3. Les fragilités du secteur bancaire, entre nécessaire restructuration et développement de la finance islamique
a) Un paysage bancaire égyptien en restructuration, soumis à l'émulation des banques étrangères

Ayant rencontré les dirigeants de deux banques représentatives de ce secteur économique - l'une, la National Bank for Development , est privée et à capitaux bahreïnis, l'autre, la Banque Misr, est publique - la délégation de la commission des finances a attaché une importance particulière au secteur bancaire égyptien, composé de 39 établissements principaux, et dont les 3 principales banques sont publiques.

Dans un paysage où les banques égyptiennes sont majoritairement publiques, les banques privées parviennent à tirer leur épingle du jeu et ont joué un rôle de régulation en 2011 lors de la fermeture, pendant deux mois, des banques égyptiennes. Par exemple, BNP Paribas dispose d'un réseau de 70 agences réparties dans tout le pays. Les résultats des banques françaises ont été positifs en Egypte en 2011.

Des restructurations et des consolidations du secteur bancaire égyptien apparaissent nécessaires pour améliorer le financement de l'économie (et notamment des PME, aujourd'hui contraintes de recourir à l'autofinancement), alors que les obligations d'Etat représentent toujours une part importante des activités bancaires du fait des marges élevées qu'elles génèrent. Comme l'a déclaré à la délégation de la commission des finances la représentante de la Banque Misr, cette dernière dispose d'excédents de liquidités placés en bons du Trésor, ce qui pose la question de la conduite d'une politique monétaire plus stricte par la Banque centrale.

La National Bank for Development , rachetée par un groupe de Bahreïn, en offre une illustration : elle ne disposait pas de capital lors de son rachat et son portefeuille d'activités ne s'élevait alors qu'à 5 milliards de livres égyptiennes, soit moins de 1 milliard de dollars. Le capital actuel atteint 3,5 milliards de livres égyptiennes, et des systèmes de gestion moderne des ressources humaines et du réseau informatique ont été mis en place.

La Banque Misr, fondée en 1920 avec des capitaux exclusivement égyptiens, fait partie de l'histoire économique de l'Egypte, ayant financé la création de compagnies emblématiques comme Egyptair. Nationalisée dans les années 1960, elle dispose d'un réseau de succursales dans l'ensemble du pays. Depuis 2003, les règles de gestion publique obéissent aux critères de l'économie privée. La Banque Misr a été fortement affectée par la réduction des investissements étrangers après la révolution, n'ayant pas de tradition d'implantation dans des secteurs privilégiés, comme l'agriculture, à la différence d'autres établissements de crédit.

b) Les perspectives d'essor de la finance islamique

L'essor de la finance islamique (seulement 3 % à 4 % des activités bancaires aujourd'hui), qui avait fait l'objet de travaux de la commission des finances en 2008 11 ( * ) , représente un facteur de développement des banques égyptiennes, parallèlement aux activités conventionnelles. Par exemple, à la National Bank for Development , les certificats de dépôt islamiques représentent des volumes d'activité mensuels compris entre 160 et 170 millions de livres égyptiennes par mois, soit une hausse de 50 % par rapport à la situation qui prévalait avant la révolution (où les volumes d'activité mensuels étaient compris entre 110 et 120 millions de livres égyptiennes par mois).

Si la définition varie (la finance islamique doit être compatible avec les principes de la Charia, pouvant donner lieu à une certification par des équipes dédiées au sein de chaque banque, et variant encore plus fortement selon les Etats), le choix opéré en Egypte était de développer des produits islamiques dans le cadre légal existant, en adossant le risque sur des actifs réels. Une des questions les plus délicates étant les restrictions à la spéculation qui naît des pratiques de taux d'intérêt, l'exemple suivant a été donné à la commission des finances : pour le crédit d'achat d'une voiture, la voiture est achetée et revendue par l'établissement de crédit qui place un ordre d'achat de la voiture et la revend avec un profit, le montant de cette marge étant inscrit au contrat, ce qui signifie que les pertes comme les profits des investisseurs sont couverts par l'établissement de crédit.


* 11 Voir notamment « La finance islamique, quelles perspectives », rapport d'information n° 329 (2007-2008).

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