4. Une priorité : consolider la gouvernance territoriale des enseignements artistiques dans un souci de concertation

a) Redéfinir clairement le rôle de l'Etat

Bien entendu, votre rapporteur ne peut pas ne pas évoquer ce que M. Jean-Marie Pontier 14 ( * ) qualifie de « l'irritante et délicate question du rôle de l'Etat » ...

(1) Le ministère de la culture et de la communication doit mieux assumer ses missions de pilotage et d'accompagnement

Ainsi qu'il a été dit précédemment, l'Etat conserve certaines attributions dans le cadre de la loi de 2004.

Compte tenu du constat établi, et indépendamment du volet financier de la réforme, votre rapporteur insiste pour que le ministère de la culture et de la communication assume mieux les missions qui restent de sa responsabilité :

- il doit fixer le cap, c'est-à-dire les objectifs de la politique nationale dans ce domaine ;

- il lui appartient, dans le respect de l'autonomie des collectivités territoriales, de garantir la cohérence, dans la durée, des règles qui en résultent et de leur interprétation, pour les établissements d'enseignement artistique et, par conséquent, pour les collectivités publiques qui en assument largement la charge ;

- il a pour mission d'aider, de conseiller et d'accompagner ces établissements et ces collectivités à élaborer et mettre en oeuvre localement les politiques en la matière ;

- il doit évaluer les activités et le fonctionnement pédagogiques des établissements ;

- il doit assumer ses missions dans le domaine de l'enseignement supérieur.

(2) Les différents ministères concernés doivent mieux coopérer

La politique de sensibilisation et d'enseignement culturel doit se conceptualiser et se décliner dans sa dimension interministérielle.

Sachant qu'elle concerne majoritairement les jeunes , le ministère en charge de l'enseignement scolaire a un rôle essentiel à jouer.

Il doit veiller à être un facilitateur d'initiatives. C'est ainsi notamment que la mission très précieuse des « dumistes » 15 ( * ) devrait être valorisée auprès des directeurs d'écoles maternelles et primaires ainsi que de leurs équipes pédagogiques.

En effet, ces intervenants extérieurs , agents des collectivités territoriales et notamment des communes ou communautés de communes , jouent un rôle essentiel de relais entre les écoles de musique et les écoles maternelles ou élémentaires . Ce dispositif a été mis en place en 1984 dans le cadre d'un accord entre les ministères de l'éducation nationale et de la culture. Il permet à plus de deux millions d'enfants, chaque année, de bénéficier d'un éveil à la musique, à la pratique instrumentale ou au chant, dans le cadre de projets divers, élaborés en étroite concertation avec les professeurs des écoles.

Certains interlocuteurs se sont inquiétés, compte tenu à la fois de la lourdeur du programme du CEPI et de l'âge moyen des élèves concernés - tout du moins dans le domaine musical -, de la capacité de ces derniers à mener de front formation artistique et enseignement scolaire .

En effet, dans le questionnaire que votre rapporteur leur a adressé, les élèves inscrits cette année en CEPI au conservatoire de Lille ont été nombreux à souligner leurs difficultés à concilier formation musicale et cursus scolaire, la plupart d'entre eux étant par ailleurs lycéens. Certains ont souhaité pouvoir adapter de façon plus souple leur scolarité générale.

C'est pourquoi une meilleure compatibilité entre ces deux engagements doit certes être recherchée par les établissements d'enseignement artistique, grâce par exemple à l'organisation de stages de fins de semaine ou pendant les vacances scolaires.

Au-delà, votre rapporteur n'exclut pas que cette question doive être réexaminée, notamment par le biais du développement des classes à horaires aménagés dans les établissements scolaires.

b) Vers une région « chef de file », dans le cadre de commissions de coordination régionale

Votre rapporteur retire de ses auditions et déplacements que, compte tenu de la diversité des territoires, on ne peut avancer de conclusions définitives quant au débat sur l'échelon territorial le plus pertinent en matière d'éducation artistique.

Néanmoins, un consensus s'est dégagé sur la nécessité de voir la région jouer un rôle de « chef de file », sous certaines conditions.

La notion de chef de file ne recouvre pas l'idée d'une hiérarchie entre les collectivités territoriales ni de tutelle des unes envers les autres.

Pour votre rapporteur, il est évident que cette coordination assurée par l'échelon régional doit s'exercer dans le respect de la libre organisation et de l'autonomie de chaque collectivité publique.

Il importe donc de rechercher comment donner toute leur place aux démarches partenariales entre les divers niveaux de collectivités, y compris pour l'enseignement supérieur.

A cette fin, le dialogue pourrait se développer au travers d'une commission de coordination régionale , avec la présence active d'élus et pas seulement de professionnels.

Votre rapporteur insiste pour que les souhaits des élus des communes et de leurs groupements soient pleinement pris en compte dans ce cadre. En effet, au sein du « millefeuilles administratif », ils sont les premiers concernés. Parallèlement, une coordination au niveau tant départemental que régional s'impose, la mise en place des CEPI ne pouvant être indépendante des schémas arrêtés en amont.

La région Rhône-Alpes est à la pointe pour ce qui concerne la concertation entre collectivités locales et elle a engagé un certain nombre d'actions structurantes dans ce cadre. Elle vient aussi d'initier la création d'une commission régionale des enseignements artistiques, dont elle assurerait le secrétariat technique.

Une commission a été créée dans le Nord-Pas-de-Calais mais votre rapporteur s'étonne que seuls les directeurs d'établissement en soient membres et non les élus. Elle estime que la participation active des élus à une telle commission faciliterait les arbitrages - qui ne peuvent tous relever de la seule responsabilité des professionnels, quel que soit leur talent - ainsi que la cohérence et la complémentarité des politiques qu'ils conduisent.

* 14 Cf. l'article de M. Jean-Marie Pontier, professeur à l'université Aix-Marseille III, dans la Revue française de droit administratif (RFDA) (2005) sur la décentralisation culturelle et la loi du 13 août 2004.

* 15 Les musiciens intervenants sont titulaire du Diplôme universitaire de musicien intervenant (DUMI), d'où la dénomination de « dumistes »...

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