N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 novembre 2015

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur la mise en oeuvre du plan d' investissement pour l' Europe ,

Par MM. Jean-Paul EMORINE et Didier MARIE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de M. Jean Bizet, président ; MM. Michel Billout, Michel Delebarre, Jean-Paul Emorine, André Gattolin, Mme Fabienne Keller, MM Yves Pozzo di Borgo, André Reichardt, Simon Sutour, Richard Yung, vice-présidents ; Mme Colette Mélot, M Louis Nègre, Mme Patricia Schillinger, secrétaires , MM. Pascal Allizard, Éric Bocquet, Philippe Bonnecarrère, Gérard César, René Danesi, Mme Nicole Duranton, M. Christophe-André Frassa, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Pascale Gruny, MM. Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Claude Kern, Jean-Yves Leconte, François Marc, Didier Marie, Michel Mercier, Robert Navarro, Georges Patient, Michel Raison, Daniel Raoul, Alain Richard et Alain Vasselle .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat s'est rapidement saisi du plan d'investissement pour l'Europe, dit « Plan Juncker », qui constitue une priorité pour la Commission européenne présidée par l'ancien Premier ministre luxembourgeois.

Le jour même de la présentation de ses grandes lignes devant le Parlement européen, le 26 novembre 2014, la commission des affaires européennes a adopté un avis politique transmis à la Commission. Le 11 février suivant, elle a adopté un deuxième avis politique ainsi qu'une proposition de résolution européenne renvoyée à la commission des finances qui, sur le rapport 1 ( * ) de son rapporteur général, notre collègue Albéric de Montgolfier, a élaboré une proposition de résolution européenne, devenue résolution du Sénat le 24 mars 2015 2 ( * ) .

Ce texte affirme notamment que le Sénat « se montrera très vigilant sur la mise en oeuvre du plan d'investissement et plus particulièrement sur le rôle des collectivités territoriales ». Plusieurs de ses dispositions accordent en effet une attention particulière à ces dernières.

Les textes normatifs concernant le plan d'investissement ayant été promptement adoptés et la Commission insistant sur la rapidité de la mise en place du dispositif, qui doit être opérationnel dès cet automne, vos rapporteurs ont souhaité étudier de plus près ce qu'il en est, en examinant plus spécifiquement la façon dont les collectivités territoriales y sont associées.

LE PLAN D'INVESTISSEMENT POUR L'EUROPE : UNE PRIORITÉ DE LA COMMISSION JUNCKER

Devant contribuer à donner « un nouvel élan pour l'Europe » selon l'expression du Président Juncker, le plan d'investissement que celui-ci a présenté dès la fin 2014 est ambitieux.

Après la crise économique profonde et durable qui a touché l'Union européenne, et les mesures de redressement et de consolidation budgétaire qui ont été prises, il s'agit de convaincre des investisseurs publics et surtout privés de financer des projets dans des secteurs d'avenir comme l'innovation, la recherche-développement, les infrastructures énergétiques et de transport, les télécommunications. L'objectif est ainsi de participer à la réindustrialisation de l'Europe.

« UN AMBITIEUX PROGRAMME D'INVESTISSEMENT »

Dès son discours d'investiture à la présidence de la Commission européenne devant le Parlement européen, le 15 juillet 2014, M. Jean-Claude Juncker avait annoncé qu'il présenterait dans les mois suivants un « ambitieux programme de croissance, d'investissement, de compétitivité et de création d'emplois ».

En effet, dans un contexte marqué par une diminution durable du niveau d'investissement dans l'Union européenne, en recul de 500 milliards d'euros depuis 2007, et alors que les besoins en investissement sont considérables, le plan d'investissement pour l'Europe, dit « Plan Juncker », vise à mobiliser 315 milliards d'euros sur les années 2015 à 2017.

Le commissaire européen en charge de l'emploi, de la croissance, de l'investissement et de la compétitivité, M. Jyrki Katainen, a précisé par la suite que le plan pourrait créer entre 1 et 1,3 million d'emplois sur trois ans. Selon les estimations de la Commission, le plan pourrait, sur la même période, se traduire par un surcroît du PIB de l'Union européenne estimé entre 330 et 410 milliards d'euros.

Ce plan d'investissement est conçu comme comprenant trois volets :

• 1 er volet

Les 315 milliards d'euros envisagés seront affectés à un Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), géré par la Banque européenne d'investissement (BEI).

La mise initiale de 21 milliards d'euros de crédits publics , dont un fonds de garantie de 16 milliards d'euros provenant du budget général de l'Union européenne, dont 8 milliards d'euros immédiatement mobilisables (2,8 milliards provenant du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE), 2,2 milliards du programme-cadre pour la recherche et l'innovation « Horizon 2020 » et 3 milliards des marges du budget général), et une contribution de 5 milliards d'euros de la BEI.

Un effet de levier de 1 à 15 devrait permettre, à partir de ces 21 milliards d'euros, de mobiliser un total d'au moins 315 milliards d'euros auprès d'investisseurs publics et surtout privés qui bénéficieront de la garantie de l'Union pour les pertes initiales éventuelles, les projets financés par le FEIS devant présenter un profil de risque plus élevé que les investissements habituellement réalisés par la BEI.

Les 315 milliards d'euros seraient affectés :

- d'une part, à hauteur de 240 milliards, à des investissements de long terme, essentiellement sous la forme d'infrastructures ;

- d'autre part, à hauteur de 75 milliards, aux PME et entreprises de taille intermédiaire.

Le schéma ci-dessous présente une vision d'ensemble du dispositif qui accorde une grande importance aux effets de levier :

L'économie générale du plan d'investissement repose sur des instruments financiers tels que des prêts, des garanties et contre-garanties et des instruments du marché des capitaux, mais exclut les subventions.

• 2 e volet

Le deuxième volet du plan d'investissement porte sur les projets qui seront financés par le FEIS à l'issue d'une procédure de sélection et qui doivent soutenir un certain nombre de secteurs relevant de l'économie de l'avenir.

Ces projets doivent être nouveaux : ils n'auraient pas été financés sans l'institution du FEIS. En revanche, ils ne doivent pas répondre à des quotas nationaux ou sectoriels ni à une logique de « juste retour ».

• 3 e volet

Le troisième volet du plan d'investissement, de nature réglementaire et encore largement prospectif, vise à créer un environnement propice aux investissements. Il s'agit de lever les obstacles à l'investissement et de renforcer le marché unique de manière à démultiplier les effets du plan et à rendre l'Union européenne plus attractive.

La Commission européenne a évoqué trois pistes :

1. l'amélioration de la réglementation européenne et nationale, la réduction des charges administratives ou encore l'amélioration de l'efficacité de la dépense publique ;

2. de nouvelles sources de financement à long terme, y compris des mesures visant à créer une union des marchés de capitaux ;

3. la suppression des obstacles à l'investissement dans le marché unique - c'est notamment l'objectif de l'Union de l'énergie et du marché unique numérique.

Pour l'instant, le premier volet du plan d'investissement est le plus avancé, puisque le règlement constituant la base juridique du FEIS a été adopté et est entré en vigueur au début du mois de juillet dernier.


* 1 Rapport n° 349 (2014-2015) du 18 mars 2015.

* 2 Résolution européenne n° 84.

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