2. Une tentative embryonnaire de se doter d'outils de pilotage

a) L'absence de dispositif de pilotage des baux pris par l'Etat

Le contrôle mené par votre rapporteure spéciale a été l'occasion de vérifier que l'information centralisée nécessaire au suivi et au pilotage des baux pris par l'Etat, dans une très large mesure, reste à élaborer .

Il est significatif qu'il ait fallu plusieurs semaines au service central de France Domaine, en 2008, pour constituer l'information demandée par le rapporteur spécial, notre ancien collègue Paul Girod, quant aux locations de bureaux supportées par l'Etat en Ile-de-France : aucun tableau n'existait en la matière, les services déconcentrés de France Domaine se bornant, apparemment, à archiver les baux conclus par l'Etat. D'ailleurs, les états fournis, comparés aux constats effectués lors des contrôles sur pièces et sur place, se sont révélés grevés d'erreurs ou d'approximations ; c'est encore vrai, dans une certaine mesure, pour l'actualisation demandée à France Domaine en vue du présent rapport. Votre rapporteure spéciale a pu rectifier les documents qui lui ont été transmis dans la mesure où ses contrôles sur pièces et sur place le lui ont permis.

Cette situation témoigne du caractère « artisanal », anachronique, du système d'information relatif à « l'Etat locataire » . Encore le terme de « système », ici, s'avère-t-il excessif, puisqu'il n'a manifestement été procédé à la constitution d'une base de données qu'en vue de répondre, ponctuellement, à la requête parlementaire.

En outre, malgré une demande en ce sens auprès de France Domaine, il n'a été possible d'obtenir ni une actualisation pour l'Ile-de-France (seule la capitale a pu bénéficier de cette mise à jour), ni une comparaison de la situation observée avec celle d'autres grandes agglomérations nationales. Cette information n'existe pas, les services déconcentrés de France Domaine n'ont pas eu la capacité ou n'ont pas pris le temps de l'élaborer, ou le service central s'est abstenu de leur en passer la « commande ». A fortiori , comme il a été signalé plus haut, on ignore actuellement le coût global que représentent les loyers supportés par l'Etat, pour des immeubles de bureaux, sur l'ensemble du territoire .

Dans de telles conditions, le suivi des baux souscrits par l'Etat se trouve donc laissé à la diligence ou, éventuellement, à la négligence de chaque ministère , voire de chaque administration . Cette situation ne peut qu'être la source de dysfonctionnements, comme l'ont mis au jour, d'une façon regrettable, les circonstances du renouvellement, fin 2007, du bail du pôle financier du TGI de Paris, installé rue des Italiens dans le IX e arrondissement de Paris 10 ( * ) . Il convient de rappeler que, suivant les éléments constatés par le Conseil de l'immobilier de l'Etat, le ministère de la justice ne s'était préoccupé du devenir de cette implantation qu'en mars 2007, bien que le délai de neuf mois restant alors avant l'expiration du bail ne puisse suffire pour trouver une nouvelle localisation et faire réaliser les aménagements nécessaires au fonctionnement du pôle financier. Or, par rapport aux conditions antérieures de la location, le nouveau bail a représenté une augmentation de près d'un tiers du loyer, soit plus d'un million d'euros 11 ( * ) .

b) La mise en place d'une ébauche de « tableau de bord » de l'Etat locataire

Un modeste début de réforme a été enclenché par France Domaine, d'ailleurs à l'évidence sous « l'aiguillon » du contrôle de votre rapporteure spéciale. En effet, au printemps 2009, des directives ont été adressées aux services déconcentrés par le service central, imposant pour l'avenir la tenue de tableaux similaires à ceux qui ont été établis pour les besoins du présent contrôle. Désormais, dans chaque département, les baux pris par l'Etat devraient être recensés et, au terme du processus, on devrait disposer d'une information synthétique sur les conditions essentielles de ces baux (le montant du loyer, les règles de son indexation, les dates d'échéance, etc.).

Du reste, il semble à votre rapporteure spéciale que les préfets pourraient utilement relayer ces directives, afin d'activer leur mise en oeuvre et, partant, la constitution de cet embryon de « tableau de bord » de l'Etat locataire.

Au terme du processus, il reviendra au service France Domaine d'exploiter ce nouvel outil au sein d'un système d'information ad hoc . Tel est le préalable de toute gestion efficiente du parc locatif de l'Etat. On peut en effet estimer que son absence se trouve à l'origine d'un certain nombre des situations les plus coûteuses constatées, en la matière, par le contrôle.

* 10 Ce sujet a donné lieu, le 9 avril 2008, à l'audition par votre commission des finances de MM. Laurent Le Mesle, procureur général près la cour d'appel de Paris, Léonard Bernard de la Gatinais, directeur des services judiciaires, Rémy Heitz, directeur de l'administration générale de l'équipement, Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du Conseil de l'immobilier de l'Etat, et Daniel Dubost, chef du service France Domaine. Le compte-rendu de cette audition est reproduit à la fin du présent rapport.

* 11 Sur le coût actuel de ce bail, cf. infra , B.

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