B. UNE REPRISE DE DETTE SANS PRÉCÉDENT

L'année 2010 a été marquée par la plus importante reprise de dette sociale jamais effectuée avec le transfert à la Cades de près de 130 milliards, dont 68 au maximum en 2011, ce qui représente un quasi-doublement de la dette sociale reprise par celle-ci depuis sa création en 1996.

Ces 130 milliards de dette comprennent l'intégralité des déficits du régime général et du FSV pour 2009 et 2010, le déficit prévisionnel de l'assurance maladie et de la famille pour 2011 et les déficits prévisionnels de la branche vieillesse (Cnav et FSV) de 2011 à 2018. La réforme des retraites prévoit en effet un retour à l'équilibre de la branche vieillesse en 2018 et tous les déficits qu'il est prévu d'enregistrer d'ici cette date sont pris en compte par le traitement de la dette ainsi organisé.

Le plan de financement de cette nouvelle dette comporte trois volets :

- une partie de la dette sera refinancée grâce à l'allongement de la durée de vie de la Cades , dont le terme devrait passer de 2021 à 2025. Le Parlement a en effet adopté en novembre 2010 un projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale qui a permis de lever, à titre exceptionnel, le verrou posé par le législateur dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, à savoir l'impossibilité de transférer de nouvelles dettes à la Cades sans lui affecter parallèlement les ressources nécessaires pour y faire face.

Ces quatre années supplémentaires d'existence de la caisse permettent de lui transférer environ 34 milliards d'euros de dette sans accroissement des ressources qui lui sont affectées ;

- par ailleurs, de nouvelles ressources ont été transférées à la caisse : la loi de financement de la sécurité sociale a prévu l' affectation à la Cades de 0,28 point de CSG , jusqu'alors affecté à la branche famille de la sécurité sociale.

Initialement, le Gouvernement avait prévu d'attribuer à la Cades plusieurs recettes concernant le secteur des assurances. Toutefois, lors de l'examen du projet de loi organique sur la gestion de la dette sociale, le Sénat et l'Assemblée nationale ont souhaité que la Cades reçoive des recettes dynamiques et pérennes.

Le Sénat a ainsi inscrit, dans la loi organique, une clause de garantie de recettes pour la Cades . Chaque année, la loi de financement devra assurer le respect de la règle d'affectation des recettes nécessaires au remboursement des dettes sociales reprises. Si les recettes affectées par le Gouvernement ne permettent pas le respect de cette règle, il faudra que la loi de financement prévoie une augmentation, par exemple de la CRDS pour, le cas échéant, combler la différence.

L'Assemblée nationale a accepté cette clause tout en ajoutant que les recettes de la Cades sont assises sur une assiette qui est celle de la CRDS et de la CSG.

Dans ces conditions, le législateur a affecté le panier « assurances » à la branche famille de la sécurité sociale et transféré 0,28 point de CSG de cette branche vers la Cades ;

- enfin, la loi de financement pour 2011 a prévu l'affectation à la Cades de la recette que le fonds de réserve pour les retraites (FRR) percevait jusqu'alors, soit 65 % du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital. Par ailleurs, le FRR versera chaque année à la caisse 2,1 milliards d'euros au titre de la réalisation de ses actifs. Le FRR devrait pouvoir, avec un tel objectif, continuer à exercer ses activités de placement jusqu'en 2024, date à laquelle ses actifs résiduels seront transférés à la Cades.

Ces deux catégories de recettes doivent permettre de transférer 62 milliards de dette à la Cades et de financer ainsi l'amortissement des déficits de la branche vieillesse sur la période 2011-2018.

*

Depuis le début de l'année, la Cades a déjà financé un transfert de dettes à hauteur de 55 milliards d'euros .

Au 31 décembre 2011, la dette amortie par la Cades depuis sa création atteindrait 59,3 milliards. La dette restant à amortir à cette date s'élèverait alors à 143,3 milliards, étant entendu que ce chiffre ne prend pas en compte les dettes à reprendre au titre de la branche vieillesse au cours des années 2012 à 2018.

Amortissement de la dette reprise par la Cades

(en millions d'euros)

Année de reprise de la dette

Dette reprise cumulée

Estimation amortissement de l'année

Estimation amortissement cumulé

Situation nette (dette restant à rembourser
au 31 décembre
de l'année)

1996

23 249

2 184

2 184

21 065

1997

25 154

2 907

5 091

20 063

1998

40 323

2 444

7 535

32 788

1999

42 228

2 980

10 515

31 713

2000

44 134

3 226

13 741

30 393

2001

45 986

3 021

16 762

29 224

2002

48 986

3 227

19 989

28 997

2003

53 269

3 296

23 285

29 984

2004

92 366

3 345

26 630

65 736

2005

101 976

2 633

29 263

72 713

2006

107 676

2 815

32 078

75 598

2007

107 611

2 578

34 656

72 955

2008

117 611

2 885

37 541

80 070

2009

134 611

5 260

42 801

91 810

2010

134 611

5 135

47 936

86 675

2011 (p)

202 611

11 372

59 308

143 303

Le graphique suivant retrace l'évolution de la dette sociale depuis la création de la Cades en 1996.

La dette votée, reprise et amortie après la reprise de dette

*

Votre commission considère que l'opération de reprise de dette sociale en cours était indispensable. Elle constate cependant que l'allongement de la durée de vie de la Cades a conduit à remettre en cause une règle que le législateur organique avait fixé pour éviter de reporter sur les générations futures le poids des dettes actuelles.

Par ailleurs, votre commission a plaidé, lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2011, en faveur d'une hausse de la CRDS pour financer la reprise de dette. Cet impôt présente en effet l'avantage d'être lisible et de reposer sur une assiette large couvrant l'ensemble des revenus.

Même si d'autres options ont été retenues, ce débat n'est pas terminé. En effet, d'autres reprises de dettes seront nécessaires pour prendre en charge les déficits qui interviendront à partir de 2012, seuls les déficits de la branche vieillesse jusqu'en 2018 étant couverts par la reprise votée en 2010.

Le Parlement devra donc débattre à nouveau des ressources à affecter à la Cades pour faire face à ces reprises.

D'une manière générale, votre commission estime souhaitable qu'un large débat soit engagé sur les recettes de la sécurité sociale, afin que celle-ci soit dotée de ressources dynamiques contribuant à la définition d'une trajectoire de retour à l'équilibre des comptes. Ce dernier ne pourra être atteint par la seule voie des économies de dépenses. Une augmentation au moins temporaire des recettes sera indispensable pour atteindre cet objectif.

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