TRAVAUX DE LA COMMISSION

AUDITION DE M. PHILIPPE SÉGUIN, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES

Réunie le mercredi 24 juin 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'audition de M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, préalable au débat d'orientation des finances publiques pour 2010 .

M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes , a indiqué que, face à une crise sans précédent, les mesures de relance ne sont pas à remettre en cause dans leur principe, dès lors qu'elles demeurent circonscrites et provisoires. Le risque existe néanmoins d'un relâchement de l'effort de maîtrise de la dépense. Ainsi, la dégradation des comptes publics constatée en 2008 a concerné quasiment toutes les administrations et ne résulte pas seulement des effets de la crise. En recettes, les baisses enregistrées l'an dernier traduisent principalement des tendances de fond, et sont notamment la conséquence de décisions de baisses d'impôts prises au cours des années précédentes. Ces décisions ont diminué les ressources publiques de 10 milliards d'euros, dont 6,5 milliards sont imputables à la loi pour le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat et 2,9 milliards aux dégrèvements de taxe professionnelle.

La dégradation s'explique également par l'insuffisante maîtrise des dépenses. Bien que la croissance récente de l'ensemble des dépenses publiques se soit établie à un niveau inférieur à la tendance observée sur la période 1998-2007, les objectifs affichés nécessitent des efforts d'une toute autre ampleur que ceux réalisés jusqu'à présent. A ce jour, seule la Suède a un taux de dépenses publiques plus fort que la France, mais son solde budgétaire était, au moins jusqu'à une date récente, très nettement excédentaire. Le déficit structurel français est estimé aux alentours des 3,5 % du produit intérieur brut (PIB), soit l'intégralité du déficit constaté fin 2008, ce qui démontre que le problème des finances publiques ne trouvait pas, à cette époque, son origine dans la conjoncture.

Au sens du traité de Maastricht, la dette publique brute a progressé de 10 %, passant de 1 209 milliards d'euros fin 2007, soit 63,8 % du PIB, à 1.327 milliards d'euros fin 2008, soit 68,1 % du PIB. La moitié de l'augmentation constatée est imputable au déficit et un cinquième résulte des emprunts contractés pour le financement des banques. Il convient en effet de rappeler que la Société de financement de l'économie française (SFEF) et la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE) ont été classées par l'INSEE et Eurostat parmi les administrations publiques, ce qui a pour effet d'inclure dans la dette maastrichtienne les emprunts qu'elles contractent. Le niveau potentiel de la dette brute apparaît encore supérieur si l'on y inclut la moitié des 28 milliards d'euros de dettes de Réseau ferré de France ne pouvant être remboursée que par l'Etat, et si l'on tient compte des billets de trésorerie émis par l'ACOSS, pour un montant de 10 milliards d'euros fin 2008, qui ont minoré temporairement la dette brute consolidée des administrations publiques.

Le prix de cette dette s'affiche dans les intérêts substantiels que la France doit payer, soit plus de 54 milliards d'euros en 2008, ce qui représente 2,8 % du PIB. La croissance de notre endettement s'accompagnera d'une augmentation de la prime de risque qui y est associée et, par conséquent, de la charge d'intérêts. En conséquence, et bien que l'écart de financement avec l'Allemagne ait récemment diminué, la crédibilité de la signature de la France est désormais attentivement observée par les marchés. Enfin, redevenu positif en 2006, le solde primaire des administrations publiques s'est de nouveau dégradé en 2007 et 2008 pour atteindre - 0,6 % du PIB. Les administrations publiques doivent donc emprunter pour payer non seulement les intérêts de la dette, mais aussi une partie des dépenses courantes hors intérêt.

Sur le fondement de ces constatations, M. Philippe Séguin a fait observer que la France est entrée avec des finances publiques dégradées dans une crise dont l'impact s'annonçait extrêmement violent. Selon la Cour, si une récession de 3 % se confirme, le déficit devrait s'élever à la fin de l'année à au moins 7 % de la richesse nationale et la dette publique dépasser 75 % du PIB, ou 80 % en comptabilisant les emprunts de la SFEF. Le doublement du déficit s'explique par l'impact du plan de relance, mais surtout par la baisse spontanée des rentrées d'impôts et de cotisations sociales et, plus secondairement, par l'augmentation spontanée de certaines dépenses, notamment celles d'assurance chômage. Bien que le déficit français s'annonce moins important que celui du Royaume Uni ou des Etats-Unis, il dépassera celui de l'Allemagne, dont le plan de relance est pourtant plus important mais le déficit structurel plus faible.

Aucune catégorie d'administration publique n'échappera à la dégradation. L'Etat devrait ainsi voir son déficit doubler et passer de 56,3 milliards d'euros en 2008 à plus de 120 milliards en 2009, ce qui représente plus de la moitié de ses recettes nettes.

Le déficit du régime général de la sécurité sociale devrait doubler et dépasser les 20 milliards d'euros, ce qui n'ira pas sans poser, dès l'automne, un problème de dépassement du plafond d'avances à l'ACOSS. Si le relèvement du plafond est envisageable, il implique que la Caisse des dépôts soit en mesure d'apporter un montant supplémentaire de ressources. Or celle-ci estime que, dans les conditions actuelles du marché monétaire, de tels montants se traduiront par des pertes, raison pour laquelle elle a dénoncé la convention censée courir jusqu'en 2010. Une autre solution, de facilité, consisterait à faire reprendre ces déficits par l'Etat. La Cour estime toutefois que la maîtrise de la dette de la sécurité sociale implique qu'elle demeure isolée, et non « noyée dans l'océan des déficits » de l'Etat. A l'instar des régimes complémentaires de retraite et du Fonds de solidarité vieillesse, l'assurance chômage devrait enfin, après deux ans d'excédents, renouer avec les déficits, estimés par l'UNEDIC à 1,3 milliard d'euros fin 2009.

S'agissant des administrations publiques locales, 2009 connaîtra probablement une importante baisse des droits de mutation. Toutefois, à l'exception de la taxe professionnelle, les bases des principaux impôts directs locaux sont protégées des effets immédiats de la crise. Par ailleurs, nombre de collectivités ayant majoré leurs taux, le ralentissement du produit des impôts locaux devrait être limité en 2009. Les dotations de l'Etat devraient connaître, dans le même temps, une augmentation sensible et les dépenses risquent de continuer à croitre à un rythme soutenu, compte tenu de l'alourdissement des prestations sociales en lien avec la crise.

Pour l'ensemble des finances publiques, M. Philippe Séguin a fait valoir que les perspectives à l'horizon de 2012 ne sont guère meilleures. Même en retenant des prévisions de croissance proches de celles du Gouvernement et une progression des dépenses en ligne avec la tendance (soit 2,2 % en 2011 et 2012), le déficit serait encore supérieur à 6 % et la dette approcherait les 90 % du PIB en 2012. Dans ces conditions, les objectifs fixés pour 2012 en termes de finances publiques ne pourront être approchés qu'au prix d'un effort supplémentaire considérable. S'il convient de saluer le principe d'une loi de programmation des finances publiques et l'adoption d'un budget triennal de l'Etat, plusieurs éléments intervenus depuis le vote de la loi de programmation 2009-2012 brouillent la lisibilité de la stratégie affichée par le Gouvernement et pourraient remettre en cause sa crédibilité. Le respect des orientations fixées dans ce cadre supposerait, par exemple, que la baisse du taux de TVA sur la restauration et la réforme de la taxe professionnelle soient compensées par une augmentation d'impôts ou une suppression d'avantages fiscaux de même ampleur.

De même, et sauf à se résigner à augmenter les prélèvements obligatoires, la perspective d'une réduction sensible du déficit et de la dette à l'horizon 2012 n'est pas réaliste sans un effort drastique de réduction des dépenses. La France s'approche d'une « zone dangereuse » et parsemée de risques. Le premier est économique : la dégradation des finances publiques pourrait, en effet, nourrir l'inquiétude des agents économiques. L'anticipation, par ces derniers, de hausses d'impôts et de cotisations sociales pourrait les conduire à différer consommation et investissement et à plonger l'économie nationale dans un cercle vicieux retardant la sortie de crise. Un deuxième risque réside dans l'appauvrissement d'un Etat qui consacre davantage sa dépense au fonctionnement et aux interventions qu'à la préparation de l'avenir. L'emballement de la dette constitue un troisième risque, dans la mesure où, dans un contexte de déficit structurel et d'endettement très élevés, une faible aggravation du déficit liée, par exemple, aux dépenses de vieillissement, pourrait provoquer un accroissement exponentiel de la dette. Certains scénarios font ainsi état d'un niveau de dette proche de 100 % du PIB en 2018 et 200 % avant 2040. A titre de comparaison, la dette de la France était de 118 % du PIB au sortir de la Première Guerre mondiale et de 170 % en 1945. Sur la base d'un taux d'intérêt à 4 %, la charge d'intérêt pourrait atteindre 8 % du PIB, soit davantage que le produit de la TVA. Le quatrième risque concerne enfin la crédibilité de la signature de la France. Les charges d'intérêt ne pouvant pas mobiliser une part indéfiniment croissante des ressources, les créanciers de l'Etat pourraient refuser tout nouveau prêt et un ajustement brutal de nos finances publiques serait alors nécessaire.

Craignant que le fait de répéter que les caisses sont vides n'accrédite l'idée qu'elles sont inépuisables, M. Philippe Séguin a jugé que la dérive des finances publiques aurait des conséquences concrètes sur la vie quotidienne des Français, qui se verraient contraints de « payer plus pour rembourser plus », cependant que l'Etat serait amené à remettre en cause radicalement une grande partie des interventions et des politiques publiques. Le retour dans des délais relativement brefs à une croissance dynamique étant peu crédible, deux voies d'amélioration demeurent envisageables : la réduction des dépenses et l'augmentation des recettes, notamment par la réduction des niches sociales et fiscales. Si le défi peut paraître considérable, l'ampleur de l'effort à accomplir n'est pas exceptionnelle au regard des ajustements menés dans les autres pays de l'OCDE ou de mesures de redressement prises par la France au cours de son histoire.

La limitation des dépenses de 2008 à 2012, telle que prévue par le Gouvernement, ne peut contribuer à ce redressement que pour environ un point de PIB, soit 20 milliards d'euros. A cet égard, les économies annoncées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques sont estimées par le Gouvernement à 6 milliards d'euros, ce qui démontre la nécessité de réformes beaucoup plus ambitieuses.

La dérive des prestations sociales appelle également une poursuite des réformes. La dégradation rapide des comptes de l'assurance vieillesse justifie de nouvelles négociations sur les retraites, y compris sur les avantages familiaux. Dans le domaine de la santé, une révision du cadre des négociations conventionnelles avec les professions de santé, une réflexion sur certaines prestations et la poursuite de la réorganisation du système hospitalier sont nécessaires. S'agissant de l'Etat, des économies supplémentaires pourraient venir d'une meilleure gestion budgétaire « en mode LOLF », c'est-à-dire centrée sur la mesure des coûts et sur la performance, d'une réforme de la gestion des ressources humaines affectées aux missions de l'Etat et d'une maîtrise de la masse salariale ainsi que du coût des pensions. Les effectifs et les charges de fonctionnement des opérateurs de l'Etat, de plus en plus nombreux, ne doivent pas non plus être négligés. Enfin, la maîtrise des dépenses locales peut passer par une rationalisation de l'intercommunalité, de la fiscalité locale et des concours financiers d'un Etat encore trop enclin à faire financer par les collectivités les politiques dont il n'a plus les moyens budgétaires.

Résumant les trois « messages-clés » adressés par la Cour à la commission, M. Philippe Séguin a contesté l'idée selon laquelle la « France s'en tirerait mieux » que ses voisins dans la crise. Il a conditionné le rétablissement des comptes à un effort accru de vérité sur l'état de nos finances publiques, et jugé indispensable la réalisation de 70 milliards d'euros d'économies. Un tel montant ne saurait être atteint par des réformes ponctuelles axées sur les gaspillages ou les dysfonctionnements les plus flagrants, et implique une véritable réflexion sur le rôle de l'Etat, les missions du service public et les modalités de leur financement.

M. Jean Arthuis, président , a relevé que certains discours convenus sur l'attractivité de la France en matière d'investissements internationaux dissimulent une réalité moins flatteuse : si des capitaux étrangers sont placés dans notre pays, c'est d'abord pour financer notre déficit budgétaire.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a salué la lucidité du propos de M. Philippe Séguin. Trois points de méthode doivent néanmoins être soulevés. La notion de déficit structurel repose sur une référence à la croissance potentielle de l'économie. La crise ayant très probablement une incidence négative sur cette croissance potentielle, ne convient-il pas de réviser les modalités d'évaluation du déficit structurel ? En deuxième lieu, les évolutions divergentes des dettes publiques constituent un enjeu crucial pour la pérennité de la zone euro. Or l'appréciation de ces évolutions peut être biaisée par des méthodes d'évaluation des agrégats différentes entre les Etats membres. Dans la mesure où Eurostat ne constitue qu'une réunion d'instituts statistiques nationaux, la Cour des comptes et les autres certificateurs européens ne peuvent-ils mener des travaux garantissant l'homogénéité des définitions nationales de l'endettement ? Enfin, « l'agencisation » de l'Etat, qui consiste à déléguer un nombre croissant de missions à des opérateurs, semble prospérer. Que penser, ainsi, d'un Plan campus financé par des dotations non consomptibles aux universités, soit autant de « poches » de trésorerie ayant vocation à être placées en bons du Trésor ?

M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite abordé la question du financement croissant de la dette de l'Etat au moyen de titres à court terme. Si cette démarche traduit la volonté de l'Agence France Trésor de tirer le meilleur parti des conditions de marché, ne prive-t-elle pas l'autorisation parlementaire de sa portée, dans la mesure où celle-ci ne concerne que le financement à moyen et long termes ? En outre, s'agissant de l'endettement, quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur l'opportunité de recourir à un emprunt national, le cas échéant obligatoire ?

M. Philippe Marini, rapporteur général , a enfin interrogé M. Philippe Séguin sur l'impact budgétaire d'une suppression de la taxe professionnelle qu'il faudra nécessairement compenser, et sur l'opportunité de différer temporairement l'amplification de la révision générale des politiques publiques, afin de ne pas compromettre une cohésion sociale dont la fragilisation causerait un grand préjudice à l'économie nationale.

M. Philippe Séguin a jugé que les décisions issues de la révision générale des politiques publiques ont tendance à « s'étioler » au gré de leur mise en oeuvre, aboutissant à des résultats sensiblement plus modestes que les ambitions affichées. S'il ne faut pas nier le péril que la crise fait peser sur la cohésion sociale, le remède semble davantage résider dans un effort de pédagogie à l'égard des citoyens, consistant à leur expliquer que le report de réformes indispensables impliquerait des ajustements encore plus douloureux. Sur les autres points soulevés par le rapporteur général, M. Philippe Séguin a formulé les réponses suivantes :

- la notion de croissance potentielle apparaît à bien des égards fragile et sujette à débats ; les controverses méthodologiques entourant cette notion ne sont pas pour autant de nature à remettre en cause le diagnostic de fond portant sur nos finances publiques ;

- la zone euro n'a pas été conçue pour résister à des divergences structurelles de la nature de celles qui sont en train d'apparaître en matière de finances publiques. S'agissant de la fiabilité des comparaisons entre niveaux d'endettement nationaux, l'indépendance et l'absence de complaisance d'Eurostat ne semblent pas devoir être remises en cause ;

- il est exact que la part de la dette négociable à court terme a considérablement augmenté en 2008, dans un contexte de forte demande pour les valeurs du Trésor et de taux courts peu élevés. L'accroissement des émissions à court terme a notamment eu pour objet de préfinancer les mesures du plan de relance. Cette politique d'émission présente le risque de rendre la charge d'intérêts plus sensible à une tension sur les taux courts, et suppose donc une anticipation fiable des évolutions de taux, de manière à transformer une part de la dette à court terme en dette à moyen et long termes. Il est par ailleurs opportun d'informer plus régulièrement et plus complètement le Parlement de l'évolution de la dette à court terme ;

- s'agissant de l'emprunt national, la Cour n'a connaissance ni de son montant, ni de ses modalités, ni de sa destination. N'ayant pas délibéré sur ce thème, il lui est difficile d'émettre une opinion, sauf à rappeler que des circonstances exceptionnelles peuvent justifier des mesures exceptionnelles. Il convient néanmoins de cantonner strictement l'usage de ce type d'instrument à la lutte contre les effets de la crise et d'en limiter au maximum le coût ;

- la Cour partage les interrogations de la commission sur le remplacement de la taxe professionnelle et sur son impact budgétaire, et le Conseil des prélèvements obligatoires publiera prochainement des travaux consacrés aux prélèvements obligatoires dans une économie globalisée, analysant notamment la situation des finances locales.

Rappelant l'exemple suédois, M. François Marc a relevé qu'un niveau élevé de dépense publique n'est pas forcément exclusif d'un solde excédentaire. En revanche, la Cour peut-elle évaluer l'impact budgétaire et l'efficacité économique de l'ensemble des baisses de recettes opérées et annoncées ?

M. Philippe Séguin a indiqué que la Suède préserve un solde excédentaire en raison du niveau très élevé de sa fiscalité et se caractérise par une dépense publique globalement plus efficace qu'en France. Au demeurant, il n'appartient pas à la Cour de définir quel niveau de prélèvements obligatoires est politiquement acceptable pour les Français. L'impact budgétaire des allègements d'impôts s'élève à 39 milliards d'euros sur les cinq dernières années. Leur impact économique n'est pas mesuré à ce stade, mais entre bel et bien dans le cadre des nouvelles missions constitutionnelles de la Cour des comptes relatives à l'évaluation des politiques publiques.

M. Jean-Jacques Jégou a vu dans les analyses de la Cour un encouragement pour le Parlement à ne pas s'en tenir à la seule contestation de certaines mesures coûteuses pour les finances publiques, telle la baisse du taux de taxe sur la valeur ajoutée dans la restauration. S'agissant des finances sociales, la Caisse nationale d'assurance vieillesse appréhende un déficit de 50 milliards d'euros en 2012. Quel rôle la Cour peut-elle jouer pour faire la lumière sur l'avenir de notre système de retraite ? Par ailleurs, si nos stabilisateurs automatiques épargnent à la France une situation aussi délicate que celle que traversent certains de ses voisins, quelles difficultés faut-il s'attendre à affronter lors de la sortie de crise ?

M. Philippe Séguin a estimé que l'équilibrage du financement des retraites ne permettra ni d'éluder la question de l'âge du départ à la retraite, ni celle du niveau de cotisation et de pension. Le déficit de financement de la protection sociale n'est pas lié aux fraudes ou aux excès de certains usagers, mais à des déséquilibres structurels appelant des mesures elles-mêmes structurelles. A titre d'exemple, l'incompatibilité entre un système de distribution des soins fondé sur une logique libérale et un principe de socialisation de la dépense est diagnostiquée de longue date.

M. Serge Dassault a affirmé partager les constats de la Cour et souhaité qu'une analyse si clairvoyante sur l'état des finances publiques tempère l'optimisme dont fait traditionnellement preuve le Gouvernement.

Citant l'exemple de la mise en oeuvre du revenu de solidarité active, M. Philippe Adnot a regretté que l'empilement de dispositifs législatifs et réglementaires nouveaux accroisse continuellement la dépense, et que les règles de recevabilité financière encadrant l'initiative parlementaire ne s'appliquent pas au Gouvernement.

Bien que la Cour n'ait pas eu à connaître les conditions de mise en oeuvre du RSA, M. Philippe Séguin a consenti qu'une forme de « schizophrénie » transparaissait entre des discours vertueux sur le plan des principes et des pratiques conduisant à accumuler les mesures ponctuellement coûteuses.

Mme Nicole Bricq s'est interrogée sur l'appréciation que la Cour porte sur la dichotomie entre bons et mauvais déficits.

Considérant qu'« un bon déficit est un déficit inexistant », M. Philippe Séguin a toutefois admis qu'il est courant de distinguer les dépenses d'avenir des autres dépenses. Ce débat renvoie à la définition de la règle d'or, qui voudrait qu'il soit exclusivement recouru à l'endettement pour financer lesdites « dépenses d'avenir ». La définition de ces dépenses demeure toutefois sujette à controverse.

M. Aymeri de Montesquiou a souhaité connaître la part de la dette locale dans l'ensemble de la dette publique et s'est interrogé sur la part de la masse salariale des collectivités dans l'emploi public.

En réponse, M. Philippe Séguin a indiqué que la dette des administrations publiques locales représente environ 10 % de la dette publique au sens du Traité de Maastricht.

A la question de M. Pierre Bernard-Reymond, relative aux conséquences du creusement des écarts caractérisant la situation des finances publiques entre les Etats de la zone euro, M. Philippe Séguin a admis que l'existence même de l'euro pourrait être menacée.

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