CONCLUSION

Il était demandé à votre commission de se pencher sur les modalités du montage juridique et financier et l'environnement du contrat passé avec la société Écomouv' pour la mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds. Sur la base des éléments rassemblés, votre commission a établi que (i) le recours à un contrat de partenariat avait été dûment autorisé par le Conseil d'État saisi dans les formes prévues, (ii) la consultation proprement dite conduisant au choix du prestataire in fine , s'est déroulée dans le respect de l'égalité de traitement des candidats.

La décision d'externaliser la collecte de l'écotaxe, dans le cadre d'un partenariat public-privé a fait consensus au Parlement lorsqu'elle a été prise. C'est un choix politique, d'autres solutions étant techniquement et juridiquement envisageables.

Sur le recours au contrat de partenariat, les autorités politiques ont considéré que la commande était passée, dès lors que l'administration avait consigne de mettre en place un dispositif assurant une rentrée financière de 1,1 à 1,2 milliard d'euros. L'administration a opté pour l'externalisation juridiquement la plus large possible, allant jusqu'à la perception de la taxe ainsi mise en place. L'État s'est donné comme objectif de maximiser le montant des recettes tout en minimisant le risque de contentieux avec notamment des exigences techniques en termes de contrôle peut-être excessives. La logique de réduction des effectifs de fonctionnaires qui prévalait ne permettait pas d'envisager les créations de postes induites par la mise en place de ces contrôles. Les investissements liés aux contraintes technologiques définies dans ce cadre ont contribué à aboutir à un coût de projet très supérieur à celui qui était estimé lors de l'étude d'évaluation préalable.

La procédure du dialogue compétitif, menée sur de longs mois, a été l'occasion d'échanges nombreux entre l'État et les candidats sur tous ces points. Il apparaît que la société Écomouv', attributaire du marché, s'est engagée sur des délais et des performances dont elle ne pouvait ignorer les difficultés, voire l'impossibilité, à les respecter. Votre commission rappellera seulement que l'Allemagne a connu une situation similaire dans ses relations avec la société Toll Collect, qui réalise aujourd'hui dans des conditions conformes à ses engagements une prestation de même nature pour l'État fédéral allemand.

Après une installation retardée par rapport au calendrier initial, Écomouv' n'a maîtrisé son système que difficilement et tardivement. Hors les modifications liées aux demandes de l'administration, et qui ont fait l'objet lorsque c'était possible d'assouplissements, il apparaît qu'Écomouv' n'a pas fait preuve de la transparence attendue pendant toute la phase de mise au point du dispositif, cachant à l'État ses retards et ses difficultés. La compréhension des pouvoirs de contrôle de l'État dans ses locaux comme en ce qui concerne certaines de ses procédures internes a fait et fait encore l'objet de points de vue différents entre l'administration et la société.

Les auditions ont souligné que l'externalisation du recouvrement de la taxe a amené l'administration à être très exigeante sur des garanties proches du « zéro défaut ». On peut donc légitimement s'interroger sur le fait que le choix d'un périmètre étendu du PPP ait amené à une complexification et à un surcoût. Mais dans tous les cas, les réponses techniques ayant été apportées par Écomouv', cette interrogation n'est pas de nature à remettre en cause le contrat, mais mérite d'être gardée en mémoire.

La décision prise en octobre 2013 de suspendre l'écotaxe, pour des raisons d'ordre public, a créé une situation juridiquement complexe, mais qu'Écomouv', aux prises avec des difficultés de stabilisation du système qu'elle avait intérêt à ne pas mettre en avant, a acceptée et mise à profit pour prolonger les tests de vérification et de mise au point en cours. Indéniablement, cette décision a joué sur l'engagement des entreprises de transport notamment, qui se sont positionnées en situation d'attente au regard des opérations d'enregistrement en cours. Mais ce point était loin d'être le seul à devoir faire l'objet de corrections et de tests. Même s'il est important aujourd'hui de retrouver de la transparence et des certitudes sur l'avenir de l'écotaxe et du dispositif mis au point par Écomouv', tant pour la société elle-même et ses financeurs que pour les redevables et les SHT, on ne saurait affirmer que le dispositif était totalement opérationnel le 1 er janvier 2014.

En tout état de cause, la suspension de l'écotaxe est une décision politique sans aucun fondement juridique. Dès lors que l'écotaxe a été votée par le Parlement, elle ne saurait être modifiée ou, a fortiori , supprimée sans qu'il soit à nouveau saisi.

Pour autant, il convient désormais de sortir rapidement de l'impasse, en redéfinissant avec Écomouv' le périmètre de l'opération et les responsabilités réciproques de l'État et de son mandataire, tout en trouvant un nécessaire accord financier. L'étude des choix qui s'offrent au Gouvernement quant aux décisions politiques liées à l'instauration d'une fiscalité écologique appliquant les principes du Grenelle de l'environnement sort du champ des préoccupations de votre commission, mais relevait de la mission parlementaire conduite par nos collègues de l'Assemblée nationale.

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