B. LA NATURE ET LE PÉRIMÈTRE DU CONTRÔLE

Si le format de la délégation n'a pas évolué depuis 2007, le périmètre de son contrôle, de même que ses prérogatives, ont été singulièrement renforcés par la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationales.

1. Le contrôle parlementaire de l'action du Gouvernement en matière de renseignement et l'évaluation de la politique publique en ce domaine

Initialement, le rôle de la délégation se limitait à « suivre l'activité générale et (des) moyens des services spécialisés à cet effet placés sous l'autorité des ministres chargés de la sécurité intérieure, de la défense, de l'économie et du budget » . Comme le relevait le rapport de la commission des lois du Sénat précité, la délégation n'était « pas placée dans une position de contrôle mais plutôt de simple suivi des services de renseignement ». Par ailleurs, le champ de son activité ne portait pas sur l'ensemble de l'activité de renseignement, mais uniquement sur certains services de renseignement.

Depuis 2013, le rôle de la délégation a été étendu de manière significative : en vertu de l'article 6 nonies de l'ordonnance du 17 novembre 1958, « elle exerce le contrôle parlementaire de l'action du Gouvernement en matière de renseignement et évalue la politique publique en ce domaine ». Outre la consécration d'une véritable mission de contrôle et d'évaluation, le périmètre de la délégation a donc été étendu à l'ensemble de l'action publique en matière de renseignement.

Si la loi de programmation militaire pour 2014-2019 avait consacré, pour la première fois au niveau législatif, la notion de politique publique de renseignement, elle n'en avait pas donné de contenu. Avec la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, la France s'est dotée d'un cadre juridique clair et unifié en matière de renseignement. Elle a, pour la première fois, donné une définition à la politique publique de renseignement et renforcé sensiblement les moyens d'information de la délégation.

L'article L. 811-1 du code de la sécurité intérieure dispose ainsi que « la politique publique de renseignement concourt à la stratégie de sécurité nationale ainsi qu'à la défense et à la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation ». Cet article fait référence à deux notions bien définies par ailleurs par le législateur : celle de « stratégie de sécurité nationale », définie à l'article L. 1111-1 du code de la défense et celle « d'intérêts fondamentaux de la Nation », définie à l'article 410-1 du code pénal.

Article L. 1111-1 du code de la défense (extraits) : « La stratégie de sécurité nationale a pour objet d'identifier l'ensemble des menaces et des risques susceptibles d'affecter la vie de la Nation, notamment en ce qui concerne la protection de la population, l'intégrité du territoire et la permanence des institutions de la République, et de déterminer les réponses que les pouvoirs publics doivent y apporter. »

Article 410-1 du code péna l : « Les intérêts fondamentaux de la Nation s'entendent au sens du présent titre de son indépendance, de l'intégrité de son territoire, de sa sécurité, de la forme républicaine de ses institutions, des moyens de sa défense et de sa diplomatie, de la sauvegarde de sa population en France et à l'étranger, de l'équilibre de son milieu naturel et de son environnement et des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique et de son patrimoine culturel. »

Il a été précisé, dans ce même article L. 811-1 que cette politique publique relève « de la compétence exclusive de l'État. »

L'article L. 811-2 définit pour sa part les missions assignées aux services spécialisés de renseignement, jusqu'ici éparpillées dans les différents décrets constitutifs de ces administrations. Ceux-ci ont ainsi pour missions « en France et à l'étranger, la recherche, la collecte, l'exploitation et la mise à disposition du Gouvernement des renseignements relatifs aux enjeux géopolitiques et stratégiques ainsi qu'aux menaces et aux risques susceptibles d'affecter la vie de la Nation. Ils contribuent à la connaissance et à l'anticipation de ces enjeux ainsi qu'à la prévention et à l'entrave de ces risques et de ces menaces. Ils agissent dans le respect de la loi, sous l'autorité du Gouvernement et conformément aux orientations déterminées par le Conseil national du renseignement. »

Grâce aux précisions de la loi du 24 juillet 2015, la politique publique du renseignement dispose désormais d'un contenu et les services spécialisés d'une mission fixés par le législateur.

2. Le champ des activités susceptibles de faire l'objet d'un contrôle

Par ailleurs, le champ des activités susceptibles de faire l'objet d'un contrôle a également connu une légère extension. Lors sa création en 2007 avaient été exclus les activités opérationnelles des services ainsi que les échanges avec des services de renseignement étrangers ou des organismes internationaux compétents en matière de renseignement. L'intervention de la délégation se limitait donc au suivi de l'activité générale des services mais ne pouvait porter sur les opérations qu'ils menaient.

La loi de programmation militaire de 2013 est revenue sur ce point, en permettant à la DPR de connaître des activités opérationnelles achevées. Les opérations en cours, les procédures et méthodes opérationnelles ainsi que les échanges avec des services étrangers demeurent toutefois exclus de son périmètre.

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