B. UNE PROPENSION À CONSOMMER DES PRODUITS IMPORTÉS PLUS FORTE À LA MARGE

En matière de politique publique, la connaissance des propensions moyennes à importer, même différenciées selon le revenu, ne constitue pas une aide à la décision pleinement satisfaisante. En effet, les conséquences sur la consommation et sur le niveau des importations d'un supplément (ou d'une amputation) de revenu peuvent être différentes de ce que suggère la propension moyenne à consommer et à importer.

En effet, si telle catégorie de ménage a une propension moyenne à importer s'élevant à N % de sa consommation, rien ne permet d'affirmer qu'une augmentation (ou une diminution) de son revenu se traduira par une augmentation (ou une diminution) proportionnelle de ses importations.

D'une part, les ménages ont tendance à épargner proportionnellement davantage en cas d'augmentation du revenu, ou à désépargner en cas de baisse de ce revenu. Cet effet est cependant très variable selon la conjoncture économique et les anticipations des acteurs.

D'autre part, il se peut que l'aubaine d'un supplément de revenu (ou l'infortune de son amputation) se traduise par l'achat (ou la privation) préférentiel(le) d'un certain type de bien, par exemple culturel ou technologique, dont le contenu en importations est susceptible de s'éloigner sensiblement du contenu moyen général de N %.

C'est souvent le raisonnement à la marge (supplément ou diminution du revenu et de la consommation) qui doit ainsi prévaloir. Dès lors, la question de la propension marginale à importer des ménages selon leur revenu apparaît centrale, même si elle est difficile à analyser.

L'enquête budget des ménages a permis d'établir, outre la part de dépense de consommation de l'ensemble des ménages pour les 10 groupes de biens précités, la dépense marginale au titre de chacun de ces groupes de biens, c'est-à-dire, dans l'hypothèse d'un accroissement de revenu, la part du revenu supplémentaire consacrée à leur acquisition.

Il ressort que la dépense marginale est plus marquée pour les biens d'équipement du foyer, les équipements électriques et électroniques (10,4 % de la dépense de consommation marginale contre 7,3 % de la dépense de consommation moyenne) ainsi que pour l'automobile , la construction navale et les biens d'équipement mécaniques (11,7 % de la dépense de consommation marginale contre 7,7 % de la dépense de consommation moyenne).

La situation s'inverse notablement pour les produits agricoles et alimentaires (11 % de la dépense de consommation marginale contre 17,6 % de la dépense de consommation moyenne), les combustibles et carburants (3 % de la dépense de consommation marginale contre 5,2 % de la dépense de consommation moyenne) ainsi que l'eau, le gaz et l'électricité (2 % de la dépense de consommation marginale contre 4 % de la dépense de consommation moyenne).

En croisant ces données avec celles des taux de pénétration des importations se rapportant à chacun des dix groupes de biens, on obtient, pour la dépense moyenne , un taux moyen de pénétration des importations de 14,5 % (cf. supra ) et, pour la dépense marginale , un taux de 16,4 % .

Autrement dit, pour 100 euros de consommation finale, 14,5 euros sont importés tandis que pour 100 euros de consommation supplémentaire , 16,4 euros sont alors consacrés aux importations .

Mais cette conclusion ne signifie pas que, pour 100 euros de revenu supplémentaire, le montant moyen des importations dépasse forcément celui constaté pour 100 euros de consommation finale, car la propension marginale à consommer a tendance à diminuer avec le revenu 31 ( * ) .

Par ailleurs, la connaissance du contenu marginal en importation par décile de revenu de la consommation des ménages, non calculé à ce jour , supposerait une enquête approfondie auprès des ménages. Faute de disposer de cette information, on peut présumer que les écarts constatés entre déciles de revenu pour le contenu moyen en importation de la consommation des ménages, tendent à se retrouver pour le contenu marginal. Mais on peut aussi imaginer que ces écarts diffèrent sensiblement.

Il serait utile d'explorer cette question située au confluent d'importants enjeux de politique économique.

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* 31 Règle connue sous la dénomination de « loi psychologique fondamentale », énoncée par Keynes : « (...) en moyenne, et la plupart du temps, les hommes tendent à accroître leur consommation à mesure que leur revenu croît mais non d'une quantité aussi grande que l'accroissement du revenu ».

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