EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 6 juillet 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a entendu une communication de M. François Marc, rapporteur spécial, sur les instruments financiers en faveur des petites et moyennes entreprises gérés par le Fonds européen d'investissement .

M. François Marc , rapporteur spécial « Affaires européennes » . - L'an passé, dans le cadre des travaux de contrôle budgétaire, je m'étais penché, avec Alain Houpert et Yannick Botrel, sur les financements en faveur de l'agriculture et nous avions dressé un bilan assez mitigé. Cette année, j'ai axé mes travaux sur les aides aux petites et moyennes entreprises (PME). Celles-ci représentent en effet 99 % des entreprises de l'Union européenne et 67 % de l'emploi total et elles ont créé 85 % des nouveaux emplois entre 2002 et 2010. Connaissant la conjoncture plutôt déprimée au sein de l'Europe, il m'a semblé intéressant de se pencher sur les moyens mis en oeuvre par l'Union européenne pour accompagner les PME et porter une appréciation sur les actions à mener pour les conforter. Deux ans après le début de la nouvelle programmation budgétaire et à la suite du lancement du plan Juncker, ce sujet m'a paru d'autant plus intéressant. J'évoquerai trois thèmes : tout d'abord, le développement des instruments financiers, deuxièmement les résultats et résultats obtenus et, troisièmement, l'initiative PME.

Les instruments financiers sont des mesures de soutien financier en faveur, notamment, des entreprises qui prennent la forme de participations, quasi-participations, de prêts ou de garanties, ou d'autres instruments de partage des risques, et peuvent, dans certains cas, être associés à des subventions. Deux objectifs sont visés au travers de ces instruments : remédier aux imperfections ou aux défaillances des marchés et produire un effet de levier à partir de la contribution de l'Union européenne, en mobilisant un investissement global plus important. Le règlement financier précise que le soutien apporté doit être proportionné aux risques.

Quels sont les avantages de ces instruments ? Dans la littérature économique, il est généralement fait état d'un certain nombre d'avantages par rapport aux subventions : tout d'abord l'effet de levier, le caractère remboursable des aides, qui garantit une plus grande soutenabilité budgétaire et la moindre dépendance des entreprises aux aides publiques. Il peut être ajouté que ce type d'outils, définis au niveau européen, est compatible avec la législation de l'Union européenne sur les aides d'État et permet une plus grande rapidité de mise en oeuvre et une moindre charge administrative.

Depuis 2001, on observe une montée en puissance des instruments financiers pour les PME grâce à une augmentation des moyens, qui sont passés de 450 millions d'euros pour la période de programmation 2001-2006 à près de 3 milliards d'euros en 2014-2020. Aujourd'hui, ces instruments reposent essentiellement sur deux programmes : le programme européen pour les PME, COSME, qui comporte un instrument de garantie et un instrument de capital investissement dotés de 1,4 milliard d'euros et le programme pour la recherche et l'innovation Horizon 2020, dont 1,5 milliard d'euros est fléché sur l'instrument InnovFin en faveur des PME innovantes.

S'agissant de la gestion quotidienne de ces moyens, elle est assurée par le Fonds européen d'investissement (FEI) - à ne pas confondre avec le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) du plan Juncker. Le FEI est une filiale de la Banque européenne d'investissement (BEI) spécialisée dans les PME depuis 2000 et qui opère dans le cadre de mandats prédéfinis venant soit de la Commission européenne, soit de certains États. La France, par l'intermédiaire de la banque publique d'investissement, Bpifrance, est présente au capital du FEI à hauteur de 102 millions d'euros, soit un niveau de participation équivalent à celui de la KfW allemande.

Ces éléments étant précisés, venons-en aux faits constatés ces dernières années. On notera tout d'abord qu'entre 2007 et 2015, les instruments financiers européens ont permis de distribuer 4,1 milliards d'euros de garanties, ce qui a permis de mobiliser un volume total de prêts estimé à 35 milliards d'euros, dont 25 milliards d'euros ont déjà été effectivement engagés auprès d'environ 438 000 PME dans vingt-huit pays. Ce montant de 25 milliards d'euros ne représente toutefois que 3,8 % du volume moyen de prêts accordés aux PME de la zone euro sur an, en 2013 et 2014. Je précise que l'instrument de garantie COSME concerne essentiellement les TPE, pour des prêts de 150 000 euros maximum. L'instrument de garantie InnovFin cible quant à lui les PME innovantes, pour des prêts compris entre 25 000 euros et 7,5 millions d'euros. Enfin, tous les pays ne bénéficient pas de ces instruments car au moins un intermédiaire financier, public ou privé, doit avoir manifesté son intérêt pour distribuer ce type de garantie de prêts aux PME. La France est, à ce jour, le principal bénéficiaire en volume des instruments de garantie COSME et InnovFin.

S'agissant du capital-investissement, il est à noter que l'action de l'Europe a joué un rôle contra-cyclique important pendant la crise financière. L'augmentation continue des engagements du FEI sur cette période a permis d'atténuer les effets de la crise, en particulier dans le secteur du capital-risque. Entre 2007 et 2015, les ressources annuelles investies par le FEI ont été multipliées par quatre, pour atteindre 2,2 milliards d'euros. Les ressources provenant du budget de l'UE ne représentent en moyenne que 10 % de l'investissement total depuis 2014 et se concentrent essentiellement sur le capital-risque, la BEI fournissant l'essentiel des autres ressources investies.

Depuis 2015, le recours aux instruments financiers européens en faveur des PME a fortement augmenté grâce au Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), mis en place dans le cadre du « plan Juncker ». Eu égard à la forte demande des marchés bancaire et du capital-investissement pour les programmes InnovFin et COSME, il a en effet été décidé de recourir à ces instruments financiers et au FEI pour mettre en oeuvre le volet PME du plan Juncker. L'objectif est d'atteindre un investissement total de 75 milliards d'euros d'ici à l'été 2018, grâce à un effet multiplicateur de 15. Cet objectif est aujourd'hui en passe d'être atteint de façon anticipée : au 16 juin 2016, l'objectif de mobiliser 75 milliards d'euros d'investissement total en faveur des PME était réalisé à 65 %, pour environ 142 000 bénéficiaires, situées essentiellement en Italie, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. Les résultats sont tels que les enveloppes financières des instruments de garantie COSME et InnovFin, prévues pour trois ans, ont quasiment été intégralement consommées. C'est pourquoi la Commission européenne envisage donc de « basculer » 500 millions d'euros de garantie de l'Union européenne du volet « infrastructure et innovation » vers le « volet PME ».

S'agissant de l'effet de levier sur le financement, il varie de six à 20 selon les caractéristiques de chaque dispositif. Selon le FEI, l'effet de levier minimum pour la facilité garantie du programme COSME est estimé à 20, c'est à dire qu'un euro de garantie du budget de l'UE permet de mobiliser, en moyenne, 20 euros de prêt pour les PME. En outre, si l'on tient compte, comme dans le cadre du plan Juncker, du deuxième multiplicateur externe, lié aux investissements additionnels permis par le financement mobilisé, l'effet de levier global sur l'investissement est encore plus élevé. Globalement, l'effet multiplicateur moyen du « volet PME » du FEIS sur l'investissement, tous instruments confondus, est estimé à 15.

Si l'on s'intéresse de plus près au cas de la France, on constate que l'action menée au niveau national et l'intervention européenne sont largement complémentaires. Les bons résultats français - près de 780 millions d'euros en 2015, plus de 500 millions d'euros sur le début de l'année 2016 - s'expliquent par deux facteurs : le développement du marché du capital-investissement et du capital-risque en France et la forte mobilisation de Bpifrance. Par exemple, Bpifrance s'est mobilisée très tôt pour participer au « volet PME » du FEIS et a signé, le 12 mai 2015, la première transaction bénéficiant de la garantie européenne. L'instrument de garantie InnovFin a ainsi permis à Bpifrance de poursuivre la distribution de son propre prêt innovation en faveur des PME et de renforcer l'attractivité de son prêt d'amorçage.

D'après un sondage réalisé en 2011, une majorité de PME interrogées indiquait que le soutien financier apporté par le programme européen avait été la seule option pour obtenir les fonds nécessaires à leur projet. Mais à l'inverse, un audit de la Cour des comptes européenne réalisé la même année indiquait qu'un effet d'aubaine existait pour 38 % des prêts figurant dans l'échantillon de prêts étudié. Par ailleurs, la Cour des comptes européenne avait considéré que des financements par les budgets nationaux auraient pu produire les mêmes effets et que la valeur ajoutée européenne de ces résultats n'était guère probante.

C'est à la suite de ces critiques, qu'il a été décidé mener une évaluation ex ante avant la mise en place de tout nouvel instrument financier. De plus, les clauses de conformité des contrats établis entre le FEI et les intermédiaires financiers ont été durcies et les critères d'éligibilité des portefeuilles de prêts renforcés. En cas de non-conformité flagrante d'un prêt avec les conditions prédéfinies, le FEI peut retirer la garantie accordée. Ces instruments ont donc été davantage encadrés pour éviter les effets d'aubaine.

J'en arrive maintenant à l'initiative PME. Celle-ci apporte, me semble-t-il, des réponses pertinentes aux États membres ayant été le plus durement touchés par la crise économique et financière. Cette initiative présente une caractéristiques simple : elle permet d'associer le budget de l'Union européenne, au titre des instruments COSME ou InnovFin, l'utilisation des fonds structurels et le soutien du groupe BEI. Les fonds structurels permettent de couvrir les premières pertes, c'est-à-dire le risque le plus important. L'initiative PME comporte deux options : l'option 1 consiste en un instrument de garantie non plafonnée sur des portefeuilles de nouveaux prêts aux PME. Chaque intermédiaire financier est également tenu de transférer le bénéfice lié à cet instrument de garantie aux PME sous la forme d'une réduction du coût du crédit, d'une réduction de la garantie demandée sur les actifs de l'entreprise ou de la caution personnelle du dirigeant. Cet instrument de garantie publique permet également aux banques de libérer des fonds propres à mesure qu'elles déploient le portefeuille de nouveaux prêts. L'option 2 prend la forme d'un instrument de titrisation de portefeuilles de prêts existants et de nouveaux prêts aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire ; elle sera bientôt expérimentée par l'Italie.

L'Espagne est le premier État membre à avoir mis en oeuvre l'initiative PME. Cette décision est intervenue dans un contexte de forte contraction de l'offre de crédit et de fragilisation des PME. L'accord signé au début de l'année passée a permis à l'instrument d'être opérationnel à l'automne 2015. L'une des difficultés de mise en oeuvre de ce dispositif en Espagne était la gestion nécessairement centralisée de l'initiative PME. Néanmoins, quinze des dix-sept communautés autonomes ont accepté de participer à l'initiative pilotée par le ministère des finances et d'allouer une part de leurs fonds structurels FEDER. Au total, la contribution des régions espagnoles à l'initiative PME s'établit à 800 millions d'euros, soit 4,1 % de l'enveloppe FEDER allouée à l'Espagne pour la période 2014?2020. Les fonds versés par une région doivent être utilisés au profit de PME implantées dans cette même région et créer un effet de levier au moins égal à quatre. Dans l'hypothèse où l'effet de levier serait inférieur, les communautés autonomes pourront exiger le retour de leurs fonds.

L'Espagne s'est fixé comme objectif la production d'un volume de prêts de 3,2 milliards d'euros d'ici fin 2019 grâce à l'initiative PME. Les premiers résultats confirment l'absorption rapide des fonds. Près de 79 % de l'enveloppe nette de fonds structurels avaient été alloués à des intermédiaires financiers fin mars 2016. Le volume total de prêts effectivement accordés atteignait 1,4 milliard d'euros pour environ 14 000 PME. Environ la moitié des prêts accordés financent le fonds de roulement des PME, tandis que l'autre moitié finance des projets d'investissement. L'analyse par région indique que la totalité des enveloppes de fonds structurels a déjà été allouée dans certaines régions, par exemple en Catalogne ou dans le Pays Basque, et que le volume de prêts accordés dépasse parfois l'effet de levier minimal de quatre. En revanche, certaines régions ont davantage de difficultés, en particulier l'Estrémadure.

L'expérience espagnole montre que l'initiative PME est un instrument financier relativement bien calibré, répondant à la fois aux demandes des banques de libérer des fonds propres et de limiter leur exposition au risque et à celles des PME. Surtout, cet instrument financier présente trois avantages majeurs : premièrement, l'absence de cofinancement requis, autre que celui au titre des fonds structurels, deuxièmement, l'expertise technique du FEI, en particulier pour les régions ayant peu d'expérience des instruments financiers et enfin l'effet de levier sur le financement total accordé aux PME, plus élevé qu'avec un instrument financier « classique » utilisant les seuls fonds structurels. À la suite de l'Espagne, cinq États membres ont décidé de participer à l'initiative PME. Seule l'Italie a choisi l'option 2 de titrisation.

En France, le lancement de cette initiative est intervenu à contretemps du calendrier politique et administratif français, au moment même où s'opérait le transfert de l'autorité de gestion des fonds structurels de l'État aux régions par la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM). La gestion décentralisée a alors semblé incompatible avec la nécessité de créer un programme centralisé dans le cadre de l'initiative PME. Compte tenu des avantages du dispositif et de l'expérience globalement positive de l'Espagne, la question d'un recours ultérieur à l'initiative PME mériterait d'être réexaminée à l'occasion de l'évaluation à mi-parcours des programmes opérationnels et, a fortiori, dans la perspective de l'après 2020. Voilà donc, un exemple de situation où notre démarche décentralisatrice crée, en quelque sorte, un obstacle à notre capacité à mettre en oeuvre cette initiative PME dans notre pays, sauf à ce que les régions françaises s'accordent entre elles. Nous avons toutefois constaté un manque d'intérêt de certaines régions, préférant essayer de tirer par elles-mêmes les meilleurs bénéfices de leurs fonds structurels.

Je conclue avec cinq recommandations. Tout d'abord, il conviendrait d'assurer la continuité des instruments financiers de garantie COSME et InnovFin jusqu'en 2020 afin de répondre à la demande de couverture des risques des institutions financières. La consommation de ces moyens a été tellement rapide qu'ils arrivent aujourd'hui à épuisement. Deuxièmement, il s'agirait de prolonger le FEIS au-delà de 2018 puisque, là aussi, le « volet PME » de ce plan d'investissement connaît un succès important. La troisième recommandation est de poursuivre le développement d'instruments de garantie en faveur des PME les plus risquées, en raison de leur caractère innovant ou de leur jeunesse. Les programmes européens n'ont pas vocation à se substituer aux prêts traditionnels mais d'aider à se projeter dans des initiatives plus risquées. La quatrième recommandation consiste à faire bénéficier les banques nationales et régionales de développement de l'expertise du FEI et promouvoir leur mise en réseau afin d'atténuer la fragmentation des marchés du financement des PME en Europe. Il convient en effet de souligner que Bpifrance est exemplaire mais il existe certains pays européens où il n'existe pas de structure ou de banque publique adaptée, en mesure de mettre en oeuvre ce type de programme. Enfin, la cinquième recommandation est de mettre en place une instance de coordination entre l'État et les conseils régionaux intéressés par l'initiative PME afin d'expérimenter cet instrument financier en France qui, à mes yeux, constitue un outil pertinent. Nous avons noté les difficultés de certaines régions européennes, c'est le cas notamment en Espagne, à utiliser la totalité du FEDER en raison du manque de projets. Si l'on peut orienter une partie de ces moyens vers des instruments financiers pour les PME, il s'agit donc d'une utilisation rationnelle de ces fonds européens.

De mon point de vue, cette mission de contrôle se révèle tout à fait positive puisqu'il s'agit de programmes européens qui fonctionnent bien, qui consomment les crédits beaucoup plus rapidement qu'anticipé et qui apportent un effet de levier tout en sécurisant les institutions financières, en particulier dans les pays où il y a aujourd'hui encore beaucoup d'inquiétudes autour des banques. Je suis convaincu qu'il faut soutenir ces initiatives porteuses d'avenir.

Mme Michèle André , présidente . - Je remercie le rapporteur spécial pour cette présentation optimiste de l'action européenne, alors que des doutes s'installent par ailleurs et que des États s'interrogent.

M. Francis Delattre . - Cette communication montre que les instruments financiers proposés au niveau européen sont bien ciblés, en visant à la fois les PME et les ETI innovantes. Ceci correspond à un stade de développement décisif des entreprises, après le dépôt du brevet et avant la mise en production, où se manifeste parfois une certaine frilosité des investisseurs.

Je pense, pour ma part, qu'il convient de favoriser la décentralisation des opérations, d'autant que les régions - qui ont un poids considérable désormais - ont l'habitude d'être en relation avec les instances européennes qui, depuis longtemps, privilégient volontiers leurs discussions avec elles plutôt qu'avec les États, même si ces derniers essaient quand même de contrôler ces échanges. Que manque-t-il aujourd'hui pour que ces instruments soient déployés en France ? Les freins sont-ils uniquement juridiques ?

Concernant le fonctionnement de la garantie, que se passe-t-il en cas de difficulté rencontrée par l'entreprise à rembourser son prêt ?

En tout état de cause, ces dispositifs financiers de soutien aux PME doivent être promus pour que les entreprises françaises puissent en bénéficier.

M. François Patriat . - Je félicite le rapporteur spécial pour la qualité de son rapport qui met en évidence le rôle décisif que peuvent avoir ces fonds européens pour le secteur de l'innovation, en favorisant l'émergence et le développement des entreprises. À travers l'action de Bpifrance, ils complètent utilement les financements régionaux qui ne sont pas toujours faciles à trouver ni adaptés aux PME.

Effectivement, la difficulté centrale reste la diffusion de l'information auprès des entreprises, certains pays utilisant bien mieux que nous ces dispositifs à l'heure actuelle.

Comme Francis Delattre, je pense que l'échelon régional constitue le niveau le plus pertinent pour la gestion des fonds européens, avec un État qui doit accompagner ce transfert de compétences.

Certaines régions ont réussi à réunir sur un seul site l'ensemble des dispositifs existant en faveur de l'innovation, y compris le volet financier. Je regrette de n'y être pas parvenu lorsque j'étais à la tête de la région Bourgogne, Bpifrance ayant préféré ne pas intégrer le projet globalisé.

Les conclusions du rapport doivent être diffusées à l'ensemble des intervenants, surtout régionaux, pour que ces dispositifs soient utilement mobilisés en faveur de l'investissement des PME, pari majeur pour l'économie française.

M. Jacques Chiron . - Je félicite également François Marc dont le rapport met en évidence la nécessité de développer l'action à l'échelle régionale, d'autant que l'activité des PME irrigue tout le territoire, en particulier le monde rural, et que nous disposons désormais de grandes régions. Les deux dernières recommandations me paraissent particulièrement pertinentes et nous devrons probablement travailler en ce sens.

M. Daniel Raoul . - Je suis très impressionné par les éléments du rapport, en particulier par les montants effectivement engagés en faveur des PME au niveau européen. Je partage le point de vue selon lequel le FEIS devra être prolongé au-delà de 2018, quand on voit notamment la forte consommation qui a déjà été faite et l'effet de levier qu'il crée, malgré le scepticisme qu'il avait suscité au départ.

Je m'interroge davantage, en revanche, sur la cinquième recommandation du rapport. Quel serait le rôle de cette instance de coordination alors que les régions, accompagnées de Bpifrance, devraient être en mesure d'être les acteurs majeurs pour l'instruction et la transmission des dossiers vers les instances européennes ?

M. Michel Canevet . - À mon tour, je salue la qualité de l'exposé du rapporteur spécial. Les instruments financiers doivent être mobilisés au mieux pour développer les entreprises et l'emploi, en particulier les PME dont l'activité, irrigue l'ensemble de notre territoire national. Bpifrance et le plan Juncker peuvent déjà intervenir et certaines banques développent également des fonds d'investissement en faveur des entreprises, comme c'est le cas en Bretagne avec la création de deux fonds, chacun doté de 20 millions d'euros, dans les domaines des nouvelles technologies et de l'économie sociale et solidaire.

Le plan Juncker pourrait-il encore accroître les moyens de Bpifrance et soutenir davantage ces initiatives ? Bpifrance ne pourrait-elle constituer l'acteur central pour le développement des instruments financiers en faveur des PME, compte tenu de son réseau existant et de l'expertise dont elle dispose ?

M. Philippe Adnot . - Les taux des prêts proposés me paraissent très élevés dans le contexte économique actuel de taux bas. Du coup, je comprends que les entreprises italiennes et espagnoles puissent être intéressées, mais je ne vois guère leur utilité pour nos PME, qui bénéficient de taux plus intéressants auprès des banques privées.

M. François Marc, rapporteur . - Le taux que j'ai évoqué dans mon exposé n'est qu'un exemple visant à expliquer son mécanisme et à montrer comment il permet de réduire de 25 à 30 % le coût de l'emprunt pour l'entreprise : il ne correspond pas à un taux réel. Les taux auxquels prêtent les banques grâce aux garanties émises par le FEI varient d'un pays à l'autre.

Les régions ne peuvent traiter directement avec le FEI au titre de l'initiative PME car un accord global doit être signé au niveau de chaque État membre, comme le prévoit la réglementation européenne : le dispositif ne saurait être mis en oeuvre sans un tel accord. Pour l'instant, les régions françaises n'ont pas formulé la volonté de mettre en oeuvre l'initiative PME.

Concernant la garantie de 50 % sur chaque prêt, ou la contre-garantie éventuelle, on sélectionne les entreprises bénéficiant d'un prêt et si l'une d'elle rencontre des difficultés et ne peut plus rembourser, la garantie intervient et agit alors comme une subvention. Dans le cadre de l'initiative PME, les fonds structurel interviennent pour couvrir les premières pertes.

François Patriat, qui s'interrogeait sur la diffusion de l'information, a raison de dire qu'il convient de veiller à ce que tous les acteurs concernés, en particulier au niveau local mais également des intermédiaires financiers, soient sensibilisés à l'action du FEI. Il existe en effet peu de documents disponibles en France sur ce sujet. Mon rapport a précisément vocation à faire mieux connaître ces dispositifs.

L'initiative PME a été créée il y a deux ans mais n'est expérimentée que depuis l'automne 2015 en Espagne. Malte s'est également engagée dans cette voie, tandis que l'Italie va mettre en place le volet relatif à la titrisation. Pour l'instant la France ne s'est pas investie dans ce dispositif alors qu'il s'agit d'un outil pertinent.

Bpifrance est un acteur majeur, co-actionnaire du FEI, membre du conseil d'administration en alternance avec les Allemands et son rôle pourrait être encore plus important, car il s'agit d'un outil très performant. En revanche, elle semble moins concernée par l'initiative PME, même si elle pourrait aider à sa mise en oeuvre.

Mme Michèle André, présidente . - Les régions espagnoles jouissent d'une très grande autonomie. Comment se sont-elles regroupées pour agir en commun vis-à-vis du FEI ? Comment s'inspirer de leur exemple ?

M. François Marc, rapporteur . - L'Espagne a beaucoup souffert de la crise économique. Le FEI est apparu comme une aide pertinente alors qu'il était parfois difficile de trouver des contreparties pour mener à bien des projets et consommer les fonds structurels. De plus, chaque région verse une partie de son enveloppe FEDER dans le pot commun mais il est convenu qu'elle bénéficiera de retours à due concurrence pour ses entreprises. Seule l'Estrémadure peine à trouver des PME souhaitant investir.

La France possède pour sa part une banque publique d'investissement dynamique et de conditions d'emprunt plus favorables, ce qui explique sans doute pourquoi elle s'est encore peu intéressée à l'initiative PME. Sans doute la réforme des régions a-t-elle également perturbé la bonne appropriation de ces outils, alors qu'ils offrent pourtant de belles opportunités.

La commission a donné acte de sa communication à M. François Marc, rapporteur spécial, et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

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