AUDITION DE M. PATRICK DEVEDJIAN, MINISTRE CHARGÉ DE LA MISE EN oeUVRE DU PLAN DE RELANCE

Réunie le mardi 7 juillet 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'audition de M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance .

M. Jean Arthuis, président, a félicité le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance d'avoir tenu son engagement de présenter chaque trimestre au Parlement un compte rendu de son action. Il a salué la présence de M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, et de sénateurs membres des commissions des affaires sociales, de la culture, de l'éducation et de la communication et de l'économie, invités à prendre part aux travaux de la commission des finances.

Il a rappelé que le plan de relance a été annoncé le 4 décembre 2008 par le Président de la République et que son contenu a été précisé par trois lois de finances rectificatives et par la loi du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés.

Après avoir relevé que sept parlementaires, dont les sénateurs François-Noël Buffet et François Zocchetto, ont été désignés pour suivre la mise en oeuvre du plan sur le terrain, M. Jean Arthuis, président , a évoqué l'hypothèse d'un second plan de relance, qui pourrait être financé par l'emprunt national annoncé par le Président de la République. Il a alors interrogé le ministre sur trois sujets : l'état d'avancement de ses travaux destinés à surmonter les obstacles liés à certaines règles administratives ; l'incidence des mesures du plan de relance sur le niveau de l'activité économique ; la possible reconduction en 2010 de la mesure de versement anticipé aux collectivités territoriales des attributions au titre du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance, a considéré que le plan annoncé le 4 décembre 2008 par le Président de la République constitue un effort financier massif, fondé sur l'investissement et enrichi de dispositions en faveur des ménages et des salariés. Ce plan est temporaire et ciblé. Sa réussite est largement subordonnée à la rapidité avec laquelle il sera mis en oeuvre.

Le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance a évalué à 30 milliards d'euros l'effort financier nouveau consacré au plan, ce montant s'ajoutant à celui des mesures de soutien au système financier adoptées au mois d'octobre 2008 et à celui de certaines mesures intervenues en 2007 et 2008 - allègements fiscaux et revalorisations de prestations sociales - et qui continuent de produire leurs effets.

Il a insisté sur l'importance des mesures en faveur de l'investissement, dont le montant s'élève à plus de 10 milliards d'euros. L'Etat y participe à la fois, pour 4 milliards d'euros, sous la forme d'interventions directes et, pour un montant compris entre 2,5 et 3,5 milliards d'euros, au titre du versement anticipé des attributions du FCTVA. Les entreprises, principalement publiques, interviennent à hauteur de 4,1 milliards d'euros. L'effort direct de l'Etat, à fort effet multiplicateur, porte sur les infrastructures, l'enseignement supérieur, le patrimoine, la culture, la justice et la défense. L'objectif est d'améliorer la compétitivité des territoires et des acteurs économiques, de façon à ce que l'argent public soit utilement investi.

M. Patrick Devedjian a insisté sur le fait que le programme d'investissement s'accompagne d'un volet de soutien à l'activité économique et à l'emploi. Les mesures fiscales, dont le coût est évalué à 9,9 milliards d'euros, ont déjà permis à certaines entreprises, en améliorant leur trésorerie, de surmonter des épreuves difficiles. Les autres mesures de soutien à l'économie, d'un montant de 6,55 milliards d'euros, sont relatives à l'aide à l'embauche dans les très petites entreprises (TPE), aux dispositifs de garantie d'OSEO, à la mise en place du fonds de sécurisation du crédit interentreprises CAP+, à la prime à la casse, au plan de soutien à l'automobile, à la création du Fonds stratégique d'investissement (FSI), au règlement des dettes du ministère de la défense et aux avances sur marchés publics.

Il a ensuite évoqué les mesures en faveur des jeunes et des salariés touchés dans leur emploi, qui ont été annoncées à l'issue du sommet social du 18 janvier 2009 et dans le cadre du plan en faveur de l'emploi des jeunes, rendu public le 24 avril 2009 par le Président de la République. Mises en oeuvre par le Fonds d'investissement social (FISo), doté en 2009 de 1,3 milliard d'euros, elles ont pour objet de revaloriser le chômage partiel comme alternative à la rupture du contrat de travail, de renforcer des dispositifs tels que les conventions de reclassement personnalisées (CRP) et les contrats de transition professionnelle (CTP), de faciliter l'insertion des jeunes ainsi que l'embauche en contrat à durée indéterminée. Leur mise en oeuvre est étalée sur 2009 et 2010.

M. Patrick Devedjian a ensuite présenté le dernier axe du plan de relance, qui répond à un objectif de solidarité. Doté de 2,6 milliards d'euros, il consiste en un ensemble d'actions tendant à promouvoir la construction et à accroître l'offre de logement social, à soutenir la rénovation urbaine et le traitement de l'habitat indigne, à développer les structures d'accueil pour les plus défavorisés, à aider les plus pauvres et à soutenir les ménages à revenu modeste par le versement, d'un montant global de 1,6 milliard d'euros, de prestations exceptionnelles, telles que le revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) pour l'outre-mer, la prime de 150 euros pour les familles modestes, les chèques emploi-services et la prime de solidarité active. Il a également mentionné l'allègement d'1,1 milliard d'euros de l'impôt sur le revenu acquitté par les contribuables les plus modestes.

Le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance a alors indiqué que l'emprunt national, décidé par le Président de la République et annoncé lors du Congrès du Parlement du 22 juin 2009, prolongera le plan de relance en finançant des projets ciblés et d'avenir. Sa préparation donnera lieu à une large concertation destinée à définir ces priorités. Il sera assorti de mesures propres à réduire les dépenses de fonctionnement et à contenir la dépense publique en l'orientant vers la préparation de l'avenir.

Au total, il a jugé que le dispositif mis en oeuvre par le Gouvernement constitue un ensemble assez complet, conçu pour provoquer un stimulus rapide. Il a annoncé que l'ensemble des autorisations d'engagement sera engagé au cours de l'année 2009 et que les trois quarts des crédits de paiement seront dépensés dans le même délai.

Après avoir rappelé que la mission qui lui a été confiée est limitée dans le temps et conduite avec une équipe réduite, mais qu'il dispose de l'autorité sur une quinzaine de directions d'administration centrale, M. Patrick Devedjian a expliqué que les moyens consacrés au plan sont mis en oeuvre soit, pour un tiers d'entre eux, par transfert de crédits au profit d'autres ministères, soit, pour les deux autres tiers, par gestion directe, c'est à dire par le versement de crédits aux agences ou organismes compétents tels que Voies navigables de France (VNF) ou l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Il s'est félicité d'avoir passé environ quarante-cinq conventions portant notamment sur l'utilisation, les échéanciers et le pilotage des crédits. Il a mis en avant le parti pris de financer uniquement des opérations prêtes à démarrer, de façon à ce que le plan ait l'impact le plus immédiat possible. Il a indiqué qu'il se réserve la possibilité de procéder à des retraits ou des dégagements d'office.

M. Patrick Devedjian a précisé que, sur le terrain, le pilotage du dispositif est confié aux préfets de régions et que des outils de suivi automatisé ont été élaborés. Il a mentionné la création d'un site Internet permettant à chacun d'accéder à l'information sur les projets en cours.

Evoquant l'état d'avancement du plan, il a annoncé que les textes de simplification des procédures sont désormais presque tous applicables. En outre, 8,5 milliards d'euros d'autorisations d'engagement ont été mis à disposition des opérateurs et des ministères, ainsi qu'un peu plus de 6 milliards d'euros de crédits de paiement, dont 3,8 milliards d'euros ont d'ailleurs déjà été effectivement dépensés. Les mesures fiscales ont permis de rembourser 6,8 milliards d'euros à titre définitif aux entreprises. Par conséquent, 11,2 milliards d'euros ont été injectés dans l'économie, auxquels il convient d'ajouter les premiers versements anticipés au titre du FCTVA, qui s'élèvent à 1,8 milliard d'euros.

M. Patrick Devedjian a annoncé que 500 chantiers, d'importance variable, ont démarré. L'objectif est d'accroître l'activité sur tout le territoire et pour toutes les catégories d'entreprises. Par ailleurs, 350 000 embauches dans les très petites entreprises ont fait l'objet d'une demande d'aide « zérocharges TPE », 230 000 véhicules ont bénéficié de la prime à la casse, 70 000 logements sociaux ou en accession sociale ont été financés, des aides pour la rénovation de 17 000 logements ont été attribuées par l'Agence nationale de l'habitat, la prime de solidarité active a été versée à 4,3 millions de ménages, la prime pour les familles modestes de 150 euros vient de l'être à 3 millions de ménages, les chèques emploi-services de 200 euros ont été distribués en juin à 1,5 million de foyers, le RSTA sera versé en juillet, OSEO est intervenu auprès de plus de 8 500 entreprises pour garantir 1,46 milliard d'euros de prêts, le médiateur du crédit a reçu plus de 10 000 dossiers et en a traité 6 800 avec un taux de succès de 65 % et le Fonds stratégique d'investissement ainsi que le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles sont intervenus à neuf reprises, à hauteur de 535 millions d'euros.

Il a insisté sur la grande mobilisation des acteurs, et en particulier de l'administration, dont l'action est à la hauteur de la mobilisation constatée au niveau international. Evoquant la situation des autres pays, il a constaté que, le plus souvent, l'effort de relance repose sur l'investissement, à l'exception du Royaume-Uni qui privilégie la consommation. Il a estimé l'impact théorique des plans de relance étrangers sur l'économie française à 0,7 % en 2009 et a observé que les stimuli étaient plus concentrés sur 2009 en France, au Royaume-Uni, au Japon et en Espagne qu'ils ne le sont en Allemagne, où l'effet des mesures prises sera surtout perceptible en 2010. Il s'est félicité que, dans la crise, la zone euro ait démontré sa capacité de réaction.

En conclusion, M. Patrick Devedjian a estimé que ce plan de relance a pour effet de fédérer les volontés, dans un contexte où un effort collectif et de solidarité est nécessaire pour surmonter la crise. Il a illustré son propos en mentionnant les mesures du FISo, ainsi que l'emprunt national dont il a considéré qu'il devra permettre, dans le même temps, de soumettre l'investissement public à des critères de rentabilité, d'utilité, d'efficacité et qu'il contribuera à contenir les dépenses courantes.

En réponse aux questions de M. Jean Arthuis, président, M. Patrick Devedjian a indiqué que les dispositions de la loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés, de même que certains textes réglementaires - tel celui sur l'adaptation du seuil de déclenchement des enquêtes d'utilité publique - ont contribué à assouplir la réglementation. Il a jugé que la mise en oeuvre du plan de relance, et notamment des mesures favorables à la consommation, contribue manifestement au soutien de l'activité économique. Il a particulièrement salué l'effort consenti par les collectivités territoriales, quelle que soit l'orientation politique de leurs exécutifs, en relevant que le montant des investissements pour la réalisation desquels 19 540 collectivités se sont engagées est supérieur de 54 % à la moyenne de référence prise en compte pour calculer l'éligibilité aux versements anticipés des attributions au titre du FCTVA.

M. Jean Arthuis, président , a évoqué le Fonds stratégique d'investissement (FSI) en estimant urgent que celui-ci parvienne à créer le fonds dédié à la recapitalisation des petites et moyennes entreprises, dont le principe est acquis mais dont la mise en oeuvre connaît du retard. S'appuyant sur les travaux du médiateur du crédit, il a constaté que, sans un renforcement de leurs fonds propres, de nombreuses entreprises disparaîtraient dans un avenir très proche.

Le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance a salué l'action du médiateur du crédit. Il s'est également félicité du fonctionnement des comités financiers constitués autour des préfets et des orientations mises en oeuvre par OSEO. Il a précisé que la vocation du FSI n'est pas de venir en aide à l'ensemble des petites et moyennes entreprises, mais de soutenir celles qui présentent un potentiel stratégique.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a demandé si le dispositif de raccourcissement des délais en matière d'archéologie préventive prévu par la loi du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés rencontre le succès escompté. Il a expliqué la réussite de la mesure relative au FCTVA par le fait qu'elle est simple et claire, tout en regrettant que les intercommunalités ne bénéficient d'aucune incitation à l'accélération de leurs investissements.

Le rapporteur général de la commission des finances s'est alors interrogé sur les éventuelles conséquences dépressives d'une absence de simultanéité entre la reprise de l'activité économique et l'extinction progressive des effets de l'impulsion budgétaire donnée par les mesures du plan de relance. Il s'est demandé si, dans ce contexte, le financement de dépenses d'avenir par le produit de l'emprunt national ne pourrait pas être considéré comme une deuxième phase de soutien à l'activité.

Enfin, après avoir constaté que le rapport du Gouvernement préparatoire au débat d'orientation des finances publiques indique que 2,6 milliards d'euros ont été dépensés au titre du plan de relance, soit 20 % seulement du total des crédits de paiement prévus, il a demandé au ministre de confirmer son objectif d'un taux de consommation de 75 % à la fin de l'année 2009.

En réponse, M. Patrick Devedjian a annoncé que, au 7 juillet 2009, 3,2 milliards d'euros de crédits de paiement ont effectivement été versés, et que l'objectif de dépense sera tenu. Il a rappelé que l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) a été doté de 20 millions d'euros et qu'un décret, comportant un projet de contrat de mission, est en cours de rédaction. Il a formulé un jugement positif sur la mise en oeuvre du nouveau régime juridique de l'archéologie préventive.

S'agissant du FCTVA, le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance a considéré qu'il sera probablement nécessaire, en 2010, de prendre des mesures de nature à rendre pérenne la mesure applicable pour l'heure à la seule année 2009. Il a cependant mis en garde sur le fait que les collectivités ne parviendront sans doute pas toutes à respecter les contraintes de délai qui conditionnent le bénéfice des versements anticipés. Evoquant l'éventualité d'un second plan de relance, il a d'abord rappelé que les mesures financées par le produit de l'emprunt national seront décidées à l'issue des travaux conduits par MM. Michel Rocard et Alain Juppé. Il a ensuite jugé que certains projets, par exemple dans le domaine des infrastructures, ont vocation à relever des deux dispositifs. Enfin, il a insisté sur les différences de temporalité entre, d'une part, le plan de relance, fondé sur l'immédiateté et mis en oeuvre au coeur d'une crise qu'il contribue à amortir, et, d'autre part, le grand emprunt, qui interviendra au plus tôt en 2010 et qui relève d'une logique de compétitivité pour préparer la sortie de crise.

En réponse à M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie , qui souhaitait que la priorité soit donnée aux projets susceptibles d'être mis en oeuvre sans délai, M. Patrick Devedjian s'est félicité de l'engagement du financement de 70 000 des 100 000 logements programmés. Il a déploré le rythme moins rapide des opérations dans les départements d'outre-mer et a annoncé qu'il se rendra à la Réunion et aux Antilles dans les prochaines semaines.

Dans le domaine du logement, M. Jean Arthuis, président , a souhaité, une plus grande cohérence entre les priorités du plan de relance et les mesures de régulation budgétaire portant sur les crédits de la mission « Ville et logement ».

En réponse à Mme Élisabeth Lamure , M. Patrick Devedjian a annoncé que le projet d'ordonnance instituant, en application de la loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés, un régime d'autorisation simplifiée pour les installations classées, a été examiné par le Conseil d'Etat et sera très prochainement publié, permettant ainsi aux entreprises d'en bénéficier avant la fin de l'année 2009.

Enfin, le ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance a souscrit au souhait de M. Christian Gaudin d'une meilleure articulation entre l'action du FSI en faveur des petites et moyennes entreprises et le dispositif du crédit impôt recherche, auquel cette catégorie d'entreprise n'a pas assez recours.

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