B. RÉSUMÉ DU PRÉSENT RAPPORT D'INFORMATION

Deux points sont, tout particulièrement, à souligner, pour votre rapporteur spécial.

1. L'excédent du compte d'avances est un phénomène normal, qui devrait s'interrompre à court terme, et ne correspond à aucune perte pour les collectivités territoriales

La première question est celle de l'excédent du compte d'avances , de l'ordre de 500 millions d'euros par an. Cet excédent peut donner, à tort, l'impression que l'Etat « gagne de l'argent aux dépens des collectivités territoriales », d'autant plus qu'il est généralement mal expliqué.

En réalité, l'excédent du compte d'avances n'a, en lui même, guère de signification. En effet, le compte d'avances n'est pas financé uniquement par les impôts recouvrés par l'administration fiscale, mais aussi par le programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », qui correspond aux dégrèvements législatifs (une dizaine de milliards d'euros par an), aux dégrèvements techniques (environ 2 milliards d'euros par an) et aux admissions en non valeur (environ 500 millions d'euros par an), c'est-à-dire à des situations où l'Etat se substitue au contribuable local.

L'entité pertinente n'est donc pas le compte d'avances stricto sensu , mais l'entité constituée par le compte d'avances et les dégrèvements techniques et admissions en non valeur du programme 201 5 ( * ) . Cette entité est déficitaire d'environ 2 milliards d'euros par an. Il n'y a donc aucune ambiguïté sur le fait que l'excédent du compte d'avances, ainsi élargi aux admissions en non valeur et aux dégrèvements ordinaires, ne se traduit par aucun bénéfice net pour l'Etat.

Cependant, il reste à expliquer un double phénomène :

- pourquoi le compte est-il chaque année en excédent depuis 1996 ?

- pourquoi le gouvernement prévoit-il, chaque année ou presque, que ce phénomène va prendre fin à très court terme ?

a) Un excédent qui provient du recouvrement en grande partie « fictif » d'un stock de créances anciennes, qui devrait prendre fin à court terme

L'excédent permanent du compte depuis 1996 est paradoxal. En effet, si d'un côté le compte verse aux collectivités territoriales l'intégralité de leur produit voté, et de l'autre perçoit les impôts, les impôts non recouvrés étant par ailleurs compensés par les dégrèvements et les admissions en non valeur, il n'a pas de raison structurelle d'être déséquilibré sur une longue période.

Ce paradoxe s'explique par le fait que le compte d'avances recouvre progressivement un stock de « vieilles créances », concernant des exercices anciens (antérieurs à l'exercice n-1), qui correspondent chaque année à des recettes de l'ordre de 2 milliards d'euros. Selon les indications fournies à votre rapporteur spécial, les plus récentes de ces créances seraient recouvrées en quasi-totalité auprès du contribuable, mais chaque année l'administration fiscale renonce à percevoir environ 500 millions d'euros de créances, sur des exercices globalement plus anciens. Ces 500 millions d'euros constituent des admissions en non valeur (ANV), qui sont compensées au compte d'avances, par le programme 201 précité.

L'Etat ne fait donc aucun bénéfice :

- les 500 millions d'euros d'admissions en non valeur sont des pertes pour le budget général de l'Etat ;

- le 1,5 milliard d'euros restant correspond en partie également à des pertes (sous forme de dégrèvements ordinaires) et, surtout, à des sommes qu'il aurait dû percevoir antérieurement.

Cet excédent devrait par ailleurs disparaître à court terme. En effet, le stock de « vieilles créances » se réduit d'environ 500 millions d'euros par an. Cette diminution provient d'un double phénomène :

- d'une part, le stock de « vieilles créances » n'est plus alimenté, les créances étant aujourd'hui recouvrées en quasi-totalité au bout de quelques années ;

- d'autre part, les admissions en non valeur réduisent ce stock d'environ 500 millions d'euros par an, ce qui concerne les créances les plus anciennes.

Dans ces conditions, l'excédent du compte semble devoir disparaître à court terme. En effet, le stock de « vieilles créances » était de seulement 2,5 milliards d'euros en 2005. En fonction des hypothèses retenues, il semble que le compte devrait renouer avec les déficits entre 2008 et 2010.

b) Un excédent habituellement sous-estimé par le gouvernement, du fait d'une sous-évaluation des taux de recouvrement des exercices anciens

Il reste donc à se demander : pourquoi le gouvernement sous-estime-t-il, chaque année ou presque, l'excédent du compte d'avances ?

Ce phénomène ne peut provenir d'une surestimation des dépenses. En effet, les dépenses du compte sont en général sous-estimées. Par ailleurs, même si les dépenses étaient surestimées, cela n'aurait pas d'impact significatif sur le solde du compte. En effet, si le gouvernement sous-estimait les dépenses du compte, il sous-estimerait aussi les recettes au titre de l'exercice en cours.

L'erreur de prévision du gouvernement provient en pratique d'une sous-estimation récurrente des taux de recouvrement pour les exercices anciens. L'excédent du compte depuis 1996, et la sous-estimation habituelle de ce phénomène par le gouvernement, ont donc une origine commune.

2. Si on prend en compte l'ensemble de ses relations de trésorerie avec les collectivités territoriales, l'Etat « gagne » 1 milliard d'euros par an

La véritable question est celle du solde global des relations de trésorerie de l'Etat et des collectivités territoriales. En effet, ces relations correspondent à un bénéfice net, pour l'Etat, de l'ordre de 1 milliard d'euros par an. Ce bénéfice net s'explique de la façon suivante :

- certes, l'excédent du compte d'avances, de l'ordre de 500 millions d'euros par an en moyenne, est plus que compensé par le montant des admissions en non valeur et des dégrèvements ordinaires, de sorte qu'une fois corrigé de ces montants, il est déficitaire de plus de 2 milliards d'euros en moyenne depuis 2000, ce à quoi s'ajoute le coût pour l'Etat de l'effet profil, de quelques centaines de millions d'euros par an ;

- cependant, en sens inverse, les prélèvements de l'Etat pour frais d'assiette et de recouvrement et pour dégrèvement et non valeur, de l'ordre de respectivement 2,5 milliards d'euros et 2 milliards d'euros en moyenne 6 ( * ) , permettent à l'Etat, alors que le coût réel de ces opérations est de seulement 1 milliard d'euros en moyenne, de faire à ce sujet un bénéfice net de l'ordre de 3,5 milliards d'euros.

Votre rapporteur spécial estime que ce phénomène devra être pris en considération, lors de la prochaine redéfinition des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales.

* 5 Les dégrèvements législatifs, correspondant à une politique fiscale qui n'est pas décidée par les collectivités territoriales, relèvent d'une problématique distincte.

* 6 La part des impôts locaux prélevée par l'Etat est de 3,6 % pour les dégrèvements et admissions en non-valeur, et de 4,4 % pour les frais d'assiette et de recouvrement.

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