2. Un double réseau qui suscite parfois des interrogations

Il n'existe pas d'équivalent, pour d'autres pays que la France, de structures associatives créés par des ressortissants étrangers pour promouvoir la langue et la culture d'un autre pays. L' Alliance française , créée en 1883, émane de la société civile. Elle repose sur un réseau de 1.071 associations à l'étranger, de droit local, autonomes, de taille très variable, dont 600 ne reçoivent aucune aide de l'Etat. Sans qu'elle ait de liens juridiques avec elles, la fondation de l'Alliance française 15 ( * ) , nouvellement créée, reconnue d'utilité publique depuis le 26 juillet 2007, vise à animer le réseau international des alliances françaises. Les rapports de l'Alliance française avec le ministère des affaires étrangères et européennes font l'objet d'un contrat d'objectifs et de moyens.

Les centres culturels et les instituts sont eux des établissements à autonomie financière de l'Etat : ils ne disposent pas de la personnalité morale, mais bénéficient d'une autonomie de gestion. Les effectifs des recrutés locaux ne figurent pas au sein des effectifs de l'Etat, mais juridiquement, ces agents sont employés par l'Etat.

Les alliances françaises conventionnées remplissent les mêmes missions que les instituts et centres culturels. La coexistence de deux réseaux culturels à l'étranger, issue de l'histoire, peut susciter parfois des interrogations.

Le réseau culturel français à l'étranger ne dispose pas aujourd'hui d'un label unique , au risque de ne pas bénéficier d'une visibilité suffisante, du moins aux yeux d'observateurs français. La création des « EspaceFrance » réunissant les services de coopération et d'action culturelle (SCAC) et les centres culturels ne permet pas de créer un label unique, puisque les alliances françaises n'y sont pas associées. Or, le label « EspaceFrance » ne bénéficie pas de la même notoriété que celui de l'Alliance française, qui constitue un symbole majeur du rayonnement culturel de la France.

Votre rapporteur spécial s'est interrogé pour savoir s'il ne convenait pas de réunir l'ensemble du réseau culturel sous le label de « l'Alliance française » . La faisabilité d'une telle réunion est apparue, après examen, improbable. L'Alliance française ne paraît pas disposée à proposer son label aux centres culturels, qui constituent plus une administration culturelle qu'une association animée par la société civile. Par ailleurs, les structures juridiques des alliances françaises et des centres culturels, tout comme les statuts des personnels, diffèrent très sensiblement. Ces différences compliquent un rapprochement éventuel. Néanmoins, des transformations de centres culturels en alliances françaises ont déjà eu lieu par le passé, et devraient encore avoir lieu à l'avenir. Pour le ministère des affaires étrangères et européennes, cette évolution pose des difficultés, car elle consiste à transmettre la responsabilité opérationnelle de l'action culturelle à l'étranger des centres culturels, qui constituent des « filiales » des ambassades, à des associations autonomes, animées par la société civile des pays étrangers.

Du point de vue du rayonnement culturel cependant, et sous réserve de faisabilité technique, cette évolution peut être souhaitable. Les Alliances françaises, parce qu'elles sont justement imergées au sein de la société civile, paraissent particulièrement adaptées à une programmation culturelle « hors les murs », à la recherche de mécénat, et au développement de partenariats culturels, au-delà de leur propre action linguistique. Elles peuvent tirer le meilleur parti du dynamisme de la société locale.

Cette évolution présenterait, en outre, l'avantage de réduire les coûts de fonctionnement de l'action culturelle à l'étranger. Les coûts salariaux des centres culturels, indexés sur ceux des ambassades, sont plus élevés que ceux des alliances françaises, contraintes à un strict autofinancement.

Sur place, dans les pays étrangers, l'existence d'un double réseau se fait rarement sentir, car alliances françaises et centres culturels ont développé des complémentarités géographiques. Votre rapporteur spécial n'en a pas moins relevé 16 doublons entre alliances françaises et centres culturels, dont le champ d'action se recoupe intégralement ou partiellement . Ce nombre pourrait être réduit. Ainsi, dans un certain nombre de cas, l'alliance française est en concurrence avec le centre culturel. Ceci ne semble pas souhaitable pour optimiser le rayonnement culturel français dans les villes concernées. Pour résoudre ces doublons, certes en diminution depuis plusieurs années, le ministère des affaires étrangères et européennes a parfois cessé toute aide financière à l'alliance française. Cette politique a ses limites, car elle ne permet pas de savoir quel organisme, centre culturel ou alliance française, constitue le meilleur opérateur culturel dans la ville concernée.

Votre rapporteur spécial invite donc le ministère des affaires étrangères et européennes à réduire encore ces doublons. A Madagascar, Tananarive accueille une alliance française dont le dynamisme est notoirement supérieur à celui du centre culturel : une fusion des deux institutions y parait donc possible.

Les 16 « doublons » entre l'Alliance française et les centres culturels

Brésil, Rio de Janeiro

Maison de France : médiathèque, théatre ;

Alliance française

Inde, New Delhi

CEDUST : centre de ressources, réseau de médiathèques, promotion des études supérieures ;

Alliance française

Afrique du Sud, Johannesburg

Institut français d'Afrique du Sud : coopération culturelle et scientifique ;

Alliance française

Chine, Pékin

Centre de coopération culturelle et linguistique : programmation culturelle ;

Alliance française : cours (dans le même bâtiment)

République démocratique du Congo, Kinshasa

Centre culturel français ;

Alliance française : cours, médiathèque

Corée, Séoul

Institut français (action culturelle et cours à 150 élèves des écoles secondaires) ;

Alliance française

Croatie, Zagreb

Institut français : action culturelle et médiathèque ;

Alliance française (sur le même site)

Djibouti

Centre culturel français : programmation culturelle ;

Alliance française : cours et programmation culturelle

Espagne, Madrid

Institut français : activité culturelle et cours ;

Alliance française

Etats-Unis, Washington

Maison de France, logée au sein de l'ambassade : programmation culturelle ;

Alliance française

Madagascar, Tananarive

Centre culturel : programmation culturelle ;

Alliance française : cours et programmation culturelle

Maurice, Port Louis

Centre culturel : programmation culturelle ;

Alliance française : cours et politique culturelle

Mauritanie, Nouakchott

Centre culturel : programmation culturelle ;

Alliance française

Mexique, Mexico

Centre culturel et de coopération - institut français d'Amérique latine : cours et programmation culturelle ;

Alliance française

Portugal, Lisbonne

Institut français : programmation culturelle ;

Alliance française : cours (dans le même bâtiment)

Royaume-Uni, Londres

Institut français : programmation culturelle et cours ;

Alliance française : cours

Source : ministère des affaires étrangères et européennes

* 15 A l'initiative de votre rapporteur spécial, le Parlement a adopté un amendement en loi de finances initiale pour 2007 permettant à l'Etat de doter cette fondation à hauteur de 2 millions d'euros.

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