2. La crise économique a retardé la cession des outillages
a) La cession d'outillages est un principe général mais non intangible

La loi du 4 juillet 2008 a imposé aux Grands ports maritimes de cesser, sauf cas exceptionnels, de détenir ou d'exploiter des outillages de manutention . Les ports ont dû les transférer en priorité aux opérateurs privés de la place portuaire, dans un délai maximal de deux ans suivant l'adoption de leur projet stratégique, soit au plus tard entre fin mars et début juin 2011, selon le calendrier propre à chaque GPM. Ainsi, l'exploitation par les ports des outillages utilisés pour les opérations de chargement, déchargement, manutention et stockage liées aux navires est interdite sauf dans quatre cas exceptionnels :

- en régie ou par l'intermédiaire de filiales, pour les activités ou prestations accessoires (dans les faits, il s'agit essentiellement de maintenance des outillages) ;

- par l'intermédiaire de filiales pour un motif d'intérêt national (pour les terminaux pétroliers par exemple) ;

- par l'intermédiaire d'une filiale, après échec d'un appel à candidatures pour la vente des outillages ;

- en détenant des participations minoritaires dans une personne morale de droit privé.

L'exploitation des outillages par le port est subordonnée à son inscription dans le projet stratégique et à l'accord de l'autorité administrative compétente.

L'article 9 de la loi a institué un ordre de priorité dans la procédure de vente des outillages au profit des opérateurs présents sur la place portuaire, s'ils en font la demande . Dans le cas contraire, ou dans l'hypothèse où les négociations n'ont pas abouti au bout de trois mois, le port lance un appel à candidatures. Si cette deuxième étape se révèle infructueuse, le port crée une filiale pour un durée maximale de cinq ans, puis lance un nouvel appel à candidature, cette étape se renouvelant aussi longtemps que les outillages de la filiale ne sont pas vendus.

La cession des outillages n'a pas concerné de manière uniforme les ports, compte tenu de la nature de leurs trafics et des achats d'engins qu'avaient effectués certains opérateurs de terminaux. Schématiquement, la loi visait essentiellement les opérateurs de manutention de conteneurs, et plus secondairement les opérateurs d'hydrocarbures et de vracs solides. A Rouen par exemple, où l'activité céréalière et le trafic de produits pétroliers représentent chacun un tiers du tonnage portuaire du port, la cession des outillages n'a concerné qu'une faible partie de l'activité portuaire, évaluée entre 10 à 15 %.

b) Le rôle essentiel de la Commission nationale d'évaluation des cessions d'outillages

La Commission nationale d'évaluation des cessions d'outillages portuaires était chargée de garantir une procédure transparente de vente des outillages publics aux entreprises privées de manutention. Les personnalités composant cette commission avaient toutes été proposées en raison de leur connaissance des processus de transfert et de privatisation ou de leur expérience dans le domaine portuaire 13 ( * ) . Votre groupe de travail a constaté qu'elle avait reçu un satisfecit général.

La commission a veillé à ce que, que les outillages publics ne soient cédés « ni à titre gratuit, ni à un prix inférieur à la valeur vénale » 14 ( * ) . L'objectif était de garantir un « juste prix » afin de ne pas pénaliser les ports dans la vente des outillages tout en proposant un prix attractif aux entreprises confrontées à une crise économique sévère. Elle a plus globalement contrôlé le respect de la procédure de vente des biens publics. La commission nationale d'évaluation a émis un avis public par terminal sur les dossiers de cession des outillages publics que lui ont adressés les présidents des directoires des grands ports maritimes. Les avis portant sur trente terminaux des sept grands ports maritimes sont accessibles sur le site du ministère de l'écologie.

Les grands ports maritimes ont bénéficié ensuite d'un délai de 6 mois à compter de la publication de l'avis rendu par la commission nationale d'évaluation des cessions d'outillages portuaires pour signer leurs actes de cession avec les opérateurs concernés.

c) La cession des outillages est désormais une réalité

Le transfert des outillages est désormais effectif dans tous les ports . Les outillages ont été cédés par le port de Rouen aux entreprises de manutention le 17 mai 2010 et par le port du Havre au 1 er juillet 2010. A Dunkerque et La Rochelle, ils l'ont été en octobre 2010. A Marseille, les transferts de propriété sont intervenus entre le 3 mai et le 31 mai 2011, soit pour les derniers transferts à la même date que celle prévue pour le port de Bordeaux. Enfin, les transferts d'outillages sont intervenus le 11 juin 2011, pour le port de Nantes-Saint-Nazaire (à l'exception d'une grue). On estime que quatre-vingt outillages portuaires environ ont été vendus (essentiellement des portiques et des grues), mais il a été impossible de savoir quelle somme cette vente a rapportée aux ports. Beaucoup d'outillages étaient anciens, et le versement du paiement a souvent été étalé sur de nombreuses années.

Toutefois, la cession des outillages ne représentait pour les entreprises qu'un avantage théorique tant qu'elle n'était pas accompagnée du transfert des conducteurs d'engins.


* 13 Cette commission, constitué d'experts indépendants, était présidée par M. Jean-François Bernicot, magistrat à la Cour des Comptes, et comprenait M. Daniel Fidelin, député de Seine-Maritime, maire de Mannevillette, conseiller général de la Seine-Maritime, en sa qualité de représentant des collectivités territoriales sur lesquelles sont implantés les grands ports maritimes et de MM. Claude Gressier et Jacques Maire, en qualité de personnalités qualifiées.

* 14 Cf. l'article L. 3211-18 du code général de la propriété des personnes publiques.

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