III. LA PROTECTION DES FEMMES CONTRE LES VIOLENCES ET LES ATTEINTES A LEUR DIGNITE

Les violences faites aux femmes ainsi que certaines représentations sexistes et condescendantes des femmes complaisamment relayées par certains medias agissent comme les révélateurs de la persistance des inégalités entre les sexes au sein de notre société.

Une approche intégrée de l'égalité doit donc également s'attaquer à ces deux problématiques.

A. LA PROTECTION DES FEMMES CONTRE LES VIOLENCES

L' enquête nationale sur les violences faites aux femmes en France (ENVEFF) réalisée en 2000 a révélé aux pouvoirs publics et à l'opinion la gravité d'un phénomène jusqu'alors largement sous-estimé. L'enquête s'est attachée à cerner l'ensemble des formes prises par ces violences, y compris celles qui sont commises au travail ou dans l'espace public. Mais un des enseignements les plus forts de ce travail de recherche a été de mettre en lumière la banalité et la gravité des violences conjugales : il faisait apparaitre que dix pour cent des femmes étaient victimes de violences au sein de leur couple et qu'une femme mourait tous les deux jours et demi sous les coups de son compagnon.

Les enquêtes menées ultérieurement par l' observatoire de la délinquance sont venues confirmer la gravité et la fréquence de ce phénomène. Comme le rappelle l'étude d'impact jointe au projet de loi, une projection réalisée à partir du taux de personnes s'étant déclarées victimes de violences physiques et sexuelles indique que le nombre de victimes pourrait s'établir sur deux ans à 400 000 pour les violences par conjoint et à 150 000 pour les violences par ex-conjoint. En 2012, ce sont 148 femmes et 26 hommes qui ont été tués par leur partenaire ou leur ancien partenaire de vie.

L'ensemble de ces données a suscité dans l'opinion et chez les pouvoirs publics une prise de conscience qui a favorisé la mise en place d'une politique publique soucieuse de réprimer cette violence et d'en protéger les victimes. Cet édifice juridique s'est progressivement construit au fil de plusieurs lois.

La loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales a pour la première fois posé le principe de l'éviction du conjoint violent hors du domicile du couple.

Le Parlement a par la suite pris l'initiative de deux lois spécialement consacrées aux violences conjugales qui tracent aujourd'hui l'essentiel du cadre juridique dans lequel s'inscrit la protection des victimes.

Résultant d'une proposition de loi d'origine sénatoriale, la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs a notamment réprimé le viol et les agressions sexuelles entre époux ; elle a érigé en circonstance aggravante le fait qu'un crime ou un délit soit commis au sein du couple ; elle a complété le code pénal pour permettre aux juridictions françaises de réprimer les mutilations sexuelles commises à l'étranger sur une victime mineure résidant habituellement sur le territoire français

Issue d'une proposition de loi de l'Assemblée nationale, nourrie par un important travail préalable avec le mouvement associatif, la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a introduit de nouvelles avancées, en particulier en créant dans le code civil une nouvelle procédure destinée à protéger, en urgence, les victimes de violences conjugales : l' ordonnance de protection , un dispositif innovant partiellement inspiré de la loi espagnole du 31 juillet 2003. Cette loi a bénéficié d'un fort consensus politique qui lui a permis d'être adoptée à l'unanimité des membres de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Plus récemment, la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel est venue proposer une nouvelle définition plus large et donc plus protectrice pour les victimes de ce délit, dont elle a d'ailleurs alourdi les sanctions.

Un projet de loi actuellement en discussion, portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France apporte au droit en vigueur des compléments ponctuels, pour le rendre conforme à une directive européenne du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et pour permettre la ratification ultérieure de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d'Istanbul.

Le chapitre premier du titre III du projet de loi relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes comporte 9 articles qui viennent compléter et renforcer le dispositif mis en place par la loi du 9 juillet 2010 en matière de violences conjugales. Votre délégation apporte son soutien à ces dispositions qui s'attachent à remédier aux difficultés d'application des dispositions actuellement en vigueur. Les recommandations qu'elle formulera en ce domaine tendront à apporter quelques compléments ponctuels à ce dispositif et à améliorer le traitement judiciaire d'autres formes de violences envers les femmes qui ne sont pas abordées dans le présent projet de loi.

1. L'ordonnance de protection : des améliorations nécessaires
a) Un dispositif protecteur novateur

L'ordonnance de protection est une nouvelle procédure civile, créée par la loi du 9 juillet 2010, qui a pour objet d'assurer la protection de la victime de violences au sein d'un couple ou d'un couple séparé et, le cas échéant, d'apporter des solutions en matière de logement et de garde des enfants. Elle doit permettre, en outre, de répondre sur le plan civil aux menaces de mariage forcé. Elle constitue un instrument juridique supplémentaire à la disposition de la victime, sans la priver des autres procédures dont elle dispose par ailleurs pour engager une action soit au civil soit au pénal.

L'article 515-11 du code civil dispose que le juge aux affaires familiales délivre une ordonnance de protection « s'il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime est exposée »

A l'occasion de la délivrance de l'ordonnance, le juge aux affaires familiales peut prendre un certain nombre de mesures limitativement énumérées par la loi :

- l'interdiction pour le conjoint violent d'entrer en contact et l'interdiction de détenir une arme, assortie de l'obligation de remettre celles dont il serait détenteur ;

- la résidence séparée des époux, et l'attribution du logement commun à l'époux, au concubin, au partenaire qui n'est pas l'auteur des violences ;

- les modalités d'exercice de l'autorité parentale et la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ;

- la dissimulation du domicile de la victime ;

- l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

L'ordonnance de protection doit être rendue en urgence. Elle est exécutoire de droit à titre provisoire et doit être notifiée aux parties. Sa durée de validité actuellement fixée à quatre mois court à compter de sa notification. Le prononcé d'une ordonnance de protection emporte un certain nombre de conséquences par-delà le plan civil. Au plan pénal, la saisine du juge aux affaires familiales fait présumer du refus de la victime de consentir à une médiation pénale, sans toutefois l'interdire absolument ; le non-respect des mesures imposées par l'ordonnance de protection constitue un délit réprimé par les articles 227-4-2 et 227-4-3 du code pénal respectivement de deux ans et de six mois d'emprisonnement.

Le suivi de l'application de la loi a fait l'objet de plusieurs rapports.

En janvier 2012, les députés Danielle Bousquet et Guy Geoffroy lui ont consacré un rapport d'information au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale 31 ( * ) . En juin 2012, un groupe de travail du conseil national d'aide aux victimes (CNAV) a rendu un rapport d'étape sur les six premiers mois de mise en oeuvre de la loi. Enfin, une mission d'évaluation conjointe à l'inspection générale des services judiciaires et à l'inspection générale des affaires sociales 32 ( * ) a tracé en juin 2013 un bilan de l'application de l'ordonnance de protection.

Ces trois rapports qui s'échelonnent tous les six mois et témoignent d'un souci louable d'assurer le suivi de l'application de la loi débouchent sur des constats largement partagés .

b) Une montée en puissance progressive mais inégale

Le rapport d'inspection est venu préciser et confirmer la montée en puissance progressive du dispositif de l'ordonnance de protection. Sur la base d'un questionnaire adressé aux Tribunaux de grande instance entre le 1 er juin 2011 et le 30 avril 2013, celui-ci a recensé la délivrance de plus de 2 600 ordonnances de protection pour plus de 3 300 saisines. Autrement dit, c'est approximativement un quart des procédures qui n'aboutissent pas, soit que la requête soit rejetée, soit que la requérante se désiste. Ces chiffres marquent une progression par rapport aux données recueillies dans le rapport de l'Assemblée nationale sur la période du 1 er octobre 2010 au 1 er mai 2011. Celui-ci ne recensait que 854 demandes d'ordonnance dont seules 584 avaient abouti. Ces résultats sont donc encourageants.

Pour autant, le recours à cette procédure reste très inégalement réparti sur le territoire :

- quatre Tribunaux de grande instance ont délivré plus de cent ordonnances : Bobigny (318), Nanterre (131), Paris (120), Nice (117) ;

- neuf en ont délivré plus de cinquante ; il s'agit de juridictions importantes comme Lille, Toulouse, Lyon, Pontoise, Evry, Créteil, Rennes, Marseille ou Perpignan ;

- la très grande majorité des juridictions, neuf sur dix, ont rendu moins de cinquante ordonnances sur la période considérée.

En outre, comme le souligne le rapport des inspections générales, « même dans les juridictions où il est intégré, ce contentieux reste très minoritaire par rapport à l'activité des juges aux affaires familiales » : par comparaison, les affaires nouvelles s'élèvent, hors référés, à plus de 375 000 pour 2011.

c) Améliorer les délais de délivrance de l'ordonnance de protection

L'ordonnance de protection est une procédure d'urgence destinée à répondre à des situations de danger immédiat. Comme le rappelle le rapport de l'Assemblée nationale 33 ( * ) , lors des débats parlementaires, les délais envisagés semblaient devoir s'établir autour de 24 ou 48 heures ou tout au plus de 72 heures.

En pratique, le délai moyen séparant la saisine du juge aux affaires familiales de la délivrance de l'ordonnance est bien supérieur : évalué en 2011 à 26 jours par le rapport de l'Assemblée nationale, il a fait l'objet d'une évaluation plus différenciée dans le rapport d'inspection.

Celui-ci estime qu'aujourd'hui, près de la moitié des ordonnances sont rendues dans un délai de moins de 20 jours, mais cette donnée globale recouvre de fortes disparités : si 14 % des décisions sont prises en moins de 10 jours, 21 % le sont en plus de trente jours. En tout état de cause, aucune juridiction n'indique répondre dans les 72 heures.

Ces délais s'expliquent par la nécessité de respecter le caractère contradictoire de la procédure et tiennent en particulier aux procédures ouvertes au juge pour la convocation des parties. Trois procédures inégalement rapides sont à la disposition du juge :

- la convocation des parties par le greffier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; c'est la procédure apparemment la plus utilisée mais c'est aussi la plus longue, particulièrement si la partie défenderesse, le conjoint accusé de violence, tarde à aller retirer le courrier qui lui est adressé, comme l'ont expliqué à votre rapporteure les personnes qu'elle a auditionnées ;

- la convocation des parties par le greffier, par voie administrative ; c'est la procédure la plus rapide dans la mesure où l'autorité administrative ainsi requise (commissaire de police, par exemple) peut délivrer la convocation dans la journée ; mais l'article 1136-3 du code de procédure civile réserve cette procédure « aux cas de danger grave et imminent pour la sécurité de la personne concernée par une ordonnance de protection ou lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen de notification » ;

- une assignation en la forme des référés , prévue à l'article 1136-4 du code de procédure civile, procédure relativement rapide mais qui nécessite le recours à un huissier de justice .

Votre délégation juge cruciale cette question des délais car leur longueur actuelle dénature l'ordonnance de protection qu'il faut impérativement considérer comme une mesure d'urgence, et peut exposer à de graves dangers les femmes victimes de violences.

La modification que l'article 7 du projet de loi propose d'introduire à l'article 515-11 du code civil pour préciser que l'ordonnance de protection doit être délivrée « dans les meilleurs délais » par le juge aux affaires familiales part donc d'une intention que votre délégation partage pleinement même si elle s'est interrogée sur la portée réelle de cette disposition.

Certaines associations de défense des droits des femmes ont exprimé leur préférence pour la fixation dans la loi d'un délai précis dans les limites duquel le juge serait tenu de statuer. Mais le gouvernement expose, en particulier dans l'étude d'impact, que la fixation d'un délai strict n'irait pas nécessairement dans le sens de la défense des intérêts de la requérante dans la mesure où leur dépassement pourrait entrainer la nullité de la procédure.

Aussi, votre délégation est-elle prête à apporter son soutien à la formule suivant laquelle l'ordonnance doit être rendue « dans les meilleurs délais » , sous réserve que le gouvernement s'engage à prendre les dispositions réglementaires ou procédurales qui permettront une réduction effective des délais de délivrance des ordonnances. Elle l'invite en particulier à s'inspirer des bonnes pratiques en usage dans certains tribunaux comme celui de Bobigny qui privilégie systématiquement la procédure de convocation par huissier.

Au cours de son audition, Ernestine Ronai, responsable de l'Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis et coordinatrice de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences a expliqué qu'un accord passé avec les huissiers de justice avait permis au Tribunal de grande instance de Bobigny de délivrer une signification dans la journée et de ramener ainsi à moins de dix jours le délai nécessaire pour la délivrance d'une ordonnance de protection.

d) Améliorer les délais des autres procédures civiles

Pour autant, la délégation relève que l'ordonnance de protection n'est pas l'unique procédure civile à laquelle ont recours les femmes victimes de violences.

Au cours de son audition, Maitre Isabelle Steyer, avocate spécialiste du droit des victimes a insisté sur le fait que l'ordonnance de protection n'était pas nécessairement la procédure la plus adaptée dans toutes les situations de violences conjugales. Son bon déroulement reposait sur l'intervention récurrente de différents personnels de justice (huissiers pour la délivrance de la convocation, assistance d'un avocat pour au moins deux audiences devant le juge, sans compter la suite des procédures nécessaires à la séparation ou à la pension alimentaire des enfants) qui, du fait de leur coût, la réservaient en pratique soit aux personnes jouissant de revenus confortables soit, à l'autre extrémité, aux personnes éligibles à l'aide juridictionnelle. En outre, c'est aux violences les plus graves et donc les plus étayées par des éléments de preuve, du fait de leur réitération, qu'elle paraissait le plus adaptée. Ces considérations, auxquelles s'ajoutent celles qui tiennent à la plus ou moins grande familiarité que les différents tribunaux ont sur tout le territoire avec cette procédure nouvelle, expliquent que les victimes, et les avocats qui les conseillent, lui préfèrent souvent les trois autres procédures civiles qui permettent de saisir en urgence le juge aux affaires familiales :

- le référé dont la possibilité est prévue par l'article 1073 du code de procédure civile ;

- la saisine dans les formes prévues pour les référés ouvertes par l'article 1137 du code précité ;

- l' assignation à jour fixe des articles 788 et suivants.

Le rapport des inspections indique que de nombreux acteurs judiciaires, avocats et magistrats, lui ont rapporté des exemples concrets de procédures « démontrant la capacité pour les juges aux affaires familiales de répondre en urgence sur le fondement de ces trois textes à des situations susceptibles de relever aussi de l'ordonnance de protection, et ce en permettant aux parties d'obtenir des décisions dans un délai compris entre 3 et 14 jours » 34 ( * ) . Ces délais paraissent sensiblement inférieurs à ceux de l'ordonnance de protection, compris entre 10 et 30 jours. Votre délégation invite donc le gouvernement à ne rien négliger pour réduire encore ces délais dans les situations d'urgence et de danger qui caractérisent les violences conjugales.

La délégation souhaite qu'une attention particulière soit portée à la réduction des délais des procédures civiles autres que l'ordonnance de protection lorsqu'elles sont utilisées dans un contexte de violences conjugales.

e) Allonger la durée de l'ordonnance de protection

Dans sa rédaction actuelle, l'article 515-2 du code civil précise que les mesures prises dans le cadre d'une ordonnance de protection ont une durée maximale de quatre mois. Cette durée s'est révélée à l'usage trop courte et la totalité des interlocuteurs rencontrés par votre rapporteure se sont accordés pour recommander son allongement. Dans son rapport précité, la commission des lois de l'Assemblée nationale avait recommandé de le porter à six mois.

C'est l'option retenue par le II de l'article 7 du projet de loi qui propose de porter ce délai à six mois et de le faire partir du prononcé de l'ordonnance et non plus de sa notification.

Certaines associations auraient souhaité que ce délai puisse être renouvelé une fois pour les concubins et les partenaires, qui, contrairement aux époux, ne disposent pas des possibilités de prorogation ouvertes actuellement par une requête en divorce ou en séparation de corps. Mais ouvrir la possibilité de renouveler un délai porté à six mois par le projet de loi reviendrait en pratique à tripler la durée de l'ordonnance par rapport à la situation actuelle. Outre qu'elle pourrait être considérée comme portant une atteinte excessive aux libertés publiques, cette prolongation serait de nature à altérer la nature de l'ordonnance qui doit rester une mesure d'urgence.

f) La priorité donnée au maintien de la victime dans les lieux

Le principe de l'éviction du conjoint violent hors du domicile conjugal a été posé, au plan pénal , par l'article 35 de la loi n°2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales. Le dispositif a été par la suite complété et étendu par l'article 12 de la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple.

Aux termes de ces dispositions, inscrites aux articles 41-1, 41-2 et 138 du code de procédure pénale ainsi qu'à l'article 132-45 du code pénal, l'autorité judiciaire peut, à tous les stades de la procédure pénale, proposer, dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve, à l'auteur des faits de violence de résider hors du domicile du couple et, le cas échéant de s'abstenir de paraître dans ce domicile ou aux abords de celui-ci

Cette compétence a ensuite été attribuée au juge aux affaires familiales dans la cadre de l'ordonnance de protection par l'article premier de la loi no°2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes. Aux termes de l'article 515-11 du code civil, le juge aux affaires familiales est compétent, à l'occasion de la délivrance d'une ordonnance de protection, notamment pour :

- 3° Statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal et sur les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences ;

- 4°Attribuer la jouissance du logement ou de la résidence du couple au partenaire ou au concubin qui n'est pas l'auteur des violences et préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement.

Votre délégation attache une grande importance au principe de l'éviction du conjoint violent, car celui-ci peut favoriser l'inversion du rapport de forces symbolique entre la victime et l'auteur et favoriser chez ce dernier une prise de conscience salutaire.

Pour autant, elle relève que cette disposition, considérée comme un des leviers phares de l'ordonnance de protection, peine à entrer dans les faits, comme l'ont confirmé les personnes auditionnées.

Le rapport des inspections formule de son côté le même constat : « l'expérience montre qu'à ce jour la victime ne souhaite pas nécessairement exercer son droit au maintien dans le logement » 35 ( * ) .

Certes, le désir de ne pas perturber le cadre de vie des enfants en les changeant d'école, l'attachement à un quartier ou à un voisinage peuvent conduire une victime de violences à demander à bénéficier du maintien dans son domicile. Mais cette solution n'est pas nécessairement la plus adaptée. Le désir de démarrer une vie nouvelle peut s'accompagner de l'envie de rompre avec un cadre qui est lié à de mauvais souvenirs. En outre, la crainte d'un retour du conjoint violent peut faire privilégier un déménagement qui permet de cacher sa nouvelle adresse. Quelle qu'elle soit, votre délégation estime que cette volonté doit être respectée .

À ce titre elle n'est pas défavorable à la nouvelle rédaction proposée par l'article 7 pour le 4° de l'article 515-11 du code civil qui, dans un strict parallélisme avec l'alinéa précédent relatif à la situation des époux, pose, pour les partenaires et concubins, le principe que sauf circonstances particulières, la jouissance du logement est attribué au partenaire ou au concubin qui n'est pas l'auteur des violences. Celle-ci ne marque au demeurant qu'une inflexion minime par rapport à la rédaction actuellement en vigueur.

Toutefois, certaines des personnes auditionnées ont fait valoir que le fait pour la victime des violences d'avoir quitté le domicile et de bénéficier d'un hébergement d'urgence au moment du dépôt de sa requête, avait pu, en pratique, inciter certains juges à privilégier le maintien dans les lieux du conjoint violent. Votre délégation considère que le fait d'avoir dû, dans l'urgence et sous la menace d'un danger imminent, quitter le domicile commun ne doit pas invalider le droit de la victime à rester dans les lieux . Elle vous recommandera donc, pour lever toute ambiguïté, de préciser que le logement est attribué à l'époux, au partenaire ou au concubin qui n'est pas l'auteur des violences « même s'il a bénéficié d'un hébergement d'urgence ».

Votre délégation insiste en revanche pour que, dans l'hypothèse où la victime ne souhaite pas rester dans l'ancien logement commun, elle bénéficie d'une priorité effective dans l'attribution d'un logement social. L'hébergement en urgence des femmes victimes de violences doit s'effectuer au sein de structures adaptées, particulièrement si, comme c'est souvent le cas, elles sont accompagnées de jeunes enfants.

La loi du 9 juillet 2010 comporte deux dispositions destinées à favoriser le développement de ces possibilités d'hébergement :

- l'article 19 qui prévoit la signature de conventions entre l'Etat, les départements et les communes pour réserver dans chaque département un nombre suffisant de logements, répartis géographiquement, à destination des personnes victimes de violences, protégées ou ayant été protégées par l'ordonnance de protection ;

- l'article 20 qui confie à une convention passée entre l'Etat et les centres régionaux des oeuvres universitaires le soin de réserver un nombre suffisant de logements à destination des personnes majeurs victimes de violences inscrites dans un établissement scolaire ou universitaire et qui sont protégées par une ordonnance de protection.

En Seine-Saint-Denis, le dispositif « un toit pour elles » mis en place en partenariat par l'Etat, le Département, la Caisse d'allocations familiales et 22 communes a effectivement contribué à fluidifier l'hébergement d'urgence dans le département. Ce partenariat a abouti à mettre un parc de 53 logements à la disposition de femmes victimes de violences. Entre janvier 2010 et juin 2013 85 femmes et 144 enfants ont ainsi pu être secourus.

Ces dispositifs devraient être plus systématiquement mis en oeuvre.

g) L'exercice de l'autorité parentale

- A l'occasion de la délivrance d'une ordonnance de protection, le juge aux affaires familiales est compétent, aux termes de l'article 515-11 du code civil, pour :

5° Se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour le couples mariés, sur l'aide matérielle au sens de l'article 515-4 pour les partenaires d'un pacte civil de solidarité et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants.

Dans le cadre de leur mission d'évaluation de l'ordonnance de protection, les services d'inspection relèvent que les témoignages recueillis tant auprès des travailleurs sociaux que des juges font part des souhaits des victimes de préserver autant que possible les liens entre les enfants et les pères

Mais dans un contexte de violences conjugales, la question de l'exercice de l'autorité parentale par le parent violent peut être une source de menaces, de pressions, voire de danger.

Certes, l'article 373-2-1 du code civil autorise déjà le juge, si l'intérêt de l'enfant le commande, à confier l'exercice de l'autorité parentale à l'un de deux parents. Il peut aussi, mais pour des motifs graves, refuser à celui-ci l'exercice du droit de visite et du droit d'hébergement. Il convient toutefois de relever que le juge n'est invité à prendre en compte dans sa décision que l'intérêt de l'enfant. Sans doute conviendrait-il d'inviter le juge aux affaires familiales, lorsqu'il délivre une ordonnance de protection, à éviter de fixer la résidence de l'enfant au domicile du conjoint violent ou d'ordonner de résidence alternée, sauf circonstances particulières justifiées par l'intérêt supérieur de l'enfant. La délégation souhaite aussi rappeler que le juge doit pouvoir, dans le cadre d'une ordonnance de protection, prononcer le retrait partiel de l'autorité parentale ou du droit de garde du parent violent, s'il a la conviction que cette décision est conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant.

L'article 373-2 du code civil autorise également le juge, lorsque l'intérêt de l'enfant le commande ou lorsque la remise directe de l'enfant à l'autre parent présente un danger pour l'un d'eux, à en organiser les modalités pour qu'elle présente toutes les garanties nécessaires. Il peut prévoir qu'elle s'effectue dans un espace de rencontre qu'il désigne ou en présence d'un tiers de confiance ou du représentant d'une personne morale qualifiée.

Il semblerait toutefois qu'en pratique, l'obligation de recourir pour la remise des enfants à des espaces de rencontre protégés soit freinée par la rareté de ceux-ci. Votre délégation invite donc les tribunaux à recenser les lieux susceptibles de constituer de s espaces de rencontre protégés.

2. La médiation pénale : une mesure incompatible avec l'ordonnance de protection

La médiation pénale est une des mesures alternatives aux poursuites, énumérées à l'article 41-1 du code de procédure pénale, que peut prendre le procureur de la République dans le cadre de poursuites pénales.

Les associations de défense des droits des femmes insistent avec régularité pour que la médiation pénale ne soit pas employée dans les situations de violences conjugales car elle revient à mettre face à face, dans une situation faussement égalitaire, l'auteur des violences et la victime sous emprise. Elles ont rappelé lors de leur audition la contradiction qu'il y aurait à procéder simultanément à la délivrance d'une ordonnance de protection et à une médiation pénale.

Ces considérations ont conduit le législateur à l'occasion de la loi du 9 juillet 2010 à introduire dans le code de procédure pénale une présomption de non-consentement à la médiation pénale pour les personnes bénéficiant d'une ordonnance de protection.

Le projet de loi dans son article 8 restreint encore, sans les faire disparaître complètement, les possibilités de recours à la médiation : dans un contexte de violences au sein du couple, le recours à la médiation ne sera possible que si la victime en fait expressément la demande. Et cette médiation, dès lors qu'elle aura réussi, devra être assortie d'un rappel à la loi pour l'auteur des violences.

Le rapport des inspections estime que le recours à la médiation pénale est aujourd'hui très marginal voire résiduel. Il indique que les parquets rencontrés font précisé qu'ils n'y recourent que dans des cas très ciblés, dans les situations de crise, de violences de faible gravité, par un mis en cause n'ayant pas d'antécédent et alors que le couple vivant sous le même toit désire maintenir le lien qui les unit.

Votre délégation estime cependant que la médiation pénale n'est pas une procédure adaptée dans le contexte de violences conjugales car elle risque de contribuer à la perpétuation d'un phénomène d'emprise de l'agresseur sur la victime. Elle recommande donc d'exclure tout recours à la médiation pénale dans un contexte de violences conjugales.

3. Le téléphone grand danger : une expérimentation qui mérite d'être généralisée.

La loi du 9 juillet 2010 avait institué à titre expérimental deux dispositifs visant à attribuer aux victimes des dispositifs de télé-protection permettant de signaler à distance que le conjoint violent mis en examen ou condamné se trouvait à proximité d'elles. Mais ces dispositifs étaient assortis de conditions très restrictives dans la mesure où ils n'étaient envisagés que dans l'hypothèse où le conjoint violent avait été condamné ou était susceptible d'encourir une peine d'au moins cinq ans de prison. Ces dispositifs ont en outre été jugés anxiogènes pour les femmes qui risquaient de se retrouver en permanence sur le qui-vive. Ces expérimentations n'ont de ce fait pas véritablement abouti.

En marge de ces dispositifs légaux, un autre dispositif expérimental a été mis en place dans le ressort du tribunal de Bobigny et du tribunal de Strasbourg sur la base d'une convention de partenariat signée entre l'Etat, les collectivités territoriales, les associations d'aide aux victimes et des opérateurs privés.

Celui-ci consiste en la remise, sur décision du parquet, pour une période limitée, à des femmes en situation de danger, d'un téléphone d'alerte des services de police et de gendarmerie. Ces téléphones peuvent être ou non géo-localisables.

D'après les informations recueillies par votre rapporteure, ce dispositif semble donner pleinement satisfaction. Au cours de son audition, Ernestine Ronai a jugé très positifs les résultats obtenus par ce dispositif expérimenté depuis 2009 en Seine-Saint-Denis et qui a déjà bénéficié à 122 femmes et par extension à 189 enfants mineurs. Elle a estimé que celui-ci procurait un sentiment de sécurité à la victime en lui indiquant que le danger avait été pris en compte par la justice et en lui permettant d'entrer à tout moment par un circuit prioritaire en contact avec les services de police ou de gendarmerie.

Suivant un constat largement partagé, ce dispositif parait présenter une grande complémentarité avec l'ordonnance de protection : le premier garantit la sécurité physique de la victime et le second assure sa sécurité juridique. Ils sont de nature à permettre à la victime de reprendre progressivement une vie ordinaire.

L'étude d'impact précise que la généralisation du dispositif téléphone grand danger est inscrite dans la cadre de la stratégie nationale de prévention de la délinquance adoptée par le gouvernement et que les coûts seront partagés entre l'État et les collectivités territoriales. Le coût global pour doter les cent départements (hors Mayotte) est évalué à un peu plus de 490 000 euros qui devraient être imputés sur le programme 137 sur lequel sont inscrits les crédits du service des droits des femmes.

Votre délégation se montrera attentive lors de l'examen de la prochaine loi de finances au montant des crédits qui seront consacrés à cette mesure nouvelle. Ceux-ci devront couvrir à la fois le coût des téléphones proprement dits et l'accompagnement des associations partenaires de l'expérimentation. Car ce dispositif qui repose principalement sur les services de sécurité et les associations partenaires fait peser sur ces dernières de lourdes contraintes qui appelleront nécessairement des compensations financières.

Votre délégation apporte son plein soutien au dispositif de télé-protection prévu à l'article 10 du projet de loi et invite l'État à consacrer les moyens nécessaires à sa généralisation.

4. La responsabilisation des auteurs de violences : un levier contre la récidive

Votre délégation a régulièrement insisté sur le fait que la lutte contre les violences envers les femmes ne devait pas se limiter au soutien qu'il faut apporter aux victimes mais devait comporter également des actions en direction des auteurs de violences pour tarir celles-ci à la source.

Aussi juge-t-elle positive, sur le principe, la création d'un « stage de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre les violences sexistes » qui pourrait être imposé au conjoint violent par le procureur de la République comme alternative aux poursuites, ou comme mesure de composition pénale, ou par le juge, comme obligation spécifique d'un sursis avec mise à l'épreuve ou comme peine complémentaire. Elle estime qu'en mettre le coût à la charge de l'auteur des violences est de nature à contribuer à la dimension pédagogique de la mesure.

Elle souhaite cependant que, dans un souci d'efficacité, l'objet de ce stage soit recentré sur les violences conjugales proprement dites, qui constituent un sujet en soi, plutôt que se diluer dans la dénonciation des violences sexistes, en général, ce qui en diminuerait la portée. Elle préfèrerait en outre au terme de « stage de sensibilisation » le terme de « stage de responsabilisation »qui lui paraît plus fort et plus conforme à sa vocation.

Votre délégation recommande donc de substituer, à l'article 15 du projet de loi, l'expression de « stage de responsabilisation à la prévention et à la lutte contre les violences au sein du couple » à celle de « stage de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre les violences sexistes ».

5. La formation des professionnels : une impérieuse nécessité

Votre délégation est convaincue de la nécessité de dispenser aux professionnels une formation spécifique à la problématique des violences et à leur traitement.

Certes, l'École nationale de la magistrature a intégré, dès 2011, l'ordonnance de protection dans ses formations, tant en formation initiale qu'en formation continue. Celle-ci s'adresse à l'ensemble des magistrats, et plus particulièrement aux magistrats qui changent de fonction pour occuper des postes de juges aux affaires familiales, de juges des enfants ou de parquetiers. Dans le cadre de la formation continue déconcentrée assurée dans les cours d'appel, sont également organisées des sessions associant d'autres professionnels.

Une formation adaptée doit également être délivrée à l'ensemble des personnels qui peuvent être amenés, en amont, à détecter les situations de violences, ou qui en aval des procédures seront amenés à assurer l'accompagnement et le soutien des victimes. Cette formation aurait vocation à être dispensée, suivant des modalités particulières, aux personnels de santé, aux services sociaux, aux personnels de police et de gendarmerie ainsi bien entendu qu'aux acteurs de la justice, magistrats, huissiers, et avocats. Ces formations, dont le contenu et les modalités devraient être définis en partenariat avec la MIPROF seraient dispensées par des organismes et des intervenant agréés.

Votre délégation souhaite que des formations agréées aux violences conjugales soient dispensées aux professionnels qui sont amenés à connaître des violences au sein du couple suivant des modalités définies en partenariat avec la MIPROF de façon à leur permettre d'en effectuer le repérage et d'en assurer la prise en charge.

6. La protection des femmes étrangères victimes de violences conjugales

L'article 14 du projet de loi introduit un nouvel article L.311-17 dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour que les victimes de violences conjugales et les victimes de la traite des êtres humains soient dispensées des taxes et droits de timbres liés au séjour ainsi que des taxes sur la primo-délivrance et le renouvellement des titres de séjour.

Votre délégation approuve cette disposition qui, pour une dépense fiscale limitée évaluée à 160 000 euros par an, est de nature à venir en aide à des femmes étrangères victimes de violence qui se trouvent très souvent dans des situations très précaires.

Votre délégation souhaite compléter cette mesure par une disposition rendant plus systématique la délivrance ou le renouvellement par l'autorité administrative d'un titre de séjour à l'étranger bénéficiant d'une ordonnance de protection. Actuellement, le titre de séjour, la carte de séjour temporaire, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ainsi que la carte de résident sont délivrées par l'autorité administrative sous la condition que la présence de la personne étrangère ne constitue pas « une menace à l'ordre public ». Cette notion parfois interprétée de façon extensive a pu, semble-t-il, justifier des refus. Les associations demandent que la délivrance de ces titres soit dorénavant de droit, mais la suppression de toute conditionnalité ne constituerait pas une mesure équilibrée. Votre délégation considère donc que ces titres doivent être délivrés à l'étranger bénéficiaire d'une ordonnance de protection sauf en cas de menace « grave » à l'ordre public , par parallélisme avec les conditions posées par l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'expulsion d'un étranger.

7. Une pratique inacceptable : la correctionnalisation des viols

Le viol est un crime puni par l'article 222-23 du code pénal de quinze ans de réclusion criminelle, ce qui souligne sa gravité. Il semblerait cependant que ces actes criminels soient trop souvent « correctionnalisés » et poursuivis sous la simple incrimination d'agressions sexuelles.

Dans le rapport qu'elle a consacré au rétablissement du délit de harcèlement sexuel, votre délégation a déjà eu l'occasion de dénoncer une pratique qui consiste à « déqualifier » les violences sexuelles. Elle avait rappelé que lorsque des faits matériels identiques sont susceptibles d'être réprimés par l'application de deux ou plusieurs textes, le concours d'infraction qui en résulte doit être tranché dans le sens de l'application de la qualification la plus haute. Elle avait cependant constaté au vu de la jurisprudence qu'un grand nombre de décisions de fond s'affranchissaient de la rigueur de ces principes pour décider de poursuivre sous la qualification de harcèlement sexuel des faits qui constituaient manifestement des cas d'agressions sexuelles. Elle avait donc formulé une recommandation invitant la garde des sceaux, responsable de la politique pénale, à se montrer vigilante pour que le nouveau délit de harcèlement sexuel ne soit plus utilisé à l'avenir pour sanctionner des agissements qui relèvent d'incriminations plus graves. Elle s'est réjouie que cette recommandation ait été parfaitement prise en compte par la circulaire relative au harcèlement sexuel 36 ( * ) .

Elle tient ici à rappeler les raisons pour lesquelles la correctionnalisation des affaires de viol lui semble contraire à l'intérêt des victimes et plus largement à la lutte contre les violences faites aux femmes :

- en premier lieu elle ramène le délai de prescription de dix ans, en matière criminelle, à trois ans en matière correctionnelle ;

- elle ferme l'accès à l'aide juridictionnelle sans condition de ressources;

- le jugement ainsi rendu, souvent en une audience d'une heure à peine, ne permet ni à l'agresseur de prendre la mesure de la gravité de son acte, ni à la victime de se reconstruire.

Pour toutes ces raisons, votre délégation , comme elle l'avait fait en matière de harcèlement sexuel, recommande à la garde des sceaux, responsable de la politique pénale, de se montrer vigilante pour que d'autres incriminations moins graves ne soient plus utilisées pour sanctionner un viol ou une tentative de viol, dès lors que les éléments constitutifs de ce crime sont caractérisés .


* 31 Rapport d'information n° 4169 : application de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein du couple et aux incidences de ces dernières sur les enfants, fait par Danielle Bousquet et Guy Geoffrey, députés, au nom de la commission des Lois.

* 32 Mission d'évaluation de l'ordonnance de protection - Inspection générale des Services judiciaires et inspection générale des Affaires sociales par Magali Ingall - Montagnier, Benoît Descoubes, Christine Branchu - Juin 2013.

* 33 Rapport précité, p. 14

* 34 Mission d'évaluation de l'ordonnance de protection p. 41

* 35 Mission d'évaluation, p. 33

* 36 Circulaire CRIM 2012-15 du 7 août 2012.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page