B. UN RÉVEIL TARDIF

1. La modernisation des textes internationaux

La protection de la propriété littéraire et artistique revêt en outre une dimension internationale majeure, en raison de la problématique essentielle de la circulation des oeuvres, sous la forme de plusieurs conventions internationales :

- la convention de Berne du 9 septembre 1886 , plusieurs fois révisée, reste le texte fondamental ; elle est gérée par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

En particulier, son article 9 subordonne la validité des exceptions à trois conditions (le « triple test »). Les reproductions ainsi autorisées doivent se limiter à certains cas spéciaux, ne pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre, ne pas causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur 7 ( * ) ;

- la convention de Rome du 26 novembre 1961 assure une protection plus modeste aux droits voisins.

Dès la fin des années 1990, il est apparu qu'Internet nécessitait de repenser les concepts du droit d'auteur - étendue du monopole, droit moral, définitions des exceptions, lutte contre la contrefaçon, etc. - en vue de les adapter aux nouveaux modes de reproduction et de diffusion numériques ;

- l' accord relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ( ADPIC ) est un texte de grande envergure, annexé au traité de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui s'applique à la fois au droit d'auteur, aux droits voisins (ici dénommés « connexes ») et aux autres droits de propriété intellectuelle (marques, dessins, brevets, modèles, etc.) ;

- les deux traités de l'OMPI du 20 décembre 1996, relatifs respectivement au droit d'auteur et aux droits voisins , prévoient l'extension de la rémunération pour copie privée au domaine numérique et encouragent un développement des mesures techniques de protection. L'OMPI propose ainsi aux États signataires de garantir le droit des auteurs sur leur territoire, notamment s'agissant de leur droit moral, de reproduction, distribution, de location et de mise à disposition.

LE TRAITÉ DE L'OMPI SUR LE DROIT D'AUTEUR (1996)

Le Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur (WCT) est un arrangement particulier au sens de la Convention de Berne qui porte sur la protection des oeuvres et des droits des auteurs sur leurs oeuvres dans l'environnement numérique. Toute partie contractante (même si elle n'est pas liée par la Convention de Berne) doit se conformer aux dispositions de fond de l'Acte de Paris (1971) de la Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques (1886). En outre, en ce qui concerne l'objet de la protection, le WCT porte sur deux catégories d'objets du droit d'auteur : les programmes d'ordinateur, quels qu'en soient le mode ou la forme d'expression, et les compilations de données ou d'autres éléments (bases de données), sous quelque forme que ce soit, qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles.

En ce qui concerne les droits reconnus à l'auteur , outre les droits reconnus par la Convention de Berne, le traité confère également le droit de distribution, le droit de location et un droit plus large de communication au public.

En ce qui concerne les limitations et exceptions , l'article 10 du WCT incorpore le « triple critère » prévu au paragraphe 2 de l'article 9 de la Convention de Berne pour déterminer les limitations et exceptions, étendant son application à tous les droits. La déclaration commune accompagnant le WCT prévoit que les limitations et exceptions telles qu'elles sont établies dans la législation nationale, conformément à la Convention de Berne, peuvent être étendues à l'environnement numérique. Les États contractants peuvent concevoir de nouvelles exceptions et limitations appropriées dans l'environnement numérique. L'extension du champ d'application des limitations et exceptions existantes ou la création de nouvelles limitations et exceptions ne sont admissibles que si les conditions du « triple critère » sont satisfaites.

Quant à la durée de la protection , celle-ci ne doit pas être inférieure à 50 ans pour tout type d'oeuvre.

La jouissance et l'exercice des droits prévus dans le traité ne sont subordonnés à aucune formalité.

Le traité fait obligation aux parties contractantes de prévoir des sanctions juridiques contre la neutralisation des mesures techniques (cryptage, par exemple) qui sont mises en oeuvre par les auteurs dans le cadre de l'exercice de leurs droits et contre la suppression ou la modification d'informations, comme certains éléments permettant d'identifier l'oeuvre ou son auteur, qui sont nécessaires pour la gestion (concession de licences, perception et répartition des redevances) des droits des auteurs (information sur le régime des droits).

Les parties contractantes s'engagent à adopter, en conformité avec leur système juridique, les mesures nécessaires pour assurer l'application du traité. En particulier, elles doivent faire en sorte que leur législation comporte des procédures permettant une action efficace contre tout acte portant atteinte aux droits visés par le traité , y compris des mesures propres à prévenir rapidement toute atteinte ultérieure.

Le traité institue une assemblée des parties contractantes ayant principalement pour mandat de traiter des questions concernant le maintien et le développement du traité.

Le traité est entré en vigueur en 2002. Il est ouvert aux États membres de l'OMPI et à la Communauté européenne. L'assemblée instituée par le traité peut décider d'autoriser d'autres organisations intergouvernementales à devenir parties au traité.

Source : OMPI

Les conventions internationales font ainsi le choix des mesures techniques de protection pour préserver, en luttant contre le piratage, le droit d'auteur et les droits voisins dans l'univers numérique. De cette philosophie s'inspirera largement l'Union européenne, lors de l'élaboration de sa propre législation en la matière.

2. L'ambiguïté européenne

L'évolution de la propriété littéraire et artistique sera également européenne. Sur ce sujet, l'Europe sera même, dans un premier temps, à l'initiative des évolutions envisagées . Dès 1988, le livre vert « Le droit d'auteur et le défi technologique : problèmes de droit d'auteur appelant une action immédiate » contient l'essentiel des mesures, qui seront reprises au sein des accords ADPIC (Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) en 1996 puis à l'OMPI, dans les traités précités de 1996. Elles se traduiront aux États-Unis, dans le Digital Millenium Copyright Act (CMCA) de 1996. Les responsables politiques comprennent qu'Internet n'est pas seulement synonyme de liberté.

Mais, ce n'est qu'en 2001, avec retard au regard des nouvelles conventions internationales, des changements déjà mis en oeuvre aux États-Unis et, surtout, du développement exponentiel du piratage culturel sur Internet, que l'Union européenne adopte, le 22 mai, une directive imposant la protection juridique des mesures techniques et la compensation pour copie privée.

La directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, dite DADVSI, se fixe pour objectif d'harmoniser certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins à l'ère numérique, sur la base du traité précité de l'OMPI. Elle privilégie, dans la lutte contre les atteintes aux droits des auteurs et, plus largement, des industriels de la culture, qu'Internet facilite grandement, des mesures techniques de protection auxquelles elle impose aux États membres de conférer un statut juridique protecteur, les sanctions applicables en cas de contournement étant laissées à leur libre appréciation.

Intervenant dans un colloque sur le thème « Les droits d'auteur et droits voisins dans la société de l'information » , organisé par la Commission nationale française pour l'UNESCO, Pierre Sirinelli constate : « le législateur a décidé qu'il fallait protéger les dispositifs techniques de protection des oeuvres par une couche juridique et qu'il fallait sanctionner les actes de contournement de ces dispositifs techniques qui mettaient en péril les oeuvres ou la propriété littéraire. Donc dans un jeu de miroirs sans fin, le droit vient au secours de la technique qui venait au secours du droit . La propriété littéraire et artistique ressemble à une espèce de mille feuilles : (...) Parallèlement au mouvement de renforcement du droit exclusif, la directive de 2001 a décidé d'offrir de nouveaux espaces de liberté aux utilisateurs et, alors que les traités de l'OMPI s'étaient peu préoccupés de la question des exceptions, la directive offre la possibilité aux États membres d'opter pour une vingtaine d'exceptions ».

Sa transposition en droit français par la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, dite également DADVSI, fut l'occasion d' une longue bataille parlementaire et d'une éclatante censure du Conseil constitutionnel , tant elle comportait des dispositions qui, dix ans après les traités OMPI, apparaissaient désormais inadaptées et polémiques à l'instar des mesures techniques de protection, des conditions de conciliation entre les exceptions au droit d'auteur et la copie privée, mais également des échanges de fichiers en « peer to peer » .

L'Union européenne a donc pris du retard et ses solutions pour concilier droit d'auteur et diffusion numérique des oeuvres culturelles semblent obsolètes dès leur consécration législative. Pire, le dispositif prévu va rapidement se trouver en contradiction avec celui des articles 12 à 15 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur, dite « directive sur le commerce électronique», qui concerne les intermédiaires techniques de l'Internet (FAI et hébergeurs). Ce texte prévoit, en effet, que les intermédiaires échappent largement à leurs responsabilités s'agissant des contenus qu'ils communiquent au public sur la base des modèles d'exploitation qu'ils proposent.

La double législation européenne des années 2000 et 2001 met profondément à mal les équilibres délicats du droit d'auteur : désormais, les titulaires de droits ne doivent plus seulement négocier entre eux, mais également avec des acteurs industriels peu soucieux d'accorder une juste rémunération aux créateurs de contenus. Depuis, la question de la responsabilité des hébergeurs en matière de lutte contre le piratage et de leur rôle dans la chaîne de financement de la création n'a cessé de se poser.

3. Et ailleurs ?

En matière de lutte contre le piratage, est internationalement partagé le constat sur le besoin de combiner différents outils , les procédures judiciaires initiées par les ayants droit s'avérant souvent longues et coûteuses et parfois inadaptées devant la nécessité d'une intervention rapide face à une offre illicite d'une très grande mobilité.

Ont ainsi émergé différents dispositifs de lutte contre la contrefaçon en ligne tant à l'égard des internautes, pour des actes de contrefaçon réalisés via les réseaux « peer to peer », qu'à l'encontre des sites considérés comme massivement contrefaisants. Une étude comparée montre qu' à culture et tradition juridique différente, les solutions choisies le sont également. Toutefois, dans le cadre de la lutte pour des actes de contrefaçon réalisés via les réseaux « peer to peer » et visant les internautes, le dispositif pédagogique de la réponse graduée impliquant un système d'avertissements préalables - réitérés en cas de récidive - avant poursuite, n'est pas isolé.

En matière d'actions mises en oeuvre à l'égard des sites massivement contrefaisants, deux dispositifs semblent aujourd'hui faire consensus : l'approche dite « follow the money » d'assèchement des ressources publicitaires et financières de ces sites et l'encadrement par la loi de procédures, à la demande des ayants droit, pouvant déboucher sur le retrait des oeuvres ou les blocages de sites.

a) L'Allemagne

Le dispositif allemand s'est développé à partir d' une approche plus traditionnelle de la lutte contre la contrefaçon, qu'on pourrait qualifier « d'indemnitaire », laquelle a été portée à son paroxysme. S'est ainsi généralisé en Allemagne un dispositif assez singulier.

Les ayants droit vont devant le juge pour demander aux FAI l'identité du titulaire d'une adresse IP ( Internet protocol ) qui a été utilisée pour partager illégalement des oeuvres en « peer to peer » . L'objectif de cette requête n'est pas d'intenter une action contentieuse, mais plutôt de pouvoir prendre contact directement avec l'internaute , via un avocat ou une société spécialisée, afin de lui enjoindre de payer des dommages et intérêts pour éviter d'être poursuivi en justice.

Les courriers de mise en demeure adressés à l'internaute indiquent ainsi précisément la somme que l'ayant droit lui réclame , cette somme recouvrant également - outre les dommages et intérêts liés au partage des oeuvres sans autorisation - les frais d'avocat que l'ayant droit a dû supporter.

Depuis octobre 2013, la loi allemande encadre davantage cette pratique, pour éviter certains abus, en imposant des règles sur le contenu et le formalisme de ces courriers et limitant à 155,30 euros le montant des frais d'avocat susceptibles d'être demandés par dossier.

Les ayants droit ont envoyé 109 000 courriers en 2013 demandant 90,3 millions d'euros de compensation . Les courriers concernent majoritairement le partage de films (43,9 %) puis la musique (22,8 %). La somme moyenne demandée par les ayants droit était de 829,11 euros et 15 % des internautes recevant ces courriers auraient réglé la somme demandée.

Le système a été présenté comme un succès par les ayants droit, mais il a été vivement critiqué tant il pouvait être perçu comme intrusif et assimilé à une technique de chantage. Sa répartition géographique a pu aussi interroger.

Des dispositifs existent également pour agir contre l'hébergeur sur le terrain précontentieux et contentieux (demande de retrait des contenus illicites, filtrage enjoint par un juge).

En ce qui concerne l'approche « follow the money », depuis 2012, une alliance a été créée entre des ayants droit et des acteurs de la publicité en ligne sur le terrain de l'autorégulation . Cette alliance a établi un projet de « Kodex » afin de réglementer le dispositif et les critères de détermination des sites « structurellement contrefaisants » , qui prévoit également un certain respect du contradictoire en permettant aux sites visés de discuter les allégations de contrefaçon.

Jean Bergevin, chef de l'unité « lutte contre la contrefaçon et le piratage » au sein de la direction de la propriété intellectuelle de la Commission européenne, et Olivia Régnier, directrice du bureau européen de l' International federation of the phonographic industry (IFPI) ont indiqué à votre mission d'information qu'il s'était avéré difficile de mettre en place un système de riposte graduée ou de blocage des sites en Allemagne, pour d'évidentes raisons historiques et culturelles , qui ne permettent pas d'envisager une quelconque politique s'apparentant de près ou de loin à la censure et à la surveillance des communications.

En revanche, le choix a été fait récemment de marquer les esprits s'agissant du piratage sur le lieu de travail en surveillant les connexions du Bundestag et du Bundesrat. L'expérience, qui eut lieu à la faveur et lors d'une procédure judiciaire en cours relative au téléchargement de photographies mettant en scène des enfants, a réussi au-delà des espérances prêtées à certains, lorsqu'un député fut obligé de démissionner.

b) Le Royaume-Uni

En 2010, le Digital Economy Act (DEA) avait prévu la mise en place, sous l'égide de l' Office of Communications (OFCOM), d' un dispositif pédagogique , obligeant les FAI à envoyer des notifications aux abonnés partageant des oeuvres sans autorisation via des logiciels « peer to peer » . Ce dispositif n'a cependant jamais été mis en place. Il a été, depuis, remplacé par l'initiative privée Creative Content UK , qui résulte d'un accord volontaire entre les ayants droit et les FAI. Il prévoit le lancement d'une campagne de sensibilisation en juillet 2015 et un mécanisme d'avertissement dépourvu de sanction ( The Voluntary Copyright Alert Programme ) qui sera mis en oeuvre à la fin de l'année.

Par ailleurs, le Royaume-Uni développe une politique pénale de plus en plus répressive dans la lutte contre les « sites pirates ». Les tribunaux anglais ont récemment condamné en première instance les propriétaires et administrateurs d'un site à, respectivement, 32 et 21 mois de prison.

En septembre 2013, la Police de Londres a créé une unité dédiée aux infractions en matière de propriété intellectuelle : Police Intellectual Property Crime Unit (PIPCU) qui lutte contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle, et plus particulièrement celles commises sur Internet. Dans ce cadre, un accord a été conclu entre la PIPCU, les ayants droit et des acteurs de la publicité en ligne, en vue de l'établissement d'une liste de services massivement contrefaisants ( Infringing Website List ) et d'actions conduites à leur égard ( Operation Creative ).

c) L'Italie

Une autorité indépendante , créée en 1997, l' Autorità per le garanzie nelle comunicazioni (AGCOM), exerce des fonctions de réglementation et de contrôle dans le secteur des communications électroniques, de l'audiovisuel et de l'édition . Elle a vu son rôle s'accroître depuis 2000 en matière de protection du droit d'auteur.

Le décret transposant la directive commerce électronique prévoit que l'AGCOM, tout comme l'autorité judiciaire, peut prescrire aux hébergeurs et aux FAI toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne. L'AGCOM est ainsi chargée de la définition et de la mise en oeuvre de la lutte contre les services en ligne centralisés massivement contrefaisants . À ce titre, elle a adopté, le 12 décembre 2013, un règlement de protection du droit d'auteur sur les réseaux de communication électroniques, entré en vigueur le 31 mars 2014.

Ce règlement instaure une nouvelle procédure de protection du droit d'auteur sur Internet, dans laquelle l'AGCOM peut être saisie par les ayants droit. Le collège de l'AGCOM peut soit conclure au classement de la demande soit constater l'atteinte au droit d'auteur et peut alors prononcer trois sortes d'injonctions , dans le respect du principe de proportionnalité : retrait des contenus, mesure de blocage ciblée ou relative à l'ensemble du site.

D'autres voies d'action tendent à renforcer la lutte contre les sites massivement contrefaisants : une procédure devant le juge, alternative à celle de l'AGCOM et l'approche « follow the money » , par laquelle un accord a été signé en 2014 entre les ayants droit de la musique et du cinéma et les acteurs de la publicité en ligne.

d) L'Espagne

Il n'existe pas, en Espagne, de dispositif pédagogique du type réponse graduée. La loi espagnole autorise cependant les ayants droit à assigner en justice les FAI pour obtenir l'identité des internautes contrefacteurs, afin de poursuivre ces derniers devant les tribunaux civils pour contrefaçon.

Le dispositif espagnol de lutte contre la contrefaçon, initialement introduit par la loi du 4 mars 2011, modifiée en octobre 2014, dite loi Sinde, se concentre principalement sur la lutte contre les services en ligne centralisés massivement contrefaisants.

La loi Sinde a institué un dispositif de notification des atteintes aux droits d'auteur constatées sur les sites Internet, mis en oeuvre par une commission de propriété intellectuelle rattachée au ministère de la culture. Le système faisant toutefois l'objet de critiques, notamment sur la lenteur des procédures et son manque d'efficacité, la loi d'octobre 2014 a eu comme double objectif de simplifier les formalités en vue de raccourcir les durées de traitement et d'améliorer l'efficience de la procédure. Elle a également introduit un dispositif « follow the money » en permettant à la commission de demander aux intermédiaires de paiement et aux acteurs de la publicité de cesser de collaborer avec les sites qui refusent de retirer des contenus.

e) Les États-Unis

Le système américain de réponse graduée ( Copyright alert system ) a essentiellement une vocation pédagogique et de sensibilisation à des alternatives légales .

Mais ce dispositif, créé en 2013, peut varier d'un FAI à l'autre ; en effet, il est entièrement volontaire et relève d'une initiative purement privée. Seuls deux à trois opérateurs appliquent cette procédure, qui repose sur un accord conclu en 2011 entre les cinq principaux FAI et les représentants des ayants droit des secteurs de la musique et de l'audiovisuel. Les avertissements prennent la forme de pop up , ce qui est fort inconfortable pour l'internaute, et la sanction finale n'existe pas.

L'accord de 2011 arrive à échéance en juillet 2015. Il devrait être renouvelé, notamment en vue d'associer plus d'ayants droit et de FAI au dispositif. Un des objectifs est de renforcer les actions de sensibilisation, lesquelles pourraient être effectuées en lien avec les pouvoirs publics.

La mise en oeuvre de ce dispositif graduel n'interdit pas que les ayants droit aient recours à d'autres procédés, selon une approche plus indemnitaire, directement auprès des internautes . Les modalités de certains procédés sont toutefois critiquées et incertaines juridiquement.

Les États-Unis ont, en revanche, été précurseurs dans la lutte contre les sites massivement contrefaisants. Leur stratégie se concentre sur deux actions majeures : la publication d'une liste de sites massivement contrefaisants par le Gouvernement fédéral, la Notorious Markets List et l' approche dite « follow the money » associant les intermédiaires de paiement et les acteurs de la publicité en ligne à la lutte contre la contrefaçon.

Dans ce cadre, des accords ont été conclus en mai 2011, avec le soutien de l'administration Obama , entre les ayants droit et les intermédiaires de paiement, qui visent aussi bien les contrefaçons de droits d'auteur que de marques. En application de ces accords, une plateforme sécurisée de l' International Anticounterfeiting Coalition (IACC) - dont les membres sont des titulaires de droits de propriété intellectuelle - est destinataire des signalements des ayants droit. Elle les examine et les transmet ensuite à l'intermédiaire de paiement concerné et, parallèlement, à une autorité publique, le National Intellectual Property Rights Coordination Center . En outre, des acteurs de la publicité en ligne ont publié, le 3 mai, 2012 une déclaration concernant les bonnes pratiques à adopter pour éviter que les publicités ne viennent involontairement financer ou légitimer l'activité de sites dédiés à la contrefaçon de marques ou de droits d'auteur. En juillet 2013, plusieurs régies publicitaires ont signé une charte de bonnes pratiques ( Best practices guidelines for ad networks to address piracy and counterfeiting ).


* 7 Ces conditions ont été étendues à l'ensemble des prérogatives patrimoniales par l'article 10 du traité OMPI sur le droit d'auteur et par l'article 13 de l'accord ADPIC. Elles sont reprises par l'article 5-5 de la directive 2001/29.

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