B. L'ARCHITECTURE ACTUELLE DE LA TAXE D'APPRENTISSAGE

1. Les deux parties de la taxe d'apprentissage

La taxe d'apprentissage est un prélèvement dû par toutes les entreprises ayant au moins un salarié et soumises à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux. Le montant collecté correspond au taux de 0,50 % des salaires versés dans l'ensemble des départements autres que ceux du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle pour lesquels le taux est de 0,26 %.

Elle est composée de deux parties communément identifiées comme le « quota » et le « hors quota » .

a) Le « quota »

Le quota est la fraction de la taxe d'apprentissage obligatoirement réservée au développement de l'apprentissage . Il était fixé à 52 % du montant de la taxe en 2011 (53 % en 2012).

Concrètement, chaque année, les entreprises doivent consacrer à l'apprentissage proprement dit un « quota » égal à 52 % du montant de leur taxe d'apprentissage. Ce quota est constitué des dépenses libératoires suivantes :

- le versement, au titre du CAS FNDMA précité, égal à 22 % de la taxe d'apprentissage. Celui-ci doit être effectué préalablement à toutes les autres dépenses libératoires. L'organisme collecteur le reverse intégralement au Trésor public, celui-ci en affectant le produit au FNDMA créé à cet effet ( cf . encadré ci-dessous) ;

- l'autre fraction du quota, dite « quota libre » (soit 30 % de la taxe) est destinée au concours financier aux centres de formation des apprentis (CFA) où sont inscrits les apprentis employés par l'entreprise, au prorata du nombre d'inscrits dans chacun d'eux.

Un éclairage « historique » sur l'origine du taux de 22 %
de la taxe d'apprentissage en faveur du CAS FNDMA

A la lumière de la création du CAS FNDMA, l'attention de votre rapporteur spécial avait été appelée sur la pertinence du maintien du taux de 22 % du quota de la taxe d'apprentissage au titre d'une des recettes du compte spécial, mais aussi sur la complexité des modalités de collecte et de répartition du produit de taxe d'apprentissage.

En effet, la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a rendu plus transparentes la collecte et la répartition de la taxe d'apprentissage à travers la création du FNDMA. Se substituant au Fonds de péréquation de la taxe d'apprentissage (FNPTA), le FNDMA a eu pour mission de recevoir les versements effectués au Trésor public soit par une personne ou entreprise redevable de la taxe d'apprentissage afin de s'acquitter de tout ou partie de cette dernière, soit par les OCTA. Ces montants sont ensuite reversés aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue (FRAFPC).

Ses ressources étaient alors constituées des ressources de l'ex FNPTA (151 millions d'euros), des recettes supplémentaires provenant de la suppression de certains chefs d'exonération (185,6 millions d'euros), des recettes correspondant aux sommes alors perçues à titre résiduel par le Trésor public (25 millions d'euros) et des économies de frais de gestion (3 millions d'euros), soit un total de 364,6 millions d'euros.

Préalablement à l'adoption de la loi du 18 janvier 2005 précitée, le montant de la taxe d'apprentissage se répartissait comme suit : 60 % au titre du barème ou hors quota (financement des premières formations technologiques et professionnelles) et 40 % au titre du quota (30 % affectés au CFA et 10 % au titre de la péréquation).

A l'issue de la réforme, la répartition du montant de la taxe d'apprentissage a été la suivante :

- 48 % au titre du barème ;

- 52 % au titre du quota, lui-même réparti comme suit : 30 % de la taxe dédiés au financement des CFA, 10 % au titre de la péréquation et 12 % au titre des COM.

La jonction de la péréquation (10 % de la taxe d'apprentissage) et des COM (12 % de ladite taxe), au sein du FNDMA nouvellement créé, a abouti à un fléchage d'un montant global s'élevant donc à 22 %.

Source : réponse au questionnaire budgétaire relatif à la loi de finances pour 2013

b) Le « hors quota »

Le hors quota - également dénommé « barème » - permet d'assurer le financement des premières formations technologiques et professionnelles . Il était égal à 48 % de la taxe en 2011 (47 % en 2012).

Dès lors qu'ont été respectés les versements du quota de 52 %, dont 22 % au titre du FNDMA et 30 % au titre du quota libre, les autres dépenses, dites « hors quota », représentent 48 % du montant de la taxe. Ces autres dépenses sont composées, outre des frais liés à l'accueil des apprentis , de toutes les sommes versées par l'intermédiaire des OCTA en vue de favoriser les premières formations technologiques et professionnelles, qu'elles se déroulent sous statut scolaire (par exemple les enseignements dispensés dans les lycées professionnels) ou sous statut d'apprenti . Une partie du hors quota peut donc aller à l'apprentissage.

La répartition des fonds du hors quota est effectuée suivant les choix d'affectation des entreprises dans le cadre d'un barème de répartition prenant en compte les niveaux de formation et la liste des établissements habilités au niveau préfectoral :

- 40 % pour les formations de niveaux IV et V (CAP, BEP et Bac pro) ;

- 40 % pour les niveaux III et II (Bac+2 à Bac+4 : BTS, IUT, licence pro, master 1) ;

- 20 % pour les niveaux I (écoles supérieures, écoles d'ingénieurs, master 2).

2. Le schéma de collecte et de répartition de la taxe d'apprentissage
a) L'évolution de la collecte

La collecte de la taxe a progressé jusqu'en 2009 pour atteindre près de 1,96 milliard d'euros. Mais, pour la première fois en 2010, l'apprentissage a dû faire face à une baisse de 3,1 % des recettes pour s'établir à 1,9 milliard d'euros. En 2011, ce montant est remonté à 1,94 milliard d'euros mais n'a pas retrouvé son niveau d'avant la crise.

Le graphique ci-après présente l'évolution de la collecte de la taxe d'apprentissage de 2006 à 2011, les données pour 2012 n'étant pas encore connues à la date d'examen du présent rapport.

Evolution de la collecte de la taxe d'apprentissage de 2006 à 2011

(en millions d'euros)

Source : DGEFP

b) Les principes de répartition du produit de la taxe

Les fonds collectés au titre du quota et du hors quota précédemment présentés sont ensuite répartis selon le schéma de principe de la collecte et de la répartition de la taxe d'apprentissage ( cf. infra « Schéma de collecte et de répartition de la taxe d'apprentissage »).

Nous verrons que, dans la pratique, les frais de gestion font que le montant réparti est inférieur au montant collecté et que l'affectation finale des fonds diffère d'une part de la répartition théorique 52/48 entre le quota et le hors quota, et d'autre part entre l'apprentissage proprement-dit et les premières formations technologiques.

En effet, l'évolution détaillée de la répartition de la collecte de la taxe d'apprentissage ( cf. infra le tableau « Evolution détaillée de la répartition de la collecte de la taxe d'apprentissage ») montre que dans les fonds relevant du quota comme du hors quota, des montants importants de crédits que les entreprises pourraient affecter à des établissements de formation ne le sont pas : il s'agit de fonds « libres », dont le montant global représente plus de 300 millions d'euros, que les OCTA affectent alors selon des politiques qui leurs sont propres.

Schéma de collecte et de répartition de la taxe d'apprentissage
(données 2011)

Source : d'après les réponses de la DGEFP au questionnaire de votre rapporteur spécial

Evolution détaillée de la répartition de la collecte de la taxe d'apprentissage

( en millions d'euros )

Année de collecte

FNDMA

Concours
financiers
obligatoires

Versements
affectés

Versements
non affectés

Total « Quota »

Versements pré-affectés

Versements non affectés

Total « Hors Quota »

Total « Quota » et « Hors Quota »

Evolution en %

2006

374,18

113,67

264,95

149,09

901,89

610,29

140,55

750,84

1 652,73

2007

393,16

122,69

279,29

154,57

949,71

640,08

151,76

791,84

1 741,55

5,4%

2008

404,00

133,14

284,87

154,16

976,17

663,73

151,20

814,93

1 791,10

2,8%

2009

436,57

277,04

199,44

155,96

1 069,01

726,14

164,13

890,27

1 959,28

9,4%

2010

427,91

279,54

181,41

155,81

1 044,67

700,82

153,28

854,10

1 898,77

-3,1%

2011

437,63

291,72

186,98

150,59

1 066,92

719,82

157,61

877,43

1 944,35

2,4%

Source : commission des finances d'après les réponses de la DGEFP au questionnaire de votre rapporteur spécial

3. Les contributions annexes

A la taxe d'apprentissage proprement dite s'ajoutent la contribution au développement de l'apprentissage (CDA) et la contribution supplémentaire à l'apprentissage (CSA).

a) La contribution pour le développement de l'apprentissage (CDA)

La contribution au développement de l'apprentissage (CDA) a été créée en 2005. Son taux est de 0,18 % de la masse salariale pour toutes les entreprises. Le produit de la CDA (environ 730 millions d'euros) est réparti directement par la direction générale des finances publiques (DGFiP) entre les régions et affecté aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue (FRAFPC), selon des règles identiques à celles de la dotation générale de décentralisation.

b) La contribution supplémentaire à l'apprentissage (CSA)

La contribution supplémentaire à l'apprentissage (CSA), créée en 2009, est la plus récente des trois taxes dédiées au développement de l'apprentissage. La CSA s'est substituée à la majoration de taux de la taxe d'apprentissage due depuis 2006 par les entreprises de plus de 250 salariés ne respectant pas un taux de 3 % d'alternants. Mais la loi de finances rectificative pour 2011 précitée a sensiblement complexifié le nouveau dispositif de la CSA. Pour les entreprises assujetties, le taux de la taxe est modulé selon l'écart entre la proportion d'alternants et la cible de 4 %, selon trois tranches :

- si la proportion d'alternants est inférieure à 1 %, le taux de la CSA est de 0,2 %. Ce taux est porté à 0,3 % pour les entreprises de plus de 2000 salariés ;

- si elle est comprise entre 1 % et 3 %, le taux de la CSA est de 0,1 % ;

- si elle est comprise entre 3 et 4 %, le taux de la CSA est de 0,05 %.

De plus, il a été créé la possibilité de versement d'un bonus, financé par le compte spécial « FNDMA » aux entreprises de 250 salariés et plus dépassant le quota d'alternants. Or, du fait des effets de seuil et de la difficulté de prévoir les comportements des entreprises, un rapport de l'IGAS de décembre 2011 jugeait déjà difficile de se prononcer sur les effets quantitatifs du dispositif en termes de recettes budgétaires (par le malus) ou de dépenses budgétaires (par le bonus).

c) La taxe d'apprentissage et les contributions annexes  : un total de 2,8 milliards d'euros

Le dispositif de collecte ne se limite donc pas à la seule TA et se caractérise par le fait que ce sont en réalité trois taxes assises sur la masse salariale des entreprises qui contribuent au financement de l'apprentissage, pour un total de près de 2,8 milliards d'euros .

La taxe d'apprentissage et les contributions annexes

Source : commission des finances

Comme le présente le schéma ci-dessus, le circuit de répartition de ces trois taxes ne présente pas une logique d'ensemble pleinement intuitive : il résulte davantage d' une superposition de strates successives de recettes fiscales fonctionnant chacune en « silo » et selon des logiques de répartition différentes , sans qu'aucun des acteurs concernés - qu'il s'agisse de l'Etat, de la région, des OCTA ou même de l'entreprise - ne puisse vraiment maîtriser la destination des flux.

Le circuit de la collecte de la taxe d'apprentissage est non seulement trop complexe, mais la suite du rapport explicitera pourquoi il n'est pas non plus efficient.

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