5. La réforme des filières de 1993

Il ne prend toutefois le visage qui nous est familier qu'en 1993. Les différentes filières du baccalauréat général et technologique sont en effet alors profondément revues, dans un double objectif :

- limiter la croissance des filières scientifiques qui tendent à devenir très largement prédominantes parmi les baccalauréats généraux ;

- moderniser les différentes filières générales et technologiques qui ne répondent plus nécessairement aux différents besoins économiques et sociaux.

Le baccalauréat général s'ordonne donc désormais autour de trois séries : littéraire (L), économique et sociale (ES) et scientifique (S). La traditionnelle dichotomie séparant les disciplines littéraires et les matières scientifiques se trouve ainsi surmontée et pour la première fois, les sciences économiques et sociales se voient reconnaître une place éminente.

Source : Christine Vergnolle-Mainar, maître de conférences en géographie, François Grèzes-Rueff, maître de conférences en histoire, IUFM Midi-Pyrénées, communication précitée.

Le baccalauréat technologique est quant à lui restructuré autour de quatre séries : sciences médico-sociales (SMS), sciences et technologies industrielles (STI), sciences et technologies du laboratoire (STL) et sciences et technologies tertiaires (STT). 9 ( * )

Pour les deux baccalauréats, la tendance est au retour à une certaine généralité : les options et les spécialités demeurent, mais elles viennent s'ajouter à un ensemble d'épreuves obligatoires particulièrement fourni au sein de chaque série. Un nombre significatif de disciplines se retrouve ainsi dans chaque série, mais selon un arrangement qui lui est propre et qui lui donne une orientation bien particulière. De la même manière, la différenciation des sujets dans une même matière selon les séries permet de donner aux épreuves un tour spécifique dans chaque filière.

C'est le constat fait par Mme Christine Vergnolle-Mainar et M. François Grèzes-Rueff lorsqu'ils comparent la structure des différents baccalauréats à cinquante années d'intervalle. « Cinquante ans après, en 2005, le baccalauréat actuel... semble relever de la même structure : on retrouve les mêmes disciplines au coeur de la culture générale, mais une seconde langue a pris la place de la physique-chimie. Et le même anneau de matières de spécialisation vient compléter les disciplines obligatoires.

Pourtant, derrière ces similitudes, les logiques sont différentes. Il y a d'abord un nombre croissant de disciplines (et encore avons-nous, pour rendre les évolutions facilement intelligibles, exclu les baccalauréats techniques et professionnels), une dispersion beaucoup plus grande des coefficients, que traduit la place relativement moins importante des matières obligatoires. Ensuite, ces multiples matières sont à présent beaucoup moins éloignées des matières principales : l'EPS a gagné un statut de discipline obligatoire à part entière ; les autres représentent des spécialités, intégrées à une filière, et non seulement des options.

Surtout, les contenus insistent plus sur des exercices techniques, qui font moins appel à la mémorisation qu'à la mise en oeuvre de méthodes : les évolutions du français et de la philosophie vers l'argumentation plutôt que l'histoire littéraire ou l'histoire des idées, de l'histoire et de la géographie vers l'exercice de synthèse en sont les principaux signes. Enfin, des matières « transversales » apparaissent, « enseignement scientifique », « lettres », « technique », sans compter les travaux personnels encadrés (TPE).

La signification de ces évolutions correspond au passage d'une vision cumulative et encyclopédique des savoirs à la juxtaposition de champs culturels, beaucoup moins hiérarchisés, qui tendent à définir la culture générale validée par le baccalauréat comme la rencontre, autour de valeurs cardinales (la rationalité, la citoyenneté, l'ouverture au monde, le patrimoine, la créativité, le développement durable etc.) qui mettent à contribution les méthodes de plusieurs disciplines. La logique du baccalauréat, comme celle des programmes de l'enseignement secondaire, reste disciplinaire ; mais la question se pose moins en termes de « territoire » disciplinaire, de périmètre de savoirs monopolisé par une discipline bien protégée par ses frontières, qu'en termes de complémentarité autour de méthodes et d'objets de connaissances. La tentative des TPE en est une des illustrations. » 10 ( * )

LES TRAVAUX PERSONNELS ENCADRÉS : UNE INTRODUCTION DIFFICILE

1999-2000 : Expérimentation des TPE en classe de première (quelques classes par série dans chaque académie) et publication d'un « protocole » de cadrage pour l'expérimentation

2000-2001 : Généralisation des TPE en classe de première (janvier 2001)

2001-2002 : Introduction des TPE en classe terminale à titre facultatif (épreuve facultative au baccalauréat selon des modalités provisoires d'évaluation)

2002-2003 : Généralisation des TPE en classe terminale, qui restent une épreuve facultative, mais mieux valorisée (coefficient 2)

2005-2006 : Les TPE sont supprimés en classe terminale. Ils restent obligatoires en classe de première et sont évalués au baccalauréat sous forme d'épreuve obligatoire anticipée à partir de 2006. Elle est dotée d'un coefficient 2 portant sur les points supérieurs à la moyenne.

Source : Ministère de l'éducation nationale (EduSCOL)

L'introduction des travaux personnels encadrés en 1999-2000 est en effet l'illustration des tentatives de créer un nouveau type d'épreuves, qui évaluerait :

- des qualités qui jusqu'ici n'étaient pas sanctionnées par le baccalauréat, comme la capacité des candidats à mener à bien en équipe un travail de recherche et de réflexion ;

- la capacité des élèves à articuler les connaissances et les méthodes tirées de plusieurs disciplines afin de traiter des sujets qui leur sont communs.

En ce sens, les TPE ont constitué une innovation importante, dont de nombreux interlocuteurs du groupe de travail se sont réjoui, tout en regrettant qu'ils aient disparu en terminale : faute de s'être entraînés auparavant, les élèves présentent en effet des projets de qualité très inégale. Quant aux enseignants, tous ne s'investissent pas nécessairement avec le même enthousiasme dans le suivi et l'évaluation des TPE. Au total, votre groupe de travail a donc eu le sentiment que cette nouvelle épreuve était une invention heureuse, mais encore inaboutie parce que restant marginale.

* 9 Les filières technologiques font actuellement l'objet d'une profonde rénovation, destinée à mettre mieux en rapport les programmes d'enseignement et les besoins des secteurs professionnels auxquelles elles préparent. La section STT est ainsi devenue depuis 2007 le baccalauréat sciences et technologies de la gestion (STG), la section SMS correspond désormais au baccalauréat sciences et technologies de la santé et du social (ST2S), qui sera délivré pour la première fois en 2009. Par ailleurs, une rénovation des filières STI et STL est à l'étude depuis plusieurs années.

* 10 Christine Vergnolle-Mainar, maître de conférences en géographie, François Grèzes-Rueff, maître de conférences en histoire, IUFM Midi-Pyrénées, communication précitée.

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