B. LE RECOURS AU SOLDE STRUCTUREL FAVORISE LA MISE EN oeUVRE D'UNE POLITIQUE BUDGÉTAIRE CONTRACYCLIQUE...

En effet, un cadre budgétaire poursuit, généralement, deux objectifs : limiter le « biais » susceptible d'exister en faveur du déficit , afin d'assurer la soutenabilité des finances publiques à long terme, et favoriser la mise en oeuvre d'une politique budgétaire contra-cyclique 23 ( * ) - soit qui assure, en particulier, une fonction de soutien à l'activité économique en cas de conjoncture dégradée. Or, il apparaît que l'évolution du déficit effectif est très sensible aux variations conjoncturelles , ainsi que s'attache à le montrer le graphique ci-après.

1. Le solde structurel fournit une image de la situation budgétaire corrigée de l'impact des fluctuations conjoncturelles...

En période de creux conjoncturel, il est observé un déficit de recettes et un surplus de dépenses , tandis que durant les périodes plus favorables, le solde public s'améliore du fait des hausses de rentrées fiscales et du recul de certaines prestations sociales. Ainsi, « les recettes de TVA
- assises sur la consommation des ménages et l'investissement des entreprises -, les recettes d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le revenu et les cotisations sociales
- assises sur la masse salariale donc sensibles au cycle de productivité et à la situation du marché du travail - fluctuent en fonction des chocs affectant l'économie
» 24 ( * ) . De même, les dépenses d'indemnisation du chômage et de revenu de solidarité active (RSA) sont fortement liées à la situation économique.

Graphique n° 3 : Évolution du solde public et variations conjoncturelles

(évolution du PIB en % ; solde public en points de PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'Insee)

Pour autant, il convient de souligner que les évolutions conjoncturelles n'expliquent qu'en partie seulement les variations du solde public, qui dépendent aussi des décisions des autorités publiques en matière fiscale et budgétaire . À titre d'exemple, la hausse significative du déficit constatée en 2009-2010 a résulté de la stagnation du PIB en 2008 puis de son recul de près de 3 % en 2009, à l'origine d'une attrition des bases fiscales et d'une sollicitation accrue des dépenses sociales - soit d'une activation des « stabilisateurs automatiques » 25 ( * ) -, mais aussi de la mise en oeuvre du plan de relance économique voulu par l'ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui comprenait, entre autres, des mesures financières en faveur des salariés ayant perdu leur emploi, des baisses d'impôts pour les ménages, ou encore des projets de travaux publics.

Quoi qu'il en soit, l'existence de règles budgétaires chiffrées concernant le seul déficit public effectif - comme le seuil de 3 % du PIB fixé par le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) - peut se révéler problématique en cas de dégradation de la conjoncture économique . Le seul jeu des « stabilisateurs automatiques » ayant pour effet de creuser le déficit public, les États peuvent être contraints d'engager des mesures de consolidation budgétaire - comme des réductions de dépenses ou des augmentations de prélèvements obligatoires - afin de demeurer en conformité avec les règles de déficit effectif. Or, l'adoption de telles mesures présente des incidences récessives et contribuent à ralentir un peu plus la croissance économique - la politique budgétaire étant alors qualifiée de « pro-cyclique ».

2. ...permettant la mise en oeuvre de politiques budgétaires contra-cycliques

Aussi est-ce pour limiter le caractère pro-cyclique des politiques budgétaires que la notion de solde structurel a été introduite dans le Pacte de stabilité et de croissance en 2005 et que l'importance de cette dernière dans le pilotage des finances publiques a été renforcée par la réforme du PSC de 2011 et le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de 2012 (TSCG) (cf. supra ). Dès lors qu'elle repose sur une estimation du solde public corrigée de l'impact des fluctuations conjoncturelles - puisque fondée sur le PIB potentiel -, une règle budgétaire exprimée en termes de solde structurel permet d'atténuer le risque que les États ne soient contraints de procéder à des ajustements substantiels de leurs finances publiques afin, notamment, de corriger la dégradation du solde résultant des évolutions de la conjoncture.

Si une règle de solde structurel permet de limiter la sensibilité de la trajectoire des finances publiques - et donc des mesures de consolidation budgétaire à engager, le cas échéant -, elle n'en est pas pour autant neutre sur l'activité ; en effet, les ajustements requis pour respecter cette règle peuvent, eux aussi, avoir des effets récessifs. Pour autant, une fois l'équilibre structurel atteint, les États disposent des marges de manoeuvre nécessaires pour laisser jouer les « stabilisateurs automatiques » et mener des politiques budgétaires contra-cycliques sans menacer la soutenabilité à long terme de leurs finances publiques .

3. Un meilleur révélateur de la position budgétaire

En outre, le solde structurel est supposé être un meilleur révélateur de la position budgétaire d'un État . En effet, il permet d'identifier la part des déficits qui ne saurait être imputée aux évolutions de la conjoncture, dès lors que les « accidents » conjoncturels peuvent avoir des effets sur le solde effectif, de par leurs incidences tant sur les recettes que sur les dépenses.

Au total, le solde public structurel permet de donner un « cap » à l'amélioration des comptes publics moins sensible aux aléas de la conjoncture économique que le solde public effectif , concourant ainsi à renforcer la stabilité de la trajectoire des finances publiques.


* 23 G. Claeys, Z. Darvas et Á. Leandro, « A proposal to revive the European fiscal framework », Bruegel Policy Contribution, Issue 2016/07, mars 2016.

* 24 S. Duchêne et D. Lévy, « Solde "structurel" et "effort structurel" : un essai d'évaluation de la composante "discrétionnaire" de la politique budgétaire », Diagnostic Prévisions et Analyses économiques , n° 18, 2003, p. 2.

* 25 Les stabilisateurs automatiques correspondent aux mécanismes par lesquels les finances publiques parviennent à atténuer les conséquences des évènements conjoncturels sur l'activité économique. À titre d'exemple, en cas de ralentissement conjoncturel, la baisse des recettes fiscales et la hausse des prestations sociales permettent d'atténuer les fluctuations de l'activité.

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