4. A nouvel objectif, nouveau baccalauréat : la création du baccalauréat professionnel et la volonté d'amener 80 % d'une génération au niveau du baccalauréat

L'époque est en effet à la spécialisation la plus fine possible des filières et chacune des séries se subdivise en d'infinies variantes. Le baccalauréat entre ainsi dans une phase d'éclatement, caractérisée par la multiplication des séries et des options.

Ce processus atteint son terme avec la création du baccalauréat professionnel. Dès juillet 1984, le Gouvernement de M. Laurent Fabius fait de la formation professionnelle le ressort de la modernisation du pays. Quant au ministre de l'éducation nationale d'alors, M. Jean-Pierre Chevènement, il prend conscience lors d'un voyage au Japon de l'élévation générale du niveau de qualification qui se profile. L'organisation du travail est en effet en train d'évoluer et il faut, pour répondre à ces transformations, faire évoluer de manière très significative le système de formation.

Un mot d'ordre est alors lancé : « 80 % d'une génération au niveau du baccalauréat », l'ambiguïté de la formule tenant moins à la distinction entre l'accession à la terminale et l'obtention du baccalauréat qu'au souci de ne pas préjuger de la forme que prendra le diplôme professionnel qui viendra sanctionner des études professionnelles vouées à s'allonger.

Longtemps, une incertitude demeure en effet : le nouveau diplôme de niveau IV sera-t-il un baccalauréat au même titre que les autres ou aura-t-il une dénomination et un contenu singulier ? Jusqu'au dernier moment, nul ne le sait et les collaborateurs du secrétaire d'Etat à l'enseignement technique d'alors, M. Roland Carraz, ont depuis eu l'occasion de raconter l'attente fébrile qui fut la leur. Aussi, lorsque le Premier ministre annonce, lors d'un entretien télévisé, la création d'un baccalauréat professionnel, l'ensemble du cabinet peut enfin éprouver une immense satisfaction.

Pourtant, bien qu'il ait été d'emblée lié à la création du baccalauréat professionnel et donc au développement massif de l'enseignement qui y correspond, l'objectif de conduire 80 % d'une génération au baccalauréat n'a pas été entendu par l'opinion publique comme une invitation à poursuivre des études professionnelles, mais bien comme l'espoir d'une accession au baccalauréat général pour tous les jeunes.

La loi d'orientation n° 89-486 du 10 juillet 1989 en tire toutes les conséquences en consacrant cet objectif en son article 3 : « La Nation se fixe comme objectif de conduire d'ici dix ans l'ensemble d'une classe d'âge au minimum au niveau du certificat d'aptitude professionnelle ou du brevet d'études professionnelles et 80 % au niveau du baccalauréat. »

En effet, dans les 10 années qui suivent la première évocation de cet objectif, les effectifs des lycées connaissent une croissance aussi forte que subite. Mais cette augmentation concerne l'ensemble du secondaire et se traduit par un afflux d'élèves dans toutes les séries.

En 1985, il y a en effet 376 435 candidats au baccalauréat, dont 251 217 dans les filières générales et 125 218 dans les filières techniques. En 1995, ils sont 639 007, dont 372 619 dans les séries générales, 177 268 dans les séries technologiques et 89 120 dans les séries professionnelles.

Le nouvel objectif consacré par le Gouvernement trouve donc un indéniable écho dans l'opinion et dans la communauté éducative. Il déborde toutefois largement la filière professionnelle et conduit à une brusque augmentation du nombre de lycéens et de bacheliers : le secondaire tel que nous le connaissons est alors véritablement né.

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