H. DÉCENTRALISATION ET CONSEIL DE L'EUROPE

Nos collectivités territoriales sont soumises aux nombreuses décisions des autorités communautaires. Mais, pour rester dans la cadre de ce rapport, nous nous référerons aux textes de principes issus du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe.

Le premier date du 15 octobre 1985 : il s'agit de la Charte européenne de l'autonomie locale, ratifiée par la France en 2007.

Son préambule rappelle que les collectivités locales sont l'un des principaux fondements d'un régime démocratique tout comme la participation des citoyens à leur gestion.

La démocratie et la décentralisation du pouvoir requièrent la défense et le renforcement de l'autonomie locale.

L'article 2 de la Charte dispose que le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et autant que possible dans la Constitution.

L'article 3 alinéa 1 er définit l'autonomie locale :

« Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques ».

L'alinéa 2 de ce même article précise :

« Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux ».

Bénéficiant de compétences d'attribution, des principes de subsidiarité et de proximité, des droits de consultation et d'adaptation, elles disposent d'une capacité d'organisation interne et doivent disposer d'un personnel statutaire de qualité recruté sur les principes du mérite et de la compétence, bénéficiant « des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière » (article 6).

Le contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit viser qu'à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Toutefois, il peut devenir contrôle d'opportunité par des autorités de niveau supérieur pour « les tâches dont l'exécution est déléguée aux collectivités locales » .

L'article 7 traite des conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local : libre exercice du mandat, compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat, principe de la fixation législative des incompatibilités.

L'article 9 est consacré aux ressources financières des collectivités locales :

« Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences. (...) Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi ».

L'alinéa 4 de l'article fait appel à la diversification, à l'évolutivité de la ressource afin de suivre autant que possible « l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences ». L'alinéa 5 traite de la péréquation pour corriger les inégalités.

La Charte précise que l'octroi de subvention ne doit pas porter atteinte « à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence » ; que les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.

L'article 10 reconnaît le droit d'association aux collectivités locales et l'article 11 leur prévoit un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale.

Tout en ayant pris le temps pour ratifier cette Charte (21 ans après sa signature), la France l'a fait en posant des réserves 140 ( * ) .

Les déclarations consignées par la France dans son instrument de ratification
de la Charte européenne de l'autonomie locale

La France a consigné trois déclarations, dans le dépôt de ratification qu'elle a déposé le 17 janvier 2007 :

1. Déclaration relative à l'article 3 concept de l'autonomie locale »)

Il s'agit d'une réserve formulée dans les termes suivants :

« La République française considère que les dispositions de l'article 3, paragraphe 2, doivent être interprétées comme réservant aux États la faculté d'instituer la responsabilité, devant l'organe délibérant d'une collectivité territoriale, de l'organe exécutif dont elle est dotée ».

On rappellera que l'article 3, paragraphe 2, prévoit notamment que le droit à l'autonomie des collectivités locales « est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux ».

2. Déclaration relative à l'article 12 engagements »)

« Conformément à l'article 12, paragraphe 2, la République française se considère liée par tous les paragraphes de la Partie I de la Charte, à l'exception du paragraphe 2 de l'article 7 ».

Rappel : le paragraphe 2 de l'article 7 prévoit que le statut des élus locaux « doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante »

3. Déclaration relative à l'article 13 collectivités auxquelles s'applique la Charte »)

« Conformément à l'article 13, les collectivités locales et régionales auxquelles s'applique la Charte sont les collectivités territoriales qui figurent aux articles 72, 73, 74 et au titre XIII de la Constitution ou qui sont créées sur leur fondement. La République française considère en conséquence que les établissements publics de coopération intercommunale, qui ne constituent pas des collectivités territoriales, sont exclus de son champ d'application ».

Deux textes postérieurs à la Charte ont été adoptés par le Conseil de l'Europe : la Charte urbaine européenne (1992) et la Charte urbaine européenne II (2008) 141 ( * ) .

La première Charte urbaine (1992)

Elle reconnaît le fait urbain dans le développement de nos sociétés et déclare que les citoyennes et les citoyens des villes européennes ont droit à la sécurité, à un environnement sain et non pollué, à l'emploi, au logement, à la mobilité, à la santé, aux sports et aux loisirs, à la culture, à l'intégration multiculturelle, à une architecture et un environnement physique de qualité, à la coexistence harmonieuse des fonctions, à la participation, à un développement économique durable, à des biens et services, aux ressources et richesses naturelles, à l'épanouissement personnel, à la collaboration entre les municipalités, à des mécanismes et structures financières et à l'égalité.

La ville future, celle du droit à la ville, est une ville de la coopération, de la coordination, de la transversalité.

La seconde Charte urbaine (2008)

Elle met l'accent sur une nouvelle urbanité marquée par le caractère durable. La ville européenne devient le lieu souhaitable d'un compromis historique entre l'économique, le social et l'écologie. Aux gouvernements urbains de faire « une ville de citadins-citoyens », « une ville durable », « une ville solidaire », « une ville de la connaissance ».

Les auteurs de ce texte sont conscients des défis à relever mais l'optimisme, la confiance, l'ouverture les animent.

Ils considèrent les villes comme un atout pour les sociétés, des animateurs du territoire « solidaires des autres territoires » . Il n'existe pas de modèle unique de développement : « nos villes ont une personnalité propre, elles sont toutes différentes et leur diversité est une chance pour l'Europe ». Message optimiste, ambitieux, exigeant, cette Charte porte « le projet européen de la ville, mélange indissociable de valeurs humanistes, de liberté individuelle, de prospérité économique, de solidarité sociale, de respect de la planète et de culture vivante. 142 ( * ) »


* 140 L'Allemagne a ratifié le 17/05/1988 ; l'Autriche le 23/09/1987 ; le Danemark le 03/02/1988 ; le Luxembourg le 15/05/1987 ; l'Italie le 11/05/1990 ; la Suède le 29/08/1989 ; Andorre, Monaco, Saint Marin, Serbie et Monténégro ont ratifié postérieurement à la France.

* 141 Ces textes n'ont pas valeur contraignante.

* 142 « Manifeste pour une nouvelle urbanité ». Collection Références, Local et Régional, 2008, p. 34.

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