D. DES PERSPECTIVES DE SOLDE PUBLIC QUI DEMEURENT PRÉOCCUPANTES

Au total, les perspectives d'évolution du solde public demeurent préoccupantes.

A titre d'illustration, le tableau ci-après distingue différents scénarios de finances publiques :

- les lettres (A, B et C) correspondent à des hypothèses de croissance des dépenses publiques en volume respectivement égales à celles du Gouvernement (A), de 1 % par an (B) et de 1,5 % par an (C) (contre, on le rappelle, une croissance moyenne des dépenses de 2,4 % en volume de 2000 à 2009) ;

- les chiffres (1, 2 et 3) correspondent à des hypothèses de croissance du PIB respectivement égales à celles du Gouvernement (1), de 2 % par an (2) (après 1,75 % en 2011 54 ( * ) ) et de 1,75 % par an (3).

Le scénario A2 correspond à celui présenté ci-avant, suggérant que le Gouvernement pourrait devoir annoncer à l'automne 2011 des mesures supplémentaires pour 10 milliards d'euros en 2012.

La trajectoire de finances publiques : quelques scénarios

(montants en points de PIB)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Scénario A1 : scénario du Gouvernement

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

2,0

2,25

2,5

2,5

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-5,7

-4,6

-3,0

-2,0

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,6

-3,7

-2,6

-2,0

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,2

-0,1

0,0

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-0,9

-0,7

-0,4

-0,1

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

84,6

86,0

85,6

84,1

Scénario A2 : scénario du Gouvernement + croissance de 1,75 % en 2011 et 2 % ensuite

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

2,0

2,0

2,0

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-5,9

-5,1

-4,2

-3,3

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,7

-3,9

-3,2

-2,7

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,2

-0,1

0,0

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,0

-0,9

-0,9

-0,7

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,1

87,0

88,1

88,2

Scénario A3 : scénario du Gouvernement + croissance de 1,75 % par an

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

1,75

1,75

1,75

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-5,9

-5,3

-4,7

-4,1

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,7

-4,1

-3,4

-3,1

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,2

-0,1

0,0

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,0

-1,1

-1,1

-1,1

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,1

87,5

89,2

90,3

Scénario B1 : scénario du Gouvernement + croissance des dépenses de 1 % en volume

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

2,0

2,25

2,5

2,5

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-5,9

-4,9

-3,5

-2,8

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,6

-3,7

-2,7

-2,3

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,1

-0,9

-0,5

-0,3

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

84,9

86,4

86,4

85,7

Scénario B2 : croissance des dépenses de 1 % en volume + croissance du PIB de 1,75 % en 2011 et 2 % ensuite

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

2,0

2,0

2,0

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-6,1

-5,4

-4,8

-4,2

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,7

-4,0

-3,3

-3,0

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,2

-1,2

-1,1

-1,0

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,3

87,6

89,2

90,2

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2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Scénario B3 : croissance des dépenses de 1 % en volume + croissance du PIB de 1,75 %

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

1,75

1,75

1,75

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-6,1

-5,8

-5,5

-5,3

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,7

-4,1

-3,7

-3,5

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,2

-1,3

-1,5

-1,5

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,3

88,1

90,7

92,9

Scénario C1 : scénario du Gouvernement + croissance des dépenses de 1,5 % en volume

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

2,0

2,25

2,5

2,5

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-6,1

-5,4

-4,3

-3,8

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,7

-3,9

-3,1

-2,8

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,2

-1,1

-0,9

-0,8

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,1

87,2

88,0

88,2

Scénario C2 : croissance des dépenses de 1,5 % en volume + croissance du PIB de 1,75 % en 2011 et 2 % ensuite

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

2,0

2,0

2,0

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-6,4

-6,0

-5,6

-5,3

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,8

-4,2

-3,7

-3,5

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,3

-1,4

-1,5

-1,5

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,6

88,4

90,8

92,8

Scénario C3 : croissance des dépenses de 1,5 % en volume + croissance du PIB de 1,75 %

Croissance du PIB

2,4

0,2

-2,6

1,6

1,75

1,75

1,75

1,75

Solde des administrations publiques

-2,7

-3,3

-7,5

-7,0

-6,4

-6,3

-6,3

-6,4

Administrations publiques centrales

-2,3

-3,1

-6,4

-5,8

-4,8

-4,4

-4,1

-4,1

Administrations publiques locales

-0,4

-0,5

-0,3

-0,1

-0,2

-0,3

-0,4

-0,2

Administrations de sécurité sociale

0,0

0,3

-0,8

-1,2

-1,3

-1,6

-1,9

-2,1

Dette publique

63,9

67,7

78,3

81,7

85,6

89,0

92,3

95,5

Remarques :

Dans les scénarios des séries B et C, on suppose que les administrations publiques locales poursuivent un objectif de solde, fixé par convention à - 0,3 point de PIB en moyenne (les fluctuations provenant du cycle électoral).

Les mesures nouvelles sur les recettes des administrations publiques centrales et des administrations de sécurité sociales sont fixées à 17,7 milliards d'euros en 2011 (dont 12,9 milliards d'euros de mesures résultant de mesures postérieures au 1 er juillet 2010) et 3 milliards d'euros chacune des trois années suivantes, conformément à la LPFP 2011-2014.

Sources : Insee, présent projet de programme de stabilité, calculs de la commission des finances

Tous ces scénarios sont vraisemblables, et aucun ne peut être qualifié de pessimiste.

Même si le scénario de dépenses publiques du Gouvernement était vérifié, une croissance de 1,75 % par an conduirait, sans effort supplémentaire, à un déficit de 5,9 points de PIB en 2011 (contre 5,7 points de PIB selon le Gouvernement), et de plus de 4 points de PIB en 2014.

Le respect des obligations stricto sensu de la LPFP (normes de dépenses de l'Etat et des régimes obligatoires de base de sécurité sociale uniquement + obligation de respecter la trajectoire de solde tant que la croissance n'est pas inférieure à 2 %) peut être assimilé, pour ce qui concerne le solde :

- au scénario du Gouvernement (A1) si la croissance est de 2 % ;

- à un scénario intermédiaire entre les scénarios A1 et A2 si la croissance est de 1,75 %. Le déficit public serait alors de l'ordre de 2,7 point de PIB en 2014.

Si les gouvernements se contentaient de respecter les normes de dépenses de l'Etat et des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, sans prendre de mesures supplémentaires pour compenser la moindre croissance, le scénario le plus plausible semble être le scénario B3 (croissance des dépenses de 1 % par an en volume + croissance du PIB de 1,75 % par an en volume). Le déficit serait de 6,1 points de PIB en 2011 et, du fait du faible différentiel entre la croissance du PIB et des dépenses publiques, ne diminuerait que de 0,3 point par an environ, d'où un déficit de 5,5 points de PIB en 2013 et 5,3 point de PIB en 2014.

Les scénarios C1 à C3 indiquent ce qui se passerait si le Gouvernement se contentait de ramener la croissance des dépenses publiques à 1,5 % en volume (contre une moyenne on le rappelle de 2,4 % de 2000 à 2009). Sans augmentation supplémentaire des prélèvements obligatoires, avec une croissance de 1,75 %, le déficit serait encore de 6,4 points de PIB en 2014. Le scénario C2, légèrement moins défavorable (il suppose que la croissance est de 2 % à partir de 2012), conduit à un déficit de 5,3 points de PIB en 2014. Il correspond à peu près à celui retenu par la Commission européenne à l'automne 2010 et évoqué ci-avant. Il doit être absolument évité, car il placerait la France en mauvaise position au sein de la zone euro, et susciterait un risque de fortes tensions sur les taux d'intérêt - c'est-à-dire, dans le contexte actuel, un risque de crise majeure pouvant mettre en cause la soutenabilité de la dette publique.

*

* *

Au total, l'examen de ce projet de programme de stabilité s'avère décevant. Même si les résultats d'exécution de 2010 sont meilleurs que prévus, le Gouvernement persiste à afficher des hypothèses macro-économiques volontaristes. Il se place donc de lui-même dans la situation d'avoir à effectuer à l'automne prochain un difficile arbitrage. Soit il en reste à une présentation formellement cohérente de la programmation triennale, sans vouloir documenter de manière précise les réductions de dépenses budgétaires et fiscales nécessaires pour respecter le « chemin de convergence », et il prendra le grave risque d'avoir à affronter les critiques des institutions européennes et le jugement incertain des marchés financiers ; soit il concrétise l'approche de sincérité évoquée début avril par le ministre du budget, mais cela pourrait signifier d'accroître la pression budgétaire de 6 à 10 milliards d'euros en 2012, ce qui est loin d'être impossible, mais ce qui est inusuel à la veille d'une année électorale majeure. C'est bien pourtant la seconde branche de l'alternative qui est la moins risquée des deux, tant il est vrai que la compétition de 2012 se situera largement sur le terrain de la crédibilité.

En termes de méthodes, et à la veille d'examiner le projet de loi de révision constitutionnelle destinée à mieux garantir le retour à l'équilibre des finances publiques, votre rapporteur général exprimera deux regrets. Tout d'abord, celui que les avancées initiées par le Sénat à l'automne, lors de l'examen de la loi de programmation triennale, ne soient pas confirmées par ce programme de stabilité, qu'il s'agisse de la présentation des objectifs de dépense en milliards d'euros courants, de la recherche d'une séquence plus prudente de croissance économique et de progression de la dépense publique, de l'exigence d'un vote parlementaire - après examen approfondi et amendements - sur la « trajectoire des finances publiques »... Il sera proposé au Sénat de maintenir ces acquis.

Ensuite, il convient de rappeler combien il serait utile à notre pays de tourner le dos à une pratique révolue et totalement inefficace consistant à « proclamer » des hypothèses économiques décalées par rapport à la réalité. Votre rapporteur général n'est pas un admirateur de l'approche communautaire en matière d'automaticité des sanctions pour les Etats qui divergeraient par rapport à la tenue de leurs obligations, mais il persiste à penser que le respect de la souveraineté nationale suppose la reconstitution la plus rapide possible de nos marges de manoeuvre. A la veille de l'échéance de 2012, l'affirmation du principe de prudence en matière de gestion des finances publiques est plus que jamais indispensable.


* 54 Prévisions de l'Insee pour les deux premiers trimestres, puis par convention croissance de 2 % en rythme annualisé les deux trimestres suivants.

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