N° 628

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 juin 2013

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) et de la délégation sénatoriale à l'outre-mer (2) en conclusion des travaux du groupe de travail sur l' impact économique des dispositifs de défiscalisation spécifiques aux outre-mer (3),

Par MM. Éric DOLIGÉ et Serge LARCHER,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Daniel Raoul , président ; MM. Claude Bérit-Débat, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Pierre Hérisson, Joël Labbé, Mme Élisabeth Lamure, M. Gérard Le Cam, Mme Renée Nicoux, M. Robert Tropeano , vice-présidents ; MM. Jean-Jacques Mirassou, Bruno Retailleau, Bruno Sido , secrétaires ; M. Gérard Bailly, Mme Delphine Bataille, MM. Michel Bécot, Alain Bertrand, Mme Bernadette Bourzai, MM. François Calvet, Roland Courteau, Marc Daunis, Claude Dilain, Alain Fauconnier, Didier Guillaume, Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Jean-Claude Lenoir, Philippe Leroy, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Michel Magras, Jean-Claude Merceron, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Mireille Schurch, M. Yannick Vaugrenard.

(2) Cette délégation est composée de : M. Serge Larcher, président ; MM.  Éric Doligé, Claude Domeizel, Michel Fontaine, Pierre Frogier, Joël Guerriau, Michel Magras, Jean-Claude Requier, Mme Catherine Tasca, MM. Richard Tuheiava, Paul Vergès et Michel Vergoz, vice-présidents ; Mme Aline Archimbaud, M. Robert Laufoaulu, secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jean-Étienne Antoinette, Mme Éliane Assassi, MM. Jacques Berthou, Jean Bizet, Jean-Marie Bockel, Gérard César, Mme Karine Claireaux, MM. Christian Cointat, Jacques Cornano, Félix Desplan, Mme Jacqueline Farreyrol, MM. Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Jacques Gillot, Mme Odette Herviaux, Jean-Jacques Hyest, Jacky Le Menn, Jeanny Lorgeoux, Roland du Luart, MM. Thani Mohamed Soilihi, Alain Néri, Georges Patient, Mme Catherine Procaccia, MM. Charles Revet, Gilbert Roger, Abdourahamane Soilihi et Hilarion Vendegou.

(3) Ce groupe de travail est composé de : Mme Marie-Noëlle Lienneman, présidente ; MM. Éric Doligé, Serge Larcher, rapporteurs , Mmes Aline Archimbaud, Éliane Assassi, MM. Gérard César, Michel Magras, Jean-Claude Merceron, Georges Patient, Jean-Claude Requier.

AVANT-PROPOS

« Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage. »
Molière. Les Femmes savantes.

Mesdames, Messieurs,

Défiscalisation et niches fiscales : ces dénominations, à elles seules, véhiculent une image lourdement connotée. De friches hôtelières en projets industriels fantômes en passant par le financement de yachts luxueux, les dérives passées ont sévèrement terni l'image de ces dispositifs fiscaux et leur ont forgé une réputation sulfureuse qui leur « colle à la peau ». Et la dimension ultramarine n'est pas sans enrichir cette image d'une nuance d'évasion... fiscale !

Chaque débat budgétaire replace immanquablement ces dispositifs 1 ( * ) sur la sellette et, entre deux débats, la flamme de la controverse est entretenue par la publication de rapports stigmatisants. Ainsi, en dépit des mesures d'encadrement, de moralisation et des coups de rabot successifs votés au fil des ans, les assauts répétés de la Cour des comptes et de l'Inspection générale des finances au cours des dernières années... jusqu'à préconiser « de supprimer les défiscalisations «Girardin» en faveur des investissements productifs et celles définies par la loi de mai 2009 (LODEOM) en faveur de la construction de logements sociaux 2 ( * ) ». Voilà la conclusion logique aux critiques multiples et répétées : manque d'efficience économique pour les outre-mer 3 ( * ) , effets d'aubaine, exposition à la fraude ...

À l'heure de la disette budgétaire, un nouvel angle d'attaque vient compléter l'arsenal : le coût pour l'État et le caractère non maîtrisé de la dépense fiscale liée à ces dispositifs.

Si le manque à gagner en termes de rentrées fiscales est consubstantiel à des dispositifs mettant en oeuvre des réductions d'impôt, son montant doit être appréhendé à l'aune de son utilité économique et sociale et comparé à d'autres dépenses fiscales.

Le coût global doit certes être contenu pour tenir compte de la nécessaire contribution à l'effort collectif de redressement budgétaire, en proportion des facultés de chacun, mais l'approche comptable ne doit pas occulter et faire oublier l'objectif assigné à l'instrument fiscal, expression d'une solidarité nationale envers des économies ultramarines soumises à des contraintes spécifiques et particulièrement vulnérables, à savoir le soutien et la stimulation de l'investissement dans les outre-mer.

Inquiètes de la menace planant sur ces dispositifs fiscaux de soutien à l'investissement alors que la contrainte budgétaire se fait plus pressante, la commission des affaires économiques du Sénat et la délégation sénatoriale à l'outre-mer ont décidé la création d'un groupe de travail commun tendant à évaluer l'impact des dispositifs de défiscalisation sur les économies ultramarines. Il s'agit là d'une démarche nouvelle car, jusqu'à présent, l'approche privilégiée a toujours été exclusivement celle du coût financier pour la collectivité nationale.

Dans le cadre des travaux de concertation en cours, le gouvernement évoque en effet des formules alternatives aux aides fiscales actuelles avant même d'avoir réuni et analysé les données chiffrées permettant d'évaluer la situation de chaque territoire, et surtout d'avoir estimé l'impact d'une remise en cause des mécanismes d'incitation existants sur les équilibres économiques et sociaux locaux. D'emblée, ces schémas de substitution, définis a priori sans en examiner leur nécessaire adéquation concrète aux réalités des outre-mer, semblent écrire la chronique d'une mort annoncée...

Sans méconnaître les impératifs de discipline budgétaire et avec le souci d'amorcer de nouvelles avancées vers davantage de maîtrise et d'efficience, la commission et la délégation ont voulu, par le présent rapport, restituer au débat un ancrage économique et territorial. Après avoir tenu sa réunion constitutive le 27 mars et mené un ensemble d'auditions à Paris 4 ( * ) , le groupe de travail a ainsi dépêché une délégation à La Réunion du 1 er au 4 mai 5 ( * ) et a organisé une visioconférence avec la Nouvelle-Calédonie le 15 mai 6 ( * ) . Ces contacts au plus près du terrain lui ont permis d'apprécier très concrètement, bien que dans un laps de temps restreint, l'importance vitale du rôle joué par les dispositifs fiscaux de soutien à l'investissement dans le développement des économies locales. Les nombreux contacts et témoignages ont également permis d'identifier des avancées substantielles vers des mécanismes mieux sécurisés, plus efficients et économes des deniers publics, étant entendu que toute évolution devra impérativement être en adéquation avec les réalités des outre-mer et s'inscrire dans la durée pour garantir une visibilité indispensable aux acteurs économiques.


* 1 Voir présentation de ces dispositifs fiscaux en annexe 1.

* 2 Cour des comptes, Rapport public annuel 2012, page 98.

* 3 Les outre-mer concernés désignent 11 territoires : les 5 départements d'outre-mer relevant de l'article 73 de la Constitution, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion ; 5 collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna ; et enfin la Nouvelle-Calédonie à laquelle est consacré le titre XIII de la Constitution.

* 4 Liste des personnes auditionnées : annexe 2.

* 5 Programme du déplacement à La Réunion : annexe 3.

* 6 Liste des interlocuteurs participant à la visioconférence : annexe 4.

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