pétitionnaires.

Toute pétition signée par plus de 4.000 citoyens est obligatoirement publiée au journal officiel et examinée en séance plénière.

L'examen d'une pétition par l'Assemblée peut aboutir :

- à sa transmission au ministre compétent pour une éventuelle mesure législative ou administrative ;

- à sa transmission au procureur général de la République, à la police judiciaire ou au médiateur de la République ;

- à l'ouverture d'une enquête parlementaire ;

- au dépôt d'une proposition de loi.

* 86 D'après le règlement de l'Assemblée de la République, il est répondu « en temps utile » à ces questions écrites. Au cours des mois de janvier, avril et juillet, les requêtes restées sans réponse plus de trois mois sont de nouveau publiées.

* 87 Article 52 de la Constitution.

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