CONCLUSION

Le bilan dressé par votre mission commune d'information fait apparaître que les avancées incontestables en matière de transparence administrative restent encore très en deçà des attentes légitimes de la société civile.

L'inertie à laquelle se heurte encore l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs, la qualité inégale de la gestion des portails publics d'information et les difficultés de réutilisation des données publiques disponibles montrent qu'il reste des réticences à lever au sein des administrations. Elles appellent la mise en oeuvre d'une politique plus volontariste pour répondre aux nouveaux enjeux de la transparence administrative à l'heure du numérique.

La transparence de l'action publique peut et doit en effet être améliorée, vis-à-vis de chaque citoyen comme de la collectivité ; la France doit en outre anticiper la massification des données ( big data ) et donc renforcer les moyens d'accompagnement de la généralisation de l'ouverture des données publiques, dans le respect de la vie privée 359 ( * ) et en s'assurant du maintien de sa souveraineté sur ces données.

En préconisant une refonte du droit de l'information publique , la mission entend répondre tout à la fois aux enjeux citoyens attachés à l'accessibilité des données publiques et permettre à notre pays de saisir les opportunités stratégiques ainsi ouvertes. Elle propose à cet effet :

- de donner sa pleine effectivité au droit d'accès à l'information ;

- de construire un droit d'accès numérique à l'information publique ;

- de promouvoir une démarche raisonnée d'ouverture des données publiques, qui permette un véritable contrôle citoyen et une réutilisation efficiente de ces données à l'appui de l'efficacité de la gestion des services publics et du développement de nouveaux services.

C'est dans le cadre ainsi redéfini qu'elle a formulé un ensemble de recommandations pragmatiques , dont elle souhaite qu'elles soient susceptibles de contribuer utilement à la définition des politiques publiques en la matière.

EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mercredi 5 juin 2014, sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, la mission commune d'information sur l'accès aux documents administratifs et aux données publiques procède à l'examen du rapport de Mme Corinne Bouchoux.

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Notre mission commune d'information sur l'accès aux documents administratifs et aux données publiques, créée en décembre 2013, touche à son terme. Nous avons procédé à un grand nombre d'auditions, tout d'abord de collectifs citoyens, d'associations, de journalistes et d'entreprises, afin d'identifier les difficultés rencontrées, de mesurer les progrès réalisés et de cerner leurs attentes ; nous avons ensuite entendu des acteurs des données publiques afin de prendre connaissance des politiques d'ouverture des données mises en oeuvre par de grands établissements publics, des départements statistiques ministériels, ou encore par certaines collectivités locales.

Nous avons enfin étudié quelques modèles étrangers, fait un point sur les travaux européens, et entendu les acteurs de la stratégie d'open datade l'État dans le cadre de la modernisation de l'action publique.

Lors de notre dernière réunion, le 17 avril, notre rapporteure nous a présenté les grandes orientations sur lesquelles elle travaillait afin que vous puissiez lui faire part de vos réactions ; puis elle a rédigé un projet de rapport que vous avez pu consulter mardi, mercredi ou ce matin. Nos travaux, qui se sont déroulés dans un climat excellent, ont permis d'appréhender la question de la transparence administrative dans ses dimensions citoyennes, économiques, juridiques et même techniques.

Mme Corinne Bouchoux, rapporteure . - Merci, Monsieur le Président. Je salue la remarquable réactivité et le sens de l'écoute de l'équipe qui m'a assistée dans la préparation de ce rapport. Il s'agissait d'examiner l'effectivité du droit à l'information publique introduit en 1978 et 1979 et de réfléchir aux perspectives ouvertes par la généralisation du numérique - deux sujet qui sont étroitement liés.

Le rapport rappelle le cadre juridique du droit à l'information publique : les lois de 1978 et 1979 prévoient  un droit d'accès général aux documents de l'administration - ceux qu'elle établit comme ceux qu'elle reçoit pour l'exercice de ses missions - une obligation de diffusion très circonscrite et aucune obligation pour l'administration d'ouvrir ses données. Le droit opposable à l'information ne s'étend ni aux informations personnelles, dont l'accès est réservé aux seuls intéressés, ni aux secrets protégés par la loi, dans l'intérêt public ou par égard aux intérêts protégés (le secret industriel et commercial). L'information publique est donc essentiellement quérable et sa communication relève de l'initiative individuelle.

Elle est en outre devenue partiellement portable. Les normes juridiques doivent en effet être publiées : cette obligation a été étendue en 2000 à leurs interprétations qui ne sont opposables qu'à condition d'avoir été publiées. Cette évolution très importante concerne également les actes et délibérations des collectivités territoriales, qui doivent être affichées ou mis à disposition pour consultation, selon le cas, et, dans le cadre d'un régime particulier, les informations liées à l'environnement, en particulier lors des consultations et enquêtes préalables.

Depuis 2005, les données publiques sont en droit réutilisables, par toute personne, à d'autres fins que celles en vue desquelles elles ont été conçues. Ce droit de réutilisation a la même étendue que celui de l'accès aux documents administratifs, et n'a pas pour corollaire l'obligation pour l'administration de publier des données « ouvertes », c'est-à-dire techniquement réutilisables : la démarche d'open data reste à la discrétion des pouvoirs publics.

La mission a procédé, entre le début du mois de janvier et la mi-avril, à de nombreuses auditions afin d'établir si la mise en oeuvre du droit d'accès aux documents administratifs connaissait encore des difficultés, juridiques ou pratiques ; de mesurer les attentes - nombreuses, hétérogènes, parfois contradictoires - exprimées par des publics extrêmement variés en matière de diffusion des informations publiques sur les portails publics et d'ouverture des données publiques ; enfin, d'examiner les politiques mises en oeuvre par les pouvoirs publics, avec un certain volontarisme au plan national, en nous attachant plus particulièrement aux domaines vitaux que sont la santé et l'environnement, ainsi qu'à celui, d'intérêt général, de la culture.

La liste des personnes entendues figure en annexe du tome I du projet de rapport et les comptes rendus des auditions sont reproduits dans le tome II (et consultables en ligne sur la page de la mission).

Nous avons constaté que la conversion de l'administration à l'accès et à la diffusion des informations publiques restait tardive et inachevée. Malgré d'indéniables efforts, les administrations sont dans l'ensemble peu diligentes dans le traitement des demandes individuelles de communication de documents administratifs, parfois, il est vrai, pour de bonnes raisons.

La diffusion numérique des informations publiques est contrastée : de nombreux portails publics d'information, variés et de bonne qualité, ont été créés depuis dix ans, mais l'identification de l'information recherchée apparaît souvent difficile ; l'information disponible est lacunaire, de qualité inégale et, en dépit du travail conséquent qui a été effectué, ne répond pas toujours aux attentes des citoyens.

L'ouverture des données, quant à elle, est une priorité affichée, visant à répondre à des attentes multiples, mais le chemin pour atteindre cet objectif est semé d'embûches. La France est certes en pointe, au plan international, pour l'open data ; cette approche volontariste peut se prévaloir de résultats significatifs, comme la plateforme data.gouv.fr et l'ouverture annoncée de grandes bases de données publiques. Certaines grandes collectivités territoriales se sont également engagées - pas toujours de manière harmonieuse - dans une démarche semblable au service des habitants, notamment sur des questions de transports et de tourisme.

Reste à mettre en oeuvre un effort d'indexation et de mise en relation des données, afin de faciliter la recherche des données brutes pertinentes, qui demeurent  comme les pierres encore éparses d'un édifice à construire. Plusieurs chantiers sectoriels appellent des améliorations, notamment dans les domaines de la santé et de la culture, pour lesquels ce rapport, se voulant pragmatique, pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses.

L'affichage d'une volonté politique affirmée a suscité des attentes fortes, portées par une avant-garde composée d'acteurs divers et impatients. En pratique, la réutilisation des données publiques se heurte à certains obstacles surmontables : des difficultés techniques et méthodologiques, tenant notamment au format des données, à l'absence de contextualisation, ou encore au défaut d'harmonisation des processus de production qui interdit un réel travail méthodologique.

La transparence administrative doit recevoir un nouvel élan. On s'appuiera à cette fin sur le socle éprouvé des lois de 1978 et 1979 pour consacrer un nouveau droit d'accès numérique à l'information publique. Trois objectifs s'imposent : l'effectivité du droit d'accès aux documents administratifs, de l'accessibilité en ligne de l'information publique et de la possibilité de réutiliser les données publiques ; l'exhaustivité, sous réserve des exceptions prévues par la loi, des documents communiqués et des informations publiées sur les portails publics et les plateformes de réutilisation ; enfin, l'ouverture des administrations les unes envers les autres, qui doivent dialoguer entre elles, afin d'améliorer le fonctionnement de leurs services, envers le public également, qui est en droit de contrôler leur action, et la société civile, dans son ensemble, dans la perspective du développement de nouveaux services, que l'on nous a beaucoup vantée, mais qui gagnerait à être étayée par des études économétriques solides. Tel est, en quelque sorte, notre « discours de la méthode »

Nous recommandons, afin de rendre plus effectif le droit d'accès à  l'information publique, d'accélérer la communication des documents administratifs, non pour sanctionner, mais pour compter sur la vertu pédagogique de la loi. Tel est l'objet du « référé communication » dont nous préconisons la création, devant le juge administratif, sur saisine de la Cada (commission d'accès aux documents administratifs) dès réception de la demande d'avis, dans deux cas spécifiques : lorsque la question de la communicabilité du document a déjà été tranchée par la jurisprudence ou par la Cada, ou si le document figure sur une liste fixée par arrêté après avis de cette dernière. Ce ne serait pas une révolution, mais un renforcement de la méthodologie existante...

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Oui.

Mme Corinne Bouchoux, rapporteure . - Nous souhaitons disposer d'un bilan annuel de l'accès aux documents administratifs dans chaque administration ; la Cada pourrait en être destinataire et publier la liste des « mauvais élèves ». Elle a anticipé notre proposition, en conduisant dès cette année une étude sur les 120 refus de communiquer : plus de la moitié d'entre eux (dont 30 pour l'État et 47 pour les collectivités territoriales) sont tout à fait sensés.

Il importe par ailleurs de mieux guider le citoyen dans sa recherche d'interlocuteurs et de documents en mettant systématiquement en ligne, avec un moteur de recherche, les répertoires des informations publiques prévus par la loi, recensant les documents, publiés ou non, et décrivant les informations qu'ils contiennent. Là encore, il s'agit de mettre effectivement en place ce qui est déjà censé exister.

Pour construire un droit d'accès numérique à l'information publique, nous prenons appui sur le périmètre inchangé des informations accessibles au titre de l'article 1 er de la loi de 1978. Il doit conduire à une diffusion en ligne plus générale, d'une information publique de qualité et répondant mieux aux attentes. C'est pourquoi nous recommandons, ayant constaté leur extrême diversité, l'harmonisation des sites publics. Nous proposons, pour étendre le champ de l'information publiée, de mettre en ligne immédiatement les documents d'intérêt général les plus fréquemment demandés, dont la liste serait fixée par décret - les nouvelles technologies permettent de le faire dans un délai très court - et de reconnaître aux citoyens le droit d'obtenir de l'administration la mise en ligne de tout document librement communicable et fréquemment demandé. La Cada pourrait être saisie en cas de refus de mise en ligne par l'administration, cette dernière devant alors justifier son opposition.

Afin d'améliorer la qualité et l'accessibilité de l'information diffusée en ligne, il conviendrait d'afficher clairement et de manière uniforme le caractère officiel des sites publics, de documenter les informations et d'établir un référentiel unique de description des données pour faciliter la recherche - on peut souvent se demander si l'on a à faire à un  site officiel... Nous demandons également de veiller à l'intelligibilité pour le plus grand nombre des informations publiques mises en ligne, par la visualisation sous forme de cartes ou de graphiques, et le commentaire des données.

On ne pourra pas tout faire du jour au lendemain. D'où notre proposition d'une stratégie pragmatique d'ouverture raisonnée des données. L'approche actuelle, qui repose sur une démarche purement volontaire, a atteint ses limites. Passons à une approche systématique, articulée en plusieurs étapes et accompagnée d'une réflexion sur l'écosystème de production des données publiques. On commencera par un recensement de l'ensemble des bases de données publiques en vue d'élaborer une cartographie systématique ; on relancera la démarche d'open data en définissant des priorités d'ouverture ; on définira des objectifs et un calendrier d'ouverture des bases de données publiques dans les contrats d'objectifs des administrations, dont le suivi sera confié au SGMAP (secrétariat général pour la modernisation de l'action publique).

L'ouverture des données sera préparée dès le stade de leur production ou de leur recueil, lors des appels d'offre, du recueil des données et de la structuration de la base d'enregistrement, par l'utilisation systématique de formats d'enregistrement et de traitement ouverts et réutilisables - si l'on fait beaucoup de choses, mais qu'elles ne sont pas normées, elles ne servent à rien. Nous recommandons l'établissement d'un référentiel général de réutilisabilité des données et la définition de modèles de réutilisation standardisés respectant les normes d'interopérabilité et de lisibilité par une machine : les documents PDF actuels sont fastidieux à consulter et souvent bien peu réutilisables. La contrepartie de l'ouverture est le renforcement des contrôles sur la réutilisation des données : attribuons à la Cada une capacité d'auto-saisine aux fins de poursuite des réutilisations frauduleuses et alourdissons le quantum des sanctions - là encore dans un souci de dissuasion plutôt que de répression.

L'ouverture des données publiques repose sur le principe de leur gratuité. Leur réutilisation, remettant en cause les modèles de leur production, amènera à réviser certaines situations. Nous proposons d'anticiper la réduction des ressources propres des producteurs de données publiques (ou de celles résultant de monopoles légaux) en poursuivant la rationalisation de leurs coûts de fonctionnement et en développant des services complémentaires. Il conviendra en outre de garantir, dans les contrats d'objectifs de ces organismes, le maintien des ressources budgétaires nécessaires à la collecte et au traitement des données publiques dont ils ont la charge, le but n'étant pas de les contraindre à la fermeture !

Il faudra enfin réfléchir aux moyens de faire bénéficier la collectivité du nouvel écosystème qui nous a été vanté : l'ouverture des données publiques et la gratuité de leur réutilisation reposeront notamment sur des financements et des enrichissements de contenu coopératifs. On les complètera par le développement de services ou modes d'accès premium soumis à tarification, l'accès standard demeurant gratuit.

Deux champs appellent des démarches spécifiques. Celui de la santé suscite des attentes très fortes. Il faut améliorer la prise en compte des besoins de la recherche par une simplification de la procédure d'accès aux données de l'assurance maladie collectées par le Sniiram (Système national d'information inter-régimes de l'assurance maladie) : des équipes dont les travaux portent sur des sujets vitaux ne doivent pas passer des mois à remplir des formulaires ! Il faut aussi clarifier la gouvernance des données de santé, en séparant les fonctions de gestionnaire et de régulateur des bases de données et en assurant la transparence des liens d'intérêt des parties prenantes à l'orientation et la surveillance de l'ouverture de ces données. On préviendra ainsi les conflits d'intérêt.

L'ouverture des données culturelles constitue un second chantier spécifique. Elle suscite de nombreuses attentes, alimentées par la directive modifiée de 2003, dont la transposition aura lieu prochainement. La complexité du dossier tient à ce qu'il concerne non seulement les données de description des oeuvres (métadonnées, catalogues et inventaires), mais aussi les contenus culturels numérisés (ouvrages, oeuvres plastiques, archives...), dont les enjeux patrimoniaux sont importants. L'ouverture de ces données se heurte notamment aux droits de propriété intellectuelle, d'autre part, et à la nécessité d'assurer le financement de la numérisation qui ne doit pas justifier la réappropriation temporaire des oeuvres en vertu de clauses d'exclusivité.

Si l'on peut poser en principe que les contenus culturels numérisés entrés dans le domaine public doivent être ouverts à la réutilisation, il reste à en définir les conditions pratiques : dans quels cas les licences pourraient-elles comporter des clauses dites de share alike permettant à tous de bénéficier des réutilisations effectuées ? On pourrait encore envisager un système reposant sur des modalités de tarification différentes pour certaines formes de réutilisation ou la fourniture de services sur mesure. Enfin, la recherche de financements privés, dans le cadre du mécénat ou d'opérations de parrainage, devra être poursuivie afin de trouver les moyens de cette politique ambitieuse.

À l'exception des données culturelles, qui feront prochainement l'objet de travaux spécifiques au sein de la commission de la culture, ce sont donc 24 recommandations d'importance inégale que je soumets à votre approbation. Certaines sont d'ordre symbolique - mais les symboles peuvent être importants dans ces domaines -, d'autres plus stratégique.

M. Christian Cointat, vice-président . - J'approuve ce rapport impressionnant. Mon expérience au sein de la Cada m'a cependant fait connaître des questions qu'il ne me paraît pas résoudre : il y a d'une part les refus de l'administration, sur lesquels la Cada se prononce, mais d'autre part, et plus graves, les cas où elle se prononce favorablement mais où l'administration ne s'exécute pas. Certains refus sont évidemment justifiés : un pompier d'un Sdis (service départemental d'incendie et de secours) avait par exemple demandé que lui soient communiquées toutes les fiches d'intervention de l'ensemble du personnel du service sur cinq ans ! Cela représentait des milliers de pages, où auraient dû être occultées les nombreuses données personnelles, au prix de plusieurs mois de travail... Les méthodes anciennes de gestion expliquent de tels refus, il faut donc insister sur la nécessité de l'informatisation des procédures et l'évolution vers l'open data...

M. Jean-Jacques Hyest, président . - C'est ce que préconise le rapport...

M. Christian Cointat, vice-président . - Je me félicite de la proposition d'introduire un « référé communication » : il n'est pas normal que les avis favorables de la Cada ne soient pas exécutés ; de tels manquements appellent une sanction.

Certaines données sont publiques, mais leur publication est entourée d'un vide juridique incitant à demander une autorisation pour les réutiliser. Or, en accordant une autorisation qui n'était pas nécessaire, on crée un droit en faveur de celui qui l'a demandée et qui pourra s'en servir pour empêcher d'autres d'utiliser les mêmes données. Une clarification sera donc nécessaire, à l'occasion d'une modification de la loi Cada. Cela dit, je tiens à féliciter à nouveau la rapporteure pour son excellent travail.

M. Jean-Jacques Hyest, président . - L'avancée permise par l'open data est pourtant bien là : si l'on demande une autorisation...

M. Christian Cointat, vice-président . - ... c'est du data qui n'est pas open !

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Un petit peu ! Je remercie également la rapporteure, pour avoir permis que nos travaux ne viennent pas télescoper ceux de la mission sur les données personnelles. Cela ne nous a pas empêchés d'aborder les données de santé, qui posent d'énormes problèmes. Il était utile de faire apparaître ces difficultés, afin de faciliter la recherche, tout en préservant les données personnelles.

Le volet culturel es également complxe : le passage en open data aura des coûts considérables. Qui va payer, par exemple, la numérisation d'une bibliothèque, ou du répertoire des oeuvres du Louvre ? À qui appartiennent les droits relatifs à ce dernier ? Mais plus il y a d'ouverture, plus la culture bénéficie à tous.

M. Christian Cointat, vice-président . - Il y a encore le problème des élus : la loi de 1978 dit clairement que les demandes d'une administration à une autre ne peuvent donner lieu à une saisine de la Cada. Mais il y a différents niveaux d'administration : l'État, les administrations territoriales, les communes. Un conseil municipal, qui a besoin pour travailler de certains documents, est souvent complètement désarmé face aux administrations d'échelon supérieur. On en arrive à la solution ahurissante où un conseiller municipal demandera, en tant qu'individu, un document qu'on ne pourra lui refuser - la jurisprudence de la Cada est claire sur ce point - alors qu'il n'aurait pu l'obtenir en tant qu'adjoint au maire, responsable d'un service administratif.

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Il est vrai que la circulation de l'information entre administrations n'est pas excellente.

M. Christian Cointat, vice-président . - Un avis du Conseil d'État sur un projet de loi, par exemple, est-il considéré comme un document administratif préparatoire ; perd-t-il cette qualité une fois la loi adoptée ? Quel est alors son régime de communication ?

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Les avis du Conseil d'Etat sont exclus du champ d'application de la loi de 1978 par une disposition explicite de l'article 6 : c'est une question qui dépasse le champ de notre mission ! Il y a d'autres exceptions, comme celles relevant de la sécurité nationale, du secret industriel ou des données personnelles ne sont pas de notre ressort, mais il faut y faire attention.

Madame la rapporteure, je vous remercie pour ce remarquable travail de synthèse et les recommandations que vous proposez à l'approbation de la mission. Le projet de rapport que vous avez présenté reflète l'approche consensuelle et pragmatique que vous souhaitiez lors de votre désignation. Il nous reste à trouver un titre à ce rapport.

Mme Corinne Bouchoux, rapporteure . - Je vous propose : « Refonder le droit à l'information publique à l'heure du numérique : un enjeu citoyen, une opportunité stratégique ».

M. Jean-Jacques Hyest, président . - Très bien. Il est vrai que le développement du numérique renouvelle la problématique de la transparence administrative et invite à repenser le droit des modes d'accès à l'information publique, sans modifier pour autant le socle des informations accessibles défini par l'article 1 er de la loi de 1978. À côté du droit d'accès individuel à ces informations, dont vous proposez de renforcer l'effectivité face à des administrations parfois peu diligentes, vous préconisez un droit à la diffusion numérique de l'information publique et une démarche raisonnée d'ouverture des données publiques. C'est ainsi que nous répondrons aux attentes de nos concitoyens et que nous accélérerons la nécessaire mutation de notre administration.

Mme Corinne Bouchoux, rapporteure . - Je vous remercie, Monsieur le Président, ainsi que tous ceux qui ont travaillé dans le cadre de cette mission.

La mission commune d'information adopte le rapport.

M. Jean-Jacques Hyest, président . - En souhaitant que nos travaux puissent utilement alimenter la politique de modernisation de l'État au service du citoyen et du développement économique, je vous informe que Mme Bouchoux et moi-même présenterons ce rapport, jeudi 12 juin, à l'occasion d'un petit-déjeuner de presse.

M. Christian Cointat . - La Cada attend ce rapport avec impatience.


* 359 Nos collègues François Pillet et Gaëtan Gorce ont examiné cette thématique dans leur récent rapport d'information n°469 (2013-2014) fait au nom de la commission des lois, La protection des données personnelles dans l'open data : une exigence et une opportunité. Ils ont formulé un ensemble de propositions de nature à garantir le respect effectif de la vie privée, en particulier contre les risques de réidentification, qui ne constituent pour autant pas des freins à l'ouverture des données.

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