B. LE MANQUE D'AMBITION DE LA COMMISSION EUROPÉENNE : BONNE OU MAUVAISE OPTION ?

1. Une politique de coopération internationale qui n'est pas un nouveau volet de la politique européenne de voisinage

Lancée en 2004, la politique européenne de voisinage a pour but de développer des liens privilégiés avec les pays voisins de l'Union européenne pour créer un espace de prospérité et de valeurs partagées, fondé sur une intégration économique accrue, des relations politiques et culturelles plus intenses, une coopération transfrontalière renforcée et une prévention conjointe des conflits.

Alors que l'Union européenne dispose d'une politique pour son voisinage à l'est avec le Partenariat oriental et au sud avec l'Union pour la méditerranée, elle n'a jusqu'à présent pas envisagé de la même manière son voisinage au nord. Or, l'appréhension du Grand nord et la place que l'Union européenne doit y occuper répondent à d'autres préoccupations.

Tout d'abord, en dépit des grands acteurs mondiaux, la situation y est stable et il y a un consensus pour maintenir cette stabilité, selon l'adage « Grand nord, basses tensions » . L'Arctique est loin de la situation méditerranéenne au lendemain des printemps arabes. De même, il n'y a pas de conflit comme l'Est de l'Europe peut en connaître.

En outre, des liens privilégiés existent déjà puisque deux acteurs sont membres de l'Union - la Suède et la Finlande -, l'Islande et la Norvège sont membres de l'Espace économique européen (EEE), et que le Groenland est un territoire associé à l'Union européenne. Un certain nombre de coopérations existent aussi, y compris avec la Russie, à travers la Dimension septentrionale et des forums comme le Conseil euro-arctique de la mer de Barents.

Il eut été souhaitable, ou tout au moins rationnel, qu'une politique intégrée simplifie et unifie ces différents outils pour gagner en force et en clarté. Elle aurait également pu se voir allouer un budget propre alors qu'aujourd'hui, il s'agit uniquement de décliner les grands programmes de l'Union (budget recherche avec Horizon 2020, politique de cohésion, Plan Juncker, etc...) aux régions du Grand nord.

Par ailleurs, la politique européenne de voisinage ayant elle-même connu une grave crise sous l'effet des printemps arabes et de l'opposition de la Russie au Partenariat oriental amenant à une redéfinition de ses objectifs, l'Union aurait peut-être été en peine de s'en inspirer pour la transposer dans une autre région.

Il n'en demeure pas moins qu'une politique tournée vers une région du monde en pleine évolution ne peut se soustraire à une étude géopolitique. L'apport du Parlement européen par la voix de ses rapporteurs Urmas Paet et Sirpa Pietikäinen est sur ce point important. Si les transformations de l'Arctique attirent l'attention de nombreux États, et particulièrement asiatiques, c'est parce que son sous-sol est présumé riche et que la navigation rendue possible par la fonte de la glace de mer pourrait créer une nouvelle route maritime entre l'est et l'ouest. Leur intérêt est donc principalement économique. En parallèle, la Russie et le Canada se sont livrés ces dernières années à un renforcement de leurs positions militaires. Si cela ne signifie pas nécessairement la préparation d'un conflit armé, c'est un fait qui mérite d'être analysé.

Pourtant, cette dimension ne figure pas dans la communication conjointe. C'est regrettable, car quelle que soit l'action de l'Union européenne dans l'Arctique, elle doit reposer sur un constat juste et complet.

Des auditions menées, votre rapporteur retire que l'objectif premier de la Commission européenne est de disposer enfin d'un siège d'observateur permanent au Conseil de l'Arctique. Or, cela ne peut être possible qu'avec l'accord unanime des membres de cette organisation, et la Russie et le Canada s'y sont opposés jusqu'à présent. Aussi, tout semble fait pour lever l'opposition de ces deux acteurs.

S'il est vrai que l'Union est déjà engagée dans un certain nombre d'actions et de coopérations, ce seul objectif paraît bien faible pour qui veut mener une diplomatie d'influence. Certes, ce serait pour l'Union européenne une reconnaissance supplémentaire sur la scène internationale. Concrètement, cela ne constituerait pas une évolution notable, car elle dispose déjà d'une position ad hoc au Conseil de l'Arctique où elle est quasiment invité permanent. Ensuite, des États membres sont membres du Conseil de l'Arctique ou en sont des membres observateurs. Ils ont donc les moyens d'exprimer une position européenne.

En outre, cet « entrisme » soulève la question de la relation aux États membres observateurs du Conseil de l'Arctique : complémentarité ou substitution ? L'accès de l'Union au statut d'observateur permanent impliquera-t-il que les États membres ne pourront plus siéger et seront représentés par la Commission européenne ? Faute de statut d'observateur pour l'Union, les États membres pourraient organiser en amont des réunions du Conseil de l'Arctique des réunions pour la recherche d'un message commun, proprement européen, qu'ils pourraient porter au Conseil de l'Arctique.

Enfin, le Conseil de l'Arctique n'est pas le seul forum de discussions et de prises de décisions impactant l'Arctique. Les négociations internationales sur la protection de la biodiversité en haute-mer, l'accord sur la pêche dans l'Arctique central, le code de navigation en milieu polaire, ne sont pas traités au sein du Conseil de l'Arctique. ils façonneront pourtant l'activité dans la région pour les années à venir.

2. Une politique centrée sur le développement de l'Arctique européen au détriment de la protection de l'environnement ?

Il est judicieux que la communication conjointe se concentre sur la partie européenne de l'Arctique. Cela ne signifie pas qu'elle doive penser l'Arctique uniquement comme des régions du grand nord de l'Europe. Mais l'Union a pu, dans le passé, donner l'impression de s'immiscer dans la politique des États non membres, ce qui fut naturellement mal ressenti. En outre, elle met en avant un développement économique plus réaliste, s'appuyant sur le local et sur des PME avec l'aide de fonds européens. Cette évolution est donc bienvenue.

Toutefois, l'orientation retenue est sujette à questionnements. En effet, jusqu'à présent, le développement économique durable et la protection de l'environnement fragile de l'Arctique étaient mis sur un pied d'égalité. Or, la communication conjointe semble favoriser le premier au détriment de la deuxième. Tandis que le développement économique passe par des objectifs, des mesures et des moyens assez clairement identifiés, il n'en est pas de même de l'adaptation au changement climatique et de la protection de l'environnement.

Les propositions en matière de limitation des effets du changement climatique sont assez floues et peu d'actions concrètes sont envisagées pour la protection de l'environnement. La communication conjointe renvoie aux accords et instruments internationaux et adopte une position prudente en ce qui concerne l'exploitation des hydrocarbures puisqu'elle se cantonne de promouvoir de hauts standards pour la prévention des accidents. Dans le même temps, le développement économique fait l'objet d'une attention particulière : un développement ancré au niveau local s'appuyant sur des PME innovantes avec le soutien des fonds européens et des programmes de coopération internationale.

En raison de l'importance du réchauffement climatique dans les régions polaires, de la fragilité de l'environnement de la région arctique et de la nécessaire protection qui doit s'y appliquer, cette évolution est inquiétante. La Commission européenne semble ici oublier ce qu'était la définition première de développement durable (note de bas de page) pour favoriser un « développement économique qui dure ». Et si elle souscrit aux demandes des États membres nordiques d'aide au développement économique, elle en oublie les objectifs d'intérêt général de l'ensemble de l'Union. Comme le montre l'encadré ci-après, ce glissement trouve son origine dans une consultation sujette à caution et peut-être indicative d'une façon de fonctionner de l'Union européenne qui n'est plus acceptable.


La consultation de la Commission européenne pour préparer
la communication conjointe : erreur de méthode ou orientation volontaire ?

1. Considérations générales sur les consultations mises en oeuvre par la Commission européenne

La consultation conduite en ligne entre le 1er septembre et le 2 décembre 2014 s'inscrit dans le processus de consultations régulièrement menées par la Commission sur un texte en préparation.

Les résultats recueillis au travers de ces consultations ouvertes - mais en général assez peu publicisées - ont souvent une influence conséquente sur l'orientation qui est ensuite donnée au texte ou au projet de réglementation préparé par la direction générale (DG) de la Commission en charge du dossier.

Cette pratique consultative se veut emblématique des instruments de démocratie participative mis en oeuvre au cours des dernières années par les institutions européennes pour répondre aux accusations de manque de concertation avec les citoyens et la société civile, de technocratie excessive et de trop grande opacité des procédures d'élaboration des textes européens.

Cette procédure de consultation-discussion passe par un site dédié intitulé « Votre point de vue sur l'Europe » : ( http://ec.europa.eu/yourvoice/index_fr.htm ).

De fait, le lancement de ces consultations est insuffisamment publicisé et suppose une démarche active forte des participants. Contrairement aux enquêtes conduites dans le cadre de l'Eurobaromètre, ces consultations ne reposent pas sur un échantillon élaboré scientifiquement et interrogé par un institut spécialisé. Les questionnaires soumis au public sont le plus souvent élaborés par les services de la DG concernée ; leur passation est auto-administrée par le répondant qui, lui-même, n'a pas été personnellement sollicité pour répondre à l'enquête.

Cette procédure ne garantit aucune représentativité réelle des résultats et n'offre aucune assurance quant à la taille du panel qui sera obtenu au final. Elle offre aux groupes de pression organisés - et donc bien informés - une capacité à peser au sein de ces consultations bien supérieure à celles des individus ou des petites organisations. On note par ailleurs que les élus, en particulier nationaux et régionaux, ne participent que très peu à ces consultations trop confidentielles car ils ne disposent en général d'aucun système d'alerte qui permettrait de les informer des lancements de telles consultations.

D'une manière générale, et en raison des biais inhérents à la méthode employée, ces consultations organisées par la Commission ne recueillent qu'un assez faible taux de participation. Sur des sujets relativement pointus, comme c'est le cas de nombre de consultations lancées par les différentes DG, le nombre de réponses recueillies se limite à quelques centaines, voire quelques petits milliers.

La seule exception récente est celle de la consultation lancée sur le TTIP qui a obtenu - en raison d'une très forte mobilisation des associations et des formations politiques - près de 150000 réponses. Pour autant, les résultats finaux (97 % de répondants hostiles au traité) ne peuvent être considérés comme statistiquement représentatifs, tant ce score est nettement plus élevé que celui constaté dans les enquêtes d'opinion classiques.

Il est intéressant de noter que le niveau de participation varie assez singulièrement suivant la DG initiatrice de la consultation. À ce titre, la DG Affaires maritimes et Pêche - la DG MARE -, fait plutôt figure de mauvais élève puisque les consultations organisées par elle ces deux dernières années enregistrent des niveaux de réponses à peine supérieurs à 100 ; une d'entre elles n'a même recueilli que 9 réponses !

Les résultats des consultations font généralement l'objet d'une publication sur le site de la Commission dans les semaines ou parfois les mois qui suivent la fin de l'enquête, mais il ne semble pas exister de règles minimales communes quant à la nature et l'exhaustivité des informations qui doivent être diffusées. Ainsi, il n'est pas toujours possible de retrouver le questionnaire intégral ayant servi de base à la consultation, alors que celui-ci est indispensable pour se livrer à une bonne interprétation des résultats.

2. Les faiblesses méthodologiques de la consultation conduite sur l'Arctique

Premier constat : Un échantillon de réponses insuffisant et dénué de représentativité.

La période d'ouverture de la consultation a été de 3 mois (ce qui est le format le plus courant pour ce type de consultation), mais elle semble avoir été trop courte au regard du très faible nombre de contributeurs recensés : seulement 72 !

Ce chiffre est d'autant plus faible que cette consultation était ouverte à plusieurs pays arctiques non membres de l'Union européenne. Ces derniers ont d'ailleurs relativement peu participé à la consultation (12 contributions), de même que les pays arctiques de l'Union européenne - Suède, Finlande et Danemark, hors Groenland - 31 réponses. Au global, les pays arctiques - membres ou non de l'Union européenne -, avec 43 réponses sur 72, représentent 60 % du panel obtenu.

Parmi les pays non-arctiques de l'Union européenne, on ne recense que 29 réponses au total. Ce score ne manque pas d'interroger quand on sait qu'en leur sein, plusieurs de ces États sont membres observateurs du Conseil de l'Arctique, qu'ils sont particulièrement engagés dans les questions polaires et qu'ils comptent chacun plusieurs dizaines de centres de recherche opérant dans le cercle arctique. Ainsi, l'Allemagne, pays généralement leader dans la participation aux consultations publiques organisées au sein de l'Union, ne compte en tout et pour tout que 2 contributeurs. Les contributeurs belges sont en revanche au nombre de 8, ce qui s'explique sans doute par la proximité aux institutions européennes desdits participants.

On observe d'ailleurs qu'une forte majorité des réponses (62 %) émane d'organisations scientifiques ou d'institutions publiques et surtout d'organisations ayant bénéficié de financements de l'Union européenne au cours des cinq dernières années (75 % du panel). Là encore, nous sommes très loin de la réalité du financement de l'Union à l'endroit des acteurs européens impliqués en Arctique.

Ce constat soulève la question de la très faible publicisation de la consultation par la DG MARE. N'aurait-il pas fallu alerter les acteurs européens directement impliqués en Arctique pour éviter que seuls ceux gravitant autour des institutions européennes ne répondent ?

À ce sujet, il est assez étonnant que les services de la Commission n'aient pas identifié systématiquement les principaux acteurs participant ou ayant participé à l'élaboration des nombreuses feuilles de route nationales des pays membres de l'Union...

Au global, force est de constater que, de taille à peine supérieure au niveau autorisant la production de résultats sous forme statistique, l'échantillon de réponses obtenues au travers de cette consultation souffre de biais qui lui dénient tout droit à revendiquer une quelconque représentativité.

Second constat : Un questionnement excessivement ciblé, restreignant et orientant le sens et les résultats de la consultation.

L'appellation donnée à la consultation, « Streamlining EU funding in the Arctic » (traduit en français par la Commission par « la rationalisation du financement de l'UE dans l'Arctique ») annonce clairement la couleur : il s'agit d'orienter prioritairement la future stratégie arctique de l'Union sur des objectifs de financement de projets en laissant de côté les autres aspects du questionnement.

Le champ de réflexion posé par cette consultation vise à restreindre les ambitions européennes aux seuls pays de l'Arctique européen, ce qui n'est pas sans incidence sur les problématiques arctiques qui englobent l'ensemble de la région ou qui ont des causes ou des incidences à l'échelle planétaire.

Concernant le questionnaire soumis à consultation, on ne peut que regretter qu'il ne soit plus - contrairement au rendu fait des résultats sur d'autres consultations - présenté sur le site dédié de la Commission. Par ailleurs, on observe que si le texte présentant le cadre de la consultation était présenté en six langues (anglais, danois, finnois, suédois, allemand et français), le questionnaire lui-même ne semble avoir été diffusé qu'en anglais.

Sur l'ordonnancement et le contenu du questionnaire proprement dit, force est de constater qu'il oriente de manière très singulière les réponses vers des sujets et des considérations mettant au premier plan la thématique du développement économique de l'Arctique.

Le titre de la première série de questions s'intitule « Défis, opportunités et actions ». Les questions qui suivent portent sur les principaux défis pour l'Arctique européen dans les dix années à venir, les opportunités d'emploi et de croissance dans la région au même horizon, les priorités à donner aux investissements et à la recherche en particulier dans une perspective de création d'emploi et de développement de la croissance. En orientant d'entrée de jeu le questionnement sur une dimension presque exclusivement économique, les concepteurs du questionnaire ont volontairement généré ce que les spécialistes de l'opinion et des sondages appellent un « effet de halo » qui biaise l'orientation des réponses données aux questions qui suivent.

La seconde partie du questionnaire consacrée à la « mise en oeuvre » s'intéresse à l'évaluation de la coordination des actions en matière d'investissements et de financements entre pouvoirs régionaux en Arctique et entre ceux-ci et les instruments mis en place par l'Union.

La troisième partie du questionnaire (la plus développée en nombre de questions) s'intitule « Questions spécifiques » et se subdivise elle-même en trois sous-chapitres. Le premier sous-chapitre consiste en une série de questions sur les systèmes de communication et de transport. Le second porte sur « la protection de l'environnement, l'adaptation au changement climatique, la prévention en matière de catastrophe ». Là encore, il semble moins question de vouloir prévenir en agissant sur les causes que de vouloir chercher des solutions pour réparer des risques présentés implicitement comme inévitables. Le dernier sous-chapitre, qui conclut le questionnaire est, lui, consacré au « renforcement du développement socio-économique, humain et institutionnel dans l'Arctique européen ».

Trois des sept questions qui suivent concernent le développement du commerce, les ressources naturelles et la compétitivité des secteurs économiques. Aucune d'entre elles ne porte sur la protection de l'environnement ou la lutte contre le changement climatique.

Au global, le questionnaire soumis à consultation est, dans sa conception même, très critiquable et contribue, par construction, à orienter profondément la nature des réponses obtenues. Il occulte nombre des orientations fixées par la résolution du Parlement européen en mars 2014, mais aussi une bonne partie des recommandations faites par le Conseil européen du 12 mai 2014 qui devraient pourtant servir de base à la Commission dans ses travaux préparatoires de la feuille de route de l'Union européenne sur l'Arctique.

3. Des résultats d'enquête peu représentatifs accompagnés d'une interprétation discutable

Le rapport d'analyse des résultats de cette consultation ne procède à aucune pondération des résultats selon l'origine nationale des répondants ou de la nature des répondants eux-mêmes. Il faut admettre qu'un tel redressement des données n'est guère possible compte tenu de la faiblesse globale des effectifs du panel et de la grande disparité du nombre de réponses d'un pays à un autre. On peut toutefois s'étonner que les analystes de la DG MARE accordent autant d'importance aux résultats d'ensemble de l'enquête et que la seule ventilation qui est - parfois - présentée dans ces résultats oppose pays arctiques (y compris ceux membres de l'Union) aux pays non-arctiques.

Une analyse véritablement qualitative des résultats aurait été plus pertinente, d'autant que l'ordonnancement des questions, le choix de celles-ci ainsi que leur formulation n'offraient guère d'espaces d'expression libre et spontanée aux contributeurs.

De l'analyse faite par les services de la DG MARE, il ressort que le défi le plus souvent cité comme majeur pour l'Arctique européen à l'horizon des dix prochaines années est celui des infrastructures. Mais celui-ci est surtout porté par les répondants des pays arctiques (essentiellement représentés par des institutions publiques desdits pays qui voient en l'Union européenne une opportunité à saisir pour trouver des financements), tandis que les contributeurs non-arctiques privilégient la protection de l'environnement. Dissocié de la protection de l'environnement dans l'analyse de cette réponse ouverte, le changement climatique n'arrive qu'au quatrième rang des défis jugés majeurs.

Outre le fait que la notion d'infrastructure renvoie à des équipements de nature assez diverse (infrastructures de transport et de communication entre les populations ou infrastructures destinées au développement de l'exploitation des richesses naturelles), il est étonnant que les deux premières questions ouvertes posées au début du questionnaire soient accompagnées d'exemples de défis déjà identifiés par le World Economic Forum et par la Commission européenne qui pointent précisément l'investissement dans les infrastructures et la « croissance bleue ».

Cette façon plutôt étrange d'orienter les réponses au questionnaire, ajoutée au fait qu'ont avant tout répondu des institutions publiques des pays arctiques (notamment celles bénéficiant déjà de subsides européens), produit assez naturellement des résultats qui pointent en premier lieu la nécessité de financer des projets de développement économique et notamment d'extraction des hydrocarbures et des ressources minières.

À contrario, les attentes de développement de la pêche, des énergies renouvelables et des initiatives de préservation des ressources naturelles et de promotion du développement durable se trouvent singulièrement minorées.

4. Conclusion

Au-delà de l'intérêt des réponses produites individuellement par chacun des contributeurs, cette consultation ne comporte, en raison de tous les biais dont elle est affectée, aucune valeur indicative quant aux orientations à donner à la future politique de l'Union européenne en Arctique.

Plus généralement, elle pose la question de la faiblesse méthodologique des consultations conduites par la Commission européenne pour orienter - et parfois même légitimer - la production de certains de ses textes normatifs.

Une réflexion approfondie mériterait d'ailleurs d'être menée pour améliorer ce type de consultations, voire pour leur substituer des instruments méthodologiquement fiables.

C'est la raison pour laquelle la résolution du Parlement européen, qui rappelle l'importance de la protection de l'environnement particulier de l'Arctique et qui propose des mesures concrètes pour la rendre effective, est la bienvenue. Toutefois, si on regarde la façon dont l'exécutif européen a tenu compte de la précédente résolution du Parlement sur l'Arctique, on peut légitimement se poser la question des suites qui seront données à cette nouvelle résolution. Les effets des pollutions dans cette région si fragile étant le plus souvent irrémédiables, il sera alors trop tard pour changer les choses.

Au final, la communication conjointe établit le cadre d'action de l'Union, pas l'action elle-même. En ce sens, elle peut générer déception et frustration. Déception, parce que l'apport de ce texte est somme toute faible par rapport à la communication de 2012 et ce, d'autant plus en raison de la position défensive de la Commission et de sa volonté d'apparaitre au sein du Conseil de l'Arctique.

Le texte engendre aussi une certaine frustration parce que peu ou pas de mesures nouvelles sont annoncées.

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