III. UNE LOI ARTICULÉE AUTOUR DE QUATRE AXES

S'inspirant très largement du dispositif d'« alarme sociale » mis en place à la RATP dès 1996, la loi du 21 août 2007 comprend quatre volets principaux :

- la prévention des conflits, en encourageant la négociation d'un accord-cadre dans l'entreprise ou d'un accord de branche ;

- la garantie de la continuité du service public en cas de perturbations prévisibles du trafic ;

- l'encadrement de l'exercice individuel du droit de grève ;

- enfin, l'amélioration de l'information des voyageurs.

A. DONNER LA PRIORITÉ À LA NÉGOCIATION D'ENTREPRISE POUR PRÉVENIR LES CONFLITS ET DÉVELOPPER LE DIALOGUE SOCIAL

La loi donne la priorité à la négociation au sein des entreprises de transport pour conclure un accord-cadre organisant une procédure de prévention des conflits et tendant à développer le dialogue social.

L'objet de cet accord-cadre est précisé par l'article 2 du texte : il s'agit de conditionner le dépôt d'un préavis de grève à une négociation préalable entre l'employeur et les organisations syndicales concernées. L'accord-cadre doit donc fixer les règles d'organisation et le déroulement de cette négociation.

Au niveau de la branche, une négociation devait également être menée, l'accord de branche ne s'appliquant dans les entreprises qu'en l'absence d'accord-cadre. Toutefois, la loi indique que tout accord-cadre régulièrement négocié s'applique, dès sa signature, en lieu et place de l'accord de branche. Compte tenu des spécificités de la SNCF et de la RATP, seules deux branches sont concernées : le transport urbain d'une part, le transport interurbain d'autre part.

Toutes ces négociations, au niveau des entreprises et de la branche, devaient être engagées avant le 1 er janvier 2008.

Si aucun accord n'a été signé dans l'entreprise ou au niveau de la branche, ce sont les dispositions d'un décret qui s'appliquent, en l'espèce le décret du 24 janvier 2008 19 ( * ) , qui a été pris après consultation des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des secteurs d'activité concernés. Il convient de rappeler que ce décret n'a qu'une valeur supplétive : il ne s'applique plus dès qu'un accord de branche ou un accord-cadre est régulièrement signé.

Quel que soit le support juridique (accord-cadre, accord de branche, décret en Conseil d'État), les sujets suivants doivent être abordés :

- les conditions de la notification à l'employeur des motifs d'un préavis de grève ;

- le délai imposé à l'employeur pour réunir les organisations syndicales qui ont procédé à la notification (au maximum trois jours) ;

- la durée de la négociation préalable (au maximum huit jours francs à compter de la notification) et ses modalités de déroulement ;

- les informations que l'employeur doit transmettre pendant la négociation préalable et les délais de transmission ;

- les modalités d'élaboration du relevé de conclusions et son contenu ;

- les conditions d'information des salariés.

Par ailleurs, la loi a imposé que les procédures de prévention des conflits conclues antérieurement à la publication de la loi, notamment à la RATP et à la SNCF, soient mises en conformité avec elle avant le 1 er janvier 2008.

La loi de 2007 ne revient pas sur les règles spécifiques du préavis de grève , codifiées à l'époque à l'article L. 521-3 du code du travail, devenu aujourd'hui son article L. 2512-2. Ainsi, le préavis de grève doit préciser les motifs du recours à la grève, et parvenir cinq jours francs avant le déclenchement de la grève à l'autorité hiérarchique ou à la direction de l'établissement, de l'entreprise ou de l'organisme intéressé. Le préavis doit également mentionner le champ géographique et l'heure du début du mouvement envisagé, ainsi que sa durée. Pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier.

En outre, la loi a interdit les « préavis glissants » : la période de négociation préalable et celle du préavis doivent être closes pour que la ou les mêmes organisations syndicales puissent déposer un nouveau préavis sur le même sujet. Dans sa décision du 16 août 2007, le Conseil constitutionnel a estimé que l'interdiction des préavis glissants est licite car le « recours répété à des grèves de courte durée » peut mettre en cause la continuité du service public.

Enfin, le législateur a souhaité encourager le recours au médiateur , choisi d'un commun accord, pour favoriser le règlement d'un différend. Il peut d'ailleurs, tout comme l'employeur ou une organisation syndicale représentative, décider d'organiser un referendum consultatif auprès des salariés sur la poursuite d'une grève huit jours après son déclenchement, dans les conditions précisées par la loi. Son résultat n'affecte toutefois pas l'exercice du droit de grève.

Les principales règles fixées
par le décret n° 2008-82 du 24 janvier 2008

L'organisation syndicale doit remettre à l'employeur, en main propre contre décharge, ou par tout autre moyen similaire, une notification présentant les motifs pour lesquels elle envisage de déposer un préavis de grève .

Cette notification doit comporter les revendications du syndicat, ainsi que les catégories d'agents et les services concernés par celles-ci.

L'employeur doit alors réunir le ou les représentants des syndicats dans les trois jours suivants la notification. Il leur transmet toutes les informations de nature à éclairer les parties à la négociation, au plus tard vingt-quatre heures avant l'ouverture de la négociation préalable.

Les parties disposent de huit jours francs à compter de la notification pour négocier.

L'employeur est tenu d'offrir aux négociateurs toute facilité pour préparer et assister aux réunions, le temps consacré étant assimilé à du temps de travail effectif ou à des heures de délégation pour circonstances exceptionnelles.

Sauf accord exprès contraire, les délégations patronales et syndicales comportent le même nombre de personnes .

Le relevé de conclusions des négociations doit être élaboré et signé conjointement par l'employeur et les syndicats concernés, et il doit rappeler avec précision toutes les phases de la négociation. Ce relevé doit être ensuite diffusé le plus rapidement possible au personnel soit par l'employeur, soit par les syndicats, puis être transmis sans délai au représentant de l'État dans la région, au représentant de l'AOT et à l'inspection du travail territorialement compétente.

Les syndicats à l'origine du préavis de grève informent les salariés des motifs pour lesquels ils envisagent, le cas échéant, de déposer finalement un préavis de grève, l'employeur devant également faire connaître sa position.


* 19 Décret n° 2008-82 du 24 janvier 2008 relatif à l'application de l'article 2 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

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