4. Édicter des normes de constructibilité adaptées au risque dans les zones dangereuses

Votre mission s'est prononcée en faveur de l'édiction de normes de constructibilité adaptées au risque dans les zones dangereuses.

Elle estime d'ailleurs que, pour déterminer les prescriptions adaptées au risque (c'est-à-dire pour fixer un niveau d'aléa pertinent), il convient non seulement de tenir compte des évènements climatiques extrêmes passés, mais aussi des catastrophes futures, dont la montée tendancielle du niveau de la mer ne pourra qu'accentuer la violence et la gravité .

De telles prescriptions sont, en général, imposées par les PPR dans les « zones de précaution » qu'ils délimitent. Les aménagements à réaliser sont toutefois enserrés dans une limite financière : en effet, ils ne peuvent coûter plus de 10 % du prix de l'habitation en cause 43 ( * ) .

Pour contourner ce problème (sans, pour autant, imposer aux propriétaires des charges financières disproportionnées, puisque les documents d'urbanisme n'ont pas d'effet rétroactif), des prescriptions pourraient être prévues par les documents d'urbanisme : ainsi, dans les zones « à risque », l'octroi d'un permis de construire serait conditionné au respect de certaines normes

Plus précisément, en ce qui concerne le risque de submersion marine, votre mission considère que :

- la mise en place de constructions sur pilotis n'est pas forcément une réponse pertinente face au risque de submersion marine. Cette solution n'est en effet efficace qu'en cas de montée progressive des eaux (comme dans le cas d'une crue fluviale), mais pas en cas de déferlement. À cet égard, lors de son audition par votre mission, M. Raymond Léost, responsable juridique de France nature environnement, avait souligné que le courant risquait d'affaiblir les maisons sur pilotis, et donc de ne pas constituer un moyen performant de protection de la vie humaine ;

- des batardeaux, depuis longtemps en usage en Gironde (c'est-à-dire des retenues d'eau, parfois amovibles, permettant d'empêcher l'entrée de la mer dans les habitations qui en sont dotées) pourraient être installés ;

- un rehaussement systématique des planchers d'habitation pourrait être imposé dans les zones exposées à un risque de submersion marine. Cet aménagement permettrait d'éviter que la hauteur des eaux pénétrant dans les maisons en cas d'évènement extrême n'atteigne des niveaux mettant en danger la vie des occupants. Toutefois, votre mission souligne que cette solution ne permettrait pas de renforcer la résistance structurelle des habitations : comme l'avait noté M. Gilles Servanton, directeur départemental des territoires et de la mer en Charente-Maritime, même lorsqu'elle reste à l'extérieur des maisons, l'eau fait pression sur les murs et peut en endommager la structure, ce qui peut provoquer, dans les cas les plus graves, un effondrement des édifices ;

- en outre, un étage, une zone refuge ou, solution minimale, un accès au toit, pourraient être rendus obligatoires dans tous les logements situés en zone inondable. Il s'agit d'éviter qu'une montée brutale des eaux ne prenne les habitants au dépourvu (comme cela pu être le cas dans les maisons de plain-pied situées en front de mer, par exemple à La Faute-sur-Mer, où les populations ont dû briser le plafond pour se réfugier sur le toit afin de s'échapper d'habitations dans lesquelles l'eau montait de manière continue) ;

- de même, comme le soulignait notre collègue Michel Doublet , l'adaptation des modes de construction à l'existence d'un risque de submersion marine peut reposer sur des aménagements simples et de bon sens . Par exemple, le rez-de-chaussée des maisons situées dans des zones à risque pourrait être constitué par un garage (ou, en tout état de cause, par des pièces n'ayant pas vocation à être occupées de manière pérenne), les pièces habitées -ainsi que les installations vitales, comme les installations électriques- étant toutes situées dans les étages supérieurs. Un concours d'architecture par type d'habitat pourrait être lancé de façon à concilier sécurité et esthétique.

En tout état de cause, votre mission estime qu'une réflexion sur les aménagements les mieux à même d'assurer une protection effective des populations doit être menée au cas par cas, dans le cadre d'une concertation entre les élus locaux et les services de l'État, préalablement à l'élaboration ou à la modification des documents d'urbanisme.

Proposition n° 39 de la mission :

Au moment de l'élaboration, de la modification ou de la révision des documents d'urbanisme, mener une réflexion sur la mise en place d'aménagements protecteurs des populations dans les habitations individuelles (batardeaux, rehaussement des planchers, étage refuge, accès au toit, neutralisation du rez-de-chaussée...).


* 43 Article R. 562-5 du code de l'environnement.

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