DEUXIÈME PARTIE - LE NÉCESSAIRE RECENTRAGE DU FSV SUR SA MISSION D'ORIGINE

I. SI LA SUPPRESSION DU FSV POURRAIT ÊTRE SUGGÉRÉE, TEL N'EST PAS LE CHOIX DE VOS RAPPORTEURS

A. LA SUPPRESSION DU FSV : UN SCÉNARIO ENVISAGEABLE, UNE PORTÉE TRÈS LIMITÉE

Le bilan contrasté du FSV depuis 1994 pourrait interroger quant à l'opportunité même de maintenir cette structure administrative. La piste de sa suppression, que vos rapporteurs ont souhaité étudier lors de leurs travaux, n'a toutefois pas suscité une forte adhésion parmi l'ensemble des personnes auditionnées.

La suppression présente en effet une portée très limitée.

Elle aurait pour principal avantage de simplifier la lecture du financement de la sécurité sociale en supprimant un intermédiaire qui peut être actuellement source de confusion. La suppression du FSV se traduirait cependant par le transfert de sa mission qui impliquerait de définir un nouveau circuit de financement des régimes. L'État, en l'espèce l'Acoss, se substituerait-il au FSV en finançant directement chacun des régimes concernés ou financerait-il la Cnav qui se chargerait de répartir les ressources entre chaque régime ? Ce circuit resterait à déterminer, ce qui ne serait pas d'ailleurs sans susciter des inquiétudes de la part des « petits » régimes, comme ces derniers l'ont exprimé devant vos rapporteurs. Il convient de préciser qu'une suppression éventuelle du FSV n'entraînerait évidemment pas la disparition des prestations prises en charge. Elle nécessiterait seulement de redéfinir les modalités de leurs financements.

Si l'argument de la simplification mérite d'être discuté, la portée d'une suppression semble pour le reste très limitée . La disparition du FSV n'entraînerait en effet aucune économie substantielle, et ce d'autant plus depuis que ses effectifs ont été diminués à la suite de son intégration administrative au sein de la Cnav.

D'après vos rapporteurs, cette solution présenterait plus d'inconvénients que d'avantages.

B. LA LOGIQUE D'UN FSV RECENTRÉ DEMEURE PERTINENTE DANS NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE

1. Un rôle symbolique d'incarnation de la solidarité

Vos rapporteurs partagent l'opinion largement exprimée au cours de leurs auditions de l'importance de maintenir incarnée la distinction entre les dépenses contributives et les dépenses de solidarité dans le système des retraites. Elle permet en effet de mettre en exergue le rôle de redistribution que jouent les retraites en France en permettant de réduire les inégalités.

D'après les chiffres du COR, pour les personnes nées entre 1955 et 1964, le rapport inter-décile pour les salariés (10 % des personnes les mieux payées par rapport aux 10 % des personnes les moins payées) est de 5,85 alors que pour les retraités (10 % des retraités ayant une retraite de droits propres parmi les plus élevées par rapport aux 10 % des retraités ayant les plus faibles pensions), ce rapport tombe à 4,10 alors même que les pensions de droits propres, obtenues par la seule contribution, sont plus dispersées (rapport inter-décile 6,66) que les salaires perçus (5,85).

Au prix d'un recentrage de la mission du FSV , détaillé dans la suite de ce rapport, vos rapporteurs estiment que ces dépenses de solidarité doivent être classées en trois catégories :

- les dépenses de solidarité « coeur de système » financées par le FSV et recentrées autour du minimum vieillesse et de la prise en charge des cotisations pour périodes non travaillées (au premier rang desquelles les périodes de chômage) ;

- les droits familiaux de retraite , financés par la Cnaf et qui nécessiteraient de lui transférer le financement de la majoration de pension pour conjoint à charge ;

- les mesures de solidarité professionnelle dont la nature hybride ne leur permet pas d'être classées de façon définitive dans le domaine contributif ou dans celui du non contributif. Elles seraient financées par les régimes de base ce qui impliquerait de rebasculer l'intégralité du financement du Mico vers les régimes.

Vos rapporteurs ont conscience des critiques théoriques qui pourraient être apportées au recentrage du FSV autour de ces deux seules prises en charge. Au regard de l'importance qu'elles jouent dans le niveau de vie des retraités les plus modestes et des enjeux financiers considérables qu'elles représentent (plus de 16 milliards d'euros en 2016), il leur semble pourtant essentiel de maintenir un circuit de financement facilement identifiable et, par voie de conséquence, un meilleur contrôle démocratique les concernant.

2. Un meilleur contrôle démocratique des dépenses de solidarité

L'existence du FSV permet d'exercer un contrôle démocratique renforcé des dépenses de solidarité à la fois par le Parlement mais aussi par les partenaires sociaux.

Le contrôle parlementaire sur le FSV s'exerce principalement à l'occasion de l'adoption des tableaux d'équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base figurant en lois de financement. Le vote des articles concernés permet chaque année qu'un débat ait lieu sur les résultats financiers du fonds et que les parlementaires se prononcent à ce sujet.

Dans le cadre de la LFSS pour 2016, votre commission a ainsi rejeté l'article 28 du projet de loi au motif que « le financement par le déficit (des) dépenses de solidarité (n'était) pas acceptable, faisant supporter aux générations futures le poids de dépenses courantes d'aujourd'hui » 73 ( * ) . Le FSV est le dernier organisme concourant au financement de la sécurité sociale dont les comptes ne sont pas intégrés au sein d'une branche. Les autres organismes de financement comme le Fonds de réserve des retraite, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ou encore le Fonds CMU, déjà évoqué dans ce rapport, font l'objet d'une information figurant au sein de l'annexe 8 du PLFSS mais ne voient pas leurs comptes adoptés spécifiquement par les parlementaires. La délibération sur les résultats du FSV permet donc un contrôle accru des dépenses de solidarité qu'il finance .

Vos rapporteurs saluent l'avancée que constitue la présentation d'un tableau consolidé des comptes de la sécurité sociale dans l'annexe 4 du PLFSS. Ils considèrent toutefois qu'une délibération des parlementaires sur ces chiffres consolidés permettrait une meilleure transparence sur la situation financière de la sécurité sociale. Ils reprennent à leur compte la préconisation de la Cour des comptes visant d'une part, à supprimer le tableau d'équilibre relatif à la catégorie des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et d'autre part, à intégrer une rubrique « FSV » distincte dans le tableau d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et dans celui du régime général de sécurité sociale. Cette proposition permettrait de mettre un terme à la présentation des comptes de la sécurité sociale « hors FSV » qui n'a pas véritablement de pertinence . Elle nécessite de modifier l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Recommandation n° 1 : Modifier l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale pour intégrer une rubrique « FSV » dans les tableaux d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et dans celui du régime général de sécurité sociale.

Le contrôle des partenaires sociaux est assuré au sein du comité de surveillance du FSV. Si ce comité ne dispose pas d'un pouvoir décisionnel, il permet à ses membres d'être tenus informés des résultats financiers du FSV et de ses évolutions.

L'ensemble des partenaires sociaux auditionnés par vos rapporteurs ont regretté l'absence de réunion de ce comité depuis 2013 manifestant ainsi leur attachement à l'existence du FSV.

Vos rapporteurs considèrent donc le maintien du FSV comme nécessaire mais jugent indispensable de recentrer sa mission, de stabiliser ses ressources et de relancer ses instances de dialogue.


* 73 Rapport de votre commission sur le financement de la sécurité sociale pour 2016, tome VII, p. 137, déjà cité.

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