4. Une situation économique et sociale très dégradée

L'Ukraine dispose d'un potentiel économique important , en particulier des ressources minières et énergétiques, des terres agricoles immenses et fertiles, représentant 22 % des terres arables européennes - l'Ukraine était le « grenier à blé » de l'URSS -, une main d'oeuvre qualifiée...

Elle reste un pays industriel, le 8 e producteur mondial d'acier. Les seuls produits sidérurgiques représentaient 41 % de ses exportations en 2008 et les autres produits industriels (produits minéraux, machines et équipements) 20 %. Le secteur agricole emploie encore 20 % de la population active et représentait 16 % des exportations en 2008.

Toutefois, la croissance des années 2000 a essentiellement reposé sur la valorisation des ressources énergétiques et des matières premières dans un contexte de forte hausse des cours sur les marchés mondiaux. Les investissements visant à moderniser les infrastructures ont été insuffisants. Les infrastructures gazières, par exemple, sont obsolètes.

Alors que le produit intérieur brut (PIB) du pays a baissé d'environ 40 % au cours des années 1990 - en 2008, le PIB réel du pays était encore inférieur à son niveau de 1990 -, l'Ukraine a été durement touchée par la crise économique mondiale qui a débuté à l'automne 2008 . La décennie de forte croissance qu'elle a connue a été stoppée brutalement. Après une croissance de 7,9 % en 2007, et encore de 2,1 % en 2008, le PIB ukrainien a reculé d'environ 15 % en 2009 , mais devrait redevenir positif en 2010, aux alentours de 2,5 %. La production industrielle a baissé de 20 % en 2009.

Cet effondrement de l'économie a logiquement entraîné une dégradation très sensible de la situation des finances publiques. Le déficit budgétaire est passé à - 9 % du PIB en 2009, après - 1,5 % en 2008. La dette publique a plus que doublé en un an, passant de 10,3 % du PIB en 2008 à 23,1 % en 2009. Les exportations ont très nettement reculé, à 40,6 milliards de dollars en 2009, après 67,7 milliards l'année précédente.

Les secteurs minier et métallurgique, ainsi que la construction, sont les plus touchés par la crise. La fermeture des marchés de capitaux aux pays émergents a ébranlé le système bancaire ukrainien, confronté aux retraits suscités par la panique des épargnants, à la chute des dépôts, aux défauts de remboursement. Le système bancaire n'est pas passé loin de l'implosion, avec les risques que cela comporte pour les pays européens très engagés dans le pays, tels que l'Autriche, la Suède et l'Italie. Le secteur bancaire n'a été sauvé de l'effondrement que par l'intervention des institutions financières internationales et l'effort de recapitalisation des filiales des banques étrangères. La hryvna a perdu près de 50 % de sa valeur au 4 e trimestre 2008.

Du reste, il est très probable que les conséquences de la crise ont été aggravées par l'instabilité politique qui prévaut dans le pays. Par exemple, la Rada n'est pas parvenue à voter le budget 2010 avant la fin du mois d'avril dernier.

Les conséquences sociales de cette crise sont rudes , en termes de chômage, de baisse des salaires et d'endettement.

Le pays a connu un net appauvrissement depuis la disparition de l'URSS. Les conditions de vie de la grande majorité de la population sont très difficiles, en particulier dans les campagnes, comme vos rapporteurs ont pu le constater au cours de leur déplacement dans les environs d'Odessa. Le salaire mensuel moyen ukrainien était de 155 euros en janvier 2009.

L'indice de développement humain (IDH) était de 0,796 en 2007, soit un IDH moyen, qui place l'Ukraine au 85 e rang sur 182, entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. L'espérance de vie n'est que de 68 ans. La population, environ 46 millions d'habitants (4 ( * )) , a diminué de 5 % depuis 2001. L'alcoolisme est devenu un grave problème de santé publique. Le système de santé est très délabré dans le secteur public, tandis que le secteur privé, s'il est plus performant, est peu regardant sur la qualité des soins et surtout avide de profits rapides. Le taux de prévalence du VIH est l'un des plus élevés d'Europe. Il a été dit à vos rapporteurs que les autorités ukrainiennes n'avaient engagé aucune campagne de prévention du sida, alors même que l'Union européenne leur alloue des fonds à cette fin, et préféraient acheter des médicaments antirétroviraux.

Dans ces conditions, l'Ukraine dépend largement de l'aide que la communauté internationale lui apporte.

Le FMI a octroyé, en novembre 2008, un accord de confirmation de 16,4 milliards de dollars sur 24 mois, dont une première tranche de 4,5 milliards a été immédiatement débloquée. D'autres versements ont ensuite été effectués : 2,8 milliards de dollars en mai 2009 et 3,3 milliards au mois de juillet suivant. La 4 e tranche, soit 3,8 milliards de dollars, aurait dû être versée en octobre, mais le FMI s'y est refusé, le gouvernement ukrainien n'ayant pas tenu divers engagements pris auprès du Fonds.

Par ailleurs, la Banque mondiale a annoncé une enveloppe de 1,75 milliard de dollars destinés à l'Ukraine, soit 750 millions de dollars pour le secteur financier et deux tranches de 500 millions pour les infrastructures, ainsi qu'une aide budgétaire de 500 millions de dollars sous condition d'exécution du programme du FMI.

Sous certaines conditions, pas encore remplies, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) était disposée à prêter à la compagnie gazière ukrainienne Naftogaz 300 millions de dollars en 2009 pour l'achat de gaz et 450 millions en 2010 pour l'investissement dans les gazoducs.

Enfin, la Banque européenne d'investissement (BEI) pourrait prêter à l'Ukraine 450 millions de dollars en 2010 pour financer la modernisation du système de transit gazier.

D'une manière générale, en effet, les besoins en matière de modernisation des infrastructures sont considérables. Par exemple, le secteur de l'eau est dans une situation très délicate. La qualité de l'eau destinée à la consommation est mauvaise, les canalisations ne sont pas entretenues, le circuit décisionnel de la gestion du secteur est particulièrement complexe et le prix de l'eau, trop faible, freine les investissements, la politique de tarification de l'eau permettant de couvrir 70 % des besoins financiers nécessaires à la maintenance du réseau.

La BEI a d'ailleurs récemment accordé un prêt de 15,5 millions d'euros pour mettre aux normes le réseau d'adduction d'eau et les installations d'assainissement de la ville de Mykolayiv, dans le sud du pays, et 100 millions d'euros pour la réalisation de divers projets de petite et moyenne dimension dans les secteurs de l'énergie et de l'environnement.

* (4) Certains journaux estiment la diaspora à 15 millions de personnes, dont 5 millions dans l'Union européenne, en particulier en Pologne, ainsi qu'en Espagne, au Portugal et en Italie.

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