N° 80

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 octobre 2010

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la participation de la France au budget de l' Union européenne en 2011 ,

Par M. Denis BADRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La négociation sur le projet de budget 2011 de l'Union européenne

1. L'avant projet de budget 2011 de la Commission propose une augmentation de 0,84 % des crédits d'engagement par rapport à 2010, soit 142,57 milliards d'euros . Il s'agit pour l'essentiel de stabiliser les engagements financiers de l'Union européenne et de les répartir différemment au profit des dépenses de compétitivité et de coopération policière et judiciaire. Les crédits de paiement affichent une hausse de 5,85 % et s'élèvent à 130 milliards d'euros . Ils visent à encourager les deux priorités indiquées précédemment ainsi qu'à augmenter les crédits dédiés aux fonds structurels.

2. Le projet de budget , adopté à une courte majorité par le Conseil , se veut plus rigoureux . Les coupes réalisées en crédits d'engagement (- 788 millions d'euros, ce qui conduirait à une augmentation de seulement 0,2 % par rapport à 2010) et, surtout, en crédits de paiement (- 3,6 milliards d'euros, ramenant la hausse pour 2011 à 2,9 % par rapport à 2010), ont principalement pour origine la volonté affichée par la majorité des Etats membres d'une discipline budgétaire renforcée .

3. Le Parlement européen a tiré les conséquences du vote du Conseil et a voté en séance plénière, le 20 octobre 2010, un budget très proche des propositions initiales de la Commission, prévoyant l'ouverture de 143 milliards d'euros de crédits d'engagement et de 130,56 milliards d'euros de crédits de paiement. Cette approche , marquée par une augmentation limitée des crédits, devrait faciliter les négociations entre les deux branches de l'autorité budgétaire lors des trois semaines de la phase de conciliation prévue par le traité de Lisbonne, qui devrait normalement aboutir dans le courant de la deuxième semaine de novembre 2010.

La contribution française au budget communautaire

4. L'article 46 du projet de loi de finances pour 2011 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union européenne à 18,235 milliards d'euros. 75 % de ce prélèvement correspondent à la ressource RNB.

5. La décision du 7 juin 2007 relative au système des ressources propres est entrée en vigueur le 1 er mars 2009 avec un effet rétroactif pour les exercices 2008 et 2007. Elle a engendré en 2009 un surcoût « exceptionnel » pour la France de plus d'un milliard d'euros. La baisse du montant du « chèque » britannique devrait désormais conduire à une réduction relative du poids de la contribution française .

6. La France demeure le deuxième pays contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne, et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne. La part de sa contribution s'élève à 16,6 % en 2010 et devrait décroître à 16,4 % en 2011 .

7. Votre rapporteur spécial recommandera, lors du débat budgétaire, l'adoption sans modification de ce prélèvement sur recettes .

Il se félicite de voir que le budget de l'Union européenne marque une volonté de s'associer aux efforts d'assainissement des finances publiques nationales .

Il appelle toutefois l'attention sur les écarts considérables constatés entre la prévision et l'exécution du prélèvement : l'estimation soumise au vote du Parlement doit être plus précise et plus fiable .

Par ailleurs, il souhaite que le Gouvernement s'engage à réduire les contributions au budget communautaire subies par la France , à la suite notamment des refus d'apurement communautaire ou des condamnations à verser des amendes et astreintes .

Enfin, il insiste à nouveau sur la nécessité de procéder à une refonte profonde du budget communautaire , tant du point de vue de ses ressources propres que de sa structure de dépenses.

Un budget, dont les dépenses sont arrêtées par les autorités communautaires, mais dont 85 % des ressources restent dépendantes de décisions des parlements nationaux, n'est ni démocratique, ni durable . De plus, un budget peu lisible et mis en oeuvre dans des proportions croissantes à travers des agences présente un risque d'inflation des dépenses . Le rapport présenté à ce sujet par votre rapporteur spécial, le 7 octobre 2009, devant votre commission des finances ainsi que la commission des affaires européennes rappelle qu'une grande vigilance doit présider à toute création de nouvelle agence 1 ( * ) .

De manière plus générale, votre rapporteur spécial plaide pour une mise en oeuvre vigilante du principe de subsidiarité, au regard duquel devraient être systématiquement examinés le budget, le fonctionnement et les politiques de l'Union européenne .

Alors qu'on a vu les difficultés à mettre en synergie l'action des Etats membres et de l'Union européenne au sujet des garanties à apporter aux dettes souveraines, la difficile question de la capacité de l'Union à emprunter est posée. La problématique du « calibrage » global du budget communautaire, comme celle des ressources réellement propres de l'Union, ne peuvent non plus être écartées, alors que va se développer le débat sur les perspectives financières 2014-2020.

Evolution 2008-2011 du prélèvement sur recettes

(en millions d'euros)

2008

2009

2010

2011

Montant du prélèvement voté

18 400

18 900

18 153

18 235

Montant du prélèvement exécuté

18 700

19 965

17 889

n.d.

Ecart

+ 300

+ 1 065

- 264

n.d.

Part dans les ressources propres européennes

16,2 %
(budget exécuté)

18,2 %
(budget exécuté)

16,6 %
(budget en cours d'exécution)

16,4 %
(APB 2011)

Source : Commission des finances d'après l'annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2011

I. LE BUDGET 2011 DE L'UNION EUROPÉENNE : CONTEXTE, ENJEUX ET PERSPECTIVES

La procédure de négociation pour le budget communautaire 2011 a pour toile de fond l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne , des perspectives financières révisées en 2010 et, enfin, l'entrée en vigueur de la décision du 7 juin 2007 relative aux ressources propres .

A. UN CONTEXTE MARQUÉ PAR LE NOUVEAU CADRE DU TRAITÉ DE LISBONNE, LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE ET LA DÉCISION SUR LES « RESSOURCES PROPRES »

1. La première mise en oeuvre de la procédure budgétaire prévue par le traité de Lisbonne

Le budget de l'Union européenne pour 2011 correspond au premier exercice de mise en oeuvre de la procédure prévue par le traité de Lisbonne . Dorénavant, le budget est donc voté à l'issue d'une seule lecture par le Conseil et le Parlement européen et d'une phase de conciliation en cas de désaccord entre les deux institutions. Bien que le nouveau traité ait mis un terme à la distinction entre dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires 2 ( * ) , plaçant sous cet angle Parlement et Conseil sur un pied d'égalité, il a introduit des dispositions pouvant permettre au Parlement européen d'imposer, in fine , son point de vue.

La procédure budgétaire annuelle est aujourd'hui précisée par les articles 313 et 314 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). En matière budgétaire comme dans les autres domaines, la Commission continue de disposer du monopole de l'initiative, qu'elle exerce par la présentation au Conseil et au Parlement d'un avant-projet de budget.

Au terme d'une seule lecture du projet de budget par le Conseil puis par le Parlement, plusieurs options sont possibles :

- si le Parlement approuve la position du Conseil, le budget est adopté ;

- s'il ne statue pas, le budget est réputé adopté ;

- si le Parlement adopte des amendements que le Conseil approuve, le budget est adopté ;

- si le Parlement adopte des amendements que le Conseil n'approuve pas, le projet est transmis au Conseil et à la Commission dans le cadre du comité de conciliation .

Ce nouvel organe a pour objectif d'aboutir, dans un délai de 21 jours à partir de sa convocation, comme le précise le TFUE, à un accord sur un projet commun à la majorité qualifiée des membres du Conseil ou de leurs représentants et à la majorité des membres représentant le Parlement. Durant cette procédure, la Commission cherche à rapprocher les positions des parties.

Compte tenu des nouvelles règles, dont en particulier la suppression de la seconde lecture, le moment décisif de la procédure budgétaire devrait, en pratique, être désormais ce comité de conciliation , qui devrait être systématiquement convoqué dans le cadre de la procédure budgétaire

En cas d'accord du comité de conciliation, le Parlement et le Conseil disposent de 14 jours pour approuver le projet afin qu'il soit définitivement adopté. Si le Conseil et le Parlement approuvent ce projet commun, le budget est adopté sur cette base.

Si le Conseil rejette le projet commun mais que le Parlement l'approuve, le Parlement peut décider de confirmer ses amendements - par un vote à la majorité des membres qui le composent et des 3/5 e des suffrages exprimés. Le budget est alors adopté sur la base du projet commun et des amendements du Parlement : Conseil et Parlement n'apparaissent donc pas sur un pied d'égalité, le Parlement étant en mesure d'imposer son point de vue au Conseil si ce dernier ne suit pas l'accord obtenu par ses représentants au sein du comité de conciliation, ce qui n'est pas le cas si c'est le Parlement qui devait rejeter le projet commun. En effet, si le Conseil approuve le projet commun mais que le Parlement le rejette, une nouvelle procédure doit être entamée sur la base d'un nouveau projet de la Commission. Une nouvelle procédure s'engage également dans l'hypothèse où Conseil et Parlement rejettent le projet ou si l'un des deux rejette le projet commun tandis que l'autre ne statue pas. En bref, l'échec de la conciliation conduirait la Commission à établir un nouveau projet de budget .

Le projet commun est par ailleurs réputé adopté si les deux institutions ne parviennent pas à statuer, ou si l'une des deux ne parvient pas à statuer tandis que l'autre approuve le projet commun.

En cas de conflit persistant conduisant à l'absence de budget voté en début d'exercice, les premiers mois de l'exercice budgétaire sont assurés par le système des douzièmes provisoires 3 ( * )

Le tableau de la page suivante résume cette multiplicité de cas de figure.

La procédure budgétaire issue du traité de Lisbonne

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2011

2. Les perspectives financières 2007-2013
a) L'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006

Les budgets communautaires adoptés annuellement s'inscrivent dans un cadre pluriannuel communément appelé « perspectives financières ». La vocation principale de ces perspectives est de garantir la discipline budgétaire de l'Union en encadrant les dépenses communautaires regroupées sous cinq rubriques (« Croissance durable », « Conservation et gestion des ressources naturelles », « Liberté, sécurité justice », « L'Union européenne, acteur mondial », « Administration »). Le cadre actuel, fruit de l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006, couvre la période 2007-2013 et traduit la priorité donnée à l'atteinte des objectifs de la stratégie de Lisbonne pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

L'encadrement des dépenses communautaires s'opère au moyen de plafonds annuels de dépenses en crédits d'engagement fixés par rubrique et sous-rubrique budgétaire, de plafonds globaux annuels en crédits d'engagement et en crédits de paiement 4 ( * ) , ainsi que d'un plafond des ressources propres fixé annuellement à 1,23 % du revenu national brut (RNB) de l'Union européenne .

Le tableau de la page suivante rappelle ce cadre pluriannuel pour les différentes rubriques du budget communautaire.

Les perspectives financières 2007-2013 (actualisées au 3 mai 2010)

(en millions d'euros courants)

5 ( * )

NB : Ces plafonds devraient être actualisés au terme de la procédure budgétaire 2011.

Source : commission des finances d'après l'annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2011

b) Les principales révisions des perspectives financières

Le cadre financier 2007-2013 a fait l'objet de plusieurs révisions depuis son adoption en 2006, à l'image du plan de relance européen en matière budgétaire . Votre rapporteur spécial en rappelle brièvement les principales dispositions. La révision des perspectives financières de mai 2009 6 ( * ) fait ainsi suite à une communication de la Commission du 26 novembre 2008 sur le plan de relance européen ainsi qu'aux conclusions du Conseil européen de décembre 2008. Ce plan, qui visait à injecter 200 milliards d'euros dans l'économie 7 ( * ) , devait conduit à appeler une participation du budget communautaire à hauteur de 5 milliards d'euros , répartie sur les deux exercices 2009 et 2010. Au final, les modalités complexes de financement de cette participation ont conduit, suite à un accord entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen, à relever le plafond de la rubrique 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi » de 3,78 milliards d'euros (2 milliards d'euros en 2009 et 1,78 milliard d'euros en 2010), étant entendu que ce relèvement devait être compensé par une baisse à due concurrence des plafonds des autres rubriques, en particulier de celui de la rubrique 2 « Conservation et gestion des ressources naturelles ».

Votre rapporteur spécial souligne également l'existence d'autres révisions significatives :

1) à titre exceptionnel en 2010, l'ajustement technique annuel du cadre financier porte non seulement sur l'ajustement traditionnel lié à l'évolution des prix et du RNB (point 16 de l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006), mais aussi sur un ajustement spécifique à la rubrique 1b (point 17 de l'accord interinstitutionnel). Par décision de la Commission, il s'est donc agi de relever les plafonds d'engagement de cette rubrique au profit de trois Etats membres : la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie , pour des montants 2011-2013 s'élevant respectivement à 632 millions d'euros, 237 millions d'euros et 138 millions d'euros ;

2) l'impasse dans laquelle se trouvait le financement du programme de radionavigation satellitaire Galileo a conduit les deux branches de l'autorité budgétaire, lors de la procédure budgétaire 2008, à relever les plafonds de la sous-rubrique 1a d'un montant de 1,6 milliard d'euros en prix courants sur la période 2008-2013. Ce relèvement a été gagé par des crédits de la rubrique 2 « Conservation et gestion des ressources naturelles » ;

3) les retards survenus dans l'approbation des programmes de développement rural, des programmes FEDER et du fonds européen pour la pêche ont conduit à la reprogrammation de 2 millions d'euros non consommés en 2007 sur les années suivantes, au-delà des plafonds initialement fixés.

c) Les instruments hors cadre

L'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 a assorti les perspectives financières d' instruments hors cadre censés garantir une certaine flexibilité dans la mobilisation des crédits communautaires.

(1) Le fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE)

Le fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) , destiné à venir en aide aux Etats membres confrontés à une catastrophe majeure, peut être mobilisé à hauteur de 1 milliard d'euros courants par an 8 ( * ) . Ce fonds a été utilisé, en 2008, pour un montant de 281 millions d'euros en faveur du Royaume-Uni (inondations de l'été 2007), de la Grèce, de la France (ouragan Dean aux Antilles), de Chypre (sécheresse) et de la Slovénie.

Pour 2009, trois demandes d'aide ont été formulées et acceptées : 494 millions d'euros à la suite du séisme intervenu en avril 2009 dans la région des Abruzzes en Italie, 109 millions d'euros en faveur de la France à la suite des dégâts causés par la tempête Klaus et 12 millions d'euros pour les inondations en Roumanie.

En 2010 , le FSUE devrait être au moins mobilisé à hauteur de 35,6 millions d'euros au profit de la France , au titre des dégâts causés par le passage de la tempête Xynthia en février 2010.

(2) Le fonds européen d'ajustement à la mondialisation (FEM)

Le fonds européen d'ajustement à la mondialisation (FEM) dispose de crédits inscrits dans le budget général de l'UE à titre de provision. Il a pour objet de faciliter la réintégration sur le marché du travail des personnes privées d'emploi. Sa dotation, limitée à 500 millions d'euros par an, n'a été mobilisée qu'à hauteur de 18,6 millions d'euros en 2007, 49 millions d'euros en 2008, 53 millions d'euros en 2009 et 45 millions d'euros en 2010 9 ( * ) .

(3) La réserve pour aide d'urgence aux pays tiers

La réserve pour aide d'urgence aux pays tiers, mobilisable en cas de catastrophe humanitaire, est inscrite au budget de l'Union à titre de provision et placée hors plafond des perspectives financières. Son montant annuel est limité à 221 millions d'euros en prix constants 2004 (soit 249 millions d'euros en 2010). Toutefois, les aides destinées à répondre à la hausse des prix des denrées alimentaires dans les pays en développement ont conduit à un financement exceptionnel en 2008. De manière à le prendre en compte, il a été décidé de modifier l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 afin de réviser le montant de la réserve pour aides d'urgence pour l'année 2008. Ce montant a ainsi été porté à 479 millions d'euros, au lieu de 239 millions d'euros.

En 2009, cette réserve a été rétablie à un niveau plus habituel de 244 millions d'euros 10 ( * ) . Et il en a été de même en 2010 puisqu'il a été choisi de l'arrêter à 249 millions d'euros. Depuis le début de l'année 2010, la réserve d'aide d'urgence a été mobilisée à hauteur de 233 millions d'euros , dont 113 millions d'euros en faveur d'Haïti, 40 millions d'euros en faveur de l'Autorité palestinienne, 40 millions d'euros pour faire face à la crise alimentaire dans la région allant du Sahel au Soudan et 40 millions d'euros en faveur du Pakistan.

(4) L'instrument de flexibilité

L' instrument de flexibilité permet de dépasser, dans la limite de 200 millions d'euros par an (prix courants), les plafonds des perspectives financières afin de financer des dépenses identifiées. Il a été recouru à cet instrument au cours de la négociation budgétaire 2008 afin d'abonder de 70 millions d'euros les actions en faveur du Kosovo et de 200 millions d'euros le financement du programme de radionavigation satellitaire Galileo. Lors de la procédure budgétaire 2009, il a été décidé de mobiliser l'instrument de flexibilité pour financer une part de la réponse de l'UE à la flambée des prix alimentaires, à hauteur de 420 millions d'euros, dont 130 millions d'euros proviennent de montants disponibles au titre de l'année 2007, 200 millions d'euros au titre de l'année 2008 et 90 millions d'euros au titre de l'année 2009.

En 2010 , il est prévu de mobiliser 195 millions d'euros par cet instrument de flexibilité, dont 120 millions d'euros destinés au financement de projets dans le domaine de l'énergie et 75 millions d'euros pour le démantèlement de la centrale nucléaire de Kozloduy (Bulgarie).

(5) Les mesures en faveur de la stabilisation financière en Europe

Le Conseil a décidé, le 9 mai 2010, d'arrêter des mesures visant à préserver la stabilité financière en Europe, à l'instar du mécanisme européen de stabilisation financière , dont l'enveloppe maximale s'élève à 500 milliards d'euros .

Ce mécanisme comprend un volet strictement communautaire , mis en place par un règlement en date du 11 mai 2010, et un volet intergouvernemental , fondé sur un accord conclu le 7 juin 2010 entre les Etats membres de la zone euro et créant le Fonds européen de stabilisation financière. Opérationnel depuis le 4 août 2010, ce dernier permet d'apporter, d'ici au 30 juin 2013, sous forme de prêts ou de lignes de crédits, jusqu'à 440 milliards d'euros, dans des conditions similaires à celles du Fonds monétaire international (FMI), chaque Etat membre de la zone euro octroyant une garantie proportionnelle à sa quote-part dans le capital de la Banque centrale européenne (BCE). En plus de ce volet intergouvernemental, le volet communautaire permet à l'Union européenne de mobiliser jusqu'à 60 milliards d'euros de prêts, contractés par la Commission européenne sur les marchés de capitaux ou auprès d'institutions financières, pour venir en aide à un Etat qui connaît de graves perturbations économiques et financières ou une menace sérieuse de telles perturbations, en raison d'évènements exceptionnels échappant à son contrôle.

A ces deux interventions, d'un montant global de 500 milliards d'euros, s'ajoutent 250 milliards d'euros de prêts du FMI, le dispositif étant en effet activé dans le cadre d'une mesure de soutien commune Union européenne/FMI, ce qui porte la potentialité totale du mécanisme européen de stabilisation financière à 750 milliards d'euros .

En outre, il a été mis en place depuis 2009 un mécanisme de soutien financier des balances des paiements destiné aux Etats membres situés hors de la zone euro , généralement accordé conjointement avec une intervention du FMI. Par emprunt de la Commission sur le marché des capitaux au nom de l'Union, ce mécanisme prévoit, aux conditions de l'emprunt, l'octroi de prêts à ces pays, qui doivent à terme rembourser la Commission. Ce dispositif a vu ses possibilités d'assistance financière être progressivement relevées dans le contexte d'une évolution de la conjoncture économique ayant rendu encore plus nécessaire l'utilisation de ces soutiens 11 ( * ) .

3. L'entrée en vigueur de la décision « ressources propres »
a) Le système des ressources propres

Le financement du budget communautaire, originellement fondé sur des contributions acquittées par chaque Etat membre, repose en principe sur des ressources propres depuis la décision du Conseil du 21 avril 1970, qui affecte à la Communauté des recettes de nature fiscale exigibles de plein droit . On rappelle que les ressources 12 ( * ) du budget communautaire se composent :

1) des trois ressources propres traditionnelles : droits de douane, prélèvements agricoles et cotisations sucre et isoglucose. 25 % de ces ressources sont retenus par les Etats membres au titre des frais de perception ;

2) de la ressource TVA , perçue par application d'un taux d'appel uniforme à une assiette harmonisée et écrêtée à 50 % du revenu national brut (RNB) de chaque Etat membre 13 ( * ) ;

3) de la ressource RNB 14 ( * ) , créée pour équilibrer le budget européen face à l'insuffisance des produits tirés des ressources propres traditionnelles et TVA, et obtenue par application au revenu national brut de chaque Etat membre d'un taux fixé annuellement, dans le cadre de la procédure budgétaire communautaire.

b) La décision du 7 juin 2007

Suite aux conclusions du Conseil européen des 15 et 16 décembre 2005, une décision relative au système des ressources propres de l'Union européenne a été prise le 7 juin 2007 . Ratifiée par la France en juin 2008 15 ( * ) , cette décision comporte les modifications suivantes :

1) les modalités de calcul de la correction britannique sont revues en profondeur. A partir de 2009, les dépenses effectuées dans les Etats membres qui ont adhéré à l'Union européenne après le 30 avril 2004, sauf dépenses agricoles de marché, seront exclues du total des dépenses réparties aux fins de calcul de la correction 16 ( * ) . Cet amendement met fin à un paradoxe qui voulait que le Royaume-Uni, par ailleurs fervent promoteur de l'élargissement, était l'un des Etats membres qui y contribuait le moins financièrement ;

2) le taux d'appel de TVA passe de 0,50 % à 0,30 % pour l'ensemble des Etats membres. Cette modification correspond à la différence constatée entre le taux maximal de 0,50 % et la valeur moyenne du taux gelé appliquée dans le passé, de 0,20 % ;

3) de nouvelles dispositions dérogatoires sont prévues en faveur des Etats membres fortement contributeurs nets au budget communautaire . Bénéficieront ainsi de taux d'appel TVA allégés l'Autriche (0,225 %), l'Allemagne (0,15 %), les Pays-Bas et la Suède (0,10 %) 17 ( * ) . Par ailleurs, une réduction forfaitaire des contributions RNB est instaurée au profit des Pays-Bas (605 millions d'euros par an) et de la Suède (150 millions d'euros), valable pour la période 2007-2013. Ces taux allégés et réductions forfaitaires ont servi, peu ou prou, de « monnaie d'échange » pour obtenir le ralliement de ces pays à la réforme de la « correction » britannique.

c) Une entrée en vigueur en 2009 avec effet rétroactif

La décision ressources propres (DRP) du 7 juin 2007 est entrée en vigueur le 1 er mars 2009 , suite à sa ratification par l'ensemble des Etats membres. Elle a notamment conduit à procéder , pour les exercices 2007 et 2008, aux ajustements de contribution des États membres , qui résultent des nouvelles modalités de calcul introduites par cette décision.

En 2010, il résulte de la DRP une structure de recettes caractérisée par une hausse de la ressource RNB , qui représente 75 % des ressources de l'UE contre 66 % en 2009 18 ( * ) . Cette tendance se confirme puisque la structure prévisionnelle des recettes de l'Union européenne en 2011 est quasiment identique à celle de 2010.

Structure des recettes de l'Union européenne
en 2011 selon le projet de budget du Conseil

Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2011


* 1 Rapport d'information n °17, intitulé « Où vont les agences européennes ? », fait au nom de la commission des finances et de la commission des affaires européennes (2009-2010).

* 2 Trois innovations majeures peuvent être relevées dans le traité de Lisbonne : la suppression de la distinction entre dépenses obligatoires, sur lesquelles le Conseil avait le dernier mot, et non obligatoires, sur lesquelles le Parlement européen avait le dernier mot ; la suppression du principe de deux lectures du projet de budget par le Parlement et le Conseil au profit d'une seule lecture par chacune des institutions ; et, enfin, la création d'un comité de conciliation, chargé en cas de désaccord entre le Conseil et le Parlement d'élaborer un projet commun.

* 3 Chaque mois, sont ouverts des crédits correspondant à un douzième des montants prévus par le budget précédent. Cette situation s'est produit en 1985, 1986 et 1988.

* 4 L'écart entre ce plafond annuel maximal de crédits et le montant voté chaque année par rubrique dans le budget est appelé « marge sous plafond ». Celle-ci ne correspond donc pas à une réserve de crédits mais à un montant de crédits théoriquement mobilisables dans le cadre de l'approbation du budget initial ou d'un budget rectificatif. La mobilisation de la marge sous plafond conduit donc à ouvrir de nouveaux crédits supplémentaires, ce qui augmente, mécaniquement, la contribution des États membres.

* 5 S'agissant des dépenses de pensions, les montants pris en compte sous le plafond de cette rubrique sont calculés nets des contributions du personnel au régime correspondant, dans la limite de 500 millions d'euros aux prix de 2004 pour la période 2007-2013.

* 6 Décision du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 modifiant l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière en ce qui concerne le cadre financier pluriannuel (2007-2013), Journal officiel de l'Union européenne n° L 132/8 du 29 mai 2009.

* 7 Sur ces 200 milliards d'euros, 170 milliards d'euros provenaient des Etats membres et 30 milliards d'euros étaient issus de ressources des institutions de l'Union européenne. Au sein de ces 30 milliards d'euros, 5 milliards d'euros ont été financés par le budget communautaire, le reste provenant de la Banque européenne d'investissement (BEI).

* 8 Les crédits d'engagement peuvent être inscrits au-delà des plafonds des rubriques concernées.

* 9 Depuis le début de l'année 2010, quatorze demandes de mobilisation du FEM, pour un montant total de 45,3 millions d'euros, ont été approuvées par la Commission et transmises au Conseil et au Parlement européen pour décision : 6,2 millions d'euros en faveur de l'Allemagne dans le secteur de la construction automobile ; 1,5 million d'euros en faveur de la Lituanie, répartis entre le secteur des équipements électriques (0,3 million d'euros), du bâtiment (0,7 million d'euros) et du textile (0,5 million d'euros) ; 13,2 millions d'euros en faveur de l'Espagne, répartis entre les secteurs de la céramique (6,6 millions d'euros), du bois (2 millions d'euros), du textile (1,8 million d'euros) et de l'industrie automobile (2,8 millions d'euros) ; 2,6 millions d'euros en faveur de l'Irlande pour les secteurs de la céramique et du cristal ; 17,6 millions d'euros en faveur du Danemark pour les secteurs des machines mécaniques et électroniques ; 2,4 millions d'euros en faveur du Portugal dans le domaine de technologies de l'information ; 1,8 million d'euros en faveur du secteur des semi-conducteurs aux Pays-Bas.

* 10 Ainsi, en 2009, la réserve d'aide d'urgence a pu être utilisée à hauteur de 188 millions d'euros, dont 65 millions d'euros en faveur du Pakistan et de la Somalie, 45 millions d'euros en faveur de l'Asie du sud-est et de la Corne de l'Afrique et 78 millions d'euros pour la facilité alimentaire.

* 11 Plafonné à l'origine à 12 milliards d'euros, l'encours des prêts pouvant être accordés aux Etats membres a été porté à 25 milliards d'euros pour le premier semestre 2009, puis à 50 milliards d'euros à partir de l'été 2009. Trois pays bénéficient actuellement du mécanisme : la Hongrie, pour un montant maximal de 6,5 milliards d'euros mobilisable jusqu'à novembre 2010, la Lettonie pour un montant maximal de 3,1 milliards d'euros mobilisable jusqu'à janvier 2012, et la Roumanie pour un montant maximal de 5 milliards d'euros mobilisable jusqu'à mai 2012

* 12 Ces ressources sont plafonnées à 1,23 % du revenu national brut (RNB) de l'Union en crédits de paiement, et à 1,3 % en crédits d'engagement. D'autres recettes les complètent, tirées des impôts et autres prélèvements opérés sur les rémunérations du personnel communautaire, des intérêts bancaires, des contributions d'Etats tiers à l'Union au titre de leur participation à certaines politiques, du remboursement d'aides communautaires non consommées, d'intérêts de retard, et du report du solde de l'exercice précédent.

* 13 Cet écrêtement vise à éviter de faire peser une charge trop lourde sur les Etats membres les moins prospères, l'hypothèse étant faite que la part relative de la consommation - et donc de la TVA - dans le revenu national est d'autant plus élevée que l'Etat est moins riche.

* 14 Le revenu national brut (RNB) est la somme des revenus perçus en un an par les agents économiques résidants sur le territoire. Son calcul repose sur la somme du PIB et du solde des flux de revenus primaires avec le reste du monde.

* 15 La France a ratifié cette décision par le vote de la loi n° 2008-570 du 19 juin 2008 autorisant l'approbation de la décision du Conseil relative au système des ressources propres de l'Union européenne ; cf. le rapport n° 203 (2007-2008) de votre rapporteur spécial, fait au nom de la commission des finances, relatif au projet de loi autorisant l'approbation de la décision du Conseil relative au système des ressources propres de l'Union européenne.

* 16 Cette révision, applicable sans limitation de durée, devrait toutefois ne pas conduire à une réduction du « chèque » britannique supérieure à 10,5 milliards d'euros sur la période 2007-2013. L'effort britannique sur cette période est en effet progressif (« phasing-in ») : à partir de 2009, 20 % des dépenses relatives à l'élargissement seront exclues du calcul du chèque, puis 70 % en 2010 et 100 % à partir de 2011. En contrepartie de cet effort, la contribution supplémentaire du Royaume-Uni est plafonnée entre 2007 et 2013.

* 17 Le gain net sur la période représente 200 millions d'euros pour l'Autriche, 7,4 milliards d'euros pour l'Allemagne, 2,7 milliards d'euros pour les Pays-Bas et 1,4 milliard d'euros pour la Suède ; le « manque à gagner » pour le budget communautaire sera compensé, à due concurrence, par l'accroissement de la ressource RNB.

* 18 Cette augmentation de la part de la ressource RNB dans les recettes de l'Union européenne s'accompagne en 2010 et en 2011 d'une réduction en miroir de la part de la ressource TVA (de 17 % à 11,6 % puis 13 %) ainsi que de celle des droits de douane (de 15 % à 11,7 % puis 10,9 %).

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