C. LA FRANCE ET LA FEUILLE DE ROUTE NATIONALE POUR L'ARCTIQUE

Sous l'impulsion de M. Michel Rocard, ambassadeur chargé des zones polaires, la diplomatie française a engagé à la fin de l'année 2013 un long et important processus visant à définir la stratégie française pour la région arctique. Un document a été présenté le 14 juin 2016 par M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international : la Feuille de route nationale pour l'Arctique (FRNA).

Le travail interministériel mené durant deux ans s'est axé autour de quatre priorités de travail :

- identifier les intérêts français dans la zone Arctique ;

- renforcer la légitimité de la France dans les affaires et les enceintes arctiques ;

- travailler à l'équilibrage entre intérêts nationaux et intérêt général dans la gouvernance de l'océan Arctique ;

- promouvoir un haut niveau de protection de cet environnement marin unique et fragile.

Le document développe sept sections thématiques : recherche et coopération scientifique ; opportunités et coopération économiques ; enjeux de défense et de sécurité ; protection de l'environnement marin arctique ; présence française dans les enceintes internationales traitant de l'Arctique ; l'Union européenne et la zone Arctique ; Intérêts nationaux et intérêt général dans la zone Arctique.

Ce document permet à la fois de rappeler la légitimité de la France en Arctique, de préciser les enjeux pour notre pays et de définir le cadre de son action pour les années qui viennent. Adopté juste après la présentation de la communication conjointe, il présente en outre l'avantage de s'inscrire pleinement dans la politique européenne, dont il énumère les points sur lesquels l'action de la France et l'action de l'Union devront être coordonnés. C'est actuellement la seule stratégie d'un État membre de l'Union à le faire et à inscrire pleinement son action en Arctique dans une perspective européenne.

La coordination avec l'Union européenne prônée par la FRNA

La France soutient l'établissement d'une politique intégrée européenne pour l'Arctique, qui appuie la légitimité de l'action européenne dans l'Arctique en vue d'obtenir le statut d'observateur permanent au Conseil arctique et qui doit permettre la meilleure coordination des nombreux programmes européens.

Au sein de l'UE, la France poursuivra les objectifs suivants :

- la mise en oeuvre de cette communication qui porte un objectif ambitieux d'intérêt général de préservation de l'environnement et des écosystèmes marins arctiques ;

- l'établissement d'une organisation régionale de gestion des pêches et d'une convention de mer régionale pour l'océan arctique ;

- la défense de l'application des principes du droit international notamment pour ce qui concerne la liberté de navigation et le droit de passage inoffensif ;

- la densification des échanges avec les cinq États riverains de l'océan Arctique pour ce qui concerne la question de l'encadrement des activités dans l'océan Arctique central ;

- le renforcement de la dimension arctique au sein de la Dimension nordique et du Conseil euro-arctique de la mer Barents, en particulier sur les aspects environnementaux et la question des transports ;

- la consolidation de la réflexion engagée avec nos partenaires européens sur les enjeux de sécurité dans l'espace maritime Arctique, notamment du Tour de table des forces de sécurité dans l'Arctique (ASFR) ;

- l'intégration de la zone Arctique dans la prospective sur la stratégie européenne pour la sécurité énergétique.

Conclusion de la FRNA : La France, un acteur arctique

Le présent document témoigne du niveau d'intérêt de la France pour la nouvelle conjoncture boréale dans laquelle opportunités économiques et défis environnementaux et climatiques sont inextricablement mêlés.

Dans son allocution du 16 octobre 2015, lors de la conférence du Cercle Arctique à Reykjavik, en Islande, le Président de la République, M. François Hollande, a déclaré :

« La France fera tout ce qu'elle pourra, ici dans cet extrême Nord de la planète, pour agir, pour mobiliser ses chercheurs et ses entreprises, et nous permettre de préserver cette partie du monde, qui est sans doute l'une des plus belles ».

L'Arctique est pour la France, comme pour nombre d'autres nations directement et indirectement intéressées, une zone d'intérêt scientifique mondial. La France appelle au renforcement de la coopération scientifique dans la zone Arctique dans lequel elle entend prendre une part active notamment en renforçant ses moyens et son investissement dans la recherche scientifique relative à l'Arctique. L'Arctique est un laboratoire naturel majeur pour l'étude du changement climatique au niveau global et revêt, de ce fait, un intérêt scientifique pour l'humanité tout entière.

La France soutient une approche de précaution multisectorielle fondée sur la préservation des écosystèmes marins arctiques et adhère au principe promu par la présidence américaine du Conseil de l'Arctique (2015-2017) selon lequel l'Arctique est une zone pilote de développement des technologies vertes.

Ainsi que l'a déclaré le Président de la République M. François Hollande à Reykjavik (16 octobre 2015) :

« La France ne considèrera jamais que l'on puisse traiter l'océan Arctique comme un océan parmi d'autres pour ce qui concerne le niveau de précaution environnementale. Nous appelons à la mise en place de normes de sécurité environnementale sui generis élevées dans la zone Arctique où des opérateurs français sont présents ».

La France promeut le principe d'une responsabilisation accrue des États extérieurs à la zone Arctique, utilisateurs potentiels de l'océan Arctique, par une plus grande implication de ces États dans les discussions et les décisions relatives à la gouvernance durable et responsable de l'océan Arctique.

La France travaillera aux côtés des autres États directement et indirectement intéressés pour favoriser un équilibrage entre intérêts nationaux et intérêt général dans cet espace marin dévoilant, année après année, une connexion interocéanique nouvelle entre l'Atlantique Nord et le Pacifique Nord.

En dernière analyse, l'Arctique est pour la France une zone écologiquement sensible dans laquelle les intérêts français doivent s'exprimer dans une logique d'intérêt durable et général bien compris.

Il est heureux que notre pays se soit doté d'une feuille de route pour l'Arctique. Cette région fascine les Français et son altération interpelle. La tradition des expéditions polaires et la présence de la recherche scientifique sont des marqueurs de l'image de la France dans la région. Nos intérêts stratégiques et économiques y sont aussi bien connus.

La feuille de route permet à la fois de rappeler nos fondamentaux dans la région et de faire passer des messages et des ambitions nouvelles, suite à l'accord de Paris sur le climat et dans le cadre d'une transformation de la région qu'il convient d'accompagner.

L'important travail effectué a montré que la communauté scientifique française, premier atout de la France dans la région, était prête à renouveler et à renforcer son engagement dans l'Arctique. Le Gouvernement doit canaliser et soutenir cet élan. À l'image de la recherche en général, la recherche polaire manque de moyens financiers et matériels (absence de navire brise-glace).

Ce travail a aussi montré que le suivi de l'Arctique implique plusieurs administrations et non le seul ministère des affaires étrangères. Depuis la disparition de M. Michel Rocard, il n'y a plus d'ambassadeur pour les pôles, ce qui est regrettable. M. Laurent Mayet, qui a repris en partie la mission, est représentant spécial pour les pôles et coordinateur de la FRNA. Il serait judicieux qu'à ce titre et pour faciliter son action interministérielle, il soit désormais rattaché au Premier ministre.

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