Recommandation 1991 (2012) - Garantir l'autorité et l'efficacité de la Convention européenne des droits de l'Homme2 ( * )

1. L'Assemblée parlementaire, rappelant sa Résolution 1856 (2012), « Garantir l'autorité et l'efficacité de la Convention européenne des droits de l'Homme » (STE n o 5), exhorte vivement le Comité des Ministres, garant statutaire de la viabilité du mécanisme de surveillance, à veiller :

1.1. à résoudre les difficultés financières du Conseil de l'Europe au plus haut niveau politique, de manière à ce que l'Organisation puisse exercer efficacement son mandat en matière de droits de l'Homme ;

1.2. à ce que l'Assemblée et les parlements nationaux prennent pleinement part à la mise en oeuvre du « processus d'Interlaken » et aient la possibilité d'examiner attentivement les rapports nationaux remis dans ce contexte.

2. Par ailleurs, l'Assemblée invite instamment le Comité des Ministres à adresser une recommandation aux États membres pour leur demander de renforcer sans tarder, par des mesures législatives, judiciaires ou autres, l'autorité de la chose interprétée ( res interpretata ) des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Annexe 2

Recommandation 1990 (2012) - Le droit de chacun de participer à la vie culturelle3 ( * )

1. L'Assemblée parlementaire rappelle que le droit de chacun de participer à la vie culturelle suppose un accès libre et égal pour tous à des ressources culturelles diversifiées. Cette participation peut être plus ou moins active, selon que l'on est un public spectateur, auditeur, que l'on pratique une activité en amateur, ou que l'on s'engage dans une profession artistique comme artiste ou créateur.

2. L'Assemblée est convaincue qu'il est de la responsabilité des États et des collectivités publiques locales d'assurer les conditions nécessaires pour « développer toute l'étendue des talents que l'Homme a reçus de la nature et par delà établir entre les citoyens une égalité de fait et rendre réelle l'égalité politique reconnue par la loi » (Condorcet, 1792).

3. Tous les acteurs publics et privés sont concernés par la richesse culturelle commune mais l'État a un rôle primordial à assumer. Acteur culturel majeur, l'État n'a pas simplement la responsabilité d'assurer une offre diversifiée de services culturels, à travers l'ensemble de ses institutions publiques, il a aussi des fonctions d'initiation, de stimulation et de régulation des synergies entre les institutions publiques et les organisations du secteur associatif et privé qui contribuent à la protection et la promotion du patrimoine culturel, à la création artistique et à l'accès du public à l'ensemble des ressources culturelles et artistiques.

4. L'État a également le devoir de prendre en compte les profondes mutations que connaissent les conditions d'accès à la culture, avec l'essor de la culture numérique et de l'internet, de favoriser l'émergence de nouveaux artistes et de nouvelles formes d'expression, de développer les nouveaux modes de diffusion des contenus culturels pour les rendre accessible à tous.

5. Dans un contexte de démocratie forte, garante de la diversité, il convient d'interpréter les obligations de respect, de protection et de réalisation des droits culturels comme une obligation intégrée de résultat en matière de démocratisation culturelle pour un égal accès aux arts. Cette obligation intégrée de résultat implique la réalisation des conditions évolutives qui permettent à chacune et à chacun de s'épanouir et de participer à la vie culturelle, sociale et politique.

6. L'accès aux arts permet à tout être humain d'équilibrer le champ de l'intelligence par celui du sensible. L'un et l'autre doivent se compléter et s'enrichir mutuellement pour l'épanouissement de la personnalité de chacun pour une nouvelle approche des autres. Grâce aux liens culturels et aux dialogues interculturels, l'accès aux arts contribue ainsi à la promotion du « bien vivre ensemble » au sein d'une société, d'un pays, et même entre les peuples, favorisant les relations entre les citoyens du monde par une meilleure compréhension mutuelle. En outre, l'accès aux arts et la libre expression artistique et culturelle contribuent au développement de l'esprit critique et donc à renforcer la citoyenneté démocratique.

7. L'accès aux arts est particulièrement important pour les jeunes, notamment ceux de 15 à 25 ans, qui se trouvent à un moment crucial de leur existence pendant laquelle ils construisent leur devenir d'adultes citoyens. Les initier aux ressources culturelles fait appel à leur sensibilité subjective et à leur imagination créative, et leur procure une grande liberté d'initiatives (insuffisamment accordée à cette tranche d'âge).

8. Étant à la croisée des générations, les jeunes sont des vecteurs essentiels de transmission des ressources et des valeurs culturelles au sein de la société. Dans une optique intergénérationnelle et de cohésion sociale, l'une des responsabilités importantes du politique est de susciter, particulièrement chez les jeunes, le « désir de culture », sans lequel, quelle que soit la qualité des offres, quelles que soient les conditions matérielles d'accès à ces offres, les jeunes ne se sentiront pas concernés. Pour les motiver, les responsables politiques doivent les impliquer plus personnellement dans les activités culturelles, promouvoir des initiatives innovantes, valoriser toutes les pratiques créatrices de liens culturel, social et politique.

9. Dans ce contexte, il faut valoriser les ressources artistiques et culturelles qui permettent les rencontres (entre publics, artistes et/ou créateurs): le monde du spectacle vivant (théâtre, opéra, concert, spectacle de cirque, etc.) et celui des arts plastiques (expositions, performances, etc.) offrent ces opportunités de rencontres. Il faut aussi porter une attention particulière aux conditions dans lesquelles les jeunes ont un accès aux activités artistiques et culturelles, qui contribuent fortement à leur donner confiance en eux en leur permettant de découvrir les multiples facettes de leur personnalité.

10. La participation aux arts enrichit le patrimoine artistique et culturel de nos sociétés grâce aux créations multiples et variées qu'elle développe. Les soutiens apportés aux jeunes talents créatifs sont donc indispensables car sans eux le patrimoine de demain s'appauvrirait. Il est donc de la responsabilité des politiques de prendre le risque de l'innovation pour procurer aux générations futures ce qui leur apparaîtra, avec le temps, comme un patrimoine classique à valeur universelle, comme nous l'avons reçu de nos aïeux.

11. L'Assemblée regrette que, par-delà les discours constants en faveur des droits culturels, les moyens matériels financiers et humains et les systèmes d'information, de médiation, d'éducation artistique et culturelle ne permettent toujours pas de traduire de façon effective et équitable les professions de foi et déclarations (nationales et internationales), en dépit de la richesse des initiatives et des projets et de la qualité des intervenants oeuvrant dans ces domaines.

12. Le droit de participer à la vie culturelle est un droit pivot au coeur du système des droits de l'Homme. L'oublier conduit à mettre en danger ce système tout entier, en privant un être humain de la possibilité d'exercer de façon responsable ses autres droits, par manque de conscience de la plénitude de son identité.

13. Par conséquent, l'Assemblée parlementaire recommande au Comité des Ministres :

13.1. d'endosser formellement les « Lignes directrices pour l'élaboration des politiques visant à assurer la participation effective à la vie culturelle » en annexe à la présente recommandation, dont elles sont partie intégrante ;

13.2. de transmettre cette recommandation à tous les États membres, afin qu'ils puissent s'en inspirer pour la définition de leurs politiques nationales ;

13.3. de transmettre cette recommandation aux comités intergouvernementaux et au secrétariat du secteur intergouvernemental de l'Organisation chargés des programmes en matière de culture, d'éducation, d'innovation technologique, de jeunesse et d'égalité des chances en leur demandant :

13.3.1. d'intégrer dûment la promotion du droit de chacun de participer à la vie culturelle dans les projets en cours (comme, par exemple, ceux sur l'éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits de l'Homme) ;

13.3.2. d'intégrer dûment la promotion du droit de chacun de participer à la vie culturelle dans les initiatives qui pourraient être lancées dans le cadre de la réflexion sur le « vivre ensemble » et du partenariat entre la Commission européenne et le Conseil de l'Europe dans le domaine de la politique de jeunesse, de la recherche et du travail des jeunes;

13.4. d'établir un comité d'experts ou un groupe de travail transversal et le charger :

13.4.1. de réfléchir aux initiatives qui pourraient faciliter une action politique coordonnée au niveau européen pour promouvoir le droit de chacun de participer à la vie culturelle ;

13.4.2. de réfléchir aux initiatives qui pourraient renforcer la collaboration entre le Conseil de l'Europe, l'Union européenne et d'autres instances internationales dans la mise en oeuvre de programmes ciblés pour encourager la participation des jeunes à la vie culturelle et pour soutenir les activités créatives innovantes, en particulier celles liées aux révolutions technologiques ;

13.4.3. de collecter et d'analyser les bonnes pratiques nationales en vue de préparer des propositions concrètes, que les comités intergouvernementaux compétents devraient examiner, approuver et soumettre au Comité des Ministres pour adoption ;

13.5. d'inviter l'Union européenne et l'UNESCO aux travaux de ce comité d'experts ou groupe de travail transversal et d'y associer étroitement l'Assemblée parlementaire, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, la Conférence des organisations internationales non gouvernementales du Conseil de l'Europe et le Conseil consultatif pour la jeunesse ;

13.6. sur la base des conclusions et propositions concrètes qui lui auront été transmises, d'adopter les mesures appropriées pour développer des projets concrets de collaboration entre le Conseil de l'Europe, l'Union européenne et l'UNESCO visant à soutenir la mise en oeuvre du droit de chacun de participer à une vie culturelle diversifiée et à renforcer, en particulier, la participation des jeunes à la vie culturelle, tant comme public que comme praticiens ;

13.7. dans le cadre du programme « Gouvernance démocratique par les politiques de l'éducation, de la culture et de la jeunesse », de charger la plateforme CultureWatchEurope d'établir une série d'indicateurs sur la participation des divers groupes, et des jeunes en particulier, à la vie culturelle et de suivre les développements dans ce domaine.

14. L'Assemblée invite les Conférences européennes des ministres responsables de la culture, de l'éducation, de la jeunesse et du numérique (des médias) à prendre en compte la présente recommandation et à inscrire dans leurs ordres du jour respectifs la question d'une promotion plus efficace des droits culturels, notamment du droit de chacun de participer à la vie culturelle, tant comme public que comme praticien, dans l'espace européen.

15. L'Assemblée, reconnaissant le rôle de plus en plus important que les autorités locales et régionales ont dans la promotion et la mise en oeuvre des droits culturels, invite le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe à prendre en compte la présente recommandation et à l'intégrer dans son programme de travail.

16. L'Assemblée considère qu'il conviendrait d'accorder une plus grande considération au droit de chacun de participer à la vie culturelle dans le cadre des travaux du Centre européen pour l'interdépendance et la solidarité mondiales (Centre Nord-Sud) du Conseil de l'Europe; l'Assemblée invite donc les organes du Centre à intégrer dans ses projets la réflexion sur la mise en oeuvre effective de ce droit et sur la contribution qu'il apporte au développement harmonieux des civilisations grâce à l'enrichissement des diversités créatives et au dialogue pluri et interculturels.

Lignes directrices pour l'élaboration des politiques visant à assurer la participation effective à la vie culturelle

I. Lignes directrices générales

1. Reconnaître les droits culturels comme les droits qui autorisent chaque personne, seule ou en commun, à développer toutes ses aptitudes d'être pensant et sensible, toutes ses capacités d'imagination créative. Reconnaître que ces droits correspondent à des besoins premiers pour tout le genre humain destiné à vivre en société: leviers essentiels des échanges culturels et du dialogue interculturel, les droits culturels sont aussi des piliers du « vivre ensemble » au sein des sociétés grâce à des références culturelles et artistiques communes qui permettent d'accéder à l'ensemble des valeurs humanistes transmises dans les sociétés démocratiques et libérales

2. Affirmer le droit de chacun de participer à la vie culturelle comme le droit qui englobe l'ensemble des droits culturels car sa garantie effective permet l'égal accès pour tous aux ressources culturelles nationales et internationales et le droit d'y participer comme auteurs ou artistes-interprètes.

3. Développer des politiques intégrées pour promouvoir la participation à la vie culturelle et établir une programmation stratégique commune aux différents secteurs gouvernementaux concernés, dont les ministères responsables de la culture, de l'éducation, des entreprises, de la recherche et du numérique, associés à ceux de la jeunesse et de l'égalité des chances. Impliquer dans la définition et la mise en oeuvre de ces politiques les autorités régionales et locales en fonction des compétences qu'elles ont dans les domaines visés.

4. Stabiliser la mise en oeuvre des politiques des pouvoirs publics en matière culturelle en pérennisant les expériences probantes. Il s'agit d'éviter que les alternances politiques propres aux démocraties libérales conduisent chaque nouveau gouvernement à apposer sa marque, ce qui remet en cause périodiquement les projets culturels de qualité.

5. Dans la définition des politiques intégrées de démocratisation culturelle, prendre en considération l'effet paralysant des multiples facteurs de discriminations (comme les situations économiques, les lieux de vie, les positions sociales, les problèmes liés aux différents handicaps, mais aussi la situation spécifique de la jeunesse) afin d'identifier les formes appropriées de soutien à mettre en oeuvre pour que la participation de chacun à la vie culturelle soit adaptée à ces contextes particuliers.

6. Placer au coeur de la mission de chaque institution publique qui contribue à l'activité, à la formation et à la médiation culturelles, l'obligation de résultat en termes de démocratisation culturelle avec des interactions fréquentes entre opérateurs.

7. Mettre en réseau les opérateurs culturels publics et privés pour échanger leurs expériences et pour développer des partenariats avec mutualisation des moyens. Envisager la dimension transfrontalière des initiatives culturelles avec des projets en partage avec des pays différents.

8. Conditionner le financement public des opérateurs culturels privés à leur contribution à la démocratisation culturelle et aux partenariats culturels. Encourager par des mesures fiscales toutes les formes de mécénat soutenant les approches culturelles démocratiques et les soutiens à la création d'autres institutions culturelles privées.

9. Moderniser et développer fortement le rôle de médiation des grandes institutions culturelles et placer au coeur de leur programmation :

9.1. les adaptations des médiations en fonction des publics (jeunes publics, publics de seniors, publics défavorisés ou tenus à l'écart des ressources culturelles) en évitant de se restreindre à des activités ponctuelles visant seulement à faire entrer occasionnellement un maximum de personnes dans des lieux culturels ;

9.2. le développement des «projets participatifs» pour lesquels les publics sont invités à participer directement aux créations au sein d'ateliers pour les impliquer personnellement dans la pratique artistique ;

9.3. l'utilisation des technologies de l'information et de la communication (écrans, réseaux internet, réalité virtuelle et réalité augmentée, etc.) pour des projets multiformes et pluridisciplinaires avec des environnements navigables susceptibles de solliciter l'action du public.

10. Repenser le rôle de l'école comme une institution essentielle à la formation artistique, au développement culturel, comme espace d'apprentissage des savoirs indispensables pour rendre effectif et attractif le droit de participer à la vie culturelle et comme espace de liberté d'expression artistique et de rencontres multiples entre les élèves et des oeuvres, avec les artistes, dans des institutions artistiques ou des salles de spectacles.

11. Mieux intégrer une éducation obligatoire aux pratiques artistiques et culturelles dans les systèmes éducatifs nationaux. Encourager les pratiques visant à développer la créativité et la sensibilité et valorisant le lien entre la vie culturelle du territoire et le système éducatif.

12. Prévoir une initiation aux arts pour tous les futurs enseignants, ce qui permettra de décloisonner les enseignements traditionnels en mettant en relief la dimension artistique de toutes les matières: par exemple, les différentes représentations picturales des reliefs en géographie, les mobiles des sculpteurs comme application des lois de la physique et l'histoire des arts pour accompagner les événements historiques. Apprendre à lire, écrire et compter est à l'évidence fondamental; apprendre à voir, à entendre, à sentir, l'est tout autant.

13. Étendre les méthodes pédagogiques propres à l'éducation artistique aux autres matières en instaurant un dialogue interactif avec les élèves, en veillant à leur donner la parole pour qu'ils puissent exprimer leurs questionnements et expliquer leur démarche individuelle d'élève.

14. Soutenir les projets qui visent à établir au sein des établissements scolaires des lieux de création artistique permettant le contact entre les élèves, les oeuvres et les artistes et offrant aux élèves la possibilité de s'initier à la libre expression et à la création artistique.

15. Favoriser le développement des pratiques amateurs, dans l'environnement périscolaire et extrascolaire, en veillant à proposer une offre ouverte à des choix diversifiés et adaptés aux différentes catégories de personnes.

16. S'appuyer sur les réseaux associatifs locaux, avec des espaces de pratiques propices à l'émergence de talents grâce au soutien de bons professionnels, ce qui permet la découverte de ses propres appétences jusqu'alors ignorées. En particulier, donner accès aux jeunes à des espaces de création en leur laissant toute liberté d'exercer leurs activités ou de monter leurs projets, en s'appuyant sur des associations de jeunes, les encourager à mutualiser leurs moyens, à partager leur créativité en se mettant en réseau avec d'autres associations pour concevoir des projets en commun.

17. Soutenir, en particulier financièrement dans le cadre de contrats pluriannuels d'objectifs, les associations culturelles, qui permettent une médiation culturelle de proximité pour les jeunes mais aussi pour toutes les générations.

18. Encourager les expressions culturelles et artistiques qui, par une perspective critique sur les conditions politiques, sociales, économiques et culturelles de la société actuelle, contribuent au développement de l'esprit critique et au renforcement de la citoyenneté démocratique. Encourager l'accès du public à ces expressions.

19. Prendre résolument en compte les nouvelles formes de création et de diffusion des contenus artistiques et culturels que la révolution technologique ouvre en abolissant les frontières géographiques et temporelles, et en instaurant un espace de liberté d'expression et de partage incontournable. Il s'agit également d'inciter l'émergence et de saisir des nouveaux modes de consommation et de création culturelles rendus possibles par les nouvelles technologies, notamment lorsqu'il s'agit d'atteindre un public jeune.

20. Promouvoir les créations pluridisciplinaires conçues via et pour le réseau internet (par exemple le Net Art) combinant plusieurs modes d'expression et qui utilisent les techniques numériques interactives comme outil de création.

21. Assurer un système de protection de la création, notamment pour rendre effectifs les droits de propriété intellectuelle qui font partie des droits de l'Homme, afin de permettre aux jeunes créateurs d'envisager une activité professionnelle artistique économiquement viable. La révolution numérique a bouleversé les usages, de manière positive pour la démocratisation culturelle, mais elle a aussi vu la naissance du piratage à large échelle des oeuvres culturelles, qui fait peser une menace grave sur la création de demain. Afin que chacun puisse participer à la vie culturelle, il convient de trouver des solutions à ce phénomène délétère pour la pérennité de la diversité culturelle.

22. Pour que les stratégies de développement culturel réussissent à promouvoir la participation de tous à la vie culturelle et favorisent le soutien à la création, utiliser les principes d'interconnexion et facteurs de valorisation mutuelle suivants: l'inter-artistique et l'interculturel, l'inter-lieux, l'inter-temporel et l'interinstitutionnel.

II. Lignes directrices spécifiques concernant l'utilisation des principes d'interconnexion

Inter-artistique et interculturel

23. Parallèlement à l'appréhension approfondie de chaque discipline artistique, développer une approche de l'éducation et de la formation aux arts valorisant les correspondances entre les arts, pour non seulement offrir à chacun une approche exhaustive des expressions artistiques pluridisciplinaires et multiformes mais aussi pour enrichir chaque discipline des autres approches artistiques.

24. Favoriser les projets éducatifs artistiques qui valorisent les interactions entre les arts, entre les arts et d'autres domaines, et entre les artistes et le public. Par exemple: les activités artistiques qui créent des correspondances entre arts plastiques, musique, arts du son, de la lumière et un dialogue créatif avec le public par la médiation d'ordinateurs dans des espaces non dédiés aux arts (par exemple les friches industrielles, les quartiers des cités pour les arts de la rue).

25. Accorder des soutiens politiques et économiques continus plus soutenus, avec des contrats d'objectifs pluriannuels, en faveur des théâtres et salles de spectacles, des lieux d'exposition, des compagnies d'artistes et des plasticiens, car ils offrent des occasions de rencontre entre tous les secteurs artistiques et, à travers eux, entre tous les secteurs culturels. Ils permettent également de réunir et de mobiliser une diversité de jeunes publics, artistes, amateurs ou professionnels.

Inter-lieux et arts numériques

26. Favoriser les créations réalisées avec les habitants (formes participatives) et les initiatives où la rencontre des arts et des personnes prend vie dans des lieux capables de lier réflexion artistique, philosophique et écologique, donnant donc du sens à sa citoyenneté: réaménager un espace public couvert (comme un hall de gare) ou en plein air (comme un espace vert) pour en faire un lieu de participation créative pour les habitants de ces quartiers.

27. Favoriser les initiatives culturelles locales et qui visent la valorisation culturelle, historique, sociale et économique des territoires, par les liens entre les créateurs, les publics et les divers métiers qui participent à ces initiatives.

28. Réaliser des programmes nationaux de numérisation du patrimoine culturel, ce qui s'inscrit dans les objectifs retenus par la Commission européenne pour la réalisation d'Europeana, point d'accès multilingue à tous les contenus culturels du patrimoine et de la création contemporaine.

29. Connecter les espaces virtuels aux espaces publics et soutenir les projets de services numériques innovants avec des dispositifs sur site (3D, réalité augmentée, systèmes immersifs de réalité virtuelle, téléphones mobiles, podcasts, etc.) ou des dispositifs sur internet accessibles à distance (visites virtuelles, parcours thématiques, services en ligne).

30. Utiliser les nouvelles formes de diffusion des contenus culturels dématérialisés, en transférant par exemple les arts visuels dans des galeries et musées virtuels où les oeuvres seraient accessibles dans des expositions en ligne.

31. S'engager dans une démarche de soutien aux services numériques culturels innovants pour faciliter l'expérimentation de nouveaux usages numériques et encourager de nouveaux partenariats entre opérateurs culturels et le monde de l'entreprise, et la recherche privée ou publique.

Inter-temporel

32. Renouer avec les savoir-faire traditionnels locaux, les sources et les exemples des créations artistiques de l'art des anciens.

33. Travailler avec les artistes de la mémoire (par exemple les archéologues) et inversement se projeter dans une vision de l'espace urbain du futur que l'on souhaite transmettre (art prospectif).

34. Favoriser les initiatives qui créent une dynamique territoriale dans la durée (festivals, fêtes, journées thématiques).

35. Promouvoir les activités liées à la mémoire et développer aussi dans cette direction le rôle des institutions muséales, des théâtres et salles de spectacle (oeuvres du patrimoine, artistes des siècles passés et théâtre classique par exemple), ce qui valorise le patrimoine et permet aux jeunes de s'approprier la culture de leur nation et celle d'autres pays.

Interinstitutionnel

36. Favoriser la mise en place d'instances de coordination chargées d'assurer la synergie entre politique culturelle et politique éducative, avec des comités permanents de professionnels renouvelables périodiquement.

37. Renforcer le lien entre les écoles et les institutions culturelles locales et nationales, non seulement pour favoriser l'accès des élèves à ces institutions, mais pour apporter le savoir et l'expérience de ces institutions et de leurs équipes à l'apprentissage artistique dans le contexte scolaire, et ce pour tous les élèves et dès leur plus jeune âge.

38. Encourager les partenariats interinstitutionnels (entre autorités gouvernementales nationales et entre autorités nationales et locales) et les partenariats public-privé, dès la définition de stratégies, pour la conception des projets et de la programmation, afin d'assurer le niveau le plus élevé de coordination et de synergie.


* 2 Discussion par l'Assemblée le 24 janvier 2012 (4 e séance) (voir Doc. 12811, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, rapporteure: Mme Bemelmans-Videc). Texte adopté par l'Assemblée le 24 janvier 2012 (4 e séance).

* 3 Discussion par l'Assemblée le 24 janvier 2012 (4 e séance) (voir Doc. 12815, rapport de la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, rapporteure: Mme Marland-Militello). Texte adopté par l'Assemblée le 24 janvier 2012 (4 e séance).

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