2. Engager la refondation

Au-delà des rapprochements entre régimes qui pourraient voir le jour, des convergences de paramètres de plus en plus nécessaires, la Mecss appelle de ses voeux une réforme plus profonde, dont l'objectif presque unique serait de restaurer la confiance des assurés, et notamment des plus jeunes, dans le système de retraite.

La situation actuelle, caractérisée par la montée sourde de tensions intergénérationnelles, ne peut perdurer. C'est pourquoi la mission propose la mise en place à terme d'un régime de base par points qui devrait revêtir le caractère le plus universel possible.


Qu'est-ce qu'un régime par points ?

Dans les régimes par points, l'assuré acquiert chaque année des points qui vont se cumuler durant toute la carrière. La contrepartie monétaire de ces points n'est connue qu'à la date de liquidation, en fonction de la valeur de service du point à cette date.

La valeur de service du point est en général identique pour tous les assurés et permet de convertir les points en euros, à la liquidation mais également au cours de la retraite. Dans les régimes complémentaires français, la valeur de service du point évolue en pratique, depuis plusieurs années, comme les prix afin d'assurer le maintien du pouvoir d'achat de la pension pendant la période de retraite.

Dans les régimes tels que les régimes complémentaires français, l'assuré acquiert chaque année un nombre de points égal au rapport entre les cotisations versées et la valeur d'achat du point qui est un paramètre du régime. Une hausse du taux de cotisation augmente le nombre de points acquis, donc les droits à la retraite.

La valeur d'achat du point peut être la même pour l'ensemble de la population couverte ou croître avec l'âge du cotisant ou encore dépendre des catégories de personnes. Dans les régimes complémentaires français, il s'agit d'un paramètre identique pour tous les assurés de chaque régime dont le mode de revalorisation est fixé par les gestionnaires, actuellement sur le salaire moyen.

Le rapport entre la valeur de service du point et la valeur d'achat du point définit le rendement instantané du régime.

Plusieurs avantages peuvent être attendus d'un régime par points :

- toutes les cotisations versées au cours d'une carrière donnent des droits à pension, ce qui n'est pas toujours le cas dans les régimes par annuités ;

- la pension versée est directement dépendante des cotisations accumulées au cours de la carrière ;

- les éléments de solidarité du système sont isolés et identifiables ;

- un tel régime évite de prendre des engagements qui ne peuvent être tenus : la valeur de service du point, contrôlée par les gestionnaires du régime, devient l'élément central de régulation sans empêcher cependant un relèvement des cotisations ;

- le système est particulièrement lisible pour les assurés.

La mission observe que la mise en place d'un tel système pourrait être complétée par l'introduction de la neutralité actuarielle par génération et par individu, conduisant à faire en sorte que chaque génération ou chaque personne perçoive en pensions ce qu'elle a versé en cotisations, assorti d'un taux d'actualisation. Il s'agit d'un des éléments essentiels de la réforme du système de retraite suédois.


Rappel des caractéristiques du système suédois
en comptes notionnels

Dans ce système, les travailleurs accumulent tout au long de leur carrière professionnelle les cotisations de retraite sur un compte qualifié de notionnel. Le régime continue de fonctionner suivant les règles de la répartition, les cotisations encaissées étant utilisées chaque mois pour financer les pensions des retraités. Les cotisations passées sont revalorisées chaque année non seulement en fonction de l'inflation, mais également en appliquant un rendement réel garanti par l'Etat, qui correspond au taux de croissance de la masse salariale. Au terme de sa vie active, le travailleur a accumulé un certain capital retraite, qui mesure l'ampleur de ses droits à la retraite.

La plus grande originalité de ce système est d'offrir des coefficients de conversion du capital en rente qui dépendent de l'espérance de vie de la génération et de l'âge de départ en retraite. Plus l'âge de départ en retraite est élevé, plus la rente mensuelle sera élevée ; plus l'espérance de vie de la génération du salarié sera élevée, plus faible sera sa rente. La formule du coefficient de conversion assure, pour chaque génération, l'égalité entre le cumul actualisé des cotisations qui ont été versées durant la période d'activité, c'est-à-dire les sommes versées assorties de leur revalorisation en fonction de l'indice retenu par les gestionnaires du régime, et le cumul actualisé des pensions qui seront reçues pendant la période de retraite, cumul qui dépend de la durée anticipée de la retraite, de l'indice de revalorisation des pensions pendant la période de retraite et du rendement escompté du capital virtuel.

A la suite d'un déplacement en Suède en 2007 106 ( * ) , la Mecss avait souligné tout l'intérêt de ce système :

« - il garantit un équilibre financier pérenne, sur la base de taux de cotisations élevés, mais stables à l'avenir ;

« - il préserve l'équité entre les générations ;

« - il assure une meilleure transparence de l'effort contributif ainsi que des niveaux de prestations perçues par les assurés sociaux suédois ;

« - il garantit une pension minimum aux personnes âgées les plus modestes »

Ce dispositif permettrait progressivement d'instaurer une retraite « à la carte » afin que les salariés, pleinement éclairés sur les conséquences de chaque solution, puissent effectuer des choix entre une durée d'activité plus longue et une meilleure pension ou une durée d'activité plus courte et une pension plus limités.

Dans ce système, même s'il pourrait être nécessaire de maintenir un âge minimum de liquidation des droits pour éviter que certains salariés ne partent avec des pensions trop basses, les âges légaux et les durées d'assurance n'auraient plus la même importance que dans le système par annuités actuel.

Volontairement, la mission n'entend pas détailler plus avant cette proposition, dans la mesure où elle considère qu'une réforme de ce type doit être élaborée selon une procédure bien différente de celle qui préside aux rendez-vous sur les retraites tels qu'ils sont organisés depuis 2008.

* 106 Rapport Mecss n° 377 (2006-2007) d'Alain Vasselle et Bernard Cazeau, « Réformer la protection sociale : les leçons du modèle suédois ».

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