3. Les propositions de la mission

La mission estime que les nombreux dispositifs d'aides aux jeunes, mis en place et réformés au fil des années, sont trop épars , et globalement insuffisants pour faire face à l'ensemble des dépenses engagées au cours de cette période de transition et d'investissement qu'est la jeunesse. Or l'autonomie des jeunes doit être accrue, non pas dans une logique d'assistanat, mais dans l'objectif de garantir l'accès de tous à une formation puis à un emploi. Dans cette perspective, améliorer les revenus des jeunes est l'une des réponses possibles, mais pas la seule, pour améliorer leur accès au logement, leur mobilité, la prise en charge de leurs dépenses quotidiennes, afin qu'ils puissent se consacrer à préparer leur avenir.

Dans ce contexte, votre mission a étudié plusieurs possibilités, s'agissant notamment de l'extension du RSA aux 18-24 ans :

- En premier lieu, concernant une éventuelle extension du RSA à l'ensemble des 18-24 ans , il convient de souligner que le coût de cette mesure est très difficile à évaluer, en raison de l'incertitude existant sur ses effets : les comportements des jeunes vis-à-vis des études et de l'emploi risquent de s'en trouver profondément modifiés, de façon difficilement prévisible à ce stade ;

- En second lieu, dans la mesure où il est difficile d'expliquer que les jeunes actifs âgés de moins de 25 ans, disposant d'un logement autonome et déclarant leurs revenus séparément, ne puissent être éligibles au RSA « chapeau » qui vise les « travailleurs pauvres », votre mission a étudié la possibilité d'étendre aux 18-24 ans ce seul dispositif de complément des revenus d'activité .

D'après les informations fournies à votre rapporteur par le Haut commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté, le coût de l'extension du seul RSA « chapeau » à l'ensemble des jeunes serait d 'environ 1 milliard d'euros . Dans cette hypothèse, le montant alloué à un jeune serait égal au montant total du RSA, amputé du montant du RSA « socle ».

Cette solution ne paraît toutefois pas totalement satisfaisante :

- d'une part, son efficacité est incertaine , car elle conduirait à verser de faibles sommes à un grand nombre de jeunes ;

- d'autre part, cette mesure risquerait de paraître inéquitable : elle engendrerait de fortes différenciations dans les situations, en fonction de l'âge (plus ou moins de 24 ans) et du montant de revenu (inférieur ou supérieur au montant de l'actuel RMI). Un autre système consisterait à n'attribuer le RSA qu'aux personnes éligibles au seul « chapeau », c'est-à-dire travaillant un nombre significatif d'heures (par exemple à mi-temps). Ce dispositif comporterait toutefois des effets de seuil et se heurterait aussi, pour cette raison, à des considérations d'équité.

Votre mission souhaite toutefois n'écarter aucune piste pour l'avenir. Deux modèles ont notamment retenu son attention :

- le modèle des pays d'Europe du Nord, où existent des droits de tirage pour le financement des périodes de formation, financés par une combinaison de bourses et de prêts ;

- l'idée de dotations en capital pour les jeunes, évoquée notamment par M. Luc Ferry.

Étant donné le coût de telles mesures, et la nécessité d'expérimentations préalables, votre mission estime, dans l'immédiat, préférable de concentrer les efforts de façon ciblée, en tenant compte des besoins concrets des jeunes, afin de faciliter leur insertion . Les aides attribuées en fonction des difficultés particulières des uns et des autres devraient être renforcées, car elles demeurent aujourd'hui ponctuelles. Un suivi individualisé de chaque jeune en difficulté est nécessaire, afin d'identifier la nature de l'aide à lui apporter : aide au logement, aide à la mobilité, financement d'une formation spécifique etc. Des dispositifs tels que le Fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ), ou encore l'allocation CIVIS répondent à cette problématique, mais leurs montants sont pour l'heure insuffisants.

LES PROPOSITIONS DE LA MISSION EN VUE DE FAVORISER L'AUTONOMIE DES JEUNES

A TERME VOTRE MISSION PROPOSE :

- d'envisager la refonte de l'ensemble des dispositifs d'aides directes (aux jeunes) et indirectes (aux familles) , afin de garantir à tous un droit d'accéder à une formation en vue d'un emploi, selon deux modalités possibles :


Soit en garantissant ce droit par un système de droits de tirage (reportables dans le temps), pour financer la transition vers la vie professionnelle. Ces droits de tirage seraient composés d'une part de bourses (du type « allocation de formation ») et, d'autre part, d'avances remboursables à taux réduits ;


• Soit en mettant en place un système de dotations en capital attribuées dès la naissance, et utilisables pour des besoins de formation ou pour la création d'une entreprise.

DANS L'IMMÉDIAT LA MISSION PROPOSE :

- Fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes : abonder ce fonds à hauteur d'environ 50 millions d'euros afin de pouvoir accorder des aides ciblées en accompagnement d'un suivi individualisé de chaque jeune en difficulté.

- Bourses :


Attribuer les bourses pendant dix mois , plutôt que neuf, afin d'apporter une aide aux étudiants dès septembre, pour faire face aux dépenses liées à la rentrée universitaire, et jusqu'en juin ;


Mettre en place des aides spécifiques afin d'inciter les jeunes à effectuer des formations dans les secteurs en tension.

- Prêt étudiant et apprenti garanti par l'État :


• Ouvrir le prêt étudiant garanti par l'État aux apprentis 74 ( * ) ;


Transformer ce prêt en une avance remboursable garantie à 100 % par l'État, afin de permettre à tous les jeunes étudiants et apprentis d'y accéder, à taux très réduits (taux zéro pendant la durée des études puis indexé sur l'inflation ensuite), avec un remboursement différé à l'obtention d'un emploi stable et conditionnel aux revenus .

- Mobilité :


Développer les programmes d'échanges européens et les bourses , sur les modèles d'Erasmus et Leonardo da Vinci 75 ( * ) , mais plus spécifiquement en direction des jeunes non étudiants (apprentis, jeunes éloignés du marché du travail) ;


• Développer les programmes d'échanges avec des pays en voie de développement, notamment dans le cadre de chantiers d'insertion ;


Faciliter l'accès au permis de conduire, dans l'esprit des mesures annoncées par le Gouvernement en janvier dernier, en :

- levant l'obstacle de la caution pour l'accès au permis à 1 euro par jour ;

- réduisant les délais d'accès aux examens, en priorité pour les candidats ayant une promesse d'embauche pour un emploi nécessitant d'être titulaire du permis ;

- facilitant l'accès aux écoles de conduite associatives pour les publics qui ont besoin d'un accompagnement personnalisé.

* 74 Rappelons qu'il est proposé, par ailleurs, d'aligner le statut des apprentis sur celui des étudiants (p. 73).

* 75 Ce programme finance des stages de formation transnationaux en entreprise ou dans des écoles professionnelles.

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