2. La nécessité de conjurer un risque systémique pesant sur l'ensemble de la protection sociale

A l'occasion de leur audition par la mission, de nombreux experts 176 ( * ) ont considéré que le problème du financement du cinquième risque ne saurait être envisagé indépendamment des perspectives globales de financement de l'ensemble du système social, dont le redressement n'est pas encore acquis. La mission du Sénat partage totalement ce point de vue. De fait, le poids des prestations sociales dans le Pib place la France au deuxième rang des pays de l'OCDE après la Suède.

Comparaison du niveau des dépenses de protection sociale
dans l'Union européenne en 2005

En % du Pib

Ce poids s'est même encore accru de près de trois points au cours des quinze dernières années.

Poids des prestations sociales dans le Pib

En points de Pib

1990

2006

Santé

9,1 %

10,3 %

Vieillesse - Survie

11,2 %

13,1 %

Maternité - Famille

2,9 %

2,7 %

Emploi

2,3 %

2,0 %

Logement

0,8 %

0,8 %

Pauvreté - Exclusion sociale

0,2 %

0,5 %

Prestations totales

26,5 %

29,4 %

Source : Drees, comptes de la protection sociale - Année 2006

Il serait particulièrement utile de disposer d'une évaluation prospective à long terme de l'évolution de l'ensemble des dépenses sociales. Les informations à ce sujet existent. Mais elles demeurent encore rares et dispersées, le conseil d'orientation des retraites (Cor) et le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (Hcaam) s'intéressant exclusivement à leur propre domaine de compétence. Une synthèse intéressante a néanmoins été réalisée dans le cadre du premier rapport du conseil d'orientation des finances publiques par son rapporteur Gilles Carrez. Cette première approche mériterait toutefois d'être régulièrement actualisée.


• Les estimations prospectives du Cor sur les retraites

Selon les estimations réalisées dans le cadre du troisième rapport du Cor 177 ( * ) , les dépenses de retraite devraient s'accroître de l'équivalent de trois points de la richesse nationale en passant de 12,8 % du Pib aujourd'hui à près de 14 % en 2020, puis 16 % en 2050.

Sur la base d'hypothèses démographiques différentes (indice de fécondité plus élevé, espérance de vie légèrement plus courte, doublement du solde migratoire) conjuguées à une augmentation à un rythme particulièrement soutenu du taux d'emploi des seniors, l'actualisation de ces données publiée en novembre 2007 178 ( * ) table sur une croissance, par rapport au niveau actuel des pensions, limitée à environ deux points. Les dépenses de retraite pourraient ainsi culminer à 14,9 % du Pib en 2040 avant de revenir à 14,7 % en 2050. Il s'agit toutefois d'un scénario que l'on peut raisonnablement qualifier d'optimiste, notamment en raison du taux prévisionnel d'évolution de la productivité. 179 ( * )


• Les estimations du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie

Dans son rapport publié en juillet 2007, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie estime qu'en « fourchette basse, la progression « au fil de l'eau » porterait la consommation de soins et de biens médicaux à l'horizon 2025 à près de 10 % du Pib (contre 8,8 % actuellement). Le taux serait d'environ 11 % [en] haut de fourchette. » 180 ( * )


• L'évaluation prospective de l'OCDE sur la santé et la dépendance

L'OCDE a mené à bien, en 2006, des travaux comparables à ceux du Cor et du Hcaam à l'horizon 2050. Deux scénarios ont été envisagés. Pour la France, l'impact du vieillissement de la population à cette échéance a ainsi été évalué à une augmentation comprise :

- entre 1,7 point et 3,5 points de Pib pour les dépenses de santé ;

- entre 1 point et 1,7 point de Pib pour les dépenses liées aux retraites et à la dépendance.


• Le premier rapport du Conseil d'orientation des finances publiques

Le premier rapport du Conseil d'orientation des finances publiques, rédigé par Gilles Carrez et publié en février 2007, est consacré exclusivement à la question de l'impact à long terme du vieillissement de la population . Ce document souligne la nécessité de tirer toutes les conséquences de ce phénomène en matière de gestion publique. Après avoir relevé que la plupart des travaux réalisés en France ainsi que par les instituts européens évaluent à terme les besoins sociaux supplémentaires induits par l'évolution démographique de notre pays à l'équivalent de trois à quatre points de richesse nationale, il estime qu'il s'agit plutôt d'un minimum.

« Dans le pire des scénarios, c'est même un surcoût supplémentaire de plus de sept points [de Pib] qui pourrait être constaté. De telles projections sont évidemment entourées d'une part d'incertitude importante, liées à la démographie, l'environnement macroéconomique et aux comportements. Mais au final, elles font consensus sur un point : le vieillissement de la population va engendrer des dépenses supplémentaires importantes, et il ne faut pas compter sur la diminution du chômage, ou la baisse des dépenses d'éducation, pour en absorber le coût. Par conséquent, ces projections montrent la nécessité d'agir au plus vite pour assurer la soutenabilité de nos finances publiques. » 181 ( * )

* 176 En particulier, Raoul Briet (audition du 6 février 2008), Philippe Josse (audition du 23 janvier 2008) et Henri Lamotte (audition du 30 janvier 2008).

* 177 Troisième rapport du conseil d'orientation des retraites - Retraites : perspectives 2020 et 2050 - mars 2006.

* 178 Cinquième rapport du conseil d'orientation des retraites - novembre 2007.

* 179 Le Cor a retenu une hypothèse de taux de progression de la productivité moyenne de 1,7 % par an jusqu'en 2013 et de 1,8 % entre 2014 et 2050, soit nettement plus que la moyenne récente de l'économie française (1,1 % par an).

* 180 Rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie - juillet 2007 - pages 95 et suivantes.

* 181 Premier rapport du Conseil d'orientation des finances publiques - février 2007 - page 9.

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