2. Les systèmes de dotations en capital pour les jeunes

L'idée d'attribuer une dotation en capital à chaque jeune, dans l'objectif de promouvoir l'égalité des chances, a été évoquée devant votre mission d'information par M. Luc Ferry.

A la demande du Gouvernement, le Centre d'analyse stratégique a examiné plusieurs exemples étrangers de dotations en capital pour les jeunes et proposé différentes modalités d'application possibles en France 73 ( * ) .

D'un point de vue philosophique, les dotations en capital s'inscrivent dans la filiation de la théorie de la justice sociale de John Rawls (1971). Elles favorisent l'égalité des chances, tout en rendant chaque citoyen partie-prenante de la société.

D'un point de vue économique, les dotations en capital sont, par l'épargne qu'elles génèrent, une réponse au phénomène de rationnement du crédit. Elles participent à un modèle de société qui serait fondé non pas sur l'endettement mais sur la constitution d'un patrimoine , jugée plus responsabilisante et plus formatrice pour l'individu. Dans certains pays, la volonté d'encourager l'épargne s'accompagne d'un objectif de soutien à la natalité (Singapour).

Le « Child Trust Fund » (CTF), instauré au Royaume-Uni en 2005, pour les enfants nés à compter de septembre 2002, accorde à chaque nouveau-né un bon de 250 livres, soit 357 euros. Le double est accordé aux enfants de familles dont les revenus sont inférieurs à 14 200 livres par an. Une autre dotation, dont les barèmes sont équivalents, est versée à l'âge de 7 ans. Les sommes versées sur le compte par les familles, et les intérêts perçus, sont défiscalisés dans la limite de 1 200 livres par an, en sorte que le dispositif est plus favorable aux ménages issus des classes moyennes et supérieures, susceptibles d'abonder le livret, qu'aux familles les plus pauvres. D'après les simulations du gouvernement britannique, qui n'intègrent pas la dotation versée à l'âge de 7 ans, décidée ultérieurement, un jeune pourrait ainsi disposer à 18 ans d'une somme allant de 1 000 à 15 000 livres, selon les efforts d'épargne réalisés.

D'autres dispositifs de ce type existent en Hongrie , à Singapour , en Corée du sud et au Canada . Les mécanismes institués sont divers :

- Les dispositifs sont soit universels (Hongrie), soit progressifs (Royaume-Uni), soit réservés aux familles les plus en difficulté (Corée du sud).

- La dotation est soit employée librement (Royaume-Uni), soit affectée obligatoirement :


• à des dépenses de soins ou d'éducation (Singapour) ;


• à des dépenses d'enseignement supérieur ou, à défaut, à l'épargne-retraite (Canada) ;


• à des dépenses d'éducation, de logement ou de création d'entreprise (Corée du sud).

Sur la base de ces exemples, le Conseil d'analyse stratégique a élaboré plusieurs scénarios possibles pour la France : une option serait par exemple d'attribuer à chaque enfant « pauvre » une dotation annuelle de 500 euros, ce qui lui permettrait de bénéficier de 23 000 euros à 18 ans . La constitution progressive d'un tel capital reposerait non pas sur le gel de ressources publiques mais sur l'attribution de points, qui ne seraient convertis sous une forme monétaire qu'à la majorité. Le coût nécessaire à la mise en place d'un tel système est estimé à 2 milliards d'euros par an, à financer par redéploiement des ressources consacrées aux bourses, aux fonds d'aide aux jeunes, à certaines prestations familiales et aides au logement, au quotient familial etc.

Une autre piste examinée est celle de l'attribution d'une dotation universelle , avec participation ou non des familles à l'abondement, grâce à un système de bonification de l'épargne à destination des enfants . Enfin, une autre possibilité consiste en l'attribution de « droits de tirage » formation , s'inspirant davantage de dispositifs mis en place en Europe du Nord (Danemark et Suède notamment).

* 73 Les dotations en capital pour les jeunes, rapport du Centre d'analyse stratégique, n° 9 (2007)

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