C. LES CONFORMISMES ET LES PESANTEURS D'UN SYSTÈME D'ORIENTATION INADAPTÉ PROCÉDANT PAR DÉFAUT PLUS QUE PAR PROJET

Les graves lacunes du système d'orientation scolaire ont été critiquées par de nombreux rapports, tant administratifs que parlementaires.

Il y a quelques années déjà, une mission d'information sénatoriale avait été diligentée sur l'information et l'orientation des étudiants des premiers cycles universitaires. Dans son rapport intitulé « S'orienter pour mieux réussir 28 ( * ) » , celle-ci avait procédé à un certain nombre de constats alarmants :

- le recours trop fréquent à une orientation par défaut ;

- une mauvaise information des étudiants, tant sur le contenu des études vers lesquelles ils s'orientent que sur leurs débouchés potentiels, provoquant des « orientations erratiques commandées par des phénomènes de mode » .

Ces constats demeurent malheureusement d'actualité comme en témoignent les auditions réalisées par la délégation, le problème spécifique de l'orientation des jeunes filles agissant souvent comme un révélateur des faiblesses générales du système.

L'un des aspects les plus fréquemment critiqués du système d'orientation est sa tendance à orienter les élèves en fonction de leur seul niveau scolaire, sans prendre en compte les préférences des élèves pour chercher à élaborer un projet professionnel.

1. Les résultats scolaires : un critère trop exclusif

Cette tendance du système français à n'évaluer les élèves que sur les seules notes enregistrées dans les matières scolaires semble davantage conçue pour sélectionner les éléments qui présentent un profil de bons élèves que pour orienter dans les meilleures conditions la grande masse des jeunes. Elle ne prend pas suffisamment en compte d'autres critères liés à leur personnalité, leur caractère, et leurs projets qui sont pourtant des éléments essentiels dans les choix d'orientation d'une vie.

De ce point de vue, le système éducatif français paraît trop « scolaire » et gagnerait à s'inspirer d'autres modèles qui font preuve d'un plus grand esprit d'ouverture.

À titre d'exemple, une mission d'information de la commission des affaires culturelles 29 ( * ) qui s'était rendue aux États-Unis pour étudier le système américain d'enseignement supérieur, formulait un certain nombre d'observations qui méritent une réflexion :

« La sélection prend en compte une pluralité de critères . La dimension scolaire est certes prise en compte, mais elle ne constitue qu'une composante parmi d'autres. Ce sont davantage les capacités et le potentiel de développement du candidat que l'on s'efforce d'évaluer, plutôt que des connaissances effectives. D'autres paramètres sont également pris en compte : les talents sportifs, l'aptitude au « leadership » et la capacité d'engagement personnel dans des activités associatives ou sociales, ce que nos interlocuteurs désignent parfois sous le terme de « compassion » . L'appartenance à une minorité sous-représentée ou une provenance sociale plus modeste peuvent aussi constituer un atout pour un candidat, dans la mesure où sa capacité à parvenir à un niveau « intéressant », malgré un handicap de départ, témoigne d'un mérite, d'une énergie et de prédispositions supérieures à celles d'un candidat issu des couches plus favorisées.

« Une insistance particulière sur les qualités de caractère revient souvent, dans ces universités d'élite, comme dans d'autres moins prestigieuses. Les établissements déclarent rechercher des étudiants « capables de surmonter l'adversité » , et de ne pas se laisser abattre par les échecs auxquels tout le monde est confronté un jour ou l'autre. »

Sans chercher à reproduire un système éducatif américain qui présente aussi des inconvénients et dont la conception et l'organisation sont aux antipodes du nôtre, il conviendrait cependant, particulièrement en matière d'orientation, de prendre conscience du caractère réducteur d'une prise en compte trop exclusive du carnet scolaire et d'insister, au contraire, sur la nécessité d'aider l'élève à élaborer un projet personnel, conforme à ses inclinations, à sa personnalité et à ses capacités, prises dans leur ensemble.

* 28 « S'orienter pour mieux réussir » , rapport n° 81 (1996-1997), fait par MM. Adrien Gouteyron, Jean Bernadaux, Jean-Pierre Camoin, au nom de la mission d'information sur l'information et l'orientation des étudiants des premiers cycles universitaires.

* 29 « Regards sur l'enseignement supérieur et l'action culturelle des États-Unis » , rapport n° 239 (2006-2007)

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